Indemnité d’éviction : 4 novembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 18/07532

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Indemnité d’éviction : 4 novembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 18/07532

4 novembre 2022
Cour d’appel de Lyon
RG
18/07532

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 18/07532 – N° Portalis DBVX-V-B7C-L744

[Z]

C/

[T]

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Tribunal paritaire des baux ruraux de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE

du 28 Septembre 2018

RG : 5116000004

COUR D’APPEL DE LYON

BAUX RURAUX

ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2022

APPELANT :

[V] [Z]

né le 19 Janvier 1978 à [Localité 19] ([Localité 19])

[Adresse 18]

[Localité 6]

représenté par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, ayant pour avocat plaidant Me François ROBBE, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE,

INTIMÉE :

[X] [T]

née le 24 Mai 1965 à [Localité 20]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me Benoît MEILHAC, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE

PARTIE INTERVENANTEES :

COMMUNAUTE D’AGGLOMERATION DEL’OUEST RHODANIEN venant aux droits de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DU PAYS D’AMPLEPLUIS

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, ayantpour avocat plaidant: Me Sylvain FLICOTEAUX de la SELARL DELMAS FLICOTEAUX, avocat au barreau de LYON,

SCP MARTIN-RIVOIRE [L] FONTAINE – NOTAIRES ASSOCIES

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Roger TUDELA de la SAS TUDELA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant:Me Jean-jacques RINCK, avocat au barreau de LYON substitué par Me Maïlys FERRANDA, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 16 Septembre 2022

Présidée par Catherine CHANEZ, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Ludovic ROUQUET, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Béatrice REGNIER, président

– Catherine CHANEZ, conseiller

– Régis DEVAUX, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 04 Novembre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Béatrice REGNIER, Président et par Ludovic ROUQUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié du 25 octobre 2002 reçu par maître [I], notaire associé membre de la SCP [N] [I], Patrick Auray, Jean-Claude Billet et Nathalie Martin-Rivoire, Mme [E] [T] et sa fille, Mme [X] [T] ‘ ont consenti à M. [Z] un bail à ferme d’une durée de 9 ans, courant à compter du 1er octobre 2002, portant sur des parcelles sises sur la commune d’Amplepuis, Lieudit Rebe, ainsi que sur divers bâtiments à usage d’habitation et à usage agricole sis sur les dites parcelles. Le bail a été régulièrement reconduit.

Les parcelles étaient réparties en 3 îlots :

îlot A : A 218, A 219, A 383,

îlot B : A370, A404, A356 à 358, A306, A316),

îlot C : A333.

Il est précisé dans le bail que 5 parcelles sont « mises à disposition du preneur à titre précaire, en vertu de l’article L411-2 du code rural », à savoir les parcelles [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10] et [Cadastre 11].

Suite à division, la parcelle [Cadastre 9] est devenue [Cadastre 12] et [Cadastre 13] et la parcelle [Cadastre 11] est devenue [Cadastre 16], puis [Cadastre 14] et [Cadastre 15].

Le 30 juin 2010, suivant acte reçu par maître [M] [L], notaire associé membre de la SCP Jean-Claude Billet, Nathalie Martin-Rivoire, [M] [L] et Bertrand Roumaneix, Mme [X] [T] a vendu les parcelles [Cadastre 13], [Cadastre 14] et [Cadastre 15] à la communauté de communes du pays d’Amplepuis-Thizy.

Par acte extrajudiciaire du 27 avril 2015, Mme [X] [T], désormais seule bailleresse suite au décès de sa mère, a adressé au preneur une première sommation de payer les fermages, visant les 11 parcelles.

Le conseil de M. [Z] a écrit à Mme [T] le 23 décembre 2015 pour soutenir que le bail rural n’avait pas respecté les dispositions de l’article L411-2 du code rural et que l’occupation des parcelles [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10] et [Cadastre 11] n’avait rien de précaire puisqu’elle avait perduré tout au long du bail initial et même au-delà et que l’intéressée avait elle-même demandé le paiement du fermage portant sur la totalité des parcelles. En conséquence, il l’a mise en demeure de cesser l’occupation des parcelles [Cadastre 12] et [Cadastre 13] issues de la parcelle [Cadastre 9] et de remettre le fonds dans son état initial.

Ce courrier étant resté sans réponse, par déclaration au greffe du 18 mars 2016, M. [Z] a fait convoquer Mme [T] à comparaitre devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Villefranche en indemnisation de son éviction de la parcelle [Cadastre 9], recadastrée entre temps [Cadastre 12] et [Cadastre 17].

Par requête reçue au greffe le 1er février 2017, Mme [T] a fait appeler en garantie la SCP Nathalie Martin-Rivoire, [M] [L] et Renaud SCP Nathalie Martin-Rivoire [M] [L] et Renaud Fontaine, ainsi que la communauté d’agglomération de l’ouest rhodanien.

Les 2 instances ont été jointes à l’audience du 12 mai 2017.

Par jugement du 28 septembre 2018, le tribunal paritaire des baux ruraux de Villefranche a :

-condamné M. [Z] à payer à Mme [T] la somme de 1 582,86 euros au titre des fermages dus pour les années 2012 à 2016 ;

-condamné M. [Z] à payer à Mme [T] la somme de 2 000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

-condamné Mme [T] à payer à la SCP Nathalie Martin-Rivoire, [M] [L] et Renaud Fontaine la somme de 750 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

-débouté les parties de leurs autres demandes ;

-condamné M. [Z] aux entiers dépens.

Par déclaration du 26 octobre 2018, M. [Z] a interjeté appel de ce jugement.

Le 26 avril 2019, Mme [T] a assigné en appel provoqué la SCP Nathalie Martin-Rivoire, [M] [L] et Renaud Fontaine et la communauté d’agglomération de l’ouest rhodanien.

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe le 20 mai 2020, M. [Z] demande à la cour de :

-déclarer recevable et bien fondé son appel à l’encontre du jugement en ce qu’il l’a :

condamné à payer à Mme [T] la somme de 1 582,86 euros au titre des fermages dus pour les années 2012 à 2016 ;-

condamné à payer à Mme [T] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

débouté de ses autres demandes (rejet de toutes les demandes de Mme [T], condamner celle-ci à lui verser la somme de 71 061,20 euros à titre de dommages-intérêts du fait de son éviction irrégulière, celle de 1 531,82 euros au titre de fermages indument perçus et celle de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens) ;

condamné aux entiers dépens ;

-le réformer de ces chefs, et en conséquence,

débouter Mme [T] de l’intégralité de ses demandes ;

condamner Mme [T] à lui verser la somme de 79 833,35 euros à titre de dommages et intérêts du fait de son éviction irrégulière ;

condamner Mme [T] à lui verser la somme de 1 754,63 euros au titre de fermages indûment perçus en 2014 et 2015 ;

condamner Mme [T] à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel avec droit de recouvrement direct au profit de Me Robbe.

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe le 23 avril 2019, Mme [T] demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et, le réformant,

-juger que la parcelle litigieuse [Cadastre 9], devenue [Cadastre 12] et [Cadastre 17], était concernée par un bail conclu à titre précaire et constater que la mise à disposition de cette parcelle a cessé à l’issue du contrat, soit le 31 octobre 2011 ;

-rejeter l’ensemble des demandes et prétentions de M. [Z] ;

-condamner M. [Z] à lui payer la somme de 6 217,58 euros au titre du reliquat des fermages de 2011 à 2016 inclus ;

A titre subsidiaire, condamner la SCP Nathalie Martin-Rivoire Jean-Michel [L] et Renaud Fontaine à la relever et garantir de toute condamnation pouvant intervenir à son encontre ;

-déclarer commun et opposable le « jugement » à intervenir à la communauté d’agglomération de l’ouest rhodanien :

-prononcer la résiliation du bail au 25 octobre 2002 ;

-condamner M. [Z] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-condamner le même aux dépens de l’instance.

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe le 25 juillet 2019, la communauté d’agglomération de l’ouest rhodanien demande à la cour de :

-juger que la demande de Mme [T] en cause d’appel est irrecevable faute d’intérêt à agir ;

-subsidiairement, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a mise hors de cause ;

-en tout état de cause, confirmer le jugement en ce qu’il a condamné Mme [T] à lui payer la somme de 750 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant :

-condamner Mme [T] ou qui mieux le devra à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

-condamner Mme [T] ou qui mieux le devra aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de Me Aguiraud.

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe le 24 juillet 2019, la SCP Nathalie Martin-Rivoire, [M] [L] et Renaud Fontaine demande à la cour de :

-confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [T] de ses prétentions ;

-débouter Mme [T] de l’intégralité de ses prétentions en ce qu’elles sont dirigées à son encontre ;

-condamner Mme [T] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

-la condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel, ces derniers distraits au profit de la SAS Tudela & Associés.

A l’audience du 16 septembre 2022, à laquelle ont comparu M. [Z], Mme [T] et la SCP Nathalie Martin-Rivoire, [M] [L] et Renaud Fontaine, Mme [T] et la SCP Nathalie Martin-Rivoire [M] [L] et Renaud Fontaine ont indiqué se référer à leurs conclusions sans rien n’y ajouter ni en retrancher. M. [Z] a fait développer ses conclusions, ajoutant se fonder sur l’article L411-32 du code rural au soutien de sa demande d’indemnité d’éviction.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour rappelle qu’elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques ou qu’elles constituent en réalité des moyens.

1-Sur la fin de non-recevoir

Ainsi que le fait valoir la communauté d’agglomération, M. [Z] n’a fait appel qu’à l’encontre de Mme [T] et n’a pas repris en appel ses prétentions relatives à la remise en état des fonds et à la libération des lieux. Mme [T] n’a donc pas intérêt à agir contre elle.

En application des articles 31 et 122 du code de procédure pénale, son appel provoqué contre la communauté d’agglomération sera déclaré irrecevable.

2-Sur les droits détenus par M. [Z] sur les parcelles [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10] et [Cadastre 11] en vertu de l’acte du 25 octobre 2002 et sur la demande d’indemnisation

L’article L411-2 3° du code rural édicte que les dispositions de l’article L. 411-1 ne sont pas applicables aux conventions d’occupation précaire tendant à l’exploitation temporaire d’un bien dont l’utilisation principale n’est pas agricole ou dont la destination agricole doit être changée.

Pour Mme [T], le bail rural ne portait pas sur les parcelles [Cadastre 13][Cadastre 14]-[Cadastre 15] qu’elle a cédées à la communauté d’agglomération, pour lesquelles il était expressément prévu dans l’acte du 25 octobre 2002 qu’elles feraient l’objet d’une mise à disposition du preneur à titre précaire en vertu de l’article L411-2. Le terme du bail était expressément prévu et M. [Z] se serait maintenu dans les lieux sans droit ni titre jusqu’à l’été 2014.

M. [Z] soutient que le projet de changement de destination des parcelles litigieuses n’est pas mentionné dans le bail et qu’il n’est pas démontré une commune intention des parties d’écarter le statut du fermage en référence à un projet d’aménagement urbain précis.

Subsidiairement, il fait valoir que la bailleresse ne peut prouver que la destination des terres agricoles était susceptible d’être modifiée à la date de signature de l’acte, qu’elle ne produit pas de certificat d’urbanisme attestant de la constructibilité des parcelles à la date de signature du bail et qu’elle n’a jamais révoqué le bail précaire.

Enfin, très subsidiairement, il affirme que l’acte d’huissier du 27 avril 2015 évoque de façon extrêmement claire un bail à ferme portant sur la totalité des parcelles, si bien qu’il traduit la volonté de la bailleresse de nover, d’autant qu’elle a réitéré dans son courrier recommandé du 23 novembre suivant.

L’acte du 25 octobre 2002 fait pourtant expressément référence au rapport établi par la FDSEA que les notaires produisent et dont ils indiquent sans être contredits qu’il y était joint. Il en ressort de façon indiscutable que M. [Z] avait sollicité le service juridique de la FDSEA avant la signature afin de faire évaluer le montant du fermage et que ce service avait proposé effectuer un abattement pour cause de précarité au motif que des terrains devaient faire l’objet d’une location au titre de l’article L411-2 du code rural.

Le service juridique de la FDSEA avait également rédigé un document intitulé « Analyse de situation et application du statut du fermage » dans lequel il était précisément fait référence à ce même article. Le service indiquait qu’il était « juridiquement possible d’inclure la totalité de la surface disponible sur le bail tout en précisant dans un article « conditions particulières » qu’une surface forfaitaire de 15ha [était] mise à disposition du preneur à titre précaire en vertu de l’article L411-2 (qui exclut l’application de l’article L411-32) jusqu’à l’acquisition effective par la collectivité publique de la surface nécessaire à la création de la zone artisanale ».

M. [Z] était donc parfaitement au fait du projet d’emprise communale pour la réalisation d’une zone artisanale et il a expressément consenti, en signant le bail, à ne disposer que de façon précaire d’une partie des parcelles appartenant à l’indivision [T].

Aucune disposition légale n’imposait à Mme [T] de produire un certificat d’urbanisme attestant de la constructibilité des parcelles.

Si celle-ci n’a jamais révoqué le bail précaire, il apparaît cependant que le notaire a porté à la connaissance de M. [Z] l’acte de vente des parcelles [Cadastre 13]-[Cadastre 14]-[Cadastre 15] le 1er juillet 2010. Par ailleurs, Mme [T] n’en était plus propriétaire lorsque l’huissier a délivré la sommation du 27 avril 2015 ni lorsqu’elle a envoyé le courrier recommandé du 23 novembre suivant. Il ne peut donc ressortir de ces deux actes une quelconque volonté d’accorder à M. [Z] le statut de fermier sur ces parcelles.

M. [Z] sollicite une indemnité pour éviction irrégulière sur le fondement de l’article 1719 du code civil aux motifs qu’il a été privé de la possibilité d’exploiter les parcelles et que Mme [T] a mentionné dans l’acte de vente du 31 juin 2010 que les dites parcelles étaient entièrement libres de location ou occupation alors qu’elle a écrit dans ses conclusions que le bail précaire s’était arrêté le 31 octobre 2011.

M. [Z] tire cependant ses droits sur les parcelles vendues d’une convention d’occupation précaire dont le terme ne peut être confondu avec celui du bail rural. Il ressort des démarches entreprises auprès de la FDSEA avant la signature de l’acte du 25 octobre 2002 que les parties sont convenues de retenir comme terme de la convention précaire le jour de la cession des parcelles à la collectivité publique. M. [Z] ne contestant pas avoir eu connaissance de la signature de l’acte par l’envoi que lui en a fait le notaire, il est devenu occupant sans droit ni titre des parcelles dès le 1er juillet 2010 et c’est uniquement en raison de la tolérance ou de l’inaction de la communauté d’agglomération qu’il a pu malgré tout continuer à en jouir jusqu’au début des travaux en 2014.

Il ne peut par ailleurs se prévaloir des termes d’un contrat auquel il n’est pas partie pour exciper d’une faute commise par la bailleresse dans l’exécution de la convention précaire.

Il n’existe donc aucun motif de condamner Mme [T] à lui verser une quelconque indemnité sur le fondement de l’article 1719 du code du civil, ainsi qu’en a jugé le tribunal paritaire des baux ruraux. Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a débouté Mme [T] de sa demande de garantie formée à l’encontre de la société notariale.

3-Sur les fermages

Le bail reprend la classification des terrains en 3 catégories, ainsi que l’a proposé la FDSEA, dénommées îlot A, îlot B et îlot C et chacune affectée d’un nombre de points. Pour chaque îlot, le produit du nombre de points par la contenance totale, puis par la valeur du point constitue le montant du fermage.

L’acte unique également que le fermage des bâtiments et de l’accès est fixé à 223,72 points.

Le bail prévoit ensuite que « le fermage sera définitivement fixé lorsque la superficie affermée sera connue. Son montant sera calculé en fonction des données contenues dans le rapport de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles du Rhône » et que « le loyer sera révisé le 1er novembre de chaque année, compte tenu de la valeur du point. »

Ledit rapport de la FDSEA rappelait la valeur du point fermage pour l’année 2001, soit 6,01 euros, et proposait de fixer le montant total du fermage à la somme de 3768,70 euros, décomposée comme suit:

pour les terrains : la valeur du fermage serait de 2 466,50 euros (6,01 x 410,40 points), mais la FDSEA propose d’effectuer un abattement de 10 % sur la moitié de ce montant pour cause de précarité, ce qui le ramène à la somme de 2 424,15 euros ;

pour les bâtiments, la FDSEA propose de fixer le montant du fermage à la somme de 1 824,35 euros ; par il apparaît cependant que dans son calcul total, elle a pris en compte une somme de 1 224,35 euros, ce qui correspond au produit du nombre de points (203,72) par 6,01 ;

pour les accès, la FDSEA propose de fixer le montant du fermage à la somme de 120,20 euros, ce qui correspond à une valeur du point de 6,01 euros.

Le bal prévoit en outre l’acquittement par le preneur des impôts fonciers afférents aux immeubles affermés est récupérable par le veilleur, ainsi que de la taxe d’association foncière, d’association de drainage et éventuellement de curage ou d’assainissement de rivière.

Les parties ne font pas état d’autres accords intervenus entre eux à ce sujet.

Mme [T] se fonde sur des valeurs de points différentes entre 2011 et 2016 selon qu’il s’agit des terrains ou des bâtiments et fixe pour cette période, le montant des fermages à la somme de 23 800,88 euros et le montant des diverses contributions et taxes à la somme de 958,10 euros. Il subsisterait un solde en sa faveur de 6 217,58 euros, M. [Z] ne s’étant jusqu’alors acquitté que de la somme de 18 541,40 euros.

M. [Z], quant à lui, se prévaut des courriers que lui a adressés la bailleresse le 30 novembre 2012 et le 23 novembre 2015 pour lui réclamer le montant du fermage sur la période de novembre 2011 à octobre 2012 (4 661,57 euros) et sur la période de novembre 2014 à octobre 2015 (4 988,56 euros). Il affirme que si elle avait commis une erreur dans le montant du prix du fermage, il lui revenait d’engager une action en révision du prix soit au moment du renouvellement du bail, soit dans la 3e année de jouissance, en application des articles L411-50 et L411-13 du code rural.

Il ajoute avoir réglé le fermage des années 2014 et 2015 sur les anciennes parcelles [Cadastre 9] et [Cadastre 11] alors qu’il n’a pu les exploiter du fait de l’implantation d’un lotissement industriel et artisanal, si bien qu’il demande la restitution de la somme de 1 754,63 euros.

Il convient cependant de faire application des clauses du bail et donc de la proposition de prix faite par la FDSEA à laquelle il se réfère.

Le bail ne fait pas de distinction entre la valeur du point terrain et la valeur du point bâtiment et ne retient que le premier de ces 2 chiffres. La valeur du point terrain retenue par Mme [T] n’est pas contestée par M. [Z].

Mme [T] n’étant plus propriétaire des parcelles [Cadastre 13], [Cadastre 14] et [Cadastre 15] depuis le 30 juin 2010, elle ne peut revendiquer le paiement du fermage sur cette partie des terres. Dans son décompte, elle a déduit dès l’année 2011 une superficie de 5ha, 56a 33ca de l’îlot B, correspondant à la superficie vendue par acte du 30 juin 2010. Elle a donc retenu un total de 246,48 points pour cet îlot. Par ailleurs, elle a compté 79,215 points pour l’îlot A alors que la FDSEA n’en avait prévu que 67,74, au motif que le bail prévoyait que le fermage serait définitivement fixé lorsque la superficie serait connue. M. [Z] ne conteste pas avoir accepté de régler un fermage basé sur ce nombre de points avant que la vente des parcelles ne perturbe les relations entre les parties. A partir de la vente, le nombre total de points est donc de 339,555 pour les terrains, outre 203,72 points pour les bâtiments et 20 pour les accès.

En conséquence, le montant du fermage sera fixé de la façon suivante :

pour l’année 2011 : 3 610,59 euros ;

pour l’année 2012 : 3 706,35 euros ;

pour l’année 2013 : 3 802,11 euros ;

pour l’année 2014 : 3 858,43 euros ;

pour l’année 2015 : 3 920,39 euros ;

pour l’année 2016 : 3 904,19 euros.

Le montant total du fermage dû pour les années 2011 à 2016 s’élève donc à la somme totale de 22 802,06 euros, en exécution des clauses du bail et en tenant compte de la survenance du terme de la convention d’occupation précaire.

M. [Z] ne conteste pas qu’il était également redevable de la somme de 958,10 euros au titre des divers frais et contributions.

Sur les versements effectués par le preneur au titre des années 2011 à 2016, Mme [T] affirme qu’il lui a versé au total 18 541,40 euros, ce qu’il ne conteste pas, si bien qu’il reste à lui devoir 5 218,76 euros.

Le jugement sera réformé et M. [Z] condamné à verser cette somme à Mme [T].

4-Sur la demande en résiliation du bail

Mme [T] demande à la cour de prononcer la résiliation du bail sur le fondement de l’article L411-35 du code rural qui interdit la sous-location hors autorisation du bailleur dans certaines situations.

Elle affirme que M. [Z] sous louait les terrains objet du fermage à des tiers et en veut pour preuve le courrier que lui a adressé le syndicat des éleveurs de chevaux de trait du Rhône, le 10 novembre 2016.

M. [Z] réplique que cette mise à disposition du pré s’est faite sans contrepartie si bien qu’elle ne peut être qualifiée de sous-location.

Dans son courrier, le syndicat écrit en effet : « ce pré nous a été gracieusement prêté’avec pour seule contrepartie la remise en état total du terrain ».

Le jugement, dont la cour adopte les motifs, a parfaitement apprécié le lien juridique existant entre M. [Z] et le syndicat ; il doit être confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.

5-Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

M. [Z] sera condamné aux dépens de l’instance d’appel.

L’équité commande de le condamner à payer à Mme [T] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que de condamner Mme [T] à payer à la communauté d’agglomération la somme de 2 500 euros sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevable l’appel provoqué de Mme [X] [T] à l’encontre de la communauté d’agglomération de l’ouest rhodanien ;

Confirme le jugement prononcé par le tribunal paritaire des baux ruraux le 28 septembre 2018 sauf en ce qu’il a condamné M. [Z] à verser à Mme [T] la somme de 1 582,86 euros au titre des fermages dus pour les années 2012 à 2016 et débouté Mme [T] de sa demande au titre des fermages de l’année 2011 ;

Statuant à nouveau,

Condamne M. [V] [Z] à verser à Mme [X] [T] la somme de 5 218,76 euros au titre du reliquat des fermages de 2011 à 2016 inclus ;

Condamne M. [V] [Z] aux dépens d’appel ;

Condamne M. [V] [Z] à payer à Mme [X] [T] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d’appel ;

Condamne Mme [X] [T] à payer à la communauté d’agglomération de l’ouest rhodanien la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d’appel ;

LE GREFFIERLA PRESIDENTE

 


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