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25 janvier 2024
Cour de cassation
Pourvoi n°
21-24.380
COUR DE CASSATION
Première présidence
__________
ORad
Pourvoi n° : J 21-24.380
Demandeur : la société UPS SCS France
Défendeur : M. [I], décédé le 20 mai 2017 et autres
Requête n° : 913/23
Ordonnance n° : 90101 du 25 janvier 2024
ORDONNANCE
_______________
ENTRE :
[G] [I], décédé le 20 mai 2017, ayant la SCP Sevaux et Mathonnet pour avocat à la Cour de cassation,
Mme [J] [T] épouse [C], prise en qualité d’ayant droit de [G] [I], ayant la SCP Sevaux et Mathonnet pour avocat à la Cour de cassation,
M. [F] [I], pris en qualité d’ayant droit de [G] [I], ayant la SCP Sevaux et Mathonnet pour avocat à la Cour de cassation,
M. [U] [C], pris en qualité d’ayant droit de [G] [I], ayant la SCP Sevaux et Mathonnet pour avocat à la Cour de cassation,
ET :
la société UPS SCS France, ayant la SCP Célice, Texidor, Périer pour avocat à la Cour de cassation,
Dans l’instance concernant en outre :
la société Asteren, ayant la SCP Boucard-Maman pour avocat à la Cour de cassation,
la société Mandataires Judiciaires Associés, pris en la personne de Maître [R] [E], ès qualités de liquidateur de la société Maintenance Partner Solutions, ayant la SCP Boucard-Maman pour avocat à la Cour de cassation,
Michèle Graff-Daudret, conseiller délégué par le premier président de la Cour de cassation, assistée de Vénusia Ismail, greffier lors des débats du 21 décembre 2023, a rendu l’ordonnance suivante :
Vu la requête du 28 septembre 2023 par laquelle M. [G] [I], décédé le 20 mai 2017, Mme [J] [T] épouse [C], M. [F] [I], M. [U] [C] demandent, par application de l’article 1009-1 du code de procédure civile, la radiation du pourvoi numéro J 21-24.380 formé le 17 novembre 2021 par la société UPS SCS France à l’encontre de l’arrêt rendu le 10 novembre 2021 par la cour d’appel de Paris ;
Vu les observations développées au soutien de la requête ;
Vu les observations présentées en défense à la requête ;
Vu l’avis de Sophie Tuffreau, avocat général, recueilli lors des débats ;
Par arrêt du 10 novembre 2021, la cour d’appel de Paris a notamment ordonné la réintégration de M. [I] [G] à compter du 1er août 2009 dans la société UPS SCS France dans son emploi ou dans un emploi équivalent à celui qu’il occupait préalablement à son transfert et condamné la société UPPS SCS France à verser à M. [I] [G] les sommes de 267 722,45 euros au titre de l’indemnité due en réparation du préjudice subi, 3 264,90 euros par mois supplémentaire à compter du prononcé du présent arrêt jusqu’à la réintégration effective de M. [I] dans la société UPS SCS France.
Le 17 novembre 2021, la société UPS SCS France a formé contre cet arrêt un pourvoi en cassation.
Par requête du 28 septembre 2023, M. [F] [I], Mme [J] [T] et M. [U] [C], tous trois pris en leur qualité d’ayants droit de [G] [I], décédé le 20 mai 2017, ont demandé la radiation du pourvoi du rôle de la Cour, en invoquant l’inexécution de l’arrêt attaqué.
Par observations du 1er décembre 2023, la société UPS SCS France fait valoir que les ayants droit de [G] [I] ne peuvent lui reprocher de ne pas avoir réintégré une personne décédée ni de ne pas verser à cette personne décédée une indemnisation égale aux salaires qu’elle aurait dû percevoir entre son licenciement et sa réintégration, que les ayants droit de [G] [I] ne peuvent en l’espèce se prévaloir des condamnations prononcées par la cour d’appel et qu’en outre, l’arrêt attaqué est inexécutable. Elle ajoute que, de surcroît, les ayants droit de [G] [I] ne présentent aucune garantie de solvabilité et se dit prête, le cas échéant, à consigner sous séquestre la somme mise à sa charge par l’arrêt attaqué. Elle demande de rejeter la requête.
Aux termes de l’article 1009-1 du code de procédure civile, hors les matières où le pourvoi empêche l’exécution de la décision attaquée, le premier président ou son délégué décide, à la demande du défendeur et après avoir recueilli l’avis du procureur général et les observations des parties, la radiation d’une affaire lorsque le demandeur ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée de pourvoi, à moins qu’il ne lui apparaisse que l’exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que le demandeur est dans l’impossibilité d’exécuter la décision.
L’arrêt attaqué a été prononcé le 10 novembre 2021, alors qu’il est constant que [G] [I] est décédé le 20 mai 2017.
L’obligation mise par l’arrêt attaqué à la charge de la société UPS SCS France de réintégrer [G] [I] dans son emploi ou dans un emploi équivalent à celui qu’il occupait préalablement à son transfert est donc inexécutable.
Il en va, par conséquent, de même de la condamnation à paiement de sommes dues jusqu’à la réintégration effective de [G] [I] dans la société UPS SCS France, dès lors que cette réintégration est impossible et que l’« indemnité d’éviction » n’en est que l’accessoire, étant encore relevé qu’il n’est pas contesté qu’à la date de son décès, [G] [I] n’avait formé aucune demande de réintégration assortie du paiement d’une indemnisation, et que ce n’est que le 25 mai 2018, qu’une assignation en intervention forcée au nom de ce dernier, pourtant décédé, et donc nulle en application des articles 32,117 et 121 du code de procédure civile, a été délivrée par son conseil à la société UPS SCS France.
S’agissant, en revanche, de l’indemnité due en réparation du préjudice subi, il convient de rappeler que, contrairement au jugement d’ouverture d’une procédure collective, le décès n’entraîne pas de plein droit l’interruption de l’instance instituée à l’article 370 du code de procédure civile mais uniquement à compter de sa notification. Au surplus, selon la jurisprudence de la Cour (1re Civ., 16 septembre 2020, pourvoi n° 18-20.023, P), cette interruption n’est prévue qu’au bénéfice des héritiers de la partie décédée qui entendent reprendre l’ instance, la 1re chambre civile en déduisant que, dès lors que le décès allégué du de cujus n’avait pas été notifié par ses héritiers, il n’y avait pas lieu d’interrompre l’ instance.
Il en résulte que le décès du salarié ne prive pas les héritiers de celui-ci de demander la radiation du pourvoi en raison de l’inexécution des condamnations faisant partie de la succession.
En l’espèce, la société UPS SCS France ne soutient pas ne pas être en mesure de s’acquitter de la somme de 267 722,45 euros mise à sa charge par l’arrêt attaqué. Elle propose même de consigner cette somme au motif que les ayants droits de [G] [I] ne présentent aucune garantie de solvabilité, de sorte qu’elle n’a aucune garantie qu’ils seront en mesure de restituer les sommes versées une fois la cassation obtenue.
Cependant, le risque d’insolvabilité du défendeur au pourvoi ne constitue pas une cause d’exonération de l’obligation pour le demandeur au pourvoi d’exécuter la décision attaquée.
En conséquence, il convient d’ordonner la radiation du pourvoi.
Dès lors, la requête doit être accueillie.
EN CONSÉQUENCE :
L’affaire enrôlée sous le numéro J 21-24.380 est radiée.
En application de l’article 1009-3 du code de procédure civile, sauf constat de la péremption, l’affaire pourra être réinscrite au rôle de la Cour de cassation sur justification de l’exécution de la décision attaquée.
Fait à Paris, le 25 janvier 2024
Le greffier,
Le conseiller délégué,
Vénusia Ismail
Michèle Graff-Daudret