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6 juillet 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/13090
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 7
ARRÊT DU 06 JUILLET 2023
(n° , 27 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/13090 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGFBQ
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Avril 2022 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY – RG n° 21/00264
APPELANTS
Monsieur [Y] [A] [N] [H]
[Adresse 41]
[Localité 46]
représenté par Me Claudine COUTADEUR de la SAS DROUOT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : W06, substituée par Me Frédérique RIAM, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
Madame [B] [H] épouse [W]
[Adresse 2]
[Localité 60]
représentée par Me Claudine COUTADEUR de la SAS DROUOT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : W06, substituée par Me Frédérique RIAM, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
Monsieur [S] [M] [G] [H]
[Adresse 5]
[Localité 45]
représenté par Me Claudine COUTADEUR de la SAS DROUOT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : W06, substituée par Me Frédérique RIAM, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
Madame [P] [A] [C] [H]
épouse [L] [E]
[Adresse 22]
[Localité 60]
représentée par Me Claudine COUTADEUR de la SAS DROUOT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : W06, substituée par Me Frédérique RIAM, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
Monsieur [I] [M] [Z] [H]
[Adresse 24]
[Localité 47]
représenté par Me Claudine COUTADEUR de la SAS DROUOT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : W06, substituée par Me Frédérique RIAM, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
Madame [U] [K] [H] épouse [D]
[Adresse 24]
[Localité 47]
représentée par Me Claudine COUTADEUR de la SAS DROUOT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : W06, substituée par Me Frédérique RIAM, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
S.C.I. [H]
[Adresse 17]
[Localité 47]
représentée par Me Claudine COUTADEUR de la SAS DROUOT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : W06 substituée par Me Frédérique RIAM, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
INTIMÉES
APIJ – AGENCE PUBLIQUE POUR L’IMMOBILIER DE LA JUSTICE
Établissement public sis au :
[Adresse 29]
[Localité 62]
représentée par Me Frédéric LEVY de la SELAS DS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : T0700 , substitué par Me François DAUCHY, avocat au barreau de PARIS, toque : T07
DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE LA SEINE SAINT DENIS – COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT
France Domaine
[Adresse 31]
[Localité 61]
représentée par Madame [J] [R], en vertu d’un pouvoir général,
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Juin 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Hervé LOCU, Président
Madame Valérie MORLET, Conseillère
Monsieur Raphaël TRARIEUX, Conseiller
Greffier : Madame Dorothée RABITA, lors des débats
ARRÊT :
– réputé contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Hervé LOCU, Président et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.
*
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
Par arrêté préfectoral du 22 juillet 2020, le Préfet de Seine-Saint-Denis a prescrit l’ouverture d’une enquête unique portant sur l’utilité publique des acquisitions foncières et des travaux à réaliser par l’Agence Publique pour l’Immobilier de la Justice (APIJ) pour la réalisation d’un nouvel établissement pénitentiaire dit « Maison d’arrêt de Seine-Saint-Denis » sur le territoire des communes de [Localité 82] et de [Localité 80] ainsi que sur la mise en compatibilité du Plan local d’urbanisme (PLU) de la commune de [Localité 80].
Par le même arrêté, il a prescrit l’ouverture d’une enquête parcellaire. Cette enquête unique s’est déroulée du 14 septembre au 16 octobre 2020 inclus.
Le projet consiste en la réalisation d’une maison d’arrêt pour répondre aux objectifs de réduction de la surpopulation carcérale en lle-de-France. Par arrêté préfectoral n°2021-0790 du 30 mars 2021, le Préfet de Seine-Saint-Denis a déclaré d’utilité publique les acquisitions foncières relatives à la réalisation de la maison d’arrêt et la mise en compatibilité du PLU.
Par une requête du 27 mai 2021, les propriétaires des parcelles comprises dans le champ du projet ont formé un recours en excès de pouvoir contre l’arrêté valant
DUP devant le Tribunal administratif de Montreuil.
Par arrêté n° 2021-1858 du 5 juillet 2021, le Préfet de Seine-Saint-Denis a déclaré cessibles, au profit de l’APIJ, les parcelles nécessaire à la réalisation du projet.
Par ce même arrêté, lesdites acquisitions ont été déclarées urgentes.
Sont notamment concernées par l’opération, Monsieur [Y] [N] [H], Madame [A] [H] épouse [W], Monsieur [M] [H], Madame [P] [H] épouse [L] [E], Monsieur [I] [H], Madame [U] [H] épouse [D] et la S.C.I. [H], l’indivision [H], en tant que propriétaires des parcelles cadastrées section AZ n°[Cadastre 1] d’une superficie de 6.910 m², n°9 d’une superficie de 2.060 m², n°[Cadastre 23] d’une superficie de 8.703 m², situées Lieudit « [Adresse 70] » sur la commune de [Localité 80]. Il s’agit de terres agricoles.
A défaut d’accord amiable, l’APIJ a saisi le tribunal judiciaire de Bobigny en vue de la fixation de la valeur du bien exproprié.
Par un jugement du 21 avril 2022, après transport sur les lieux le 15 février 2022, le juge de l’expropriation de Bobigny a :
Annexé à la décision le procès-verbal de transport du 15 février 2022 ;
Dit n’y avoir lieu à fixer d’indemnité provisionnelle,
Fixé l’indemnité due par l’APIJ à Monsieur [Y] [N] [H], Madame [A] [H] épouse [W], Monsieur [M] [H], Madame [P] [H] épouse [L] [E], Monsieur [I] [H], Madame [U] [H] épouse [D], S.C.I. [H] prise en la personne de son représentant légal, au titre de la dépossession des parcelles cadastrées section AZ n°[Cadastre 1] d’une superficie de 6.910 m², n°9 d’une superficie de 2.060 m², n°[Cadastre 23] d’une superficie de 8.703 m², situées Lieudit « [Adresse 70] » sur la commune de [Localité 80]) à la somme, de 246.010 euros en valeur occupée,
Dit que ce montant arrondie se décompose de la façon suivante :
220.912,50 euros au titre de l’indemnité principale,
25.091,25 euros au titre de l’indemnité de remploi,
Condamné l’Agence publique pour l’immobilier de la justice (APIJ) à payer à Monsieur [Y] [N] [H], Madame [B] [H] épouse [W], Monsieur [M] [H], Madame [P] [H] épouse [L] [E], Monsieur [I] [H], Madame [U] [H] épouse [D], la S.C.I. [H] prise en la personne de son représentant légal, la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamné l’Agence publique pour l’immobilier de la justice (APIJ) aux dépens,
Rejeté toutes les autres demandes des parties.
Monsieur [Y] [N] [H], Madame [B] [H] épouse [W], Monsieur [M] [H], Madame [P] [H] épouse [L] [E], Monsieur [I] [H], Madame [U] [H] épouse [D], et la S.C.I. [H] prise en la personne de son représentant légal, (ci-après « l’indivision [H] ») ont interjeté appel du jugement le 27 juillet 2022 a formé appel au titre de l’indemnité de dépossession.
Pour l’exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :
1/ adressées au greffe le 20 octobre 2022 par l’indivision [H], notifiées le 24 octobre 2022 (AR intimé non daté et AR CG le 25 octobre 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :
Infirmer le jugement du 21 avril 2022 de la juridiction de l’expropriation de la Seine-Saint-Denis du Tribunal Judiciaire de Bobigny, excepté en ce qu’il a condamné l’APIJ aux dépens et à verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Fixer l’indemnité de dépossession foncière comme suit :
Parcelle n°AZ [Cadastre 1]
Indemnité principale : 6.910 m² x 40.00 euros/m² : 276.400 euros
Frais de remploi : 28 640 euros
Soit un total de 305.040 euros
Parcelle n°AZ [Cadastre 59]
Indemnité principale : 2.060 m² x 40.00 euros/m² : 82.400 euros
Frais de remploi : 9.240 euros
Soit un total de 91.640 euros
Parcelle n°AZ [Cadastre 23]
Indemnité principale : 8.703 m² x 40.00 euros/m² : 348.120 euros
Frais de remploi : 35.812 euros
Soit un total de 383.932 euros
Condamner l’Agence Publique pour l’Immobilier de la Justice (APIJ) à payer aux expropriés la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens conformément à l’article L.312-1 du code de l’expropriation.
2/ adressées au greffe le 20 janvier 2023 par l’APIJ, rectifiées le 6 avril 2023, intimée, notifiées le 11 avril 2023 (AR appelant le 13 avril 2023 et AR CG le 14 avril 2023), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :
Juger l’indivision [H] mal fondée en son appel,
En conséquence, de débouter les appelants de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
Confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par la chambre des expropriations du tribunal judiciaire de Bobigny le 21 avril 2022 sous le n° RG 21/00264 en ce qu’il a :
Fixé les indemnités à revenir à l’appelant comme suit :
220.912,50 euros au titre de l’indemnité principale,
25.091,25 euros au titre de l’indemnité de remploi,
Total : 246.010 euros en valeur occupée.
3/ adressées au greffe le 28 décembre 2022 par le commissaire du gouvernement, notifiées le 10 mars 2023 (AR appelant non daté et AR intimé le 13 mars 2023), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :
Confirmer le jugement de première instance.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES :
L’indivision [H] fait valoir que :
Concernant la situation géographique, les terrains expropriés sont situés sur le territoire de la commune de [Localité 80]. Ils sont :
en lisière Est de l’actuelle prison de [Localité 82],
au sud de la plateforme aéroportuaire [77] situés à proximité du parc des expositions de [Localité 82].
L’emprise du projet est bordée :
au sud par l’autoroute A 104 dite « La Francilienne » qui relie les autoroutes A1 ([Localité 76]-[Localité 71]) et A3 (Seine-Saint-Denis) au niveau de l’aéroport ;
au nord, par la route de [Localité 82];
par deux départementales à l’Ouest (RD 40) et à l’Est (D88E).
Les parcelles expropriées sont les parcelles cadastrées AZ n°[Cadastre 1] d’une superficie de 6.910 m², n°9 d’une superficie de 2.060 m², n°[Cadastre 23] d’une superficie de 8.703 m², situées Lieudit « [Adresse 70] » sur la commune de [Localité 80]. Il s’agit de terres agricoles.
Concernant la consistance matérielle des parcelles, l’expropriation porte sur les parcelles en nature de terre agricole.
Concernant la consistance juridique des parcelles, elles sont louées à usage agricole.
Concernant la qualification des parcelles, s’agissant de la date de référence, les deux premiers alinéas de l’article L.322-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique disposent que : « Les biens sont estimés à la date de la décision de première instance ». Au terme de ces dispositions, la date de référence s’apprécie à la date de la décision de première instance et prend en compte les dispositions du PLU un an avant DUP. Cependant, lorsque le bien est situé à l’intérieur du périmètre d’exercice du droit de préemption urbain, la date de référence est « La date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan local d’urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien » en application des dispositions des articles L. 213-6 et L. 213-4 du code de l’urbanisme. La Cour de cassation, dans un arrêt concernant, certes, les emplacements réservés, mais qui peut être transposé de façon plus générale (Civ. 39, 24 mai 2018, n° 17-16.373) confirmant l’arrêt de la cour d’appel de Nîmes du 6 février 2017 fait valoir que c’est à bon droit que pour apprécier « l’usage effectif » des parcelles expropriées, a été retenue en tant que « date de référence » la date à laquelle a été pris l’arrêté préfectoral emportant la mise en compatibilité du POS, cette date étant celle correspondant à l’acte le plus récent rendant le POS opposable et délimitant la zone dans laquelle était située l’emplacement réservé. Or, l’arrêté portant déclaration d’utilité publique en date du 30 mars 2021 a emporté mise en compatibilité du PLU de la Commune de [Localité 80] et a classé les terrains expropriés en zone 1AUp, pour « Zone à urbaniser à court terme à vocation pénitentiaire ». Cette modification du zonage des parcelles les a soumises au droit de préemption urbain institué par délibération du conseil municipal du 27 mai 1987 sur les zones urbaines et à urbaniser de la commune de [Localité 80]. Par conséquent, la date de référence doit être fixée au 30 mars 2021.
Concernant la situation d’urbanisme à la date de référence, les parcelles expropriées était située en zone à urbaniser 1AUp, en témoigne le plan de zonage du PLU. Les zones autorisées en zone 1AUp, bien qu’elles soient soumises à conditions et limitativement énumérées, les occupations et utilisations du sol sont les suivantes :
Les terrains devront par conséquent être évalués compte tenu de cette ouverture à la construction. Sur le double discours de l’expropriant et l’atteinte au droit de propriété des expropriés ” ressort de ce principe cardinal de réparation intégrale que l’indemnisation doit « permettre à l’exproprié de retrouver une situation identique à celle qu’il avait avant l’expropriation » (Cour d’appel de Toulouse, 30 octobre 2013, n° 12/00013), ce qui implique d’évaluer le bien selon ses caractéristiques les plus précises et complètes.
La Cour européenne des droits de l’Homme juge que l’expropriation ne doit pas entraîner une atteinte disproportionnée au droit de propriété, atteinte constituée dès lors que l’exproprié subit une « charge spéciale et exorbitante » (CEDH, 4 novembre 2010, Dervaux c/ France, 40975/07, §49), en bénéficiant d’une indemnisation disproportionnée avec la valeur réelle du bien. L’expropriant et le juge de première instance fixent la date de référence au 14 septembre 2019 (soit 1 an avant la date d’ouverture de l’enquête publique). Cependant, à cette date, le terrain était classé en zone A par un plan local d’urbanisme adopté dix ans avant, soit le 30 mai 2011. Autrement dit, retenir le 14 septembre 2019 revient à faire application d’un document d’urbanisme adopté plus de 10 ans avant l’expropriation pour pouvoir opposer aux expropriés le caractère agricole – et inconstructible – de leurs terrains dans le but de justifier une indemnisation moindre de leur propriété ; alors même que, pour construire sur cette propriété, le PLU a été modifié et les terrains rendus constructibles ; mais surtout que la Carte de destination générale des différentes parties du territoire (CDGT) du SDRIF classe ces terrains en « espace urbanisé à optimiser » .
Par conséquent, il est manifeste que l’expropriant entend : d’un côté (celui de l’indemnisation), faire passer les parcelles expropriées pour des parcelles agricoles, afin d’obtenir la fixation d’une indemnité moindre à allouer aux expropriés, quand, du point de vue de l’urbanisme, il se prévaut du caractère déjà urbanisé ou dont l’urbanisation est à optimiser pour justifier l’expropriation des terrains. D’ailleurs, si le terrain n’était pas indiqué par le SDRIF comme « un espace urbanisé à optimiser », le projet de prison n’aurait pas pu y être réalisé. Ce double discours, qui tend à réduire l’indemnisation des expropriés, va à l’encontre tant du droit de propriété de ceux-ci, droit pourtant protégé par l’article 1er du Premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, que du principe de réparation intégrale du préjudice. Par conséquent, la protection du droit de propriété commande que les terrains expropriés soient considérés comme des terrains à bâtir, et qu’ils soient évalués comme tels.
Concernant la situation très privilégiée des parcelles, à titre subsidiaire, si les terrains expropriés devaient ne pas être considérés comme des terrains à bâtir, il est relevé que la jurisprudence tient compte de la situation privilégiée des terrains n’entrant pas dans cette catégorie. En effet, aux termes d’un arrêt du 1er décembre 1993 « Société nationale des Chemins de Fer Français c/ Melle [X] », la Cour de cassation a reconnu au visa de l’ancien article L. 13-15 du Code de l’expropriation qu’une valeur intermédiaire existait entre la valeur des terres agricoles et celles de terrains à bâtir. C’est ainsi que la Cour de cassation considère comme en situation privilégiée :
des terrains de nature agricole mais présentant une façade de 400 mètres sur une voie viabilisée située à proximité d’une agglomération. (Civ. 3°, 27 avril 1994, AFTRP c. [O], n° 92-70.466) ;
des terrains situés à proximité d’habitations d’une agglomération, dans une région bien desservie par une voie de chemin de fer et une autoroute (Civ. 3e 14 février 1996, Dépt Seine et Marne C. Bouille, n° 95-70.006) ;
des terrains à usage effectif de terre agricole bénéficiant d’un privilège d’accès ayant une facade sur une voie publique et se trouvant à proximité immédiate dans une zone tant urbanisée qu’artisanale (Civ. 3e 14 avril 1999, Dépt du Morbihan c. M. [T] [V], n° 98-70.079) ;
des parcelles à proximité immédiate d’un réseau complet de communication (autoroute, voie ferrée, aéroport international) (Civ. 3°, 16 décembre 2008, CC/ [Localité 71] Métropole, n°07.20.160 : Civ. 3°, 10 mars 2009, CCI Grand [Localité 71], n°08.12.282) ;
des parcelles situées à 800 mètres du centre du village, en limite d’une zone pavillonnaire située au sein d’une des dernières zones d’urbanisation de la commune (Civ. 3°, 15 juin 2017, n°16-18.407).
La Cour de cassation a par ailleurs confirmé un arrêt rendu par la Cour d’appel de Versailles qui a considéré que des parcelles étaient en situation privilégiée dès lors qu’elles se trouvaient à proximité d’un ensemble de maisons individuelles, étaient de forme rectangulaire et équipées en termes de réseaux (Civ. 3°, 29 novembre 2011, n°10-30.891). Et encore, dans un arrêt du 11 février 1998 (Civ. 3ème , 11 février 1998, n° 96-13.142). Et pour rappel, la cour d’appel de Paris suit la jurisprudence de la cour de cassation et c’est ainsi que sont considérées comme en situation privilégiée :
une parcelle facilement accessible par sa proximité des axes routiers importants que sont l’autoroute A4, la francilienne et les RD 934 et 418, située dans un secteur à forte progression économique et démographique, à proximité de la zone urbaine de l’ancien centre bourg de [Localité 78] et d’une importante zone d’activité, disposant d’une large façade de 15 m de large sur une voie carrossable et jouxtant une zone urbanisée desservie par les réseaux (Pièce n° 11: CA Paris, 24 octobre 2019, n° 18/07356) ;
une parcelle en façade de deux voies asphaltées et équipées (Pièce n° 12 : CA Paris, 25 avril 2013, n° 10/22472) ;
une parcelle située à 1400 m au nord-ouest de la zone agglomérée de la commune de [Localité 81] (dont la population a doublé en 40 ans) et à 1600 m de la zone agglomérée de la commune de [Localité 63], communes desservies par la RD 231 qui dessert également [Localité 79] et par l’A4, proche des voies de communication (autoroute A4 et RD 231 comme indiqué), à 14km de [Localité 73], 30mn de [Localité 76] et à proximité de réseaux publics (450 m du village urbain), comprise dans le secteur IV de Marne la Vallée, qui va supporter l’opération d’intérêt national ‘les Villages Nature’, proche également du Centre commercial du Val d’Europe, dotée d’un réseau de communication de proximité adapté à la dimension internationale du pôle d’activité [accès autoroute et RER très proche (gare desservant Disneyland), correspondances vers l’aéroport [77]] et offrant, de longue date, aux secteurs concernés par la présente opération, la possibilité d’implantations d’activités facilitées (CA Paris, 15 octobre 2015, Village nature, n°13/12653); autoroute et RER très proche (gare desservant Onegar vers l’aéroport [77]) et offrant, de longue date, aux secteurs concernés par la présente opération, la possibilité d’implantations d’activités facilitées (Pièce n° 13: CA Paris, 15 octobre 2015, Village nature, n° 13/12653) ;
La jurisprudence rappelle donc à de multiples reprises que ce sont les caractéristiques objectives de situation du bien qui permettent de le qualifier de bien en situation privilégiée telles que la facilité d’accès, la façade sur voie, la proximité plus ou moins grande des réseaux même s’ils sont insuffisants, la proximité de la zone agglomérée qu’elle soit à usage d’habitation ou d’activité, ainsi que la proximité des équipements publics de superstructures et d’infrastructures telles autoroutes, aéroport international, chemin de fer ou encore équipements scolaires, sportifs et autres… Enfin, le caractère agricole ou naturel de terrains expropriés n’empêche nullement que soit retenue leur situation privilégiée (pour une solution récente sur ce point, (Cass. 3e civ., 23 sept. 2020, n° 19-20.431). La situation privilégiée des terrains n’a pas été contestée devant le juge de l’expropriation qui l’a retenue. Néanmoins, la juridiction de première instance n’en a pas tiré suffisamment les conséquences sur la valeur vénale. Il convient de caractériser de situation hautement privilégiée, la parcelle, outre qu’elle soit insérée dans un environnement urbanisé, sont desservies par des équipements publics importants :
L’aéroport [77],
mais également à proximité d’importantes infrastructures routières et autoroutières et d’importantes zones d’activités d’intérêt national et international (la zone d’activités AEROLIANS par exemple).
Si la cour refuse de qualifier les terrains de terrains à bâtir, elle doit néanmoins caractériser un niveau très élevé de situation privilégiée des terrains, et constatera que l’indemnité retenue par le juge de l’expropriation est sous-évaluée.
Concernant la valeur vénale des parcelles, s’agissant des erreurs entachant le jugement de première instance, le premier juge a retenu des termes de comparaison pour évaluer les parcelles expropriées et a conclu que « la moyenne globale des 16 termes de comparaison retenus est de 18,60 euros/m² » mais qu’ « il convient de fixer la valeur unitaire à 12,50 euros/m² », et ce, sans que soit expliqué les motifs et le raisonnement conduisant d’une moyenne globale de 18,60 euros/m² à 12,50 euros/m², soit une baisse de 6,10 euros/m² (c’est-à-dire 1/3). Calculer une moyenne globale de 18,60 euros/m² et fixer l’indemnité d’éviction par application d’une valeur unitaire de 12,50euros /m² sans justifier les raisons conduisant à cette décote est contradictoire. L’indemnité d’éviction aurait dû être calculée par application de la valeur unitaire déterminée par la moyenne globale calculée par le juge de l’expropriation. Le premier juge a manifestement commis une erreur de calcul dans la détermination du prix au m² des référence 14 et 15 (CG3 et CG4 du Commissaire du gouvernement), mise en jaune par nos soins. En effet, le prix au m² est de : 15 euros pour la référence n°4 du CG et de 16,73 euros pour la référence n°5 du CG. Si cette erreur de calcul n’avait pas été commise, la moyenne des prix eut été supérieure à 18,60 euros /m².
Concernant des termes de comparaison de l’expropriant retenus par le premier juge, le premier terme de comparaison DEM 1 est relatif à un accord obtenu par l’établissement public [Localité 76] Terres d’Envol qui concerne la cession de parcelles entre personnes publiques, a fortiori des parcelles sous DUP appartenant à la Région Ile-de-France. Dès lors, une fois sollicitée, cette dernière n’avait aucune raison de refuser de vendre son bien à l’expropriant au prix proposé par celui-ci. Au demeurant, la cession à vil prix d’un bien n’est pas interdite entre personnes publiques surtout pour la réalisation d’un projet d’intérêt général, de sorte que la valeur fixée ne peut être considérée comme représentative du marché. Le deuxième terme de comparaison (DEM2) est relatif à un accord entre Grand [Localité 76] Aménagement et des expropriés (la Région Ile-de-France et des particuliers) concernant des parcelles incluses dans le périmètre de la [Adresse 83]. Il en est de même du troisième terme de comparaison (DEM3). Le quatrième terme de comparaison (DEM4) est relatif à un accord où l’EPT Terres d’Envol acquiert un terrain compris dans le périmètre de la DUP de l’opération d’aménagement du Vallon du Sausset. Il en est de même pour le cinquième terme de comparaison (DEM5). Les sixième (DEM8), septième (DEM9) et huitième (DEM11) termes de comparaison concernent la [Adresse 83]. Toutefois, il ressort de ces jugements qu’il s’agissait de parcelles en zone naturelle, avec des caractéristiques différentes de celles des parcelles aujourd’hui expropriées. L’expropriant communique avec son mémoire en réplique 4 arrêts de la Cour d’appel de Paris concernant la [Adresse 83], à l’égard desquels la remarque susmentionnée s’applique (parcelles en zone naturelle, dans une configuration différente). Il apparaît que ces termes de comparaison établissent la très forte pression foncière des personnes publiques sur ce secteur et qu’il n’existe quasiment plus de marché libre. Par conséquent, les références de l’expropriant retenues par le juge de l’expropriation auraient dû être rejetées en tant qu’elles ne sont pas comparables par la nature de leur acteur ou en tant qu’elle porte sur des biens d’autres natures. A tout le moins, si la juridiction entend néanmoins les retenir comme termes de comparaison utiles, il convient de corriger les erreurs commises sur les calculs et d’en limiter l’importance dans l’évaluation du prix au m² pour tenir compte du fait que ces valeurs sont issues d’un marché captif et contraint.
Le juge de l’expropriation a retenu les 5 termes de comparaison proposés par le commissaire du gouvernement, étant précisé que 2 sont identiques à celles de l’expropriant (CG 1= DEM4 et CG2=DEM5). Parmi ses références, les quatrième et cinquième termes de comparaison (CG 1 et CG2) sont relatives à l’opération du Vallon du Sausset et seront donc écartés pour les raisons exposées. Le quatorzième (CG3) et seizième (CG5) termes de comparaison correspondent à des cessions par ou à des communes ([Localité 82] pour la CG3 et [Localité 74] pour la CG5- étant entendu que le marché de [Localité 74] est moins tendu que celui de [Localité 80]). Le quinzième terme de comparaison (CG4), le plus élevé à 12,17 euros/m² s’il n’est pas tenu compte de l’erreur de calcul commis par le juge de l’expropriation, correspond à une vente entre particuliers mais sur le territoire de la commune de [Localité 67] (77), dont la situation géographique est bien moins privilégiée que celle de [Localité 80], et le marché y est moins tendu, ce qui démontre l’insuffisance de l’évaluation réalisée à 12,17 euros/m².
Concernant la valeur unitaire, les expropriés sollicitent à titre principal que leur indemnité de dépossession foncière soit fixée à 40 euros/m² en valeur occupée sur la base des termes de comparaisons qu’ils ont produit en première instance et retenus par le juge de première instance. Les valeurs issues de ces termes de comparaison sont les seules valeurs correspondant à un marché libre, par opposition au marché captif que subit la commune de [Localité 80] du fait des nombreuses opérations d’aménagement sur son territoire depuis plusieurs années. De plus, force est de constater que :
Les actes de vente mentionnent effectivement des biens situés en zone N et non des droits à construire, ni une modification de zonage, ni aucune condition suspensive – la qualification de terrain à bâtir dont fait mention l’expropriant étant à cet égard particulièrement osée.
Que la valeur de ces 4 ventes ne correspond pas à une zone à urbaniser mais bien à une zone N (ce qu’elle était et est d’ailleurs toujours). Les expropriés produisent à cet égard un acte de vente en date du 11 avril 2022 pour la parcelle cadastrée section B n°[Cadastre 3] à [Localité 80] située en zone 1AUe, consentie à un prix de 600.000 euros soit 129,31 euros/m² (Pièce n° 17).
Il a été démontré que les parcelles expropriées sont en situation hautement privilégiée en ce qu’elle est située dans un environnement urbanisé, à proximité de l’Aéroport [77], de la zone urbanisée de [Localité 82] et de la ZAC Aérolians, sont aisément accessibles, et situés dans une zone de pression foncière conséquente et de longue durée. Il résulte de ce qui précède que les expropriés sollicitent que leur indemnité de dépossession soit fixée à 40 euros/m² en valeur occupée.
L’APIJ rétorque que :
Concernant la situation géographique du bien, les parcelles expropriées sont des parcelles cadastrées section AZ n°[Cadastre 1] d’une superficie de 6.910 m², n°9 d’une superficie de 2.060 m², n°[Cadastre 23] d’une superficie de 8.703 m², situées Lieudit « [Adresse 70] » sur la commune de [Localité 80] Il s’agit de terres agricoles.
Concernant la situation locative, les parcelles sont exploitées par la SCEA FERME DE CHALMASSY.
Concernant la date de référence, les parcelles en cause ne sont pas situées dans un périmètre couvert par un droit de préemption urbain, de telle sorte que les dispositions des articles L 213-4 et L 213-6 du Code de l’urbanisme ne trouvent pas à s’appliquer. La date de référence doit en conséquence être fixée un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique. Cette enquête a été prescrite par un arrêté préfectoral n° 2020-1578 du 22 juillet 2020 (pièce n° 2). Elle s’est tenue du 14 septembre 2020 au 16 octobre 2020 inclus. La date de référence doit donc être fixée au 14 septembre 2019, soit un an avant ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique. C’est donc à tort que l’appelant invite la Cour à fixer la date de référence au 30 mars 2021, date de l’arrêté déclaratif d’utilité publique emportant mise en compatibilité du PLU ayant abouti à un classement des parcelles en cause en zone lAUp dédiée à la réalisation du centre pénitentiaire. La mise en compatibilité du PLU de [Localité 80] issue de l’arrêté déclaratif d’utilité publique du 30 mars 2021 ne peut en effet être prise en compte pour déterminer la situation d’urbanisme de l’emprise en cause. Aussi, pour qu’une DUP valant mise en compatibilité modifie une date de référence, sur un bien qui jusqu’alors n’était pas soumis au droit de préemption, il faut qu’elle soit suivie d’une délibération du Conseil Municipal statuant sur l’instauration du droit de préemption urbain sur le secteur concerné par la mise en compatibilité. Tel n’est pas le cas en l’espèce aucun droit de préemption urbain n’ayant été institué avant ou après mise en compatibilité sur le secteur concerné. Dans un arrêt du 27 février 2003, la Cour d’Appel de Paris a en outre jugé que lorsque la modification de la règle d’urbanisme est intervenue pour les seuls besoins de l’opération d’utilité publique aux fins de laquelle l’expropriation a été mise en ‘uvre, cette modification ne peut pas être prise en compte (CA PARIS 27 février 2003, GFA DU GRAND VILTAIN / CCI [Localité 76]). En juger autrement reviendrait d’ailleurs à méconnaître le 3ème alinéa de l’article L322-2 du Code de l’expropriation qui impose au Juge d’écarter les changements de valeur « provoqués par l’annonce des travaux ou opérations dont la déclaration d’utilité publique est demandée, par la perspective de la modification des règles d’utilisation des sols….. ». Dans un arrêt du 25 janvier 2018 (pourvoi n° 16-25138) la Cour de Cassation est venue préciser que la mise en compatibilité du Plan Local d’Urbanisme (PLU) par une déclaration d’utilité publique (DUP) ne peut valoir date de référence pour apprécier la qualification d’un bien exproprié lorsque ce dernier se situe dans une zone soumise au droit de préemption urbain. Cette solution jurisprudentielle procède d’une lecture stricte des dispositions de l’article L. 213-4 du code de l’urbanisme, qui disposent que la date de référence est celle de « l’acte rendant public et approuvant, révisant ou modifiant » le document d’urbanisme. Elle procède également du principe posé à l’article L. 322-2 du code de l’expropriation, selon lequel il ne peut être tenu compte, au stade de l’évaluation du bien exproprié, des changements de valeur résultant directement de l’opération déclarée d’utilité publique. Au regard de ce qui précède le jugement ne pourra qu’être confirmé en ce qu’il a fixé la date de référence en application des dispositions de l’article L 322-2 du Code de l’urbanisme au 14 septembre 2019, date à laquelle l’emprise en cause était située en zone A du PLU.
Concernant l’indemnité principale, les appelants sollicitent l’allocation d’une indemnité principale sur la base d’une valeur de 40 euros/m². Au soutien de cette demande il est fait état de divers termes de comparaison dont certains sont commentés dans le mémoire des appelants et d’autres uniquement produits en pièces annexes audit mémoire. Les 4 mutations citées concernant la commune de [Localité 80] sont intervenues les 30, 31 janvier et 4 février 2019 au profit de la société SOLIMMO (pièces adverses n° 3/4/5). La parcelle acquise était, à la date de sa cession, située en zone N PLU. Leur prix d’acquisition est de 40 euros/m² libre d’occupation. Les parcelles objet de ces cessions forment ensemble une unité foncière présentant une façade sur une voie de circulation (route de [Localité 82]) asphaltée et équipée, bordée sur le côté opposé de pavillons d’habitation. Tant de par leurs conditions de desserte qu’à raison de leur situation d’urbanisme qui autorise :
Les constructions ou installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics dès lors qu’elles ne sont pas incompatibles avec une activité agricole dans l’unité foncière ou elles sont implantées.
Ces parcelles répondent à la qualification de terrain à bâtir au sens de l’article L 322-3 du Code de l’expropriation, lequel dispose que la qualification de terrain à bâtir est réservée aux parcelles qui sont tout à la fois :
Situées dans un secteur désigné comme constructible par un plan d’occupation des sols, un plan local d’urbanisme, un document d’urbanisme en tenant lieu ou par une carte communale, ou bien, en l’absence d’un tel document, situés dans une partie actuellement urbanisée d’une commune,
Effectivement desservies par une voie d’accès, un réseau électrique, un réseau d’eau potable et, dans la mesure où les règles relatives à l’urbanisme et à la santé publique l’exigent pour construire sur ces terrains, un réseau d’assainissement, à condition que ces divers réseaux soient situés à proximité immédiate des terrains en cause et soient de dimensions adaptées à la capacité de construction de ces terrains. Lorsqu’il s’agit de terrains situés dans une zone désignée par un plan d’occupation des sols, un plan local d’urbanisme, un document d’urbanisme en tenant lieu ou par une carte communale, comme devant faire l’objet d’une opération d’aménagement d’ensemble, la dimension de ces réseaux est appréciée au regard de l’ensemble de la zone. Les terrains qui à la date de référence indiquée au premier alinéa, ne répondent pas à ces conditions sont évalués en fonction de leur seul usage effectif, conformément à l’article L. 322-2.
Ces parcelles ne sont pas situées dans un secteur désigné comme inconstructible stricto sensu y étant autorisées. Elles sont par ailleurs desservies par une voie asphaltée et équipée sur laquelle elles disposent toutes d’une façade. L’APIJ entend souligner que l’acquéreur des parcelles citées à titre de termes de comparaison est la société SOLIMMO, laquelle est une filiale du groupe PETIT FORESTIER, ces 2 entités ayant leur siège social à la même adresse ([Adresse 4] à [Localité 82]). L’acquisition est destinée, à moyen terme, à permette une extension du siège du groupe PETIT FORESTIER après approbation de la révision du PLU en cours et devant permettre le classement de ces parcelles en zone Uee à dominante d’activités économiques (pièce n° 4). De ce qui précède, il apparaît que le prix auquel la société SOLIMMO a acquis ces terrains s’entend d’une valeur d’anticipation sur le passage des parcelles en cause en zone urbaine Uee. Les références susvisées auraient dues être écartées par le Tribunal, ce dernier ayant toutefois relevé à juste titre que :
« Ces parcelles bénéficient d’une situation extrêmement privilégiée, directement bordées par la route de [Localité 82] de l’autre côté de laquelle se situe une zone pavillonnaire ;
Ont été cédées à une entreprise dont le siège social est situé sur des parcelles voisines et qui dispose d’un intérêt certain à l’acquisition de ces parcelles justifiant le prix élevé consenti ;
Ces éléments constituant un facteur substantiel de plus-value par rapport aux parcelles expropriées ».
Aucun de ces éléments ne saurait justifier d’une infirmation du jugement. Les 2 références concernant la commune de [Localité 66] doivent être écartées. Cette commune étant éloignée de [Localité 80] et étant située en limite des communes de [Localité 65], [Localité 75], [Localité 72] ainsi que de la commune de [Localité 64] en Seine-et-Marne. Le marché immobilier sectoriel n’est donc en rien comparable avec celui de la commune de [Localité 80]. Il est relevé que les emprises objet des mutations citées sont, à l’exception de 2 parcelles, situées en zone AU, de telle sorte qu’aucune comparaison n’est pertinente. Il sera enfin observé par la Cour que s’agissant de la cession du 13 décembre 2016 (pièce adverse n° 6) l’acte précise en page 8 que pour la fraction des parcelles cadastrée section A n° [Cadastre 16] située en zone A du PLU la valeur d’acquisition est de 12 euros/m² en valeur. Une même observation peut être faite s’agissant de la vente du 17 décembre 2015 (pièce adverse n°7, page 9), le prix de cession des parcelles cadastrée section A n° [Cadastre 14], située en zone A du PLU, étant 12 euros/m² en valeur libre. Les arrêts de la Cour d’appel de Paris concernent pour leur part des parcelles sises en Seine-et-Marne sur les communes de [Localité 78] en zone lAUb (pièce adverse n° 11), sur la commune de [Localité 68], concernant une parcelle située en zone lAUX (pièce adverse n° 12), [Localité 81], dans le secteur IV de Marne la Vallée en zone ND valorisée à hauteur de 8 euros/m². Ces arrêts qui intéressent un autre département, d’autres communes et qui portent sur des emprises dont la situation d’urbanisme n’est pas comparable ne sauraient fonder de l’infirmation du jugement. Il en sera de même de la vente du 11 avril 2022 (pièce adverse n° 17). Cette mutation concerne une parcelle sise à [Localité 80], d’une contenance de 4.640 m cédée au prix de 600.000 euros, soit 129,31 euros/m². A la lecture de l’acte, il apparaît toutefois que cette mutation porte sur un terrain à bâtir situé en zone lAUb du PLU (cf. plan ci-dessous), l’acquéreur s’étant vu délivrer préalablement à la cession un permis de construire définitif autorisant la construction de 2 bâtiments composés de 18 entrepôts (cf. acte page 20). L’APIJ sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a fixé l’indemnité principale sur la base d’une valeur de terrain de 12,50 euros/m² en valeur occupée. Les termes de comparaison retenus par le premier juge et proposés par le commissaire du gouvernement à l’exception, pour les raisons ci-dessus explicitées des références qui étaient proposées par l’exproprié au titre des cessions consenties au bénéfice de la société SOLIMMO doivent être retenus ainsi que les décisions définitives du Tribunal portant sur l’indemnisation de parcelles sises dans le périmètre de la déclaration d’utilité publique. Ces références portent sur des terrains de même nature que ceux ici en cause, également situés sur le territoire de la commune de [Localité 80] en zone A ou NI – les valeurs d’échange observées sur ces 2 zones étant identiques. Elles concernent également des emprises en situation privilégiée au sens où l’entend la jurisprudence et ainsi que retenue à juste titre par le Tribunal, la valeur retenue étant largement supérieure à la valeur moyenne des terres agricoles en région lle-de-France, laquelle est pour le département voisin de Seine-et-Marne, en secteur péri urbain de :
2,38 euros/m² avec une valeur dominante de 0,78 euros/m² pour des terres libres,
Au plus de 1,30 euros/m² avec une valeur dominante de 0,72 euros/m² pour des terres louées.
Les termes de comparaison récents (période 2020/2021) produits par le commissaire du gouvernement doivent être retenus au soutien de cette valeur unitaire, ces éléments concernant pour 2 d’entre eux des mutations sur la commune de [Localité 80] et révélant une valeur moyenne de 9,94 euros/m². Les arrêts rendus par la Cour d’appel de Paris le 25 juin 2020 sous les n° RG 19/05776 / 19/08132 / 19/08128 / 19/04297 (pièces n° 5 à 8) dans le cadre de la [Adresse 83] à [Localité 80], aux termes desquels la valeur de 9 euros/m² occupé et hors remploi retenue par le Tribunal a été confirmé pour des terrains à usage agricole en situation privilégiée et situés en zone NI du PLU, doivent également être retenus. Le jugement doit être confirmé sur la valeur unitaire.
Le commissaire du gouvernement conclut que :
Concernant la description des parcelles expropriées, il s’agit des parcelles cadastrées section AZ n°[Cadastre 1] d’une superficie de 6.910 m², AZ n°[Cadastre 59] d’une superficie de 2.060 m², AZ n°[Cadastre 23] d’une superficie de 8.703 m², situées Lieudit « [Adresse 70] » sur la commune de [Localité 80]. Il s’agit de terres agricoles. Les parcelles sont louées à usage agricole, elles sont donc considérées comme occupées.
Concernant la date de référence, elle a été fixée au 14 septembre 2019. La parcelle en cause n’est pas située dans un périmètre couvert par le droit de préemption urbain. Aussi les dispositions des articles L 213-4 et L 213-6 du Code de l’Urbanisme ne trouvent pas à s’appliquer. L’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique s’est déroulée du 14 septembre au 16 octobre 2020 inclus. En conséquence, la date de référence à retenir est fixée un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique, soit le 14 septembre 2019. En conséquence, le Commissaire du Gouvernement sollicite la confirmation du jugement de première instance sur ce point.
Concernant la situation d’urbanisme et la qualification des parcelles expropriées, le juge a qualifié le terrain comme non à bâtir. Le Plan Local d’Urbanisme (PLU) de [Localité 80] a été approuvé en Conseil Municipal du 30 mai 2011. A cette date les parcelles en cause était située en zone agricole. En l’occurrence les parcelles sont enclavées, elles ne sont desservies par aucune voie ni aucun réseau. La parcelle AZ [Cadastre 6] est desservie par un chemin rural non équipé. En raison de leur situation d’urbanisme, les parcelles objet de l’expropriation ne peuvent être considérées comme un terrain à bâtir. En conséquence, le Commissaire du Gouvernement sollicite la confirmation du jugement de première instance sur ce point.
Concernant la valeur unitaire des terrains, le juge a fixé la valeur unitaire des terrains à 12,50 euros/m². L’appelant sollicite la fixation de la valeur unitaire du terrain à 40 euros/m² en valeur occupée. Les termes datent de 2019. Compte tenu de l’importance du nombre de termes aux alentours de 10euros, les prix de cessions des quelques termes à 40euros constituent par conséquent un micromarché qu’il convient d’écarter n’étant pas représentatif du marché réel des parcelles à évaluer. En conséquence, le Commissaire du Gouvernement sollicite la confirmation du jugement de première instance en ce qu’il a fixé la valeur unitaire des terrains à 12,50 euros/m².
SUR CE, LA COUR
– Sur la recevabilité des conclusions
Aux termes de l’article R311-26 du code de l’expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017-article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, l’appel étant du 28 juillet 2022, à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, l’appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel.
À peine d’irrecevabilité, relevée d’office, l’intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.
L’intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.
Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l’ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.
Les conclusions et documents sont produits en autant d’exemplaires qu’il y a de parties, plus un.
Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.
En l’espèce, les conclusions de l’indivision [H] du 20 octobre 2022, de l’APIJ du 20 janvier 2023 et du commissaire du gouvernement du 28 décembre 2023 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.
– Sur le fond
Aux termes de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s’impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes.
Aux termes de l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la réserve d’une juste et préalable indemnité.
L’article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.
Aux termes de l’article L 321-1 du code de l’expropriation, les indemnités allouées couvrent l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation.
Aux termes de l’article L 321-3 du code de l’expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l’indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.
Aux termes de l’article L 322-1 du code de l’expropriation le juge fixe le montant des indemnités d’après la consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété ou lorsque l’expropriant fait fixer l’indemnité avant le prononcé de l’ordonnance d’expropriation, à la date du jugement.
Conformément aux dispositions de l’article L 322-2, du code de l’expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération – sous réserve de l’application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code – leur usage effectif à la date définie par ce texte.
L’appel de l’indivision [H] porte sur le montant de l’indemnité de dépossession ; elle conteste la date de référence retenue par le premier juge, demande de la fixer au 30 mars 2021 et de retenir en conséquence un zonage 1AUp ; elle invoque le double discours de l’expropriant et l’atteinte à son droit droit de propriété et demandent de retenir la qualification de terrain à bâtir ; à titre subsidiaire, elle demande de retenir une situation hautement privilégiée et de retenir une valeur unitaire de 40 euros/m².
Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s’agit de terres agricoles correspondant aux parcelles suivantes secion AZ :
N°[Cadastre 1] pour 6910 m² ( emprise totale ) ;
N°[Cadastre 59] pour 2060 m² ( emprise totale) ;
N°[Cadastre 23] pour 8703 m² ( emprise totale) ;
Toutes situées sur la commune de [Localité 80].
Ces terres sont proches de l’actuelle maison d’arrêt de [Localité 82], la procédure d’expropriation concernant un ensemble de terres agricoles d’une superficie d’environ 16 hectares.
Ces terrains expropriés sont en lisière est de l’actuelle prison de [Localité 82], au sud de la plate-forme aéroportuaire [77] est situé à proximité du parc des expositions de [Localité 82].
L’emprise du projet est bordée :
‘ au sud par l’autoroute A104 dite « la francilienne » qui relient les autoroutes A1 « [Localité 76]-[Localité 71] » et A3 (Seine Saint-Denis) niveau de l’aéroport ;
‘ au nord, par la route de [Localité 82] ;
‘ par 2 départemental à l’Ouest (RD 40) et à l’Est (D88E).
Le jour du transport, les terres n’étaient pas exploitées.
Pour une plus ample description, il convient de se référer au procès verbal de transport.
S’agissant de la date à laquelle le bien exproprié doit être estimé, il s’agit de celle du jugement de première instance conformément à l’article L322-2 du code de l’expropriation, soit le 21 avril 2022.
1° sur la date de référence
Le premier juge en application de l’article L322-2 du code de l’expropriation a fixé la date de référence un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique, soit le 14 septembre 2019.
L’indivision [H] demande l’infirmation par application des articles L 213-6 et L213-4 du code de l’urbanisme et de fixer la date de référence au 31 mars 2021 ; ils invoquent un arrêt de la 3° chambre de la cour de cassation du 24 mai 2018 N°17-16373 concernant les emplacements réservés en indiquant qu’il peut être transposé de façon plus générale.
L’APIJ demande la confirmation en invoquant un arrêt de la 3ème chambre de la cour de cassation du 8 novembre 2006 N°05-17462 et un arrêt de la même chambre du 25 janvier 2018 N°16-25138.
Le commissaire du gouvernement demande la confirmation du jugement sur le fondement de l’article L322-2 du code de l’expropriation.
En principe, la date de référence se situe, un an avant l’ouverture de l’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique , conformément à l’article L322-2 du code de l’expropriation ; en effet, celui-ci prévoit que les biens sont estimés à la date de la décision de première instance ; que toutefois, et sous réserve de l’application des dispositions des articles L322-3 à L322-6, est seul pris en considération l’usage effectif des immeubles et droits réels immobiliers un an avant l’ouverture de l’enquête prévue à l’article L1 ou, dans le cas prévu à l’article L 122-4, un an avant la déclaration d’utilité publique ou, dans le cas des projets ou programmes soumis au débat public prévu par l’article L 121-8 du code de l’environnement ou par l’article 3 de la loi N°2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand [Localité 76], au jour de la mise à disposition du public du dossier de ce débat ou, lorsque le bien est situé à l’intérieur du périmètre d’une zone d’aménagement concerté mentionnée à l’article L311-1 du Code de l’urbanisme, à la date de publication de l’acte créant la zone , si elle est antérieure d’au moins un an à la date d’ouverture de l’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique.
Cependant, cette date de référence connaît des exceptions, notamment lorsqu’un bien est soumis au droit de préemption conformément aux articles L213-6 et L213-4 du code de l’urbanisme, qui prévoient que cette date de référence se situe, pour les biens non compris dans le périmètre d’une zone d’aménagement différé, à la date à laquelle est devenue opposable aux tiers, le plus récent des actes rendant public, approuvant, modifiant ou révisant le plan local d’urbanisme, et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien.
En effet, l’article L211-1 du code de l’urbanisme dispose que les communes dotées d’un plan d’occupation des sols rendu public ou d’un plan local d’urbanisme approuvé peuvent, par délibération, instituer un droit de préemption urbain sur tout ou partie des zones urbaines et des zones d’urbanisation futures délimitées par ce plan.
En l’espèce, l’arrêté préfectoral N°2021-0790 du 30 mars 2021 ayant déclaré publique le projet de réalisation de la maison d’arrêt de la Seine Saint Denis a emporté mise en compatibilité du plan local d’urbanisme de la commune de [Localité 80].
L’ indivision [H] en conclut que cette modification du zonage a automatiquement soumis les parcelles expropriées au droit de préemption urbain instauré par délibération du conseil municipal du 27 mai 1987.
Elle invoque à l’appui un arrêt de la 3° chambre civile de la cour de cassation du 24 mai 2018 qui a jugé que : « l’arrêté déclarant l’opération d’utilité publique et emportant mise en compatibilité du plan d’occupation des sols constitue un acte entrant dans les prévisions de l’article L322-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ; qu’ayant relevé que l’arrêté du 6 décembre 2011 déclarant d’utilité publique le projet d’aménagement de la rocade Ouest de la commune de Mende et emportant mise en compatibilité du plan d’occupation des sols était l’acte le plus récent rendant celui-ci opposable et délimitant la zone dans laquelle était situé l’emplacement réservé, la cour d’appel a exactement fixé la date de référence au jour de cet arrêté » (pièce N°8).
Cependant, l’ indivision [H] reconnaît que cet arrêt concerne les emplacements réservés ; or, cet arrêt concerne la possibilité de faire application de l’article L322-6 du code de l’expropriation, qui fixe une date dérogatoire en matière d’emplacement réservé, lorsque c’est l’arrêté de déclaration d’utilité publique emportant mise en compatibilité du plan d’occupation des sols qui a crée l’emplacement réservé incluant le terrain exproprié et ne traite pas de la possibilité d’instaurer un droit de préemption urbain par la seule mise en compatibilité d’un plan local d’urbanisme sans délibération du conseil municipal.
En l’espèce, l’indivision [H] fait état du droit de préemption qu’il n’établit pas, en ne produisant ni en première instance ni en appel la délibération du 27 mai 1987 qu’il invoque ou une délibération du conseil municipal ayant instauré un droit de préemption urbain sur les parcelles nouvellement classées en zone à urbaniser.
Or, dans cette hypothèse, la cour de cassation par arrêt de la 3ème chambre du 6 novembre 2006 N°05-17462 a jugé qu’une déclaration publique emportant mise en compatibilité du plan d’occupation des sols d’une commune avec une opération d’urbanisme ne peut avoir pour effet, en l’absence d’une nouvelle délibération du conseil municipal instituant un droit de préemption sur une partie de la parcelle expropriée reclassée en zone d’urbanisation future, de soumettre automatiquement celle-ci au droit de préemption urbain institué antérieurement dans une zone de ce type.
Ainsi, pour que la déclaration d’utilité publique valant mise en compatibilité modifie une date de référence, sur un bien qui jusqu’alors n’était pas soumis au droit préemption, il faut qu’elle soit suivie d’une délibération du conseil municipal statuant sur l’instauration de droit de préemption urbain sur le secteur concerné par la mise en comptabilité qui n’entraîne pas à elle seule automatiquement la soumission des parcelles expropriées au droit de préemption urbain.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement qui a exactement fait application de l’article L322-22 du code de l’expropriation et retenu comme date de référence la date du 14 septembre 2019, soit un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique, celle-ci ayant eu lieu du 14 septembre 2020 au vendredi 16 octobre 2020 inclus tel que cela ressort de l’arrêté préfectoral N°2020-1578 du 22 juillet 2020.
A cette date, comme retenu par le premier juge, le bien exproprié est en zone A, laquelle n’est pas constructible.
2° sur le double discours de l’expropriant et l’atteinte au droit de propriété
Le premier juge a écarté la qualification de terrain à bâtir.
L’indivision [H] indique qu’il résulte des dispositions de l’article L 321-1 du code de l’expropriation que le bien doit être évalué selon ses caractéristiques les plus précises et complètes, que la Cour européenne des droits de l’Homme juge que l’expropriation ne doit pas entraîner une atteinte disproportionnée au droit de propriété, atteinte constituée dès lors que l’exproprié subit une « charge spéciale et exorbitante » (4 novembre 2010, Dervaux France, 40 975/07 paragraphe 49), en bénéficiant d’une indemnisation disproportionnée avec la valeur du bien.
Elle indique qu’en l’espèce, l’expropriant et le premier juge fixent la date de référence au 14 septembre 2019, que cependant à cette date, le terrain était classé en zone A par un plan local d’urbanisme adopté 10 ans avant, soit le 30 mai 2011, ce qui revient à lui opposer le caractère agricole et inconstructible de son terrain dans le but de justifier une indemnisation moindre de sa propriété, alors même, que pour construire sur cette propriété, le PLU a été modifié et les terrains rendus constructibles et que surtout la carte de destination générale des différentes parties du territoire (CDGT) du SDRIF classe ces terrain en « espaces urbanisés à optimiser (pièce numéro 9).
Elle en conclut qu’il est manifeste que l’expropriant entend d’un côté, celui de l’indemnisation, faire passer les parcelles expropriées pour des parcelles agricoles, afin d’obtenir la fixation d’une indemnité moindre, quant au point de vue de l’urbanisme, il se prévaut du caractère déjà urbanisé ou dont l’urbanisation est à optimiser pour justifier l’expropriation des terrains ; il considère que ce double discours, qui vise à réduire son indemnisation, va à l’encontre tant du droit propriété, droit pourtant protégé par l’article premier du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’Homme, que du principe de réparation intégrale du préjudice.
Elle indique en conséquence que la protection du droit propriété commande que les terrains expropriés soient considérés comme des terrains à bâtir, et qu’ils soient évalués comme tels.
Cependant, aux termes de l’article L322-3 du code de l’expropriation, la qualification de terrain à bâtir, est réservée aux terrains qui un an avant l’ouverture de l’enquête prévue à l’article L1 ou , dans le cas prévu à l’article L122-4, un an avant la déclaration d’utilité publique , sont quelle que soit leur utilisation, à la fois :
1° situés dans un secteur désigné comme constructible par un plan d’occupation des sols, un plan local d’urbanisme, un document d’urbanisme en tenant lieu ou par une carte communale, ou bien, en l’absence d’un tel document, situés dans une partie actuellement urbanisée d’une commune ;
2° effectivement desservis par une voie d’accès, un réseau électrique, un réseau d’eau potable et, dans la mesure ou les règles relatives à l’urbanisme et à la santé publique l’exigent pour construire sur ces terrains, un réseau d’assainissement, à condition que ces divers réseaux soient situés à proximité immédiate des terrains en cause et soient de dimensions adaptées à la capacité de construction de ces terrains. Lorsqu’il s’agit de terrains situés dans une zone désignée par un plan d’occupation des sols, un plan local d’urbanisme, un document d’urbanisme en tenant lieu ou par une carte communale, comme devant faire l’objet d’une opération d’aménagement d’ensemble, la dimension de ces réseaux est appréciée au regard de l’ensemble de la zone.
Les terrains qui, à la date de référence indiquée au 1er alinéa, ne répondent pas à ces conditions sont évalués en fonction de leur seul usage effectif , conformément à l’article L322-2.
En outre, l’article L322-4 dispose que l’évaluation des terrains à bâtir tient compte des possibilités légales et effectives de construction qui existaient à la date de référence prévue à l’article L 322-3, la capacité des équipements mentionnés à cet article, des servitudes affectant l’utilisation des sols et notamment des servitudes d’utilité publique, y compris les restrictions administratives au droit de construire, sauf sur si leur institution révèle, de la part de l’expropriant, une intention dolosive.
De plus, les terrains qui, à la date de référence indiquée au premier alinéa, ne répondent pas aux conditions de l’article L322-3 du code de l’expropriation sont évalués en fonction de leur seul usage effectif, conformément à l’article L322-2 du code de l’expropriation.
Il en résulte que les conditions cumulatives exigées pour qu’une parcelle soit qualifiée de terrain à bâtir sont, d’une part, une constructibilité juridique attachée aux documents d’urbanisme opposable et, d’autre part, une constructibilité matérielle caractérisée par la desserte effective par l’ensemble des voies et réseaux (d’accès, réseau électrique, potable, réseau d’assainissement).
Or, en l’espèce à la date de référence retenue par la cour du 19 septembre 2019, les parcelles étaient situées en zone A (zone agricole) du PLU de [Localité 80] ; elle est enclavée, n’est desservie par aucune voie ni aucun réseau et est desservie par un chemin rural non équipé.
En conséquence, les conditions cumulatives de l’article L322-3 n’étant pas remplies, la parcelle expropriée ne peut recevoir la qualification de terrain à bâtir et le jugement sera donc confirmé en ce sens.
L’institution d’une date de référence en application de l’article L322-2 du code de l’expropriation est destinée à assurer l’équilibre entre les intérêts des expropriés, à indemniser le préjudice certain, et ceux des expropriants, à protéger la spéculation foncière sur les biens concernés après l’annonce de l’expropriation ; la Cour de cassation a jugé par arrêt du 21 octobre 2010 n° 10-40038 que ne présente pas un caractère sérieux, la question de la constitutionnalité du I de de l’article L13-15 du code de l’expropriation devenu l’article L322-2 dudit code.
En conséquence, la mesure contestée, qui ménage le juste équilibre entre les intérêts en présence, ne constitue pas une atteinte disproportionnée au droit et au respect des biens des appelantes au regard du but légitime poursuivi et il n ‘y a donc pas violation en l’espèce de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Le jugement en considérant que la fixation de cette date de référence au 14 septembre 2019 ne fait pas supporter une charge spéciale et exorbitante constituant une atteinte disproportionnée au droit de propriété sera donc confirmé.
3° sur la qualification de situation privilégiée
Le premier juge a retenu que la parcelle expropriée bénéficie d’une situation très privilégiée, compte tenu de sa localisation, à proximité immédiate de l’actuelle maison d’arrêt de [Localité 82], de zones urbanisées, de l’autoroute A 104, de la route de [Localité 82] et de la D 88.
Cette qualification de situation privilégiée sollicitée à titre subsidiaire par l’indivision [H] n’est pas contestée par l’APIJ et le commissaire du gouvernement.
Le jugement sera confirmé en ce sens.
4° sur l’indemnité principale
A Sur les surfaces
Les superficies retenues par le premier juge ne sont pas contestées par l’indivision [H].
Le jugement sera confirmé en ce sens.
B Sur la situation locative
Aux termes de l’article L 322-1 du code de l’expropriation le juge fixe le montant des indemnités d’après la consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété.
La fixation par le premier juge de l’indemnité de dépossession en valeur occupée, la parcelle expropriée étant louée à usage agricole, n’est pas contestée par l’indivision [H].
Le jugement sera confirmé en ce sens.
C Sur la méthode
Le juge de l’expropriation dispose du pouvoir souverain d’adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.
La méthode par comparaison retenue par le premier juge comme proposée par les parties en première instance n’est pas contestée par l’appelant.
Le jugement sera confirmé en ce sens.
D Sur les références des parties
Après examen des références des parties, le premier juge a fixé en retenant les caractéristiques du bien à évaluer, notamment sa situation très privilégiée a retenu une valeur unitaire de 12,50 euros/m².
Il convient en conséquence d’examiner les références des parties :
a) Les références de l’indivision [H]
A l’appui de sa demande de fixer la valeur unitaire à 40 euros/m², elle invoque à [Localité 80] des cessions de parcelles cadastrées section C[Cadastre 51], C [Cadastre 20] et C [Cadastre 19], une superficie de 13 678 m², à la société SOLIMMO, pour des parcelles situées en zone N, pour 40 euros/m² en valeur occupée, indemnité d’éviction en sus de 3,5 euros/m² :
‘vente du 31 janvier 2019, parcelle C3 [Cadastre 7],5 1624 m², 224 960 euros, soit 40 euros/m²
‘vente du 30 janvier 2019 :
-parcelle C [Cadastre 51],6862 m², 298 497 euros, 43 euros/m² (pièce numéro 3)
-parcelle C[Cadastre 18], 4896 m², 195 840 euros
‘vente du 31 janvier 2019, parcelle C [Cadastre 19], 4924 m² ,196 960 euros, 40 euros/m²
(pièce numéro 4)
‘vente du 4 février 2019, parcelle C[Cadastre 20], 1892 m², 75 680 euros, 40 euros/m²
(pièce numéro 5).
Elle indique que ces valeurs correspondent au marché libre, par opposition au marché captif que subit la commune de [Localité 80] du fait des nombreuses opérations d’aménagement sur son territoire depuis plusieurs années ; que les actes de vente mentionnent effectivement des biens situés en zone N et non des droits à construire, ni une modification de zonage, ni aucune condition suspensive, que la valeur des quatre ventes correspond non à une zone urbanisée mais bien à une zone N.
L’APIJ demande d’écarter ces références en indiquant que l’acquéreur de ces parcelles est la société SOLIMMO, qui est une filiale du groupe PETIT FORESTIER, les deux entités, ayant leur siège social à la même adresse [Adresse 4] à [Localité 82] ; que l’acquisition est destinée, à moyen terme, à permettre une extension du siège du groupe PETIT FORESTIER (pièce numéro 3) après approbation du PLU actuellement en cours et devant permettre le classement ces parcelles en zone Uee à dominante d’activité économique (pièce numéro 4) ; que le prix auquel la société SOLIMMO a acquis ces terrains s’entend d’une valeur d’anticipation sur le passage des parcelles en cause en zone urbaine Uee.
Le commissaire du gouvernement demande également d’écarter ces références qui constituent un micro marché non représentatif du marché réel de la parcelle à évaluer.
Cependant, ces parcelles ne sont pas des terrains à bâtir, étant situées en zone N, à savoir une zone naturelle dans laquelle les seules constructions admises sont restreintes et limitées aux constructions, soit nécessaires à l’ activité agricole, soit nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, à la condition de ne pas être incompatibles avec une activité agricole, de sorte que cette zone ne peut pas être considérée comme une zone constructible.
Ces références comparables sont donc retenues.
Cependant, le premier juge a exactement souligné que ces parcelles bénéficient d’une situation extrêmement privilégiée, étant directement bordées par la route de [Localité 82] de l’autre côté de laquelle se situe une zone pavillonnaire, et qu’elles ont été cédées à une entreprise dont le siège social est situé sur les parcelles voisines et qui dispose d’un intérêt certain à l’acquisition de ces parcelles, justifiant le prix élevé consenti ; que ces éléments constituent un facteur substantiel de plus-value par rapport à la parcelle expropriée.
L’indivision [H] invoque également un acte de vente du 11 avril 2022 pour la parcelle cadastrée section B N°[Cadastre 3] à [Localité 80] située en zone 1AUe, au prix de 600000 euros, soit 129,31 euros/m² (pièce N°17).
Cependant, ce terme n’est pas comparable, étant situé en zone Au (zone urbanisée), alors que la parcelle à évaluer est située à la date de référence en zone A (agricole) ; en outre, l’acquéreur s’est vu délivrer préalablement à la cession un permis de construire définitif autorisant la construction de deux bâtiments composés de 18 entrepôts (pièce 17 : page 20) ; il sera donc écarté.
L’indivision [H] produit également :
– deux actes de ventes concernant des parcelles sises sur le territoire de la commune de [Localité 66] (pièces N°6 et 7).
Cependant, ces cessions du 13 décembre 2016 (pièce N°6) et du 17 décembre 2015 (pièce N°7) datant de plus de 5 ans sont trop anciennes pour être retenues ; en outre, elles se trouvent à [Localité 66], qui est une commune éloignée de [Localité 80], étant située en limite des communes de [Localité 65], [Localité 75], [Localité 72] et de [Localité 64] en Seine et Marne dont le marché n’est pas comparable.
– trois arrêts de la cour d’appel de paris du 24 octobre 2019 (pièce N°11), 25 avril 2013 (pièce N°12) et 15 octobre 2015 (pièce N°13).
Cependant, ces arrêts concernent des parcelles situées en Seine-et-Marne sur les communes de [Localité 78] en zone 1AUb( pièce N°11), sur la commune de [Localité 68] (pièce N°12), concernant une parcelle située en zone 1AUX, à [Localité 81] (77) ( pièce N°13), dans le secteur 4 de Marne-la-Vallée en zone ND valorisée à hauteur de 8 euros/m².
Ces arrêts concernent donc d’autres départements, d’autres communes, et portent sur des emprises dont leur situation d’urbanisme n’est pas comparable ; ils seront donc écartés.
b) Les références de l’APIJ
Elle reprend les références retenues par le premier juge et les références du commissaire de gouvernement de première instance avec les références de publication :
( avec mention par l’appelant des termes avec les N° de première instance dans son tableau)
Date de mutation
Références cadastrales
Surface/m²
Prix/ euros
Prix euros/m²
Zone d’urbanisme
observations
I1
DEM1
14/12/17
CN°[Cadastre 54], ZB N°[Cadastre 55], [Cadastre 13], [Cadastre 56], [Cadastre 21], [Cadastre 58], [Cadastre 36], [Cadastre 53]
106377
744639
7
NL
En réalité
7, 72 euros/m²
I2
DEM2
14/12/17
B N°[Cadastre 11] et [Cadastre 12], ZB N°[Cadastre 28], [Cadastre 34], [Cadastre 49], [Cadastre 50], [Cadastre 52] et [Cadastre 32], CN°[Cadastre 39]
19902
139313
7
Partiellement
occupé
I3
DEM3
27/04/17
ZB N°[Cadastre 26] et [Cadastre 27]
7540
52780
7
Valeur libre
I4
DEM4
06/07/20
C N°[Cadastre 57]
2907
23750
8,17
Valeur libre
I5
06/07/20
C N°[Cadastre 48]
528
4313
9,17
NL
Valeur libre
I6
Accord amiable à expropriation 23/10/2021
AZ N°[Cadastre 10]
1808
9,5
I7
Accord amiable à expropriation
7/11/2021
BC N°[Cadastre 33] BC [Cadastre 15]
724
9,5
I8
DEM8
Cour d’appel de Paris
25/06/2020
RG 19/05776
C N°[Cadastre 37], [Cadastre 42] et [Cadastre 44]
1621
9
N
Valeur occupée
I9
DEM9
Cour d’appel de Paris
25/06/2020
RG 19/08132
ZB N0[Cadastre 30], C N0[Cadastre 35], [Cadastre 38]
2470
9
N
Valeur occupé
I10
DEM11
Cour d’appel de Paris
25/06/2020
RG 19/04297
ZB N°[Cadastre 40], C N°[Cadastre 43]
3562
9
N
Valeur occupée
I11
21/05/2021
AR [Cadastre 7]
[Adresse 9]
[Localité 82]
10000
150000
10,17
A
Acquisition commune
I12
09/03/20
YA [Cadastre 8]
[Adresse 69]
[Localité 82]
4781
80000
12,17
A
Entre particuliers terrain avec hangar
I13
14/09/21
BK [Cadastre 25]
[Adresse 84]
[Adresse 84]/[Localité 74]
3483
34830
10
Uda
Vente commune
L’indivision [H] indique que le premier juge a commis une erreur de calcul dans la détermination du prix /m² des références I11 et I12, alors que le prix au m² est de 15 euros/m² et de 16,73 euros/m².
L’indivision [H] disposant des références de publication n’A pas sollicité les actes de vente ; cependant, au regard des superficies de 10000 m² pour I11, pour un prix de 150000 euros, il convient de retenir 15 euros/m² et pour I12 au regard de la superficie de 4781 m², pour un prix de 80000 euros, il convient de retenir 16,73 euros/m².
Ces références seront examinées ci-après.
L’indivision [H]demande d’écarter :
1° les termes de l’APIJ
I1 : elle indique qu’il s’agit d’un accord obtenu par l’établissement public Terres d’envol qui concerne des parcelles entre personnes publiques, a fortiori des parcelles appartenant à la Région Île de France, qui n’avait aucune raison de refuser de vendre son bien à l’expropriant au prix proposé par celui-ci ; que cette vente à vil prix n’est pas représentative du marché.
La circonstance qu’il s’agisse d’une vente intervenue entre personnes publiques ou au profit d’une personne publique ne justifie pas d’écarter ce terme, les appelants ne démontrant pas que le prix n’est pas représentatif du marché ; ce terme comparable en consistance sera retenu ; il sera cependant tenu compte de l’ancienneté de ce terme.
I2 : elle indique que ce terme est relatif à un accord entre Grand [Localité 76] Aménagement et des expropriés (Région Île de France et des particuliers) concernant des parcelles incluses dans le périmètre de la [Adresse 83].
La circonstance qu’il s’agisse d’une vente intervenue entre personnes publiques ou au profit d’une personne publique ne justifie pas d’écarter ce terme, les appelants ne démontrant pas que le prix n’est pas représentatif du marché ; ce terme comparable en consistance sera retenu ; cependant, il sera tenu compte de l’ancienneté de ce terme.
I3 : elle avance les mêmes motifs que pour le terme I2.
La circonstance qu’il s’agisse d’une vente intervenue entre personnes publiques ou au profit d’une personne publique ne justifie pas d’écarter ce terme, les appelants ne démontrant pas que le prix n’est pas représentatif du marché ; ce terme comparable en consistance sera retenu ; cependant, il sera tenu compte de l’ancienneté de ce terme.
I4 : elle indique que ce terme est relatif à un accord ou l’ETP Terres d’envol acquiert un terrain compris dans le périmètre de la DUP de l’opération d’aménagement du Vallon du Sausset.
La circonstance qu’il s’agisse d’une vente intervenue entre personnes publiques ou au profit d’une personne publique ne justifie pas d’écarter ce terme, les appelants ne démontrant pas que le prix n’est pas représentatif du marché ; ce terme comparable en consistance sera retenu.
I5 : elle avance les mêmes motifs que pour le terme I4.
La circonstance qu’il s’agisse d’une vente intervenue entre personnes publiques ou au profit d’une personne publique ne justifie pas d’écarter ce terme, les appelants ne démontrant pas que le prix n’est pas représentatif du marché ; ce terme comparable en consistance sera retenu .
Les termes I6 et I7 correspondent à des accords d’expropriation ; il ne s’agit pas de ventes effectives ; ces termes ne sont pas représentatifs du marché immobilier locale et seront donc écartés.
Elle indique que les termes de comparaison DEM 8, DEM 9 et DEM 11 concernent la [Adresse 83] et qu’il ressort des jugements qu’il s’agissait de parcelles en zone naturelle, avec des caractéristiques différentes des parcelles expropriées.
Le terme DEM 8 correspond au terme I8.
L’arrêt indique qu’il s’agit comme les terrains à évaluer de terres agricoles ; l’appelante ne démontre pas que la différence de configuration, au demeurant non précisée, constitue un élément de moins value ; ce terme comparable en consistance sera retenu.
Le terme DEM 9 correspond au terme I9.
L’arrêt indique qu’il s’agit comme les terrains à évaluer de terres agricoles ; l’appelante ne démontre pas que la différence de configuration, au demeurant non précisée, constitue un élément de moins value ; ce terme comparable en consistance sera retenu.
Le terme DEM 11 correspond au terme I10.
L’arrêt indique qu’il s’agit comme les terrains à évaluer de terres agricoles ; l’appelante ne démontre pas que la différence de configuration, au demeurant non précisée, constitue un élément de moins value ; ce terme comparable en consistance sera retenu.
2° les termes du commissaire du gouvernement de première instance repris par l’APIJ
Il indique que le premier juge a retenu les 5 termes de comparaison proposés par le commissaire du gouvernement, deux étant identiques à celles de l’expropriant, soit I4 et I5.
Les termes CG1 et CG2 du commissaire du gouvernement correspondant aux termes I4 et 15 ont déjà été retenus.
L’indivision [H] indique que les termes I 11 et I 13 correspondent à des cessions par ou à des communes, [Localité 82] pour le I11 et [Localité 74] pour le I13, étant entendu que le marché de [Localité 74] est moins tendu que celui de [Localité 80].
La circonstance qu’il s’agisse d’une vente intervenue entre personnes publiques ou au profit d’une personne publique ne justifie pas d’écarter ce terme, les appelants ne démontant pas que le prix n’est pas représentatif du marché ; ces termes comparables en consistance seront retenus .
Elle indique que le terme I 12, le plus élevé à 12, 17 euros/m² , s’il n’est pas tenu compte de l’erreur de calcul commis par le juge de l’expropriation, correspond à une vente entre particuliers mais sur le territoire de la commune de [Localité 67] (77), dont la situation géographique est bien moins privilégiée que celle de [Localité 80] et le marché y est moins tendu, ce qui démontre l’insuffisance de l’évaluation réalisée à 12,17 euros/m².
Si la commune de [Localité 67] correspond à un marché immobilier moins tendu, ce terme reste cependant comparable en consistance et il sera donc retenu.
Les termes retenus correspondent à une moyenne de :
7,72+7+7+8,17+9,17+9+9+9+15+16,73+10=112,51euros/11= 10,22 euros/m².
c) les références du commissaire du gouvernement
Il indique que compte tenu de l’importance du nombre de termes aux alentour de 10 euros, les prix de cession des quelques termes à 40 euros constituent par conséquent un micro marché qu’il convient d’écarter n’étant pas représentatif du marché réel de la parcelle à évaluer.
Il demande en conséquence la confirmation de la valeur unitaire à 12,50 euros/m².
Il ne reprend pas les termes du commissaire du gouvernement de première instance et n’en présente pas de nouveaux.
Les termes retenus par la cour correspondent à :
termes de l’indivision [H] : 40 euros/m²
termes de l’APIJ : 10,22 euros/m².
Il convient de tenir compte des facteurs suivants :
– les termes de l’indivision [H] correspondent à des parcelles bénéficiant d’une situation extrêmement privilégiée, ont été cédées à une entreprise qui a un intérêt certain pour l’acquisition, ce qui explique le prix élevé et correspond comme l’indique le commissaire du gouvernement à un micro marché ;
– les termes de l’APIJ correspondent à des termes comparables en consistance et sont homogènes , alors qu’ils portent sur plusieurs secteurs, même s ‘ils sont pour certains anciens ;
– la parcelle à évaluer est en situation très privilégiée ;
– il convient de tenir compte s’agissant des termes de l’APIJ de l’évolution du marché.
En conséquence, le premier juge au vu de ces éléments a exactement retenu une valeur unitaire de 12,50 euros/m².
Il convient donc de confirmer le jugement qui a fixé l’indemnité principale à la somme de 220912, 50 euros se décomposant comme suit :
– 86 375 euros pour la parcelle cadastrée AZ N°[Cadastre 1] ;
– 25 750 euros pour la parcelle cadastrée AZ N°[Cadastre 59] ;
– 108 787,50 pour la parcelle cadastrée AZ N°[Cadastre 23].
5° Sur l’indemnité de remploi
Elle est calculée selon la jurisprudence habituelle comme suit :
– Parcelle AZ N° [Cadastre 1]
– 20% sur 5 000 euros : 1 000 euros
– 15% sur 10 000 euros :1 500 euros
– 10% sur 71 375 euros : 7 137,50 euros
– Soit un total de 9 637,50 euros
Parcelle AZ N° [Cadastre 59]
20% sur 5 000 euros : 1 000 euros
15% sur 10000 euros :1 500 euros
10% sur 10750 euros : 1 075 euros
Soit un total de 3 575 euros.
Parcelles AZ N°[Cadastre 23]
20% sur 5 000 euros : 1 000 euros
15% sur 10 000 euros : 1 500 euros
10 % sur 93787, 50 euros : 9 378, 75 euros
– Soit un total de 11 878, 75euros.
soit une indemnité totale de remploi de 25 091,25 euros
Le jugement sera confirmé en ce sens.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a fixé l’indemnité totale de dépossession à la somme de 246 003,75 euros arrondie à la somme de 246 010 euros se décomposant comme suit :
‘ 220 912,50 euros : indemnité principale
‘ 25 091,25 euros : l’indemnité de remploi
– Sur l’article 700 du code de procédure civile
Il convient de confirmer le jugement qui a condamné l’APIJ à payer à l’indivision [H] la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité commande de débouter l’indivision [H] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
– Sur les dépens
Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance, qui sont à la charge de l’expropriant conformément à l’article L 312-1 du code de l’expropriation.
L’indivision [H] perdant le procès sera condamnée aux dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Statuant dans la limite de l’appel ;
Déclare recevables les conclusions des parties ;
Confirme le jugement entrepris ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Déboute M. [I] [M] [Z] [H], Madame [U] [K] [H], la Société civile immobilière [H], M. [Y] [A] [N] [H], Madame [B] [A] [K] [H], M. [S] [M] [G] [H] et Madame [P] [A] [C] [H] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [I] [M] [Z] [H], Madame [U] [K] [H], la Société immobilière [H], M. [Y] [A] [N] [H], Madame [B] [F] [H], M. [S] [M] [G] [H] et Madame [P] [A] [C] [H] aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT