Indemnité d’éviction : 9 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/00772

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Indemnité d’éviction : 9 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/00772

9 novembre 2022
Cour d’appel de Paris
RG
20/00772

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRET DU 09 NOVEMBRE 2022

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/00772 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBIHO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 14/06992

APPELANTE

SAS BASSANO DEVELOPPEMENT

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Benoît BOUSSIER de la SELARL DELSOL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0513, avocat postulant

Ayant pour avocat plaidant Me Virginie o. DELANNOY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0513

INTIMES

Maître [R] [H]

en qualité d’administrateur judiciaire de la SAS LES NOUVELLES RESIDENCES DE FRANCE

[Adresse 5]

[Localité 6]

SAS LES NOUVELLES RESIDENCES DE FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

S.E.L.A.F.A. MJA, en la personne de Me Valérie [N]

en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS LES NOUVELLES RESIDENCES DE FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentés par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515, avocat postulant

Ayant pour avocat plaidant Me Rémy CONSEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : C0987

SAS HOTEL FAUBOURG CHAMPS ELYSEES

N° SIRET : 811 975 135

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Aurélie POULIGUEN-MANDRIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R047, avoat postulant et plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 27 septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Gilles BALAY, président

Monsieur Douglas BERTHE, conseiller

Madame Marie GIROUSSE, conseillère

qui en ont délibéré

GREFFIERE : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

– contradictoire

– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Gilles BALAY, Président et par Madame Anaïs DECEBAL, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé du 1er juillet 1996, le Crédit Industriel et Commercial, aux droits duquel sont venues successivement la société AD Capital puis la société Bassano Développement, a donné à bail a la société Times Square Saint-Honoré Hotel et Résidence, aux droits de laquelle est venue la société Les Nouvelles Residences de France, des locaux dependant d’un ensemble immobilier placé sous le regime de la copropriété sis [Adresse 4]. Ce bail a été consenti pour une durée de neuf ans à compter du 1er juillet 1996, en vue de l’exploitation d’un hôtel, d’une résidence de tourisme et d’un restaurant à l’exclusion de tout autre activité ou utilisation des lieux étant précisé que le preneur aura l’obligation de conserver une exploitation de catégorie minimum de 4 étoiles NN, moyennant un loyer annuel en principal de 868 959,40€. Les locaux comprenaient, dans un bâtiment A, 52 chambres et divers locaux annexes et dans un bâtiment B, salons, restaurant, 5 suites et divers locaux annexes, outre 58 emplacements de stationnement.

Par arrêt du 21 février 2007, la cour d’appel de Paris a confirmé que la société Les Nouvelles Residences de France avait droit à une indemnité d’éviction à la suite du congé avec refus de renouvellement délivré le 21 décembre 2004 pour le 30 juin 2005 par la société AD Capital. Par arrêt du 23 février 2011 confirmant partiellement le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 3 septembre 2009, la cour d’appel de Paris a fixé l’indemnité d’éviction à la somme de 12 442 630 € et l’indemnité d’occupation due par la société Les Nouvelles Residences de France a la somme de 593 847 € par an.

Par acte extrajudiciaire du 28 février 2011, la société Bassano Développement venant aux droits de la société AD Capital après la vente de l’immeuble à son profit le 26 juillet 2010, a exercé son droit de repentir et a offert le renouvellement du bail moyennant un loyer annuel de 1 200 000€.

Par jugement en date du 8 avril 2015, le juge des loyers commerciaux a fixé à la somme annuelle de 705 000 € le montant du loyer du bail renouvelé au 1er mars 2011. La société Bassano Développement a interjeté appel de ce jugement. Par arrêt du 10 mai 2017, la Cour a fixé le montant du loyer renouvelé à 700’000 €; un pourvoi contre cet arrêt a été rejeté par arrêt de la Cour de cassation du 17 mai 2018.

Par acte extrajudiciaire du 13 février 2014, elle avait signifié au preneur une mise en demeure visant la clause résolutoire du bail, d’avoir à produire les pièces de nature à justifer des rapports de vérification énumérés par l’architecte-expert dans son rapport, en vertu de l’article 18 du bail; de justifier avoir accompli suivant les prescriptions de l’article 16, les interventions requises sur les chéneaux, canalisations, descentes d’eaux pluviales se trouvant dans les lieux loués ; de produire toutes pièces justificatives des diligences aecomplies à la suite de la notification préfectorale du 8 octobre 2013 concernant les tours aéro-réfrigérantes situées en toitures-terrasses, en produisant devis ou factures d’intervention et la correspondance adressée en retour dans les délais requis par l’autorité préfectorale ; de prendre toutes mesures utiles en vue de la remise en route d’un ascenseur qui, selon les constatations de l’architecte-expert, serait en l’état condamné et ce, au regard des obligations d’entretien et demise en conformité qui incombent au preneur en vertu des clauses du bail sus-rappelé ; de produire de même toutes pièces justificatives concernant la remise en route et le cas échéant le remplacement des équipements VMC hors d’usage, s’agissant d’une infraction caractérisée aux dispositions du réglement sanitaire du département de [Localité 7], ainsi que l’a relevé l’architecte ; de communiquer toutes notifications et correspondances échangées au cours des trois dernières années avec la Préfecture de Police pour connaitre l’état de l’établissement vis-à-vis de ses obligations réglementaires et ce, indépendamment de la notification du 8 octobre 2013 dont le bailleur a pu avoir directement connaissance dans le cadre de l’expertise.

Par acte extrajudiciaire du 12 mai 2014, la société Bassano Développement a signifié à la société Les Nouvelles Residences de France une mise en demeure visant la clause résolutoire du bail d’avoir à produire toutes les pièces justificatives concernant l’homologation de l’exploitation hoteliére en catégorie de tourisme quatre étoiles ; de produire de même toutes les pièces justificatives des démarches réalisées en vue de remplir les conditions prescrites dans les termes du bail relatives à la destination des lieux et aux textes réglementaires en vigueur.

Par acte du 13 mars 2014, la societe Les Nouvelles Residences de France a fait assigner la société Bassano Développement devant le tribunal de grande instance de Paris en opposition au commandement du 13 fevrier 2014 et subsidiairement pour se voir accorder un délai de 12 mois pour se conformer aux causes de la sommation et aux fins de suspension des effets de la clause resolutoire. Par acte du 16 septembre 2014, la défenderesse a appelé en intervention forcée Maître [R] [H], ès-qualités d’administrateur judiciaire de la societe Les nouvelles residences de France et la société Mandataires Judiciaires Associes (MJA), prise en la personne de Maitre [D] [N], ès-qualités de mandataire judiciaire, désignés par le jugement du tribunal de commerce de Paris du l1 juin 2014 ayant ouvert la procédure de redressement judiciaire à son égard. Par conclusions du 30 septembre 2015, la societe Hotel Faubourg Champs Elysées est intervenue volontairement à l’instance. Par jugement du 2 decembre 2015, le tribunal de commerce de Paris a prononce la liquidation judiciaire de la societe Les Nouvelles Résidences de France, maintenu Maitre [R] [H] en qualite d’administrateurjudiciaire pour la finalisation des opérations de cession et désigné la societe MJA prise en la personne dc Maitre [D] [N] en qualité de liquidateur judiciaire.

Par arrêt du 28 janvier 2016, la cour d’appel dc Paris a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Paris du 24 juillet 2015 ayant arrété le plan de cession des actifs de la société Les Nouvelles Residences de France au bénéfice de la société Esprit de France, à laquelle s’est substituée la societe Hôtel Faubourg Champs Elysées. La societe Bassano Développement a formé un pourvoi contre cet arrêt, lequel a été déclaré irrecevable par un arrêt de la cour de cassation en date du 13 septembre 2017.

L’acte de cession a été signé le 27 octobre 2016 en l’etude de Maitre [H] en présence de la societe Bassano Développement.

Par jugement du 28 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a reçu l’intervention volontaire du liquidateur est celle de la société Hôtel Faubourg Champs Élysées ; en rejetant la demande de cette dernière de voir déclarer non écrite la clause résolutoire du bail, le tribunal a toutefois rejeté la demande de résiliation par constat de l’acquisition de la clause résolutoire, ainsi que la demande de résiliation judiciaire et les demandes subséquentes de la société Bassano Développement. Cette dernière a été condamnée à payer à la société MJA la somme de 8000 €, et à la société Hôtel Faubourg Champs Élysées la somme de 15’000 €, en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par deux déclarations au greffe du 27 décembre 2019, complétées par une déclaration du 26 mars 2020, la société Bassano Développement a interjeté appel de ce jugement. Les appels ont été joints par ordonnances du conseiller de la mise en état du 20 février 2020 et 4 juin 2020. L’ordonnance de clôture a été été prononcée le 7 septembre 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions de la société Bassano Développement déposées au greffe le 3 septembre 2022, par lesquelles elle demande à la Cour d’infirmer partiellement le jugement déféré en ses dispositions relatives à la résiliation du bail et aux frais irrépétibles et aux dépens; et statuant à nouveau, de constater l’acquisition de la clause résolutoire à la date du 13 mars 2014, subsidiairement prononcer la résiliation judiciaire du bail aux torts du preneur ; et en tout état de cause de condamner la société hôtel Faubourg Champs Élysées au paiement d’une indemnité d’occupation égale au montant du dernier loyer pratiqué, tel que fixé par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 10 mai 2017 ; et de condamner solidairement l’administrateur et le liquidateur judiciaire de la société Les Nouvelles Residences de Franc, ainsi que la société Hôtel Faubourg Champs Élysées, à lui payer une somme de 25’000 € pour frais irrépétibles d’instance ainsi qu’aux dépens dont distraction au profit de la Selarl Delsol, son avocat.

Vu les dernières conclusions de la société Hôtel Faubourg Champs Élysées déposées au greffe le 6 septembre 2022, par lesquelles elle demande à la Cour de constater qu’elle n’est saisie d’aucune demande par les déclarations d’appel du 27 décembre 2019 à 16h10, à 16h24, et du 26 mars 2020 qui n’ont pas opéré d’effet dévolutif, et à titre subsidiaire de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions. En toute hypothèse elle demande que soit prononcée la nullité de la sommation du 13 février 2014, le rejet des prétentions de la société Bassano Développement, et subsidiairement elle sollicite l’octroi d’un délai de deux ans pour satisfaire à la sommation du 13 février 2014, avec suspension pendant ce délai des effets de la clause résolutoire. Elle demande la condamnation de la société appelante à lui payer la somme de 20’000 € au titre des frais irrépétibles d’appel, et aux dépens.

Vu les dernières conclusions déposées le 26 juin 2020 au nom de la société Les Nouvelles Résidences de France, de Maître [R] [H] en sa qualité d’administrateur judiciaire maintenu à cette fonction, de la société MJA prise en la personne de maître [D] [N] en qualité de liquidateur judiciaire, demandant à la Cour de confirmer le jugement du 28 novembre 2019 en toutes ses dispositions, et y ajoutant, de juger que la clause résolutoire n’a pas produit effet, subsidiairement d’accorder un délai de 12 mois à la société locataire pour se conformer aux causes de la sommation du 12 mai 2014 avec suspension des effets de la clause résolutoire, et en tout état de cause débouter la société Bassano développement de toutes ses demandes et la condamner à payer la somme de 15’000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur l’effet dévolutif de l’appel

Le décret n°2022-245 du 25 février 2022 modifiant l’article 901 du code de procédure civile et l’arrêté du 25 février 2022 modifiant l’arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant la cour d’appel sont immédiatement applicables aux instances en cours pour les déclarations d’appel qui ont été formées antérieurement à l’entrée en vigueur de ces deux textes réglementaires, pour autant qu’elles n’ont pas été annulées par une ordonnance du magistrat compétent qui n’a pas fait l’objet d’un déféré dans le délai requis, ou par l’arrêt d’une cour d’appel statuant sur déféré.

Une déclaration d’appel, à laquelle est jointe une annexe comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués, constitue l’acte d’appel conforme aux exigences de l’article 901 du code de procédure civile, dans sa nouvelle rédaction, même en l’absence d’empêchement technique.

La Cour a été saisie successivement par 3 déclarations d’appel de la société Bassano Développement. Les procédures ont fait l’objet d’une jonction.

La dernière déclaration en date du 26 mars 2020 mentionne les chefs du jugement critiqués, expressément énumérés dans une annexe qualifiée de ‘pièce jointe faisant corps avec la déclaration d’appel’, adressée au greffe de la Cour par le même message par le RPVA. L’effet dévolutif s’est en conséquence opéré pour les chefs du jugement ainsi critiqués.

Sur la validité de la clause résolutoire

La disposition du jugement entrepris ayant débouté la société Hôtel Faubourg Champs Élysées de sa demande tendant à voir déclarer non écrite la clause résolutoire du bail, ne fait l’objet d’aucune critique des intimés, lesquels sollicitent la confirmation du jugement qui s’impose pour ce qui concerne cette disposition.

Sur la mise en jeu de la clause résolutoire par la mise en demeure du 13 février 2014

C’est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qu’il convient d’adopter entièrement que le premier juge a statué pour juger que la mise en demeure du 13 février 2014 n’a pas pu produire effet et n’a pu dès lors mettre en jeu la clause résolutoire qu’elle vise, notamment en relevant que l’automaticité de la sanction d’une clause résolutoire conforme aux dispositions de l’article L.145-41 du code de commerce, exige que le bailleur qui la met en ‘uvre délivre une sommation d’exécuter des obligations nées du bail qui soit suffisamment claire, précise et explicite pour permettre réellement au preneur, d’une part de se convaincre à sa seule lecture de l’infraction au bail qui lui est reprochée, et d’autre part soit en mesure dans le délai d’un mois prévu pour y mettre fin, de déterminer précisément les actions à mettre en ‘uvre. Le tribunal a très précisément relevé que la sommation litigieuse portait sur de multiples injonctions, peu précises, se rapportant non seulement au bail mais à un rapport d’architecte, un arrêté préfectoral, le règlement sanitaire de la Ville de Paris, dans des conditions qui ne permettaient pas à la société preneuse de déterminer clairement avant l’expiration du délai d’un mois quelles actions elle devait mettre en ‘uvre pour y répondre.

Il convient d’y ajouter que cette façon de procéder relève d’une certaine mauvaise foi dans la mise en ‘uvre de la clause résolutoire, qu’illustre en l’espèce le moment choisi pour signifier la sommation litigieuse, puisqu’un commandement de payer avait été signifié le 23 janvier 2014 visant la clause résolutoire, de sorte que la sommation visant aussi la clause résolutoire a été signifiée avant l’expiration du délai d’un mois, et très peu de temps avant l’introduction d’une procédure devant le tribunal de commerce qui a conduit au jugement d’ouverture du redressement judiciaire en date du 11 juin 2014. La condamnation prononcée le 1er juillet 2014 par ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Paris pour un montant de 708’398,60 € démontre par ailleurs que le défaut de paiement des loyers constituait le reproche essentiel que la société Bassano Développement formulait à l’encontre de la société locataire, la procédure devant le juge des référés n’ayant d’ailleurs pas concerné les infractions visées dans la sommation du 13 février 2014, laissant apparaître clairement qu’elle a été signifiée pour accentuer la pression sur la société locataire.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a jugé que la clause résolutoire du bail n’a pas été acquise pour les infractions visées dans la sommation du 13 février 2014.

Sur la demande en résiliation judiciaire du bail

La société Bassano Développement prétend obtenir la résiliation judiciaire du bail sur le fondement de l’article 1741 du Code civil, lequel dispose que le contrat de louage se résout par la perte de la chose louée et par le défaut respectif du bailleur et du preneur de remplir leurs engagements.

Elle invoque en premier lieu les manquements faisant l’objet de la mise en demeure du 13 février 2014 ; elle se prévaut également d’un avis défavorable de la sous-direction de la sécurité du public de la préfecture de police de [Localité 7] en date du 4 juin 2014 dont elle prétend tirer la conséquence que le preneur a exploitée pendant plusieurs années l’hôtel au mépris des obligations réglementaires. Elle se prévaut encore d’un manquement à l’obligation de classement de l’établissement en hôtel 4 étoiles NN, ayant fait l’objet d’un constat dressé par Maître [E] le 23 avril 2014 et de la sommation visant la clause résolutoire du 12 mai 2014, critiquant le jugement en ce qu’il a considéré que cette infraction ne pouvait être retenue du fait de la modification de la réglementation sur la classification des hôtels de tourisme postérieurement à la date de conclusion du bail.

Il convient d’observer sur la question de la classification de l’hôtel que le bail faisait seulement obligation au preneur de conserver une exploitation de catégorie minimum de 4 étoiles NN, catégorie ayant disparu depuis lors ; et que le bail ne faisait pas d’obligation particulière d’en justifier auprès du bailleur de sorte que la sommation du 12 mai 2014 d’avoir à produire les pièces justificatives concernant l’homologation de l’exploitation hôtelière dans cette catégorie ne pouvait pas mettre en jeu la clause résolutoire, pas plus que la sommation par le même acte de produire toutes pièces justificatives des démarches réalisées pour remplir les conditions prescrites dans les termes du bail sous la rubrique ‘destination des lieux loués’, en des termes trop imprécis.

D’ailleurs, c’est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qu’il convient d’adopter entièrement que le premier juge a rejeté la demande de résiliation judiciaire du bail.

Il convient d’y ajouter que les griefs imprécis formulés à l’encontre de la société preneuse se rapportent à des faits très anciens, et qu’aucune infraction ne subsiste ; et que le GIE Atout France avait d’ailleurs procédé au classement de l’établissement dans la catégorie 4 étoiles par décision du 18 juin 2014, renouvelée le 23 octobre 2019.

Le rapport de la préfecture de police du 26 juin 2014 ne démontre en aucun cas l’exploitation de l’hôtel en violation de la réglementation applicable, et il a d’ailleurs été suivi d’un avis favorable le 5 janvier 2015 après fourniture des documents sollicités.

Enfin, Monsieur [U] [F], le même architecte qui avait établi la note provisoire du 13 décembre 2013 dont se prévaut la société bailleresse pour établir les manquements du preneur, est l’auteur des notes techniques établies le 4 novembre 2016 et 19 décembre 2016, complétées par la note technique établie en complément le 28 mai 2018 par l’agence architecture [Y] [J]. Ces rapports établissent amplement le respect par la société locataire de ses obligations d’entretien et la conformité de l’exploitation avec la réglementation administrative.

En particulier, dans sa note du 19 décembre 2016, Monsieur [F] indique avoir fait le rapprochement entre l’état d’entretien actuel de l’immeuble et les points techniques soulevés dans la mise en demeure du 13 février 2014, pour constater :

que les rapports de vérification technique émanant d’organismes agréés sont communiqués,

qu’un constat d’entretien a été confié à une entreprise qualifiée pour l’entretien des chéneaux, gouttières et canalisations d’eaux pluviales de l’ensemble,

que la situation technique et administrative des tours d’aéro réfrigérants est actuellement régularisée,

que tous les ascenseurs de l’ensemble ont subi les vérifications et les travaux correctifs nécessaires qu’ils sont à ce jour en service,

que la remise en fonction de la VMC est aujourd’hui effective,

que toutes les notifications de la préfecture de police depuis 2009 ont été communiquées et que les observations de la plus récente visite de la commission de sécurité ont fait l’objet de travaux qui sont soient achevés, soit planifiés à court terme.

De même le rapport de Monsieur [Y] [J] du 28 mai 2018 conclut-il que l’établissement est en conformité avec les normes et règlements techniques qui le concernent.

La demande de résiliation judiciaire se trouve dès lors sans aucun fondement sérieux et doit être rejetée, ainsi que les demandes subséquentes, par confirmation du jugement entrepris.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Les dispositions du jugement entrepris doivent être confirmées, également en ce qu’elles concernent les dépens et frais irrépétibles de première instance.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, en équité, la société Bassano Développement devra indemniser les parties intimées de leurs frais irrépétibles d’appel dans les conditions précisées au dispositif ci-après.

Elle supportera les dépens d’appel en application de l’article 696 du même code.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 28 novembre 2019 par le tribunal judiciaire de Paris,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Bassano Développement à payer à la société Hôtel Faubourg Champs Élysées une somme de 12’000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles d’appel,

CONDAMNE la société Bassano Développement à payer à la société Les Nouvelles Résidences de France en liquidation judiciaire, maître [R] [H] en sa qualité d’administrateur judiciaire et la société Mandataires Judiciaires Associés (MJA) en sa qualité et de liquidateur de ladite société, pris ensemble, une somme de 8’000 euros en indemnisation de leurs frais irrépétibles d’appel,

CONDAMNE la société Bassano Développement aux dépens.

Le Greffier Le Président

 


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