6 avril 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/06988
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 2
ARRÊT DU 06 AVRIL 2023
(n° , 12 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/06988 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGDUT
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Juillet 2022 -Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de PARIS – RG n° F 19/00829
APPELANTE
Etablissement Public PARIS HABITAT OPH
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Thomas GODEY, avocat au barreau de PARIS, toque : L0305
INTIMÉ
Monsieur [V] [T]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Emilie VIDECOQ, avocat au barreau de PARIS, toque : C2002
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 9 février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant la Cour composée de Mme Marie-Paule ALZEARI, Présidente de chambre et Mme Christine LAGARDE, Conseillère.
un rapport a été présenté à l’audience par Mme Marie-Paule ALZEARI, Présidente de chambre dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Olivier FOURMY, Premier président de chambre
Mme Marie-Paule ALZEARI, Présidente de chambre
Mme Christine LAGARDE, Conseillère
Greffière lors des débats : Mme CAILLIAU Alicia
ARRÊT :
– contradictoire
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile
– signé par Olivier FOURMY, Premier président de chambre et par CAILLIAU Alicia, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. [V] [T] a été engagé par l’établissement public Paris Habitat OPH (ci-après, ‘l’OPH’ ou ‘Paris Habitat’), dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, en date du 15 décembre 2008, en qualité de directeur des ressources humaines et des conditions de travail (classification directeur, catégorie IV, niveau 2).
M. [T] a saisi le conseil de prud’hommes par requête, en date du 30 janvier 2019, aux fins de voir ordonner la revalorisation de son salaire et voir condamner Paris Habitat à diverses sommes à titre de rappel de salaire et de dommages et intérêts.
M. [T] a été convoqué à un entretien préalable en vue de son licenciement par courrier du 15 mars 2019.
Il a été placé en arrêt maladie pour accident du travail le 16 mars 2019.
Il a été licencié par courrier du 1er avril 2019 pour insuffisance professionnelle.
M. [T] a, à nouveau, saisi le conseil de prud’hommes de Paris, par requête en date du 27 août 2019, en contestation de son licenciement.
Les deux affaires ont été jointes.
Par jugement de départage du 6 juillet 2022, le conseil de prud’hommes de Paris a :
– dit que le licenciement de M. [T] est nul ;
– ordonné la réintégration de M. [T] dans le mois suivant le prononcé de la décision sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
– fixé le salaire de M. [T] au regard de la revalorisation accordée et des augmentations annuelles générales aux sommes suivantes :
à compter du 1er janvier 2017 : 10 050 euros
à compter du 1er janvier 2018 : 10 080,15 euros
à compter du 1er janvier 2019 : 10 201,11 euros
à compter du 1er janvier 2020 : 10 303 euros
à compter du 1er janvier 2021 : 11 215,75 euros
à compter du 1er janvier 2022 : 10 457 euros
– fixé la moyenne des 3 derniers mois de salaire à la somme de 11 328 euros ;
– dit n’y avoir lieu à prononcer une astreinte sur la fixation des salaires ;
– condamné Paris Habitat à payer à M. [T] les sommes de :
14 344,53 euros à titre de rappel de salaire de janvier 2017 à juin 2019, outre la somme de 1 434,45 euros au titre des congés payés afférents
4 785,56 euros à titre de rappel de prime d’objectif 2016 et 478,55 euros au titre des congés payés afférents
5 040,07 euros à titre de rappel de prime d’objectif 2018 et 504 euros à titre de congés payés afférents
389 208,60 euros à titre de l’indemnité d’éviction sur la période du 1er juillet 2019 au 25 mai 2022
2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
– dit que les condamnations à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation en bureau de conciliation et celles à caractère indemnitaire, à compter de la décision;
– dit que les intérêts dus pour une année entière se capitaliseront ;
– ordonné la remise des fiches de paie conformes à la décision ;
– dit n’y avoir lieu de prononcer une astreinte ;
– dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire en application de l’article 515 du code de procédure civile ;
– rappelé que le jugement est exécutoire de droit à titre provisoire dans la limite maximum de neuf mois de salaires calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire, cette moyenne étant de 11 328 euros ;
– condamné Paris Habitat à payer à M. [T] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné Paris Habitat OPH aux entiers dépens.
Par déclaration du 26 juillet 2022, la société Paris Habitat a interjeté appel de cette décision.
PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 17 octobre 2022, la société Paris Habitat demande à la cour de :
« I. Les demandes relatives au rappel de salaire
A. A titre principal
‘ CONSTATER que la lettre du 11 avril 2016 ayant pour objet « revalorisation de votre rémunération à compter du mois de janvier 2017 » n’a pas de force contraignante à l’égard des parties ;
‘ CONSTATER qu’aucun avenant au contrat de travail de M. [T] n’est venu formaliser la revalorisation de sa rémunération à compter du mois de janvier 2017 ;
‘ CONSTATER que M. [T] n’a pas dépassé les performances attendues pour l’année 2016 ;
‘ CONSTATER que M. [T] n’a pas dépassé les performances attendues pour l’année 2018 ;
‘ DIRE ET JUGER que M. [T] n’a subi aucun préjudice.
En conséquence,
‘ INFIRMER le jugement du Conseil de Prud’hommes de Paris en ce qu’il a accueilli l’ensemble des demandes de M. [T].
B. A titre subsidiaire
‘ CONSTATER que M. [T] ne démontre pas l’étendu du préjudice qu’il aurait subi’;
En conséquence,
‘ CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud’hommes de Paris en ce qu’il a débouté M.. [T] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail.
II. Les demandes relatives au licenciement
A. A titre principal
‘ CONSTATER les man’uvres frauduleuses de M. [T] pour se créer une protection contre le licenciement ;
‘ CONSTATER que le licenciement notifié à M. [T] repose sur une cause réelle et sérieuse ;
En conséquence,
‘ INFIRMER le jugement du Conseil de Prud’hommes de Paris en ce qu’il a reçu l’ensembles des demandes de M. [T] ;
A titre reconventionnel,
‘ CONDAMNER M. [T] au versement de la somme de 5.000 euros au titre de la procédure abusive.
B. A titre subsidiaire
‘ CONSTATER l’absence de démonstration de son préjudice par M. [T],
En conséquence,
‘ LIMITER la condamnation de Paris Habitat au versement du montant minimum de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail soit la somme de 28.944,12 euros.
C. A titre infiniment subsidiaire
‘ CONSTATER que la réintégration de M. [T] au sein de Paris Habitat ferait courir des risques psychosociaux importants à ses collaborateurs ;
En conséquence :
‘ AMENAGER les conditions de réintégration de M. [T] au sein de Paris Habitat.
III. En tout état de cause
‘ INFIRMER le jugement du Conseil de Prud’hommes de Paris en ce qu’il a accueilli la demande de M. [T] et par conséquent condamné Paris Habitat au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
‘ CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud’hommes en ce qu’il a débouté M. [T] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudices complémentaires ;
‘ CONDAMNER M. [T] à verser à Paris Habitat la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
‘ INFIRMER le jugement du Conseil de Prud’hommes de Paris en ce qu’il a accueilli la demande de M. [T] et condamné Paris Habitat aux entiers dépens ;
‘ CONDAMNER M. [T] aux entiers dépens. »
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 5 janvier 2023, M. [T] sollicite la cour de :
« 1/ CONFIRMER le jugement en ce qu’il a :
Fixé le salaire de M. [V] [T] au regard de la revalorisation accordée et des augmentations annuelles générales aux sommes suivantes :
– à compter du 1er janvier 2017 : 10 050 €
– à compter du 1er janvier 2018 : 10 080,15 €
– à compter du 1er janvier 2019 : 10 201,11 €
– à compter du 1er janvier 2020 : 10 303 €
– à compter du 1er janvier 2021 : 10 215,75 €
– à compter du 1er janvier 2022 : 10 457 €
Y ajoutant, FIXER le salaire de M. [T] à compter du 1er juillet 2022, à la somme de 10 614 €
Condamné PARIS HABITAT OPH à payer à M. [V] [T] les sommes suivantes :
– 14 344,53 € à titre de rappel de salaire de janvier 2017 à juin 2019, outre la somme de 1434,45 € au titre des congés payés afférents ;
– 4 785,56 € à titre de rappel de prime d’objectif 2016 ;
– 478,55 € au titre des congés payés afférents ;
– 5 040,07 € à titre de rappel de prime d’objectif 2018 ;
– 504 € à titre des congés payés afférents ;
2/ CONFIRMER le jugement en ce qu’il a condamné PARIS HABITAT OPH pour exécution déloyale du contrat de travail mais l’infirmer sur le quantum et condamner PARIS HABITAT à payer à ce titre à M. [T] la somme de 10 000 € ;
3/ CONFIRMER le jugement en ce qu’il a jugé le licenciement de M. [T] nul sur le double fondement de la violation du droit d’agir en justice et de la protection au titre de l’accident du travail ;
CONFIRMER en conséquence le jugement en ce qu’il a ordonné la réintégration de M. [V] [T], et l’assortir d’une astreinte portée à 1000 € par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;
REJETER la demande de PARIS HABITAT OPH au titre d’un aménagement de la réintégration s’analysant en un refus de réintégrer ;
CONFIRMER le jugement en ce qu’il a condamné PARIS HABITAT OPH au paiement d’une indemnité d’éviction depuis le 1er juillet 2019, sans déduction des revenus de remplacement perçus, soit la somme de (arrêtée au 9 février 2023) :
– A titre principal : 486 737,60 €
– A titre subsidiaire : 455 967,62 €
Subsidiairement, en cas de licenciement jugé nul sur le seul fondement de la violation de la protection des accidentés du travail, CONDAMNER PARIS HABITAT OPH au titre de l’indemnité représentative des salaires dus entre l’éviction et la réintégration au paiement de la somme suivant (arrêtée au 9 février 2023)’:
– A titre principal : 193 246,60 €
– A titre subsidiaire : 162 476,62 €
CONDAMNER en outre PARIS HABITAT OPH en réparation des préjudices complémentaires résultant de la nullité du licenciement à payer à M. [T] la somme de 100 000 € ;
A titre infiniment subsidiaire,
JUGER, que le licenciement de M. [T] est sans cause réelle et sérieuse et CONDAMNER, en conséquence, sur le fondement de l’article L.1235-3 du Code du travail, PARIS HABITAT OPH à payer à M. [T] au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de :
– A titre principal : 110 512 €
– A titre subsidiaire : 105 304,30 €
4/ CONFIRMER le jugement en ce qu’il a ordonné à PARIS HABITAT OPH de remettre à M. [T] des bulletins de paie conformes (intégrant l’affiliation à la retraite complémentaire Ircantec) depuis décembre 2016 ;
5/ JUGER irrecevable la demande reconventionnelle de PARIS HABITAT OPH sur le fondement de la procédure abusive, et en tout état de cause la JUGER mal fondée et l’en DEBOUTER ;
6/ DIRE que les condamnations porteront intérêts au taux légal avec capitalisation des intérêts en application de l’article 1154 du code civil ;
8/ CONDAMNER PARIS HABITAT OPH au titre de l’article 700 du CPC à payer à M. [T] la somme de 5000 € s’ajoutant à la condamnation prononcée à ce titre en première instance, DEBOUTER PARIS HABITAT OPH de sa demande à ce titre formulée contre M. [T] et CONDAMNER PARIS HABITAT OPH aux entiers dépens ».
L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 février 2023.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Sur les demandes relatives à la rémunération
Sur le rappel de salaire sur la base de 10 000 euros mensuels bruts outre les augmentations générales annuelles
Paris Habitat soutient notamment qu’il n’avait pas connaissance de la revalorisation salariale de M. [T] puisque ce dernier n’aurait jamais averti la nouvelle direction de l’engagement qu’avait pris l’ancienne secrétaire générale d’une augmentation qui devait trouver à s’appliquer à compter du 1er janvier 2017.
D’autre part, aucun avenant au contrat de travail de M. [T] n’a été conclu visant à formaliser la revalorisation de sa rémunération. En l’absence d’un tel avenant, l’engagement pris par l’ancienne secrétaire générale le 11 avril 2016 n’a aucune force contraignante à l’égard des parties.
Enfin, M. [T] a évoqué cette revalorisation pour la première fois lors d’une discussion avec Mme G., directrice générale adjointe innovation, ressources humaines et numériques, le 30 janvier 2019, soit près de trois ans après l’engagement pris par l’ancienne direction.
En réponse, M. [T] fait notamment valoir que l’engagement pris par l’ancienne direction est définitif et a force obligatoire, de telle sorte que la nouvelle direction était tenue de le reprendre.
Sur ce,
Il résulte des pièces versées aux débats et des conclusions des parties qu’il est constant que M. [T] a reçu un courrier, daté du 11 avril 2016, signé de Mme F. B., secrétaire générale de l’OPH, ayant pour objet « revalorisation de votre rémunération à compter du mois de janvier 2017 » et se lisant notamment : « Pour faire suite à nos différents échanges et après validation par la Direction générale, l’établissement portera votre salaire de base à 10 000€ bruts à compter du mois de janvier 2017 » (souligné par la cour).
C’est donc à juste titre que le premier juge a fixé à 10 000 euros bruts, à compter du mois de janvier 2017, le salaire de M. [T].
En effet, outre que les fonctions de secrétaire générale plaçaient Mme F. B. à un poste plus haut niveau de la hiérarchie de Paris Habitat, il résulte des termes mêmes de ce courrier que la direction générale avait donné son accord.
Il n’appartenait certainement pas à M. [T] de le vérifier, la signature de la secrétaire générale suffisant à engager l’Office (il n’est d’ailleurs pas allégué que ce ne serait pas le cas).
Par ailleurs, l’argument selon lequel, faute d’avenant, cette proposition de fixation du salaire ne trouverait pas à s’appliquer, aux motifs que la rémunération contractuelle d’un salarié constitue un élément contractuel qui ne peut être modifié sans son accord, de même que la rémunération contractuelle ou le mode de rémunération, qui ne peuvent donc être modifiés sans son accord, peu important que l’employeur prétende que le nouveau mode serait plus avantageux, est inopérant.
En effet, il ne s’agissait ici ni de modifier la rémunération (laquelle ne se limite pas au salaire mais comprend également, le cas échéant, primes, intéressement, participation et autres) ni de changer le mode de rémunération (le cas typique étant le maintien global d’une rémunération mais par réduction du salaire et augmentation des primes).
Il s’agissait d’augmenter le salaire, sans aucune contrepartie de la part du salarié.
Dès lors, l’accord de celui-ci n’était pas nécessaire et, au demeurant, en réclamant l’application de cet engagement unilatéral de son employeur, M. [T] a signifié sans aucune ambiguïté son accord pour la modification proposée unilatéralement par son employeur.
Dès lors, la décision du premier juge en ce qui concerne la fixation des salaires de M. [T] à compter du 1er janvier 2017 sera confirmée.
Sur les rappels de prime d’objectifs pour 2016 et 2018
Selon Paris Habitat, seules les performances supérieures ou très supérieures aux attentes permettent aux salariés d’être éligibles au versement de la prime d’objectifs.
Pour l’année 2016, si M. [T] a réalisé une performance conforme aux attentes, cela ne justifiait pas le versement de la prime d’objectifs 2016.
Pour l’année 2018, M. [T] n’a pas atteint les objectifs déterminés par Mme G. en date du 26 janvier 2018. A cet égard, la société précise que, contrairement aux dires de M. [T], les objectifs ont été portés à sa connaissance de manière transparente et précise et étaient réalisables par ce dernier au regard de ses fonctions et de son ancienneté.
Dans ces conditions, Paris Habitat conclut qu’il n’y a pas lieu de lui verser les primes d’objectifs 2016 et 2018.
En réponse, s’agissant de la prime d’objectifs 2016, M. [T] soutient qu’il a eu une performance très supérieure aux attentes car il aurait dépassé l’objectif de maîtrise du budget. S’agissant de la prime d’objectifs 2018, il fait valoir que les objectifs qui ont été fixés ne lui ont pas été communiqués et qu’au demeurant, ces objectifs n’étaient pas précis, objectifs et réalisables. Les deux primes d’objectifs auraient donc dû lui être versées.
Sur ce,
C’est par de justes motifs, que la cour approuve, que le premier juge a décidé que les primes d’objectif pour 2016 était due par Paris Habitat à M. [T].
D’une manière générale, il appartient à l’employeur de déterminer un mécanisme d’attribution de prime qui permette au salarié, comme éventuellement au juge, de vérifier si elle est due.
L’OPH affirme que seules les performances supérieures ou très supérieures aux attentes permettent aux salariés d’être éligibles au versement de la prime d’objectifs.
Encore faut-il que les notions de ‘performance supérieure’ ou ‘performance très supérieure’ puisse être déterminées avec un minimum de précision et qu’au demeurant, le salarié ait été mise en position de connaître cette limitation à son droit à prime.
La note du 9 octobre 2018, à laquelle se réfère l’OPH pour justifier sa position, ne fournit aucune précision à cet égard et, en tout état de cause, ne pourrait être applicable à l’année 2016.
Il faut dès lors se reporter à l’objectif principal fixé pour 2016, qui était celui d’une réduction des ‘frais de personnel’.
En l’occurrence, la réduction a été de 6% pour un montant final total de plus de 162,5 millions d’euros, soit une réduction de plus de 10,5 millions d’euros.
Aucune autre condition n’était posée.
Force donc est de constater, alors que ce montant est loin d’être négligeable, qui correspond sans doute à une réduction de personnel (ce qui pourrait expliquer par ailleurs les tensions au sein de la DRH telles que dénoncées par plusieurs salariés), que l’objectif est atteint dans des conditions qui justifient l’attribution de la prime, l’OPH n’apportant aucun élément, autre que la considération générale rappelée ci-dessus, pouvant permettre de s’y opposer.
La décision entreprise est donc confirmée pour la prime 2016.
Il n’en va pas de même pour la prime d’objectif 2018.
En effet, des objectifs ont été fixés à M. [T] le 26 janvier 2018, il les a contestés pour partie dès le 1er février. La direction a maintenu ses attentes, M. [T] a répliqué le 5 février 2018.
Aucun accord express n’est donc intervenu sur la fixation des objectifs, dont le rappel fait par l’OPH dans ses conclusions montre au demeurant combien ils étaient nombreux, et tous qualitatifs à l’exception de celui relatif à la maîtrise de la masse salariale, mais il n’en demeure pas moins que M. [T] n’ignorait rien des objectifs qui lui étaient assignés par son employeur.
M. [T] procède par affirmation mais ne démontre pas que l’objectif de maîtrise de la masse salariale a été atteint, la seule valeur vérifiable, certes en novembre 2018, conduisant à constater une baisse inférieure à celle attendue.
S’agissant du 1er objectif, relatif à l’employabilité et à la mobilité, si la cour entend l’objection de M. [T] qu’il est difficile de motiver les salariés à cet égard si peu de possibilités sont offertes, il n’en demeure pas moins que le ‘powerpoint’ produit quant à la mobilité ne l’a été que l e 24 octobre 2018, à l’occasion d’une ‘réunion d’information des encadrants’, ce qui ne répond pas au but recherché. La production du courriel d’une collaboratrice, en date du 22 octobre 2018, auquel est joint un « tableau de suivi du recrutement » n’est pas davantage de nature à satisfaire l’objectif relatif à l’employabilité et à la mobilité.
Dès lors, il n’est pas besoin d’entrer plus avant dans la discussion relative aux autres objectifs, pour constater que deux objectifs sur lesquels M. [T] n’avaient pas (sauf la réserve minime mentionnée plus haut) présenté d’observation n’ont pas été atteints alors qu’il n’est pas contesté qu’ils présentaient une importance certaine.
La cour relève que, en sa qualité de DRH, M. [T] n’ignore rien de ce qui concerne les objectifs et la manière de les apprécier.
La prime 2018 n’était donc pas due et la décision du premier juge sera infirmée sur ce point.
Sur l’exécution fautive et déloyale du contrat de travail
La société Paris Habitat soutient en particulier que M. [T] ne démontre pas le préjudice qu’il aurait subi du fait de la non-attribution des primes de 2016 et 2018 et de l’absence de revalorisation de sa rémunération.
M. [T] réplique que Paris Habitat a fait preuve de déloyauté car il n’a pas exécuté ses obligations, notamment en refusant d’appliquer la revalorisation salariale qui lui avait été promise et de lui verser les primes sur objectifs 2016 et 2018. Il fait valoir que cette déloyauté est d’autant plus caractérisée que la société n’a pas répondu à ses réclamations. Ce faisant, il a été injustement privé de l’intégralité du salaire dû mensuellement depuis janvier 2017 et des primes d’objectifs. Il sollicite à ce titre la somme de 10 000 euros à titre de dommages intérêts.
M. [T] prétend également subir un préjudice moral en raison du non-versement des primes, ce qui selon lui constitue un grief particulièrement vexatoire pour un DRH.
Sur ce,
Il résulte des considérations qui précèdent que M. [T] n’a pas bénéficié de la revalorisation salariale qui lui avait été promise non plus que de la prime 2016 qui lui était due.
La rémunération constitue un élément essentiel de la relation entre un employeur et un salarié, étant rappelé, si besoin était, que le salaire présente un caractère alimentaire.
Certes, le montant conséquent du salaire de M. [T] ne permet pas de considérer que le refus d’augmentation auquel il a été confronté lui a porté un préjudice matériel considérable mais ce refus constitue, sans même parler du non-paiement de la prime 2016, dont l’appréciation est nécessairement plus délicate, une exécution déloyale du contrat de travail qui lui a causé un préjudice moral, dont il est fondé à demander réparation.
La cour note que, pour se déterminer quant au dommage résultant de cette exécution déloyale, le premier juge a inclus la nullité du licenciement, qu’il retenait par ailleurs.
Ce n’est pas ainsi que M. [T] présente sa demande, qu’il limite expressément au non versement de l’intégralité des salaires dus et du non-versement de deux primes.
Pour tenir compte de l’ensemble de ces éléments, l’OPH sera condamné à payer à M. [T] la somme de 1 500 euros à titre de dommages intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, la décision du premier juge étant réformée sur ce point.
Sur les demandes relatives au licenciement de M. [T] notifié le 1er avril 2019
En premier lieu, Paris Habitat rappelle que l’insuffisance professionnelle s’entend de l’incapacité du salarié à exécuter correctement sa prestation de travail qui, sans être fautive, peut se caractériser par le défaut d’accomplissement d’un certain nombre de missions. L’insuffisance professionnelle se définit comme l’incapacité objective et durable d’un salarié d’exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification.
S’agissant d’un salarié disposant de responsabilités importantes ou d’une expertise particulière, la société Paris Habitat rappelle que les juges ont validé le licenciement pour insuffisance professionnelle en considération du « manque de travail, d’implication et de réactivité, malgré les mises en garde du manager dont le salarié n’a pas tenu compte » après avoir relevé que l’intéressé n’avait pas rempli ses objectifs (Cass. Soc. ; 24 sept. 2015, n°14-15656).
Il est également de jurisprudence constante qu’un comportement managérial inadapté engendrant une démotivation du personnel et de l’absentéisme justifie un licenciement pour insuffisance professionnelle.
En l’espèce, M. [T] a fait preuve d’un comportement managérial inadapté. Selon une enquête interne menée par la société, les collaborateurs du service des Ressources Humaines ont qualifié le climat régnant au sein du service de M. [T] comme étant « anxiogène », « très tendu », « difficile » et n’ont pas hésité à utiliser les termes de ‘climat de peur’. Le management de M. [T] est décrit comme étant « autoritaire », « dictatorial » et il utiliserait les failles de la personne pour « dominer, humilier ». Les collaborateurs ont également fait état des difficultés qu’ils rencontraient dans l’exercice de leurs missions en raison du manque d’écoute de M. [T]. A cet égard, Paris Habitat produit plusieurs attestations de collaborateurs afin d’illustrer l’attitude irrespectueuse de M. [T].
De fait, M. [T] s’est illustré dans une incapacité durable à occuper de façon satisfaisante le rôle de directeur des ressources humaines. A cet égard, la société soutient que M. [T] n’a jamais mis en ‘uvre les pistes qui avaient été identifiées lors d’une réunion en date du 8 mars 2018 aux fins d’améliorer la politique sociale. Le diagnostic de la direction des ressources humaines qui avait été réalisé par la société ConvictionsRH à compter du 10 décembre 2018 a fait état des mêmes problématiques que celles évoquées lors de la réunion du 8 mars 2018. En outre, M. [T] n’a pas rempli certains objectifs qui lui ont été assignés au titre de l’année 2018.
Enfin, au visa de l’article 9 du code de procédure civile, la société Paris Habitat soutient que les pièces n°64 à 70 produites par M. [T] ont été établies postérieurement aux faits et ne respectent pas le principe de loyauté probatoire.
Paris Habitat conclut que, dans ces conditions, le licenciement de M. [T] pour insuffisance professionnelle est fondé.
En second lieu, la société Paris Habitat conteste la réalité de l’accident du travail de M. [T] survenu le 25 mars 2019 et la mesure de rétorsion à son action en justice.
Tout d’abord, M. [T] dit avoir été victime « d’un choc psychologique à la suite d’un entretien disciplinaire » sans pour autant apporter un quelconque élément de nature à caractériser un accident de travail. Le certificat médical initial, daté du 26 mars 2019, qui ne repose sur les seules déclarations de M. [T], a été établi le lendemain de l’entretien préalable au licenciement qui s’est tenu le 25 mars 2019. La réalité de cet accident du travail a d’ailleurs été contestée devant le tribunal judiciaire de Paris.
Ensuite, l’OPH fait valoir qu’il n’a pas méconnu le droit du salarié d’ester en justice et qu’aucune mesure de rétorsion n’a été prise.
En fait, cinq salariées ont adressé un mail à Mme G. dans lequel elles alertaient la direction sur le mode de management adopté par M. [T] qu’elles qualifiaient « d’agressif, injuste et irrespectueux ». Cette alerte est antérieure à la requête introduite par M. [T] devant le conseil de prud’hommes de Paris le 30 janvier 2019 aux fins d’obtenir un rappel de salaire. En outre, la société explique qu’elle a eu connaissance de l’action en justice de M. [T] le 8 février 2019, date de la réception de la lettre de convocation.
Par ailleurs, le 6 février 2019, Mme G. a reçu un mail d’une autre salariée lui faisant part de son mal-être en raison de l’attitude de M. [T] à son encontre. C’est dans ce contexte que la société a décidé de diligenter une enquête interne et a décidé de licencier le salarié au regard des résultats de l’enquête.
L’OPH conclut que le licenciement de M. [T] ne s’analyse donc pas en une mesure de rétorsion à son action en justice concernant le rappel de salaire. La lettre de licenciement repose sur des motifs caractérisant une insuffisance professionnelle et ne fait aucune mention de l’action en justice initiée par le salarié.
En réponse, M. [T] soutient notamment que son licenciement est nécessairement nul car il est intervenu alors qu’il était en arrêt pour accident du travail. A cet égard, il rappelle que l’arrêt pour accident du travail est intervenu le lendemain de l’entretien préalable de licenciement du 25 mars 2019 et qu’il a transmis son arrêt par courriel du 27 mars 2019. Il précise que la société et d’autres collaborateurs ont accusé réception de ce courriel. Dès lors, l’OPH avait eu connaissance de son accident du travail au jour de la notification du licenciement au 1er avril 2019.
Le licenciement est également nul au motif que l’OPH aurait méconnu son droit d’agir en justice. Il rappelle avoir saisi le conseil de prud’hommes de Paris de plusieurs demandes de rappels de salaires, ce dont il a informé la société par lettre du 30 janvier 2019. Il explique ensuite que la société a décidé de diligenter une enquête mettant en cause son comportement auprès du personnel. A cet égard, M. [T] soutient que l’enquête a été menée exclusivement à charge contre lui puisque d’une part, elle aurait été diligentée par Mme G. seulement sans aucune concertation avec le CHSCT ni le médecin du travail ou l’inspection du travail, et d’autre part, il n’aurait jamais été entendu dans le cadre de cette enquête. En fait, il ressort de la chronologie des faits et des pièces qu’il verse aux débats que son licenciement a été prononcé en réaction de son action en justice.
Sur ce,
M. [T] démontre, pas les pièces qu’il produit, que l’OPH était informé, au plus tard le 4 février 2019, de la saisine du conseil de prud’hommes par ce salarié, pour obtenir notamment, paiement du rappel de salaire sur base d’un mensuel brut de 10 000 euros, d’un rappel de primes d’objectifs pour 2016 et 2018, d’un demande de dommages intérêts pour exécution fautive du contrat de travail à hauteur de 10 000 euros, en outre une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Mme G. A d’ailleurs adressé un courriel à M. [T], dès le 7 février 2019, lui proposant notamment de faire droit à sa demande de rappel de salaires mais pas à sa demande de primes.
Dans cette perspective, il n’est pas possible de considérer que le licenciement serait nul pour violation du droit d’agir en justice.
La cour n’approuve donc pas le premier juge sur ce point.
En revanche, la lettre de convocation à un entretien préalable est datée 15 mars 2018 (lire : 2019) pour un entretien devant se tenir le 25 mars, en vue d’une éventuelle mesure de licenciement.
Or, le 26 mars 2019, M. [T] a été placé par son médecin généraliste en arrêt de travail pour accident du travail. Si le document adressé à l’employeur ne contenait évidemment pas le motif de cet arrêt, la cour peut observer que sur l’exemplaire destiné au salarié, il est mentionné un syndrome dépressif réactionnel.
L’arrêt de travail a été reçu au plus tard le 28 mars par l’employeur, puisqu’une employée va s’en étonner : « Mais nous (…) n’avons pas fait de déclaration. Apparemment, les déclarations peuvent se faire directement par le salarié. As-tu fait un truc’ Si tu souhaites que nous le faisions, il faudra que tu nous fournisses les circonstances de l’accident » (sic).
L’OPH ne craint pas d’écrire qu’ « (a)ucune réponse n’a été apportée à cet e-mail » alors que l’employeur ne saurait exiger de son salarié de justifier de la nature de la pathologie pour laquelle il bénéficie d’un arrêt de travail. Libre à l’employeur, s’il le souhaite, de contester le caractère professionnel de cet arrêt.
En tout état de cause, peu important la formulation de ce courriel, et sans qu’il soit question ici de prendre parti pour confirmer le caractère professionnel ou non de la pathologie du salarié, la cour doit relever que le licenciement a été prononcé alors que l’employeur savait que le salarié se trouvait en arrêt pour accident du travail.
Il importe peu que la coïncidence entre la perspective d’un licenciement et l’arrêt maladie puisse apparaître à certains troublante, le fait demeure que, pendant la période entre l’entretien préalable et la lettre de licenciement, M. [T] a été arrêté par son médecin pour accident du travail et son employeur en avait connaissance.
L’OPH n’apporte pas la démonstration de la fraude à l’arrêt de travail, en tout cas à son motif professionnel, qu’elle allègue.
Le licenciement est donc nécessairement nul par violation des dispositions de l’article L. 1132-1 du code du travail.
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur les demandes indemnitaires formulées par M. [T]
A titre principal, Paris Habitat soutient que le licenciement de M. [T] est fondé sur des éléments objectifs, circonstanciés et précis. Dès lors, il conclut au débouté de ses demandes indemnitaires relatives à son licenciement.
A titre subsidiaire, si la cour estime que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, elle condamnera l’OPH à ne verser à M. [T] que la somme de 28 944,12 euros, correspondant à trois mois de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (9 648,04 x 3).
A titre infiniment subsidiaire, si la cour estime que le licenciement est nul, il convient qu’elle aménage la réintégration de M. [T]. En effet, la réintégration de M. [T] à son poste de directeur des ressources humaines et des conditions de travail dans un tel contexte ferait courir des risques psychosociaux importants à ses collaborateurs et entraînerait un climat social tendu.
En réponse, M. [T] conteste les faits de harcèlement moral qui lui sont reprochés qui, d’après lui, ont été brandis de manière déloyale par la direction pour asseoir son licenciement après qu’il avait saisi le conseil de prud’hommes de Paris d’une demande de rappel de salaires. En conséquence de la nullité du licenciement, il sollicite sa réintégration au sein de l’entreprise, que n’empêche aucun obstacle sérieux.
Sur ce,
Le salarié dont le licenciement est déclaré nul et qui demande sa réintégration a droit au paiement d’une somme correspondant au salaire dont il a été privé au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, compte étant tenu des revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période.
M. [T] a bénéficié d’un nouveau contrat de travail à compter du 6 janvier 2020.
Compte tenu de la revalorisation du salaire brut auquel il pouvait prétendre, ainsi que décidé plus haut, et le calcul opéré par le conseil de M. [T] n’étant pas autrement contesté, il sera alloué la somme de 293 491 euros pour la période du 1er juillet 2019 au 31 décembre 2022.
L’OPH sera condamné à remettre à M. [T] des bulletins de paie conformes depuis décembre 2016.
Il n’y a pas lieu d’autoriser l’aménagement de la réintégration de M. [T], qui est de droit, quand bien même l’OPH produit des attestations émanant de certains salariés disant appréhender un tel retour.
La cour observera, cependant, que compte tenu de l’ancienneté du litige, de ce que M. [T] a retrouvé un emploi, certes moins bien rémunéré, semble-t-il et de l’ensemble des circonstances ayant conduit au licenciement annulé, il eût été opportun que des demandes subsidiaires eussent été formulées et il reste, en tout cas, opportun qu’un rapprochement s’opère entre les parties sur cette question, compte notamment tenu des sommes allouées à M. [T] par la présente décision.
La cour dira n’y avoir lieu à prononcer une astreinte.
Sur la demande de dommages intérêts pour préjudices complémentaires
M. [T] fait notamment valoir à cet égard qu’outre son caractère nul, le licenciement a été brutal et vexatoire. Sa réputation professionnelle a été entachée, une enquête interne a été menée non contradictoirement. Il lui a été prescrit des anxiolytiques.
Paris Habitat réplique que M. [T] ne « démontre pas quel serait le prétendu préjudice moral qu’il aurait subi ».
Sur ce,
La cour doit relever que M. [T] ne démontre aucun préjudice qui ne serait déjà réparé par l’allocation des sommes précisées ci-dessus et par sa réintégration (ou l’indemnisation éventuelle de sa non-réintégration dans l’hypothèse de l’accord entre les parties suggéré ci-dessus).
M. [T] sera donc débouté de sa demande d’indemnisation complémentaire,
Sur la demande d’exécution provisoire qu’aurait formulée M. [T]
Au visa de l’article 515 du code de procédure civile, Paris Habitat soutient que l’exécution provisoire n’apparaît pas nécessaire.
Sans qu’il soit besoin de rentrer dans le détail des arguments de l’OPH à cet égard, la cour ne peut qu’observer que M. [T] n’a pas formé une telle demande et qu’en tout état de cause, le présent arrêt est exécutoire quand bien même un pourvoi serait formé.
Sur la condamnation de M. [T] au titre de la procédure abusive
Là encore, il n’est pas besoin pour la cour de rappeler les arguments des parties.
Il suffit de souligner qu’une demande au titre d’une procédure abusive formée par une partie à l’encontre d’une autre partie ne peut être formée, par principe, sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile, dont l’initiative revient au juge seul.
Cette disposition peut encore moins servir à fonder une demande de dommages intérêts.
La demande de l’OPH est donc irrecevable outre que, compte tenu de ce qui précède, à la supposer recevable, elle ne saurait aboutir.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
L’OPH, qui succombe à l’instance pour l’essentiel, sera condamné aux dépens d’appel.
Il sera condamné à payer à M. [T], en cause d’appel, une somme de 2 500 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement, en date du 6 juillet 2022, du conseil de prud’hommes de Paris, sauf en ce qui concerne la prime pour l’année 2018, le montant des dommages intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et le montant de l’indemnité d’éviction ;
Statuant à nouveau sur ces points et y ajoutant,
Fixe à la somme de 10 614 euros le montant du salaire brut à compter du 1er janvier 2023 ;
Déboute M. [V] [T] de sa demande du paiement de la prime 2018 ;
Condamne Paris Habitat OPH à payer à M. [T] la somme de 1 500 euros à titre de dommages intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
Fixe à la somme de 293 491 euros le montant total de l’indemnité d’éviction pour la période du 1er juillet 2019 au 31 décembre 2022 ;
Condamne Paris Habitat OPH à payer à M. [T] la somme de 293 491 euros à titre d’indemnité d’éviction ;
Déboute M. [T] de sa demande de dommages intérêts complémentaire au titre du licenciement ;
Rappelle que la réintégration de M. [T] a été ordonnée ;
Rappelle que Paris Habitat OPH doit délivrer à M. [T] des bulletins de paie conformes aux décisions judiciaires intervenues ;
Déboute M. [T] de sa demande d’assortir l’ordre de sa réintégration à une astreinte ;
Rappelle que les condamnations pécuniaires porteront intérêt comme précisé par le jugement et ordonne la capitalisation des intérêts ;
Décide qu’est irrecevable la demande de Paris Habitat OPH de condamnation de M. [T] pour procédure abusive sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile ;
Condamne Paris Habitat OPH aux dépens d’appel ;
Condamne Paris Habitat OPH à payer à M. [T] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel ;
Déboute les parties de toute demande autre, plus ample ou contraire.
La greffière, Le président,