29 février 2024
Cour d’appel de Versailles
RG n°
23/00304
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 58G
Chambre 1 – 3
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 29 FEVRIER 2024
N° RG 23/00304
N° Portalis DBV3-V-B7H-VUBH
AFFAIRE :
S.A. PREPAR-VIE
C/
S.A.S. GROUPE ERGET venant aux droits de la société GROUPE ERGET
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 22 Août 2022 par le Juge de la mise en état du TJ de Nanterre
N° chambre : 8
N° RG : 20/07735
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU
Me Florence REBUT DELANOE de l’ASSOCIATION L & ASSOCIES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT NEUF FEVRIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A. PREPAR-VIE
RCS de NANTERRE sous le n° 323 087 379
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619
APPELANTE
****************
S.A.S. GROUPE ERGET
venant aux droits de la SOCIETE GROUPE ERGET
N° SIRET : B 812 651 313
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Florence REBUT DELANOE de l’ASSOCIATION L & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J060
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 15 décembre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Florence PERRET, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence PERRET, Président,
Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,
Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme FOULON,
FAITS ET PROCEDURE :
La société Prepar-Vie est propriétaire d’un immeuble situé [Adresse 1] à [Localité 3].
Selon acte sous seing privé en date du 21 septembre 2009, elle a donné à bail commercial ces locaux à la société Groupe Erget, pour une durée de neuf années, du 1er décembre 2009 au 30 novembre 2018.
Par acte extrajudiciaire du 23 mai 2018, le bailleur a donné congé à la société Groupe Erget (désignée sous le numéro de RCS B 479 891 178), pour le 30 novembre 2018, avec refus de renouvellement et offre de payer une indemnité d’éviction.
Par exploit du 28 mai 2019, la société Prepar-Vie a assigné en référé cette même société Groupe Erget devant M. le président du tribunal de grande instance de Nanterre afin de solliciter la désignation d’un expert chargé de fixer l’indemnité d’éviction due à cette dernière, ainsi que l’indemnité d’occupation due par cette dernière.
Par acte du 15 octobre 2020, la société Groupe Erget a fait assigner la société Prepar-Vie afin notamment de dire qu’elle a droit à une indemnité d’éviction et de surseoir à statuer dans l’attente du rapport de M. [H].
Par ordonnance de mise en état en date du 22 août 2022, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
– débouté la société Prepar-Vie de sa demande de nullité de l’assignation délivrée le 15 octobre 2020,
– rejeté toute autre demande,
– renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état du 13 janvier 2023 pour conclusions en ouverture de rapport de la société Prepar-Vie et clôture,
– réservé la condamnation aux dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par acte du 13 janvier 2023, la société Prepar-Vie a interjeté appel de l’ordonnance et prie la cour, par dernières écritures du 7 avril 2023, de :
– infirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a débouté la société Prepar-Vie de sa demande de nullité de l’acte d’assignation délivré le 15 octobre 2020, par la société Groupe Erget, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 479 891 178,
– infirmer l’ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Nanterre rendue le 22 août 2022, en ce qu’elle a débouté la société Prepar-Vie de sa demande de condamnation de la société Groupe Erget au paiement d’un montant de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens,
Et statuant à nouveau,
– dire que l’acte d’assignation délivré par la société Groupe Erget le 15 octobre 2020 est affecté d’une irrégularité de fond, en raison du défaut de capacité d’ester en justice de cette société dissoute depuis le 25 février 2016 et radiée depuis le 31 mars 2016,
– dire, en conséquence, nul l’acte d’assignation délivré le 15 octobre 2020, par une société inexistante dépourvue de personnalité morale ;
– débouter la société Group Erget de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Sur la demande indemnitaire de la société Groupe Erget,
– dire irrecevable la demande indemnitaire comme ne relevant pas des attributions du juge de la mise en état, telles que limitativement énoncées par l’article 789 du code de procédure civile,
– subsidiairement, dire non fondée la demande indemnitaire de la société Groupe Erget et, par suite, l’en débouter,
En outre,
– condamner la société Groupe Erget au paiement d’une indemnité d’un montant de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel avec recouvrement direct, conformément aux dispositions de l’article 69 du code de procédure civile.
Par dernières écritures en date du 8 mars 2023, la société Groupe Erget prie la cour de :
A titre principal,
– confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,
Subsidiairement,
– condamner la société Prepar-Vie à titre de dommages et intérêts, au paiement des sommes suivantes demandées dans les conclusions du 18 juin 2021, soit:
* la somme en principal de 819 254 euros HT à titre d’indemnité d’éviction, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l’assignation avec capitalisation,
* outre 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– condamner la société Prepar-Vie au paiement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 novembre 2023.
SUR QUOI :
Le débat est de savoir si la désignation d’une personne morale inexistante par l’effet de certaines mentions dans un acte de procédure doit être considérée comme une simple nullité pour vice de forme au sens de l’article 114 du code de procédure civile ou s’il s’agit d’une irrégularité de fond au sens de l’article 117 du même code, comme soutenu par l’appelante.
Le premier juge a considéré que la nullité de l’assignation ne saurait être prononcée car la société Groupe Erget a fait l’objet d’une transmission universelle de patrimoine au profit de la société également dénommée Groupe Erget immatriculée au RCS sous le n° B 812 651 313, que l’erreur dans l’indication du numéro d ‘immatriculation au RCS dans l’assignation s’analysait en une simple irrégularité de forme relevant des dispositions de l’article 114 du code de procédure civile, régularisable et nécessitant la preuve d’un grief pour que l’acte soit déclaré nul.
Constatant qu’aucune forclusion n’était intervenue, que la rectification avait été opérée lors des conclusions signifiées le 18 juin 2021 et que la régularisation n’avait laissé subsister aucun grief, il a conclu que tel n’était pas le cas.
Pour voir dire nulle l’assignation délivrée le 15 octobre 2020, ayant introduit l’instance au fond enrôlée sous le numéro RG 20/07735, Prepar-Vie expose les mêmes moyens de droit et de fait que ceux développés en première instance tenant à l’existence d’une irrégularité de fond, en raison du défaut de capacité d’ester en justice de la société, dissoute depuis le 25 février 2016 et radiée depuis le 31 mars 2016.
Les arguments en réponse de la société Groupe Erget sont en substance les mêmes que devant le juge de la mise en état.
Sur ce,
Une inexactitude dans la désignation de la personne morale appelante est un vice de forme, qui ne peut entraîner la nullité de l’acte à condition de justifier d’un grief, et ne caractérise pas une incapacité d’ester en justice (Cass. 2e civ., 4 fév. 2021, no20-10.685).
La cour suprême ajoute que l’erreur relative à la dénomination d’une partie n’affecte pas la capacité à ester en justice qui est attachée à la personne, quelle que soit sa désignation.
Il n’est pas contesté qu’en l’espèce, la dénomination Groupe Erget est la même dans les deux cas ainsi que l’adresse du siège social ; seuls diffèrent le n° de RCS, mention facultative aux termes de l’article 648 du code de procédure civile, et la forme sociale de la société, SAS et non SA.
La cour procède à une simple adoption de motifs, jugeant que les moyens soutenus par l’appelant ne font que réitérer, sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels, se livrant à une exacte appréciation des faits de la cause, et à une juste application des règles de droit s’y rapportant, il a répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu’il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d’une discussion se situant au niveau d’une simple argumentation.
Il sera simplement ajouté que ce n’est pas la société absorbée dépourvue de personnalité morale qui a agi mais la société absorbante issue de la transmission universelle de patrimoine qui, par une erreur de plume, a mentionné l’ancien numéro de RCS dans l’assignation qu’elle a délivrée à Prepar-Vie le 15 octobre 2020, mention au demeurant non obligatoire, de sorte qu’il s’agit bien d’une nullité de forme et non de fond qui était encourue. La solution eut été contraire dans le cas où il n’aurait été réalisé aucune transmission universelle de patrimoine.
Cette erreur n’a pas empêché toute identification de la personne morale, ou n’en a pas désigné plusieurs sans qu’on puisse déterminer laquelle est l’auteur véritable de l’acte, étant entendu que le bailleur connaît l’identité de son locataire et que les motifs de l’assignation étaient parfaitement clairs et non équivoques sur la personne morale concernée, faisant au surplus référence à des actes procéduraux antérieurs dans lesquels figurait la véritable désignation de la société, telle la procédure de référé ayant donné lieu à la désignation d’un expert et les conclusions en référé de la société Groupe Erget développées à cette occasion, le litige étant encore pendant en ces termes.
L’ordonnance dont appel est confirmée.
La demande subsidiaire en paiement de dommages et intérêts formée par la société Groupe Erget ne relève pas des attributions du juge de la mise en état limitativement énumérées par l’article 789 du code de procédure civile et seule la juridiction du fond a ce pouvoir. Son rejet est confirmé.
La société Prepar-Vie sera condamnée à payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition,
Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société Prepar-Vie à payer à la société Groupe Erget la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Prepar-Vie aux dépens de première instance et d’appel.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame F. PERRET, Président et par Madame K. FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,