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22 mai 2023
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
23/00476
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 23/00476 – N° Portalis DBVH-V-B7H-IWUP
CS
PRESIDENT DU TJ DE CARPENTRAS
11 janvier 2023
RG :22/00298
S.A.R.L. AGEO
C/
S.A.R.L. LA BAUSSINQUE
Grosse délivrée
le
à
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section B
ARRÊT DU 22 MAI 2023
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Président du TJ de Carpentras en date du 11 Janvier 2023, N°22/00298
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre
Mme Corinne STRUNK, Conseillère
M. André LIEGEON, Conseiller
GREFFIER :
Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 17 Avril 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 22 Mai 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
S.A.R.L. AGEO
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Anne GILS de la SELARL G.P & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AVIGNON
INTIMÉE :
S.A.R.L. LA BAUSSINQUE
anciennement dénommée SARL [Localité 4] BUSINESS,
inscrite au RCS d’AVIGNON sous le n° 529 209 165
prise en la personne de son gérant en exercice domicilié es-qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Didier ADJEDJ de la SELASU AD CONSEIL AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS
Statuant sur appel d’une ordonnance de référé
Ordonnance de clôture rendue le 11 avril 2023
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 22 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 26 septembre 2013, Mesdames [S] et [E] ont consenti à la société [Localité 4] Business un bail commercial portant sur des parcelles à usage de terrain de golf, cadastrées section C n° [Cadastre 5] et [Cadastre 6] sur la commune d'[Localité 4] (84), pour une durée de neuf années et moyennant le paiement d’un loyer annuel de 1 000 € HT et HC.
Par acte du 26 octobre 2013, un bail de sous-location a été établi entre la société [Localité 4] Business et M. [L] [J], agissant en son nom propre et au nom de la société AGEO en cours de formation, sur les mêmes parcelles pour une durée de neuf années, à compter du 1er septembre 2013 pour expirer le 31 août 2022, moyennant le paiement d’un loyer annuel de 12.000 € HT et HC payable mensuellement et d’avance.
Suivant acte authentique reçu le 21 mai 2014, la SARL [Localité 4] Sport et Loisirs a cédé son fonds de commerce à la société Académie Golf Entraînement représentée par [K] [J] et [L] [J] au prix de 20.000 euros.
Selon acte d’huissier délivré le 15 novembre 2021, la société [Localité 4] Business a fait commandement à la société Académie Golf Entraînement [Localité 4] (AGEO) de régler l’arriéré de loyers arrêté à la somme de 9 600 euros TVA comprise, dans le délai d’un mois, à défaut de quoi le bailleur entendait user de la clause résolutoire contractuelle.
Suivant acte d’huissier délivré le 7 février 2022, la société [Localité 4] Business a fait délivrer à la SARL AGEO un congé avec refus de renouvellement de bail et offre de paiement d’une indemnité d’éviction.
Par acte d’huissier daté du 21 avril 2022, la société [Localité 4] Business a fait délivrer à la SARL AGEO un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail l’invitant :
-à régler l’arriéré de loyer d’un montant de 6.159,89 euros;
-à justifier d’une assurance locative;
-à assurer le bon état d’entretien des lieux loués et effectuer les réparations locatives à la charge du preneur;
-à équiper la zone autour du practice d’un nouveau dispositif visant à empêcher les balles de golf de tomber sur le site du golf ou sur la route en longeant la partie sud, celui existant étant aujourd’hui dégradé et ne remplissant plus sa fonction de mise en sécurité tant du golf que de la route.
Selon publication au BODACC en date des 14 et 15 mai 2022, la société [Localité 4] Business a changé de dénomination sociale pour devenir la Sarl La Baussinque.
Selon acte d’huissier délivré le 5 août 2022, la société La Baussinque, anciennement [Localité 4] Business, a fait commandement à la société Académie Golf Entraînement [Localité 4] (AGEO) de régler l’arriéré de loyers arrêté à la somme de 4 800 euros TVA comprise, dans le délai d’un mois, à défaut de quoi le bailleur entendait user de la clause résolutoire contractuelle.
Par exploit de commissaire de justice du 29 août 2022, la SARL AGEO et M. [L] [J] ont fait assigner la SARL La Baussinque, venant aux droits de la société [Localité 4] Business devant le tribunal judiciaire de Carpentras à l’effet de prononcer, à titre principal, la nullité du congé délivré le 7 février 2022 pour défaut de qualité à agir et, à titre subsidiaire, de condamner la société défenderesse à payer à la société AGEO une somme de 200.000 euros à titre d’indemnité d’éviction, ainsi qu’en tout état de cause, obtenir sa condamnation à leur verser solidairement la somme de 95.540 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur trouble de jouissance, de la perte d’exploitation et de leur préjudice moral.
Par exploit de commissaire de justice délivré le 11 octobre 2022, la SARL La Baussinque a fait assigner la SARL AGEO devant le président du tribunal judiciaire de Carpentras, statuant en référé, à l’effet de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire et d’expulser la locataire, outre la fixation d’une indemnité d’occupation et l’octroi d’une indemnité de 3000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance contradictoire du 11 janvier 2023, le juge des référés a :
-rejeté l’exception d’incompétence au profit du juge de la mise en état,
-déclaré acquise la clause résolutoire et constaté la résiliation du bail liant les parties à la date du 21 mai 2022,
-ordonné l’expulsion de la société AGEO et celle de tout occupant de son chef dans le délai d’un mois à compter de la signification de la présente ordonnance,
-précisé qu’à défaut, elle en sera expulsée par toute voie de droit, y compris avec le concours de la force publique et d’un serrurier, en cas de besoin, dit que les meubles garnissant les locaux seront remis aux frais de la personne expulsée, dans le lieu désigné par celle-ci et qu’à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier de justice à charge de l’exécution avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques sur autorisation du juge de l’exécution, ce conformément à ce que prévoient les articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d’exécution,
-fixé l’indemnité d’occupation à la somme de 1 000 € par mois et l’a condamnée au paiement de ladite indemnité jusqu’à parfaite libération des lieux,
-dit n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte,
-condamné la société AGEO à verser à la société la Baussinque une indemnité de 1 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens comprenant le coût du commandement et du constat du 5 août 2022,
-dit que la présente ordonnance est assortie de plein droit de l’exécution provisoire.
Par déclaration du 6 février 2023, la SARL AGEO a interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 14 mars 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SARL AGEO, appelante, demande à la cour, au visa des articles 789 et suivants du code de procédure civile, des articles L.121-3 et R.312-6 du code de l’organisation judiciaire et de l’article L.145-9 et L.145-14 du code du commerce, de :
-réformer l’ordonnance référé du tribunal judiciaire de Carpentras en date du 11 janvier 2023, en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
-prononcer l’incompétence du juge des référés en l’état de la saisine du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Carpentras sous le RG 22/01346,
A titre subsidiaire,
-débouter la SARL La Baussinque de l’ensemble de ses demandes,
A titre infiniment subsidiaire,
-Accorder les plus larges délais pour la remise en état du filet de protection,
En toute hypothèse,
-condamner la SARL La Baussinque à payer à la SARL AGEO une somme de 2 000 €, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Au soutien de son appel, la SARL AGEO soutient in limine litis l’incompétence du juge des référés au visa des dispositions de l’article 789 du code de procédure civile, selon lesquelles lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est seul compétent pour ordonner toutes les mesures provisoires. Elle explique qu’en l’espèce, le juge de la mise en état était d’ores et déjà saisi au moment de l’assignation délivrée le 11 octobre 2022.
Sur le fond, elle fait valoir que dès la réception du commandement de payer les loyers, elle s’est rapprochée de l’huissier afin de rétablir la réalité et régulariser les loyers réclamés et justifier des documents demandés.
Elle considère que les reproches de la SARL La Baussinque ne sont pas fondés étant donné qu’elle justifie d’un contrat d’assurance et qu’il n’est pas sérieux de reprocher l’état de la pelouse au mois d’août 2022 compte tenu des conditions climatiques exceptionnelles connues dans la région.
Elle expose encore que la SARL La Baussinque n’assure plus la jouissance paisible des lieux loués ce qui a nui à son chiffre d’affaires. Elle explique que l’exercice de l’activité professionnelle est devenu particulièrement difficile, voire impossible, en raison de coupures intempestives d’électricité et d’eau, du détournement de clientèle, du dénigrement, des dégradations du local où se trouvait les bouteilles de gaz, de l’interdiction d’accès aux toilettes pour la clientèle et notamment les enfants venant prendre des leçons de golf. Elle ajoute qu’elle subit également depuis plusieurs années de nombreuses nuisances olfactives liées à la fosse septique du restaurant.
Enfin, elle soulève que le premier juge n’a pas statué sur la demande de délais qui doivent lui être accordés au cas où les demandes de remise en état devaient être retenues puisqu’en effet, la note d’audience reprend effectivement les demandes de délai exposées lors de l’audience de plaidoirie.
LA SARL La Baussinque, en sa qualité d’intimée, par conclusions en date du 23 mars 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour de :
-confirmer l’ordonnance entreprise en tous ses points,
En conséquence,
-juger que la clause résolutoire est acquise par l’effet du commandement signifié le 21 avril 2022,
-juger que le juge des référés a été saisi antérieurement à la saisine du juge de la mise en état,
-juger en tout état de cause que la clause résolutoire ayant été acquise avant la fin du bail, soit au 21 mai 2022, le juge des référés était compétent pour statuer sur la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire,
-ordonner en conséquence l’expulsion de la société AGEO, dont le siège social est sis [Adresse 7], ainsi que celle de tout occupant de son chef situé sur les parcelles de terrain cadastrées n° [Cadastre 5] et 999 Section C sur le Golf d'[Localité 4], le tout, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir et jusqu’à parfait délaissement,
-ordonner l’expulsion du défendeur et de tout occupant introduit de son chef avec au besoin l’assistance de la force publique et d’un serrurier,
-ordonner l’enlèvement des biens et facultés mobilières se trouvant dans les lieux en un lieu approprié aux frais, risques et périls du défendeur, qui disposera d’un délai d’un mois pour les retirer à compter de la sommation qui sera délivrée par huissier chargé de l’exécution,
-condamner la SARL AGEO à payer à la SARL La Baussinque et à titre provisionnel la somme de 1.200 € TTC au titre de l’indemnité d’occupation due à compter du mois de septembre 2022,
-condamner la SARL AGEO à payer la somme de 3.000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre tous les dépens qui comprendront notamment le coût du procès-verbal de constat d’huissier en date du 5 août 2022.
La SARL La Baussinque fait valoir tout d’abord que le juge de la mise en état n’était pas saisi au moment de la délivrance de l’assignation en référé, soutenant que la clause résolutoire a été acquise avant la fin du bail et avant la saisine du juge en charge de statuer sur l’indemnité d’éviction. Elle explique qu’il s’agit en l’espèce de faire constater par le juge des référés, l’acquisition de la clause résolutoire du fait du manquement du locataire à ses obligations essentielles relevant parfaitement de la compétence du juge des référés, le juge des loyers n’ayant à statuer uniquement sur l’indemnité d’éviction y compris dans le cadre de la mise en état.
Sur le fond, elle soutient que la réitération systématique du non-paiement des loyers et indemnités justifie d’autant plus qu’aucune indulgence ne lui soit accordée, alors même que l’ordonnance de référé 24 mars 2021 avait déjà été particulièrement indulgente à son égard afin de lui laisser le temps de régulariser sa situation.
Elle indique également que le simple défaut de production dans le délai d’un mois de cette assurance justifie que la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire soit faite par le juge et que l’expulsion de la SARL AGEO soit immédiatement ordonnée.
Quant à l’attestation d’assurance, elle relève qu’elle a été produite sept mois après la délivrance du commandement, alors qu’elle devait en justifier dans un délai d’un mois. Elle précise que l’appelante a produit cette attestation la veille de l’audience qui comporte seulement une couverture de l’assurance responsabilité civile, ce qui ne correspond pas aux exigences du bail.
Elle soutient que la société AGEO a manqué gravement et de manière répétée à ses obligations contractuelles, notamment à l’entretien des filets de protection qui longent la route nationale, dont le défaut constitue une obligation de sécurité. Elle lui reproche également le défaut d’entretien de la pelouse et du practice laissé totalement à l’abandon, et se trouvant aujourd’hui dans un état déplorable, ces obligations ayant été rappelées dans le cadre du commandement du 21 avril 2022 qui n’a pas été suivi d’effet dans le délai d’un mois.
Enfin, elle expose que l’indemnité d’éviction, s’il devait y en avoir une, serait pour le moins très faible, au regard du caractère quasi inexistant des derniers chiffres d’affaires de la SARL AGEO, au cours des trois dernières années, et de l’état déplorable des lieux.
La clôture de la procédure est intervenue le 11 avril 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 17 avril 2023, pour être mise en délibéré, par disposition au greffe, au 22 mai 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
– Sur la compétence du juge des référés :
En application de l’article 789 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
…
3/ accorder une provision au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Le juge de la mise en état peut subordonner l’exécution de sa décision à la constitution d’une garantie dans les conditions prévues aux articles 514-5, 517 à 522;
4/ ordonner toutes autres mesures provisoires, même conservatoires, à l’exception des saisies conservatoires et des hypohtèques de nantissements provisoires…
Le caractère exclusif des attributions du juge de la mise en état ne joue que si la demande est présentée au juge des référés postérieurement à la désignation du juge de la mise en état (civ 2ème 18 mars 1998).
Dans l’ordonnance entreprise, le juge des référés a écarté cette exception de procédure au motif que, lors de la saisine du juge des référés, le juge de la mise en état n’avait pas encore été saisi puisque la procédure devant le juge des loyers, initiée par l’assignation délivrée le 29 août 2022, avait été appelée la première fois le 11 octobre 2022 pour faire l’objet d’un renvoi à une prochaine conférence présidentielle.
Cette analyse est contestée par l’appelant qui fait valoir que la saisine de la juridiction est intervenue par acte délivré le 29 août 2022.
En l’état, l’analyse du premier juge est inopérante dans la mesure où la constatation de la résiliation du contrat de bail par acquisition de la clause résolutoire ne relève nullement des compétences exclusives du juge de la mise en état à la différence de l’allocation d’une provision comme cela a été notamment jugé par la cour d’appel de Paris le 23 mars 2017 (AJDI 2017.668).
De même, la juridiction du fond n’est pas saisie d’une demande de résiliation du bail mais de prétentions en lien avec le non-renouvellement du droit au bail, de sorte que le juge des référés est compétent pour connaître du litige.
L’ordonnance entreprise sera confirmée mais sur le motif pris de l’absence de compétence exclusive du juge de la mise en état en matière de résiliation de bail par application de la clause résolutoire.
– Sur la demande de résiliation :
Aux termes de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
Aux termes de l’article L145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
L’article 1353 du code civil dispose que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Des commandements visant la clause résolutoire ont été délivrés les 21 avril, 5 août et 15 novembre 2022 à la demande de la société [Localité 4] Business à destination de l’AGEO .
Le premier acte enjoint au preneur de :
-régler un arriéré locatif d’un montant de 6.000 euros, correspondant à la dette locative allant du mois de décembre 2021 au mois d’avril 2022 inclus,
-de justifier de l’assurance locative,
-d’assurer le bon état d’entretien des lieux et effectuer les réparations à sa charge,
-d’équiper la zone autour du practice d’un dispositif visant à empêcher les balles de golf de tomber sur le site du golf ou sur la route en longeant la partie sud,
et ce, dans un délai d’un mois.
Le deuxième acte lui enjoint de régler un arriéré locatif, sous le même délai, d’un montant de 4.800 euros, correspondant à la dette locative allant du mois de mai au mois d’août 2022 inclus.
Enfin, le dernier commandement porte sur l’obligation de régler l’arriéré de loyers d’un montant de 9 600 euros dans un délai d’un mois.
En l’état, il n’est pas contesté que la dette locative, telle qu’elle figure dans les commandements de payer, a fait l’objet d’une régularisation de la part du preneur dans le délai d’un mois, et ce, à trois reprises, de sorte que l’acquisition de la clause résolutoire n’est pas justifiée s’agissant de l’arriéré locatif.
Il est également justifié de l’assurance qui couvre l’activité de société AGEO pour la période du 1er avril 2022 au 31 mars 2023, comme en témoigne l’attestation produite et émise par MMA PRO-PME.
Pour le surplus, le juge des référés a retenu l’acquisition de la clause résolutoire en raison des manquements du locataire à son obligation d’entretien, notamment liée au très mauvais état général des filets de protection, voire à leur absence sur une partie du golf, ce qui est contraire à la sécurisation des lieux.
La société appelante oppose une exception d’exécution soutenant pour sa part que le bailleur méconnaît les dispositions énoncées à l’article 1719 du code civil qui lui font obligation, entre autre, ‘d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée, d’en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail…’
La société AGEO soutient en effet que le raccordement du practice aux compteurs d’eau et d’électricité ne se fait pas de manière autonome puisqu’il repose sur les contrats d’abonnement et de distribution du bailleur et de la société [Localité 4] Sport et Loisirs . Or, depuis le 11 janvier 2019, date à laquelle la société [Localité 4] Sport et Loisirs a cédé à la société Du Moulin le fonds de commerce de parcours du golf (club house, restaurant, pro shop), elle subit des coupures intempestives d’électricité et d’eau de la part du repreneur.
Elle déplore également la présence de nuisances olfactives émanant de la fosse sceptique du restaurant. Pour finir, l’appelante expose que M. [L] [J] a été confronté à la violence physique et verbale du représentant de la société Du Moulin et que l’exercice de son activité est devenue difficile (dénigrement, dégradations du local où se trouvait les bouteilles de gaz, interdiction d’accès aux toilettes pour la clientèle, détournement de clientèle…).
Au soutien de son appel, la société AGEO produit un procès-verbal d’huissier établi le 27 novembre 2020 faisant le constat de l’impossibilité d’accéder au site Golf d'[Localité 4] et que le site n’était pas alimenté en électricité.
Il est également produit un courrier établi le 23 février 2021 par la société Du Moulin dans lequel il est indiqué le refus de fournir gratuitement la société AGEO en eau et électricité sollicitant de sa part qu’elle se rapproche du fournisseur.
Ces pièces ne sont pas suffisantes pour retenir l’exception de procédure. Le procès-verbal de constat daté du 27 novembre 2020 n’est pas contemporain à la délivrance du premier commandement de payer et ne peut justifier d’une impossibilité d’exploiter le golf alors même qu’il a été dressé la veille de la réouverture du golf après l’interruption de l’activité pendant plusieurs semaines en raison de la crise sanitaire (page 2 du procès-verbal).
Sur l’interruption de l’alimentation, il sera relevé d’une part qu’elle n’est pas imputable au bailleur mais à un tiers, et d’autre part qu’elle est une réponse à l’absence de paiement de la consommation d’eau et d’électricité. Elle ne peut en conséquence caractériser une faute du bailleur.
La présence de nuisances olfactives n’est nullement établie.
Ainsi, faute de rapporter la preuve d’une exception d’inexécution, il résulte, conformément à ce qui a été constaté dans l’ordonnance critiquée, que dans le mois qui a suivi la signification du commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 21 avril 2022, que le preneur n’a pas déféré à l’obligation d’équiper la zone autour du practice d’un dispositif visant à empêcher les balles de golf de tomber sur le site du golf ou sur la route en longeant la partie sud.
Il résulte en effet du procès-verbal de constat dressé le 5 août 2022 par la SCP Maze-Baude que les filets de protection sont déchirés et rapiécés et en très mauvais état général; de même, il est démontré la présence au sol de filets troués ainsi que l’absence de toute protection sur la partie sud du terrain qui longe la route (pièce 11-intimée). Cet élément factuel est également confirmé par un courrier adressé au bailleur par la police de l’environnement de la mairie d'[Localité 4] qui l’informe de l’absence de filet pour protéger les abords du terrain situé en bordure de route (pièce 13).
En appel, il n’est toujours pas justifié par le preneur de ce qu’il a satisfait à cette obligation de sécurité caractérisant ainsi un manquement délibéré à son obligation d’entretien. La demande de délais ne paraît ainsi nullement justifiée.
C’est donc, à juste titre, que le juge de première instance a constaté que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 21 mai 2022, a ordonné l’expulsion de l’appelante et l’a condamnée au règlement d’une indemnité d’occupation, dont le montant n’a pas à être réformé, en considération de la demande de confirmation totale de l’ordonnance formulée par l’intimée.
– Sur les demandes accessoires :
Le sort des dépens et de l’indemnité de procédure a été exactement réglé par le premier juge.
En cause d’appel, il convient d’accorder à la société La Baussinque, contrainte d’exposer de nouveaux frais pour se défendre, une indemnité de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel.
La société AGEO qui succombe, devra supporter les dépens de l’instance d’appel et sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles d’appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référé et en dernier ressort,
Confirme l’ordonnance de référé du 11 janvier 2023 rendue par le président du tribunal judiciaire de Carpentras en toutes ses dispositions, en précisant que la somme de 1 000 euros par mois fixée au titre de l’indemnité d’occupation l’est à titre provisionnel,
Y ajoutant,
Déboute la société Académie Golf Entraînement [Localité 4] (AGEO) de sa demande de délais,
Condamne la société Académie Golf Entraînement [Localité 4] (AGEO) à payer à la société La Baussinque la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel,
Condamne la société Académie Golf Entraînement [Localité 4] (AGEO) aux dépens de la procédure d’appel.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE