Indemnité d’éviction : 28 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/12906

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Indemnité d’éviction : 28 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/12906
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28 juin 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/12906

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 28 JUIN 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/12906 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGEJ2

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du 02 Mai 2018 -Président du TGI de PARIS – RG n° 18/51182

APPELANTS

Mme [W] [X]

ABC HOTEL

[Adresse 3]

[Localité 5]

M. [E] [Y]

ABC HOTEL

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentées par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020 et assistées par Me Elodie CARPENTIER, avocat au barreau du Val-de-Marne, toque : PC 486

INTIMÉS

M. [C] [H]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Mme [F] [H]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentées et assistées par Me Jean-Loïc TIXIER-VIGNANCOUR, avocat au barreau de PARIS, toque : D0428

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 Mai 2023, en audience publique, rapport ayant été fait par Patricia LEFEVRE, Conseillère conformément aux articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre

Jean-Christophe CHAZALETTE, Président de chambre

Patricia LEFEVRE, Conseillère

Greffier, lors des débats : Jeanne BELCOUR

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– Rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Patricia LEFEVRE, conseillère, le Président étant empêché, et par Jeanne BELCOUR, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

****

Par acte sous seing privé du 7 février 2003 à effet du 1er janvier 2002, M. [C] [H] et Mme [F] [H] ont consenti à M. [E] [Y] et à Mme [W] [S] un bail commercial portant sur un local à destination de marchands de vins, liqueurs, alcools à déguster et à emporter, restaurant et un local d’habitation, le tout situé au [Adresse 1]), moyennant un loyer annuel en principal de 13 032 euros.

En 2016, les bailleurs ont diligenté une première procédure de référé afin de faire constater l’acquisition de la clause résolutoire insérée dans le bail et sur l’appel de l’ordonnance constatant celle-ci et condamnant les locataires au paiement de la somme de 18 030,60 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au mois de juin 2016, la cour d’appel de Paris a, par un arrêt du 23 mai 2017, autorisé les locataires à se libérer de leur dette locative arrêtée au 3 avril 2017 à la somme de 19 707,22 euros dans un délai de quatre mois, avec suspension des effets de la clause résolutoire. M. [Y] et Mme [S] se sont acquittés de leur dette dans le délai fixé par la cour.

Le 12 octobre 2017, M. [Y] et Mme [S] ont sollicité le renouvellement de leur bail commercial.

Par acte extra-judiciaire en date du 22 novembre 2017 visant la clause résolutoire insérée au bail et reproduisant les dispositions de l’article L.145-41 du code de commerce, M. et Mme [H] ont fait délivrer à M. [Y] et à Mme [S] un commandement de payer portant sur la somme de 4 153,92 euros au titre des loyers et charges impayés et leur enjoignant de justifier d’une assurance contre les risques locatifs.

Par acte extra-judiciaire du 21 décembre 2017, M. [Y] et Mme [S] ont fait assigner M. et Mme [H] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris afin de notamment de voir suspendre les effets de la clause résolutoire.

Par acte extra-judiciaire du 12 janvier 2018, M. et Mme [H] ont accepté le renouvellement du bail au prix de 50 000 euros annuels plus charges et taxes correspondant à la valeur locative.

Par ordonnance contradictoire du 2 mai 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, saisi de demandes reconventionnelles des bailleurs a :

– constaté l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 22 décembre 2017 ;

– ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de l’ordonnance, l’expulsion de M. [Y] et de Mme [S] et de tout occupant de leur chef des lieux sis [Adresse 1] avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;

– dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu’à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans le délai d’un mois non renouvelable à compter de la signification de l’acte, à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l’exécution, ce conformément à ce que prévoient les articles L.433-1 et suivants et R.433-1 et suivant du code des procédures civiles d’exécution ;

– fixé, à titre provisionnel, l’indemnité d’occupation due par M. [Y] et Mme [S], à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires et condamné solidairement M. [Y] et Mme [S] au paiement de cette indemnité ;

– dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de paiement (relative aux régularisations de charges) ;

– condamné solidairement M. [Y] et Mme [S] à payer à M. et Mme [H] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rejeté le surplus des demandes ;

– condamné solidairement M. [Y] et Mme [S] aux dépens qui comprendront notamment le coût du commandement de payer.

Le 5 juin 2018, M. [Y] et Mme [S] ont interjeté appel et par un arrêt en date du 16 janvier 2019, la cour d’appel de Paris a :

– confirmé l’ordonnance entreprise sauf en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à référé sur la demande en paiement ;

statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

– condamné in solidum M. [Y] et Mme [S] à payer à M. et Mme [H] la somme de 6 519,81 euros au titre des régularisation de charges des années 2013 à 2017 avec intérêts au taux légal à compter du 4 octobre ;

– débouté M. [Y] et Mme [S] de leur demande de délais de paiement ;

– condamné in solidum M. [Y] et Mme [S] à payer à M. et Mme [H] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’instance d’appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le 15 mars 2019, M. [Y] et Mme [S] ont formé pourvoi contre cet arrêt et par un arrêt en date du 11 mai 2022, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a partiellement cassé et annulé l’arrêt rendu le 16 janvier 2019, remis sur les points cassés, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyés devant la cour d’appel de Paris.

Cette cassation est limitée aux dispositions de l’arrêt du 16 janvier 2019 constatant l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 22 décembre 2017, ordonnant à défaut de restitution volontaire des lieux, l’expulsion de M. [Y] et de Mme [S] et de tout occupant de leur chef des lieux, statuant sur le sort des meubles et fixant à titre provisionnel, l’indemnité d’occupation due aux bailleurs. Elle retient, au visa des articles L 145-10 alinéa 4 et l’article L. 145-11 du code commerce, que :

(…) l’acceptation par le bailleur du principe du renouvellement du bail, sous la seule réserve d’une éventuelle fixation judiciaire du loyer du bail renouvelé, manifeste la volonté du bailleur de renoncer à la résolution de celui-ci en raison des manquements du locataire aux obligations en découlant et dénoncés antérieurement.

Pour accueillir la demande reconventionnelle en constatation de la résiliation du bail, l’arrêt retient que les preneurs ne peuvent valablement soutenir que les bailleurs ont renoncé à se prévaloir du commandement du 22 novembre 2017, dès lors que le bail initialement conclu entre les parties a été résilié de plein droit le 22 décembre 2017, les bailleurs étant libres de consentir un nouveau contrat, les parties ne s’étant d’ailleurs manifestement pas encore entendues sur les termes d’une éventuelle nouvelle convention, et notamment sur le montant du loyer.

En statuant ainsi, alors qu’en notifiant aux locataires, le 12 janvier 2018, soit postérieurement au commandement du 22 novembre 2017 visant la clause résolutoire dont les effets n’avaient pas été constatés judiciairement, une acceptation du principe du renouvellement du bail, les bailleurs ont renoncé sans équivoque à se prévaloir des infractions dénoncées au commandement antérieur pour obtenir la résiliation du bail renouvelé, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés’.

Par déclaration en date du 6 juillet 2022, M. [Y] et Mme [S] ont saisi la cour d’appel de ce siège et aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 9 mai 2023 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens développés, ils demandent à la cour de les déclarer bien fondés en leur saisine, de déclarer irrecevables les conclusions signifiées et les pièces communiquées par les consorts [H], le 2 décembre 2022 et d’infirmer l’ordonnance entreprise rendue le 2 mai 2018 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris, sauf en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à référé sur la demande en paiement et statuant à nouveau de :

– juger non acquise la clause résolutoire et débouter par conséquent les consorts [H] de leurs demandes de constatation de l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 22 décembre 2017 et de fixation à titre provisionnel d’une indemnité d’occupation ;

– juger impossible leur réintégration dans le local commercial sis [Adresse 1] ;

– juger qu’ils peuvent prétendre au bénéfice d’une indemnité d’éviction qui sera déterminée après expertise ;

– juger qu’ils peuvent également prétendre à la réparation du préjudice qu’ils ont subi en raison de leur perte du droit au maintien dans les lieux jusqu’à paiement effectif de l’indemnité d’éviction et que ce préjudice sera également évalué dans le cadre de l’expertise sollicitée ;

à titre principal :

– avant dire droit, ordonner une mesure d’expertise avec mission d’évaluer le montant de l’indemnité d’éviction et le préjudice résultant de la perte de leur maintien dans les lieux jusqu’à règlement de l’indemnité d’éviction ;

– surseoir à statuer dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise ;

à titre subsidiaire :

– renvoyer les parties à mieux se pourvoir

en tout état de cause :

– condamner M. et Mme [H] à leur verser la somme de 50 000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnité d’éviction qu’ils doivent percevoir et au paiement de la somme de 3 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens y compris les frais d’expertise.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 18 avril 2023, M. et Mme [H] demandent à la cour, au visa des articles L.145-1 et suivants du code de commerce, de confirmer l’ordonnance du 2 mai 2018, rendu par le juge des référés près du tribunal judiciaire de Paris, en ce qu’il a constaté acquise la clause résolutoire et fixée à titre provisionnel l’indemnité d’occupation due jusqu’à la libération effective des lieux à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires, condamnant solidairement M. [Y] et Mme [S] au paiement de cette indemnité et les a déboutés de l’ensemble de leurs demandes et condamnés aux dépens.

SUR CE, LA COUR

A titre liminaire, Mme [S] et M. [Y] soutiennent l’irrecevabilité des conclusions de M. et Mme [H] faute d’avoir été, ainsi que l’exige l’article 1037-1 du code de procédure civile, notifiées dans le délai de deux mois de la communication de leurs écritures du 23 septembre 2022. M. et Mme [H] objectent qu’ils ont conclu avant l’avis de fixation, que la communication de leurs pièces par les appelants n’a été effective que le 7 décembre 2022, le lien WeTransfer, figurant à leur bulletin de communication de pièces du 21 octobre 2022 étant invalide et que les appelants ont formulé devant la cour saisie sur renvoi, des demandes nouvelles dont ils soutiennent qu’elles sont irrecevables.

Selon l’article 1037-1 du code de procédure civile, en cas de renvoi devant la cour d’appel, lorsque l’affaire relevait de la procédure ordinaire, celle-ci est fixée à bref délai dans les conditions de l’article 905. En ce cas, les dispositions de l’article 1036 ne sont pas applicables.

La déclaration de saisine est signifiée par son auteur aux autres parties à l’instance ayant donné lieu à la cassation dans les dix jours de la notification par le greffe de l’avis de fixation. Ce délai est prescrit à peine de caducité de la déclaration, relevée d’office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président.

Les conclusions de l’auteur de la déclaration sont remises au greffe et notifiées dans un délai de deux mois suivant cette déclaration.

Les parties adverses remettent et notifient leurs conclusions dans un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l’auteur de la déclaration.

La notification des conclusions entre parties est faite dans les conditions prévues par l’article 911 et les délais sont augmentés conformément à l’article 911-2.

Les parties qui ne respectent pas ces délais sont réputées s’en tenir aux moyens et prétentions qu’elles avaient soumis à la cour d’appel dont l’arrêt a été cassé.

Dès lors, aucun effet n’est attaché à l’envoi par le greffe de la cour de l’avis de fixation prévu à l’article 905 du code de procédure civile, les parties étant soumises aux délais de procédure prévues par les dispositions sus-mentionnées.

En l’espèce, M. [S] et M. [Y] ont, en l’absence de constitution des autres parties, fait signifier, par acte extra-judiciaire du 23 septembre 2022, leurs conclusions déposées le 5 septembre 2022. Les consorts [H] ont constitué avocat le 12 octobre 2022 et n’ont conclu que le 2 décembre suivant soit passé le délai de deux mois prévu par l’article 1037-1 du code de procédure civile. Ils ne peuvent utilement faire valoir qu’ils n’étaient pas en possession des pièces de leur adversaire d’autant, qu’ils n’ont allégué d’une difficulté d’accès aux pièces communiquées le 21 octobre 2022, que le 30 novembre 2022 soit passé le délai dont ils disposaient pour conclure. Il convient d’ajouter que dans leurs premières écritures du 2 décembre 2022, ils font valoir qu’ils n’ont pas été destinataires des pièces visées par Mme [S] et M. [Y] à leurs conclusions devant la cour d’appel de Paris, sans que cet état de fait, qu’ils présentent désormais les ayant empêché de régulariser des conclusions d’intimés, ne soit un obstacle au dépôt d’écritures tendant à la confirmation de l’ordonnance du 2 mai 2018.

Enfin, M. et Mme [H] ne peuvent pas prendre prétexte de demandes présentées dans le cadre de l’instance après renvoi de cassation, pour écarter cette fin de non-recevoir, les nouvelles demandes des appelants (tendant à une mesure d’expertise et au paiement d’une provision) figurant dans leurs écritures signifiées, le 23 septembre 2022.

Les écritures M. et Mme [H] déposées le 2 décembre 2022 sont tardives et par conséquent, irrecevables et leurs prétentions seront examinées dans l’état de leurs conclusions notifiées le 4 octobre 2018.

*

A titre liminaire, il convient de rappeler que la cassation est partielle et n’atteint que les chefs de l’arrêt du 16 janvier 2019 énoncés à l’arrêt de cassation du 11 mai 2022, ce qui exclut, que les parties soumettent à la cour les dispositions irrévocables de l’arrêt du 16 janvier 2019 (relatives à la régularisation des charges).

Au soutien de leur appel, M. [Y] et Mme [S] font valoir qu’ainsi que l’a jugé la Cour de cassation, l’acceptation par le bailleur du principe de renouvellement du bail postérieurement à la délivrance du commandement de payer manifeste sa volonté de renoncer à la résolution de celui-ci, ce qui exclut que la cour d’appel puisse retenir une résolution de plein droit du bail au 22 décembre 2018 dès lors que celle-ci n’était pas constatée judiciairement lors de l’acceptation du principe de renouvellement. Ils indiquent que le commandement de payer délivré le 19 octobre 2022, dont font état les bailleurs, est contesté devant le tribunal judiciaire de Paris.

En application de l’article L. 145-10 du code de commerce dans les trois mois de la notification de la demande du preneur en renouvellement, le bailleur doit, par acte extrajudiciaire, faire connaître au demandeur s’il refuse le renouvellement en précisant les motifs de ce refus. A défaut d’avoir fait connaître ses intentions dans ce délai, le bailleur est réputé avoir accepté le principe du renouvellement du bail précédent.

L’article L. 145-11 du même code précise que le bailleur qui, sans être opposé au principe du renouvellement, désire obtenir une modification du prix du bail doit, dans le congé prévu à l’article L. 145-9 ou dans la réponse à la demande de renouvellement prévue à l’article L. 145-10, faire connaître le loyer qu’il propose.

Il résulte de ces textes, que l’acceptation par le bailleur du principe du renouvellement du bail, sous la seule réserve d’une éventuelle fixation judiciaire du loyer du bail renouvelé, manifeste la volonté du bailleur de renoncer à la résolution de celui-ci en raison des manquements du locataire aux obligations en découlant et dénoncés antérieurement.

Par un acte extra-judiciaire du 23 janvier 2018 M. et Mme [H] rappelaient la date du bail (7 février 2003), la demande de renouvellement notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 octobre 2017, faisaient valoir ainsi qu’en application de l’article L 145-34 du code de commerce, le loyer était déplafonné et écrivaient :

le bailleur accepte le renouvellement au prix de 50 000 euros annuels plus charges et taxes correspondant à la valeur locative.

Par ailleurs, l’intégralité des frais de procédure et charges impayées du bail en cours doivent être réglées.

Il est précisé qu’en cas de désaccord sur le nouveau loyer applicable, le montant sera fixé conformément aux règles énonces par les articles L 145-33 à L 145-35 et R 145-20 du code de commerce.

Il s’ensuit que les bailleurs, ainsi que le soutiennent les appelants, ont accepté le principe du renouvellement du bail, dont le loyer devait éventuellement être judiciairement fixé. Ils ont ainsi manifesté leur volonté de renoncer à la résolution de celui-ci en raison des manquements du locataire aux obligations en découlant et dénoncés antérieurement.

Il convient de relever qu’à la date de cette acceptation, ainsi qu’il ressort de l’ordonnance critiquée, le juge des référés était saisi de la seule demande des locataires de suspendre les effets de la clause résolutoire, mise en oeuvre par un commandement du 22 novembre 2017, compte tenu de conclusions en première instance des 7 février 2018, selon M. et Mme [H] et 28 mars 2018, ainsi que l’écrit le premier juge.

Dès lors la décision déférée sera infirmée en ce qu’elle constate l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 22 décembre 2017, ordonne la restitution des lieux aux bailleurs, statue sur le sort des meubles garnissant les locaux et fixe à titre provisionnel, l’indemnité d’occupation due par M. [Y] et Mme [S] et la cour dira n’y avoir lieu à référé de ces chefs.

A hauteur d’appel, M. [Y] et Mme [S] affirment, invoquant les dispositions de l’article L 110-10 du code des procédures civiles d’exécution, qu’ils doivent, compte tenu de l’infirmation du titre exécutoire, être rétablis dans leurs droits en nature ou par équivalent. Ils demandent à la cour de juger impossible leur réintégration des locaux loués, dont ils ont été expulsés le 27 juillet 2021, en exécution de l’ordonnance querellée, eu égard à la cession de leur licence IV et de leur état de santé. Ils évoquent les conséquences de la perte du droit au maintien dans les lieux, dans l’attente du versement de l’indemnité d’éviction, ainsi que la perte de cette indemnité et prétendent à l’évaluation de l’indemnité d’éviction et de leur préjudice dans le cadre d’une expertise, sollicitée à titre principal, avant dire droit, la cour devant dans l’attente du dépôt du rapport du technicien commis surseoir à statuer.

Il ressort de la formulation de cette demande de mesure d’instruction, présentée avant dire droit et assortie d’un sursis à statuer, après que la cour ait retenu le principe de leur droit à indemnité d’éviction et à réparation sur le fondement de l’article L 110-10 du code des procédures civiles d’exécution, qu’elle ne s’inscrit pas dans les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile et par conséquent, excède les pouvoirs du juge des référés. Il sera dit n’y avoir lieu à référé de ce chef.

*

Selon le deuxième alinéa de l’article 835 du même code, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier.

Au cas d’espèce, les locataires sollicitent l’allocation d’une provision à valoir sur l’indemnité d’éviction dont ils prétendent qu’elle leur serait due.

L’existence d’une créance à ce titre ne présente pas l’évidence requise en référé, dans la mesure où en application de l’article L 145-14 du code de procédure civile, cette indemnité est due par le bailleur qui refuse le renouvellement du bail, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

M. et Mme [H] seront condamnés aux dépens de l’instance d’appel sur renvoi et à payer à M. [Y] et Mme [S] la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Déclare irrecevables les conclusions notifiées le 2 décembre 2022 pour le compte de M. et Mme [H] ;

Dans les limites de sa saisine ;

Infirme l’ordonnance du 2 mai 2018, en ce qu’elle a :

– constaté l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 22 décembre 2017 ;

– ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de l’ordonnance, l’expulsion de M. [Y] et de Mme [S] et de tout occupant de leur chef des lieux sis [Adresse 1] avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;

– dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu’à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans le délai d’un mois non renouvelable à compter de la signification de l’acte, à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l’exécution, ce conformément à ce que prévoient les articles L.433-1 et suivants et R.433-1 et suivant du code des procédures civiles d’exécution ;

– fixé à titre provisionnel l’indemnité d’occupation due par M. [Y] et Mme [S], à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires et condamné solidairement M. [Y] et Mme [S] au paiement de cette indemnité ;

Statuant à nouveau et y ajoutant

Dit n’y avoir lieu à référé des chefs infirmés et sur la demande personnelle au titre de l’indemnité d’éviction ;

Condamne M. et Mme [H] à payer à M. [Y] et Mme [S] la somme de 2500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens de la procédure de renvoi.

LE GREFFIER LA CONSEILLERE

 


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