Indemnité d’éviction : 26 octobre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 22/05078

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Indemnité d’éviction : 26 octobre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 22/05078

26 octobre 2022
Cour d’appel de Paris
RG
22/05078

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 26 OCTOBRE 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : R N° RG 22/05078 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFNZM

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Février 2022 -Président du TJ de Meaux RG n° 21/00861

APPELANTE

S.A.R.L. ZK AUTO prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliès en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIRET : 519 700 827

Représentée par Me Tancrède MONGELLI de l’AARPI SI VIS PACEM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

S.A.S. ARKAD HOLDING prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliès en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

N° SIRET : 522 399 351

Représentée par Me Jean-Charles NEGREVERGNE de la SELAS NEGREVERGNE-FONTAINE-DESENLIS, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame Patricia LEFEVRE, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Jean-Paul BESSON, premier président de chambre

M. Jean-Christophe CHAZALETTE, président

Mme Patricia LEFEVRE, conseiller

GREFFIER lors des débats : M. Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

-CONTRADICTOIRE

-par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Jean-Paul BESSON, premier président de chambre et par Olivier POIX, greffier, présent lors de la mise à disposition.

******

Par acte sous seing privé du 1er février 2010, la société SCI Nessadrea a donné à bail commercial à la société Zk auto, le lot n°2 de l’immeuble en copropriété situé [Adresse 2]), pour une durée de neuf années à compter du 1er février 2010, pour un usage exclusif de locaux d’activité/bureaux, moyennant un loyer annuel de 21 472 euros.

Selon acte notarié en date du 3 décembre 2014, la société Arkad holding a acquis le lot n°2 sus-mentionné.

Par acte en date du 28 juin 2018, la société Arkad holding a donné congé à la société Zk auto pour le 31 janvier 2019 avec refus de renouvellement et offre d’une indemnité d’éviction.

Faisant valoir que la société Zk auto se maintenait dans les lieux malgré l’expiration, le 30 juin 2021, du bail dérogatoire conclu le 1er mars 2020 et qu’elle n’a pas réglé la totalité des loyers dus, la société Arkad holding a, par acte extra-judiciaire en date du 28 juillet 2021, fait assigner la société Zk auto devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux afin de voir, principalement constater l’occupation sans droit ni titre des locaux loués, ordonner l’expulsion de la société défenderesse et sa condamnation au paiement d’une indemnité provisionnelle.

Par ordonnance contradictoire du 09 février 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux a :

– ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l’expulsion de la société ZK auto et de tout occupant de son chef des locaux qui lui sont donnés à bail par la société Arkad holding, situés au [Adresse 2]), avec le concours, en tant que besoin, de la force publique et d’un serrurier ;

– dit, qu’en cas de besoin, que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera réglé conformément aux dispositions du code des procédures civiles d’exécution ;

– rejeté la demande la société Arkad holding de suppression de tout délai ;

– fixé à titre provisionnel l’indemnité d’occupation due par la société Zk auto, à compter du 30 juin 2021 et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires ;

– condamné par provision la société Zk auto à payer à la société Arkad holding la somme de 20 519,73 euros au titre de l’arriéré des loyers et charges dû au 30 juin 2021 (terme de juin inclus) ;

– rejeté la demande de la société Zk auto de suspension pendant une durée de deux ans du paiement de la somme de 20 519,73 euros au titre de l’arriéré des loyers et charges dû au 30 juin 2021 et sa demande d’une somme provisionnelle de 10 000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

– rejeté les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile et condamné la société Zk auto aux dépens ;

– rejeté la demande de la société Arkad holding d’exécution de l’ordonnance au seul vu de la minute et rappelé que sa décision est exécutoire à titre provisoire.

Le 7 mars 2022, la société Zk auto a relevé appel de cette décision dans ses dispositions lui faisant grief et aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 11 mai 2022, elle demande à la cour d’infirmer l’ordonnance entreprise, et statuant à nouveau de débouter la société Arkad holding. Subsidiairement si elle faisait l’objet d’une condamnation provisionnelle, elle réclame un report de paiement de l’intégralité des sommes qui seraient mise à sa charge, indemnité d’occupation incluse, d’une durée de deux années, aucune somme même postérieure, ne pouvant être exigible durant ces deux ans. Elle réclame également la condamnation de la société Arkad holding à lui verser une somme provisionnelle de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, outre une somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens de première instance et d’appel.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 10 juin 2022, la société Arkad holding soutient, au visa des articles 1134 et suivants du code civil et 835 du code de procédure civile, la confirmation de la décision entreprise, sauf en ce qu’elle a écarté sa demande d’astreinte, sollicitant devant la cour la condamnation de la société Zk auto au paiement d’une astreinte de 500 euros par jour à compter de l’arrêt à intervenir. Elle réclame en tout état de cause, que la société Zk auto soit déboutée de ses demandes et condamnée au paiement de la somme de 4500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

SUR CE, LA COUR

La société Zk auto avance qu’il est manifeste qu’elle n’a pas signé le bail dérogatoire en date du 1er mars 2020, la signature figurant en fin de ce contrat semblant être une copie servile de la signature de son gérant, M.[W]. Elle prétend que son occupation des lieux n’est pas un trouble manifestement illicite puisqu’il existe un débat sur la véracité du bail dérogatoire. Ce même moyen est également soutenu pour écarter l’obligation de paiement dont se prévaut l’intimée. La société ZK auto ajoute qu’il existe, quant au quantum de la dette réclamée par la société Arkad holding, une contradiction majeure entre les différents documents produits en demande, caractérisant, ici encore, une contestation sérieuse.

La société Arkad holding objecte que l’occupation sans droit ni titre d’un local commercial, évidente en l’espèce puisque l’appelante ne peut plus se prévaloir d’un titre d’occupation quelconque, constitue un trouble manifestement illicite. Elle conteste le moyen de la société Zk auto selon lequel, elle n’aurait pas signé le bail dérogatoire, fait valoir qu’eu égard à l’acquisition de la prescription de l’action en fixation de l’indemnité d’éviction, la société locataire ne peut se prévaloir d’un droit au maintien dans les lieux et estime que cette situation justifie sa demande d’astreinte. Elle sollicite la confirmation de la condamnation provisionnelle, la contestation pour faire obstacle à cette demande devant être sérieuse, or la société Zk auto n’apporte pas la preuve qu’elle a effectivement procédé au paiement de l’intégralité des loyers depuis le mois de janvier 2020 et ne produit aucune pièce en ce sens.

En application de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

En application de l’article 835 du même code, le juge des référés peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L’expulsion d’un locataire commercial devenu occupant sans droit ni titre peut être demandée au juge des référés du tribunal judiciaire en application des dispositions de l’article 835 du code de procédure civile, dès lors que le maintien dans les lieux de cet occupant constitue un trouble manifestement illicite ou qu’à tout le moins l’obligation de libérer les lieux correspond à une obligation non sérieusement contestable.

Sans avoir à examiner les contestations de la société Zk auto quant au caractère apocryphe de la signature attribuée à son gérant figurant sur le bail dérogatoire daté 1er mars 2020 dont le terme est atteint, il convient de relever comme l’a fait le premier juge, que la société Zk Auto n’allègue et encore moins ne justifie d’un droit à se maintenir dans les lieux. Elle ne conteste pas la validité et les effets du congé sans offre de renouvellement à effet du 31 janvier 2019, délivré le 28 juin 2018, ni ne plus pouvoir revendiquer un droit au maintien dans les lieux dans l’attente du versement de l’indemnité d’éviction, étant désormais forclose à réclamer sa fixation judiciaire, faute d’action dans les deux années de la date d’expiration du bail.

Le premier juge pouvait, contrairement aux affirmations de la société Zk auto, faire ce constat, sans s’arrêter au fait que le bailleur se plaignait également du non-respect du terme du bail dérogatoire. La décision sera confirmée dans ses dispositions relatives à l’expulsion de la société Zk auto, y compris en ce qu’elle rejette la demande d’astreinte dont la nécessité en l’espèce n’est pas établie.

Aux termes du deuxième alinéa de l’article 835 du même code, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier.

En l’espèce, et ainsi que l’avance la société Zk auto, la bailleresse lui a remis le 25 mai 2021 une attestation précisant qu’elle est à jour du règlement de ses loyers de l’année 2021.

Non seulement, la société Zk auto a été informée très rapidement par un courrier du 28 juin 2021, après des échanges avec son comptable, que cette attestation était erronée, mais il n’y est fait état que des loyers de l’année 2021 et la débitrice ne prétend pas s’être acquittée des loyers dus en 2020.

La société Zk auto ne justifie d’aucun autre paiement que ceux mentionnés à l’extrait de compte au 2 juin 2021, joint au courrier du 28 juin 2021. Ce décompte récapitule les sommes dues au titre des loyers de 2020 et 2021, ne fait mention d’aucun règlement en 2020 et précise le montant des règlements effectués en 2021 (8917,20 euros et 5x 2972,40 euros). La société Zk auto n’excipant d’aucun autre paiement, le solde débiteur de ce compte, soit 20 519,13 euros a justement été retenu par le premier juge au titre des sommes dues au 30 juin 2021.

La société Zk auto sollicite un délai de grâce sans apporter aux débats le moindre élément pertinent sur sa situation financière actuelle, les bilans produits se rapportant aux exercices clos le 31 décembre 2019 et 2020. Elle produit certes des plans d’apurement de dettes sociales et fiscales (ses pièces 17 à 19) mais il ressort de leur lecture que le dernier terme de chacun des plans est échu et par conséquent, ces dettes doivent être réglées.

En l’absence de tout effort ou offre de règlement, il convient de confirmer le rejet de la demande de délai de paiement.

Compte tenu de ce qui précède, la procédure engagée par la société Arkad holding ne peut pas être qualifiée d’abusive et le rejet de la demande de dommages et intérêts provisionnels à ce titre sera confirmée.

Les condamnations prononcées en première instance au titre des dépens et frais irrépétibles seront confirmées. La société Zk auto sera condamnée aux dépens d’appel et à payer une indemnité complémentaire au titre des frais exposés par la société Arkad holding  pour assurer sa défense devant la cour.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance rendue le 10 février 2022 ;

Y ajoutant,

Condamne la société Zk auto à payer à la société Arkad holding la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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