22 février 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/08307
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 3
ARRET DU 22 FEVRIER 2023
(n° , pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/08307 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6OF
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2020 -Tribunal Judiciaire de PARIS –
RG n° 13/00108
APPELANT
Monsieur [D] [K]
né le 09 Août 1947 à [Localité 2]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Jean-claude BOUCTOT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0998
INTIMEE
S.A.S. VIA FORUM MEETING
N° SIRET : 344 747 316
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Françoise HERMET LARTIGUE, avocat au barreau de PARIS, toque C0716
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 13 décembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Gilles BALAY, président
Monsieur Douglas BERTHE, conseiller
Madame Marie GIROUSSE, conseillère
qui en ont délibéré
GREFFIERE : Madame FOULON, lors des débats
ARRET :
– contradictoire
– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Douglas BERTHE,Conseiller, en remplacement de Monsieur Gilles BALAY et par Madame Mianta ANDRIANASOLONIARY, greffière présente lors de la mise à disposition.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte du 27 novembre 2003, Mme [V] [U], aux droits de laquelle vient M. [D] [K], a consenti un bail commercial à la société Via Forum Meeting portant sur une boutique située [Adresse 1] et une activité d’importation, exportation, distribution de tissus, vêtements en tous genres, en gros, demi-gros et détail, pour une durée de neuf ans à compter du 1er octobre 2003 pour se terminer le 30 septembre 2012.
Par acte extrajudiciaire du 11 avril 2012, la société Via Forum Meeting a fait délivrer à M. [D] [K] une demande de renouvellement de bail à compter du 1er octobre 2012.
Par acte extrajudiciaire du 04 juillet 2012, M. [D] [K] a notifié à la société Via Forum Meeting un refus de renouvellement du bail pour motifs graves et légitimes avec dénégation du droit au maintien dans les lieux et de tout droit à indemnité d’éviction.
Par exploit du 28 décembre 2012, M. [D] [K] a fait assigner la société Via Forum Meeting devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins d’expulsion et de fixation de l’indemnité d’occupation.
Par jugement mixte en date du 22 septembre 2016, le tribunal a notamment :
– dit que le bail du 27 novembre 2003 portant sur les locaux situés [Adresse 1], à droite de l’immeuble et à l’angle de la [Adresse 5] et de la [Adresse 6], a pris fin le 30 septembre 2012 à 24h00, par l’effet du refus de renouvellement délivré par M. [D] [K] à la société Via Forum, le 04 juillet 2012 ;
– dit que le refus de renouvellement sans offre d’indemnité d’éviction du 04 juillet 2012 n’est fondé sur aucun motif légitime au sens de l’article L.145-17.- I du code de commerce ;
– dit que ce refus de renouvellement ouvre droit, en conséquence, à la société Via Forum à une indemnité d’éviction et au maintien dans les lieux jusqu’à son paiement ;
– fixé à titre provisionnel l’indemnité d’occupation due par la société Via Forum à M. [D] [K], à compter du 1er octobre 2012, au montant contractuel du loyer, charges et taxes en sus ;
– avant-dire droit au fond sur le montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation, tous droits et moyens des parties demeurant réservés à cet égard, désigné en qualité d’expert, Mme [X] [J] avec notamment pour mission de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction en cas de perte du fonds de commerce ou de son transfert, ainsi que le montant de l’indemnité d’occupation due à compter du 1er octobre 2012.
L’expert a rendu son rapport le 22 mai 2019.
Par jugement du 28 mai 2020, le tribunal judiciaire de Paris a :
– dit que par l’effet du congé avec refus de renouvellement signifié le 04 juillet 2012, le bail liant M. [D] [K] et la société Via Forum Meeting, et portant sur des locaux situés [Adresse 1], a pris fin le 30 septembre 2012 ;
– dit que ce refus de renouvellement a ouvert droit pour la société Via Forum Meeting, au paiement d’une indemnité d’éviction ;
– fixé à la somme globale de 1.043.450 euros l’indemnité d’éviction, qui se décompose ainsi :
– indemnité principale : 980.000 euros ;
– indemnités accessoires :
– 36.300 euros pour les frais de remploi,
– 10.000 euros pour le trouble commercial,
– 9.900 euros pour les frais de déménagement,
– 3.500 euros pour les frais administratifs et juridiques,
– 3.750 euros pour les frais de double loyer,
– dit que la société Via Forum Meeting est redevable d’une indemnité d’occupation à compter du 1er octobre 2012 et jusqu’à la date de la libération des lieux ;
– fixé à la somme annuelle de 86.625 euros hors taxes et hors charges, le montant de cette indemnité d’occupation due à compter du 1er octobre 2012 ;
– dit que l’indemnité d’occupation ainsi fixée sera indexée annuellement sur l’indice des loyers commerciaux, l’indice de référence étant celui du 1er trimestre 2012 ;
– dit que la compensation s’opère de plein droit entre les créances réciproques de
M. [D] [K] et de la société Via Forum Meeting ;
– condamné M. [D] [K] aux dépens, en ce inclus les frais d’expertise judiciaire confiée à Mme [J] ;
– condamné M. [D] [K] à payer à la société Via Forum Meeting la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire ;
– rejeté toutes demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 1er juillet 2020, M. [D] [K] a interjeté appel partiel du jugement.
Par conclusions déposées le 05 octobre 2020, la société Via Forum Meeting a interjeté appel incident partiel du jugement.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 30 novembre 2022 et le rapport confié à Douglas BERTHE, conseiller.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Vu les conclusions déposées le 29 novembre 2022, par lesquelles M. [D] [K], appelant, demande à la Cour de :
– déclarer Monsieur [D] [K] recevable et bien fondé en son appel ; y faisant droit ;
– infirmer le jugement entrepris sur les points contestés et statuant à nouveau sur les seuls chefs contestés, à savoir :
a) Sur la fixation de l’indemnité d’éviction globale, de l’indemnité principale et de l’indemnité accessoire fixée pour les frais de remploi ;
b) Sur le montant de l’indemnité d’occupation due à compter du 1er octobre 2012
jusqu’à la date de libération des locaux ;
c) Sur le rejet de la demande subsidiaire de la contre expertise ;
d) Sur la condamnation de M. [D] [K] au paiement de la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– voir fixer l’indemnité d’éviction globale due par Monsieur [D] [K] à la somme de 148 588,00 € ;
– voir fixer l’indemnité d’occupation due par la société Via Forum Meeting à Monsieur [D] [K], à compter du 1er octobre 2012 et jusqu’au 16 novembre 2020 (date de la libération effective des locaux) à la somme de 111 375,00 € par an hors taxes et hors charges ;
– dire que cette indemnité d’occupation sera indexée annuellement sur l’indice des loyers commerciaux (ILC), l’indice de référence étant celui du 1er trimestre 2012 (107,1), et condamner la société Via Forum Meeting au paiement de celle-ci, augmentée des taxes et charges en sus, jusqu’au 16 novembre 2020 inclus, date à laquelle les locaux ont été libérés par la Société Via Forum Meeting ;
– dire que la compensation s’opèrera de plein droit entre les créances réciproques de Monsieur [D] [K] et de la Société Via Forum Meeting ;
– ramener à de plus justes proportions l’indemnité allouée à la société Via Forum Meeting au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– rejeter les moyens de la société Via Forum Meeting et la débouter de ses demandes incompatibles avec ce qui précède ;
– très subsidiairement, et pour le cas où la Cour ne serait pas suffisamment éclairée par les six rapports d’expertise versés aux débats :
– ordonner une contre-expertise et pour y procéder, désigner tel expert qu’il lui avec la même mission précédemment dévolue à Madame [X] [J] désignée suivant jugement avant dire droit de première instance en date du 22 septembre 2016, laquelle mission serait alors actualisée à la date du 16 novembre 2020, date effective de l’éviction.
Vu les conclusions déposées le 29 novembre 2022, par lesquelles la SAS Via Forum Meeting, intimée, demande à la Cour :
– de dire Monsieur [K] infondé en son appel ;
en conséquence,
– de débouter Monsieur [K] de toutes ses demandes ;
– d’écarter des débats la pièce n°8 (rapport amiable de Monsieur [R] du 4 mars 2019) et la pièce n°9 (rapport amiable de Monsieur [S] du 11 octobre 2019) communiquées hors délai par Monsieur [K] après trois années d’expertise judiciaire et n’ayant pas donné lieu à un débat contradictoire en présence de l’expert ;
– d’écarter pour les mêmes motifs les trois rapports non contradictoires établis en 2022, soit plus de 2 ans après le départ de la locataire, rapports qui en outre ne permettent pas de déterminer l’indemnité de transfert au jour du départ du preneur pour prendre en compte une lecture rétrospective des effets de crise conjoncturels, indéterminables en novembre 2020 ;
– de dire la société Via Forum Meeting bien fondée en ses demandes ;
– de confirmer le jugement rendu le 28 mai 2020 en toutes ses dispositions à l’exception du départ du délai de l’indemnité d’occupation qu’il est demandé à la Cour de fixer à compter du jugement rendu le 22 septembre 2016 par le Tribunal de Grande Instance de Paris, compte tenu du délai très important de la procédure judiciaire imposé par les multiples arguments infondés de Monsieur [K] ;
y ajoutant,
– de condamner Monsieur [D] [K] à verser à la société Via Forum Meeting la somme totale de 100.000 euros à titre d’indemnisation de son préjudice résultant des man’uvres de Monsieur [K] visant à retarder la procédure et à refuser de répondre à plusieurs propositions de remise des clefs dans le but de réduire le montant de l’indemnité d’éviction par l’effet de l’augmentation de l’indemnité d’occupation, étant rappelé que le preneur ne peut quitter les locaux sans l’accord du bailleur tant que l’indemnité d’éviction n’est pas réglée par le bailleur au preneur ;
– de condamner Monsieur [D] [K] à payer à la société Via Forum Meeting l’indemnité d’éviction en tout état de cause avec intérêts de retard à compter de la date d’exigibilité correspondant au départ de la locataire et à la restitution des lieux, soit le 16 novembre 2020 ;
– de condamner Monsieur [D] [K] à verser à la société Via Forum Meeting la somme supplémentaire de 10.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure en cela comprenant les frais de l’expertise judiciaire, lesquels pourront être recouvrés par Maître Hermet-Lartigue, avocat, conformément à l’article 699 du Code de Procédure Civile.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties. Cependant, pour une meilleure compréhension du présent arrêt, leur position sera synthétisée.
M. [D] [K] expose :
– sur la surface pondérée qu’un accord entre les parties est intervenu sur une surface pondérée de 165 m²B comme indiqué par Madame [J] qui a été retenue par le tribunal et qui le sera également par la cour,
– sur l’indemnité principale, que les références retenues par Mme [J] sont anciennes (de 2009 à 2014) et sont éloignées du périmètre de la [Adresse 5] ; que Madame [J] n’a pas retenu le fait que le règlement de copropriété interdit toute activité de restauration alors que la plupart de ses références visent essentiellement ce type d’activité, que l’expert judiciaire a retenu, pour une valeur actuelle de marché, un prix unitaire de 1 200 € le m² tout en produisant des références dont il résulte un prix moyen de 770 €, que l’expert judiciaire ignorait la baisse des valeurs locatives entre 2011 et 2017 imputable à la forte diminution du nombre de commerces de gros en tissus dans le quartier historique du Sentier, les activités de commerce en gros du « Sentier » ayant été transférées aux portes de PARIS, qu’il en a résulté une baisse notoire de commercialité du quartier, que les références de M. [R] et celles de M. [S] sont plus récentes et comprennent des baux situés à proximité du périmètre litigieux , qu’il convient de retenir un prix de 650 € du m², que l’évaluation de l’indemnité d’éviction doit être faite au moment où le préjudice est réalisé, c’est à dire au moment auquel l’éviction devient effective, soit au 16 novembre 2020, date de libération des lieux par le preneur, qu’il convient de tenir compte de la diminution de la valeur locative à cette période à raison de la crise sanitaire du Covid-19 et de l’actualiser à la date effective d’éviction, ce qu’ont fait les trois derniers rapports d’expertise amiables établis respectivement par MM. [R], [S] et [O], que ces trois rapports sont parfaitement recevables comme ayant été régulièrement versés aux débats et soumis à l’appréciation de la cour et de l’intimée, que la cour de cassation estime que le juge ne peut écarter des débats et refuser d’examiner un rapport d’expertise amiable régulièrement produit dans une procédure judiciaire contradictoire, qu’il résulte de ces trois rapports une valeur locative moyenne de 523,24 € le m²P, soit 86 334 € au total, elle s’accorde avec l’expert judiciaire pour retenir un coefficient de capitalisation de 7 sur la valeur locative qu’elle détermine ainsi, qu’en revanche le fonds n’a pas été perdu n’a subi aucune perte de clientèle excluant l’existence de toute précarité ; qu’un coefficient de minoration de 2/3 doit donc être appliqué à l’indemnité principale qui doit s’apprécier à 104 171,00 €,
– sur les frais de remploi, qu’ils doivent s’évaluer à 20 % de l’indemnité d’occupation et non de la valeur locative de marché, soit 17 267 € ;
– sur le trouble commercial, qu’elle ne conteste pas le montant de 10 000 € retenu par l’expert judiciaire,
– sur les frais de déménagement, qu’elle ne conteste pas le montant de 9 900 € retenu par l’expert judiciaire,
– sur les frais administratifs et commerciaux qu’elle ne conteste pas le montant de 3 500 € retenu par l’expert judiciaire,
– sur les frais de double loyer, qu’elle ne conteste pas le montant de 3 750 € retenu par l’expert judiciaire,
qu’il en résulte une indemnité d’éviction totale de 148 588 €.
– sur l’indemnité d’occupation, qu’elle doit être fixée à la valeur locative en renouvellement au 1er octobre 2012, soit 750 € /m², soit 123 750,00 € par an HT/HC, que cette indemnité est due depuis la fin du bail jusqu’à la remise des clés au bailleur, soit le 16 novembre 2020, qu’un abattement de précarité de 30 % ne peut être appliqué en ce que l’activité du preneur n’a pas été ralentie en raison de l’éviction qui était contractuellement prévue dès la signature du bail à raison du placement sous tutelle du bailleur et par application de l’article 456 code civil, qu’un abattement de précarité de 10 % doit être appliqué conformément à l’usage en la matière et aux préconisations de l’expert judiciaire, qu’ainsi l’indemnité d’occupation doit être fixée à 111 375,00 € par an HT/HC, que la longueur des opérations d’expertise qu’on lui reproche n’est pas de son fait mais de celui du preneur, comme cela a été relevé par l’expert judiciaire.
La société Via Forum Meeting fait valoir :
– sur l’indemnité principale, que la valeur locative de marché de 1200 € du m² retenue par Mme [J], soit 198 000 € HT/HC/AN au total se justifie par le bon emplacement pour l’activité exercé, du cachet de l’immeuble, de la belle visibilité dont les locaux bénéficient grâce à un linéaire de façade global d’environ 25,57 m 2 et de sa grande surface commerciale et de stockage, que les rapports d’expertise produits ne sauraient être retenus en ce qu’ils sont produits en juin 2022 alors que la fixation de l’indemnité doit être évaluée au jour de son départ le 16 novembre 2020 ; que ces rapports ne sont pas contradictoires, que la baisse de la commercialité résultant des mesures de confinement ne permet pas d’entraîner une baisse de la valeur locative, que Monsieur [K] ne peut de bonne foi se prévaloir d’un confinement de quelques mois pour évaluer indemnité d’éviction, elle s’accorde avec l’expert judiciaire pour retenir un coefficient de capitalisation de 7 pour aboutir à une indemnité principale de 1 095 000 €.
Sur les frais de remploi, qu’ils doivent s’évaluer à 20 % de la valeur locative de marché, soit 40 000 €,
– sur le trouble commercial doit être fixé à 10 000 € ;
– sur les frais de déménagement, qu’elle a communiqué un devis de déménagement de 19.500 euros hors taxes,
– sur le trouble commercial, qu’elle ne conteste pas le montant de 10 000 € retenu par l’expert judiciaire,
– sur les frais administratifs et commerciaux qu’elle ne conteste pas le montant de 3 500 € retenu par l’expert judiciaire,
– sur les frais de double loyer, qu’elle ne conteste pas le montant de 3 750 € retenu par l’expert judiciaire,
– que compte-tenu de la longueur exceptionnelle de la procédure et de la résistance abusive de Monsieur [K] à ses obligations, le point de départ de l’obligation à paiement de l’indemnité d’éviction et des intérêts à courus doit être fixé à la libération des lieux et à la restitution des clefs, soit au 16 novembre 2020, date à laquelle l’indemnité est exigible dans les conditions de l’article L.145-28 du Code de Commerce.
– sur l’indemnité d’occupation, que l’indemnité d’occupation retenue par l’expert judiciaire est élevée compte tenu de la longueur de la procédure imputable à l’appelant, ce qui justifie qu’une indemnité d’occupation soit exclue pour la période à compter de l’assignation devant le tribunal jusqu’au jugement avant dire droit au fond sur l’indemnité d’éviction rendu le 22 septembre 2016,
– sur sa demande de dommages-intérêts, que son préjudice résulte des refus de répondre à des propositions de remise de clés et des comportements procéduriers dilatoires qu’elle impute au bailleur.
MOTIFS DE L’ARRÊT
Sur l’irrecevabilité des rapports d’expertises amiables produits par l’appelant :
Il résulte des articles 6, 15 et 16 du code de procédure civile qu’à l’appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d’alléguer les faits propres à les fonder, que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions ainsi que les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense, que le juge ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement. Il est par ailleurs de jurisprudence constante que le juge du fond ne peut refuser d’examiner des rapports d’expertise amiable établis de façon non contradictoire régulièrement versés aux débats, soumis à la libre discussion des parties et corroboré par d’autres éléments de preuve (Cass. ch. mixte 28-9-2012 n° 11-18.710 ; Civ. 1ère , 9 sept. 2020, n° 19-13.755).
Il résulte des éléments du dossier que les rapports du 4 mars 2019 de M. [R] et du 11 octobre 2019 de M. [S], ont été soumis au débat de la première instance et appréciés par le premier juge dont la décision est présentement appelée.
Les rapports d’expertise de [I] [R] du 31 mars 2022, de [N] [S] du 17 mai 2022 et de Monsieur [O] du 11 mai 2022 ont été communiqués à la partie adverse dans le cadre des débats à hauteur d’appel le 7 juin 2022. L’ordonnance de clôture ayant été prononcée le 30 novembre 2022. La cour ne saurait donc retenir que ces rapports ont été communiqué « hors délai » au preneur.
Ils ont été régulièrement versés aux débats et soumis à la discussion des parties et l’appelant exerce légitimement un droit lui étant garanti en cherchant à fonder ses prétentions par des éléments de preuve qui se corroborent. Il appartiendra donc à la cour de les examiner au regard des autres éléments probant lui étant soumis et notamment le rapport d’expertise judiciaire de Mme [J] du 21 mai 2019.
La demande d’irrecevabilité de ces rapports sera donc rejetée.
Par ailleurs, la cour s’estimant suffisamment éclairée pour fixer l’indemnité d’éviction et l’indemnité d’occupation, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande subsidiaire de M. [D] [K] d’ordonner une contre-expertise.
*
* *
Il convient à titre liminaire de rappeler qu’en vertu du jugement mixte du tribunal de grande instance de Paris du 22 septembre 2016, il est acquis aux débats que le refus de renouvellement délivré par M. [D] [K] le 04 juillet 2012 a mis fin au bail du 27 novembre 2003 à
compter du 30 septembre 2012, qu’il a ouvert droit à la société VIA FORUM au maintien dans les lieux en l’attente du paiement de l’indemnité d’éviction et qu’il a ouvert droit pour M. [D] [K] au paiement d’une indemnité d’occupation statutaire.
Sur indemnité d’éviction :
Aux termes de l’article L 145-14 du code de commerce, en cas de congé avec refus de renouvellement, le bailleur doit payer au locataire évincé une indemnité dite d’éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement, l’indemnité d’éviction est destinée à permettre au locataire évincé de voir réparer l’entier préjudice résultant du défaut de renouvellement. Elle comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.
Il est par ailleurs usuel de mesurer les conséquence de l’éviction sur l’activité exercée afin de déterminer si cette dernière peut être déplacée sans perte importante de clientèle auquel cas l’indemnité d’éviction prend le caractère d’une indemnité de transfert ou si l’éviction entraînera la perte du fonds, ce qui confère alors à l’indemnité d’éviction une valeur de remplacement.
Il est admis que l’indemnité d’éviction s’évalue à la date la plus proche de l’éviction et que la valeur du fonds de commerce est au moins égale à celle du droit au bail qui s’y trouve incluse.
L’article L145-8 code de commerce qui confère au preneur le bénéfice d’un droit au renouvellement du bail commercial est d’ordre public. Il n’est pas contesté qu’alors que c’est le preneur qui avait sollicité le renouvellement du bail, M. [D] [K] a refusé ce renouvellement. S’il est exact que le preneur a acquis le droit au bail pour un montant de 183 000 €, le profit qu’aurait ainsi réalisé la SAS VIA FORUM MEETING du fait du rachat d’un bail initialement non renouvelable en ce qu’il était conclu avec une majeure protégée n’est pas démontré dans son principe ni dans son quantum. En outre et dès la souscription du bail commercial, il était prévisible, comme c’est le cas en l’espèce, que la propriété des locaux loués soit susceptible d’être transférée. Or, le contrat de bail conclu après la cession du droit au bail ne stipule pas qu’une quelconque somme sera à déduire de l’indemnité d’éviction éventuellement exigible. Dès lors, aucune stipulation contractuelle ne vient encadrer le principe d’indemnisation intégrale de l’éviction posé par l’article L 145-14 du code de commerce.
– Sur le caractère transférable ou non du fonds de commerce :
L’indemnité d’éviction a pour objet de compenser le préjudice qui résulte pour le locataire de la perte de son droit au bail. Si le fonds de commerce est transférable, l’indemnité principale est qualifiée d’indemnité de déplacement et correspond au minimum à la valeur du droit au bail, élément incorporel majeur du fonds de commerce.
Si le fonds n’est pas transférable, l’indemnité principale correspond à la valeur du fonds et est dite de remplacement et comprend donc la valeur marchande du fonds, déterminée selon les usages de la profession. Si la valeur du droit au bail est supérieure à la valeur marchande du fonds, le locataire doit alors se voir allouer une indemnité de transfert égale à la valeur du droit au bail.
En l’espèce, la société VIA FORUM exerce, selon la destination prévue au bail, une activité d’« importation, exportation, distribution de tissus, vêtements en tout genre, en gros, demi-gros et détail ». L’activité exercée n’étant pas intrinsèquement liée à l’environnement commercial et à l’emplacement, l’activité de vente en gros ne s’adressant pas à des chalands mais à des détaillants et l’expert relevant l’existence à proximité de locaux d’activités à louer équivalents à ceux perdus, les parties s’accordent pour reconnaître, conformément à la proposition de l’expert judiciaire, que l’exploitation est transférable et que l’indemnité principale doit donc être égale à la valeur du droit au bail. Il est donc constant que la perte du fonds de commerce du preneur n’est pas allégué, s’agissant d’un simple transfert de son activité. Le fait que preneur a bénéficié d’autres locaux avant son éviction ainsi que les caractéristiques prétendument plus favorables à son activité des locaux qu’il occupe désormais sont sans incidence sur la valeur du droit au bail au jour de son éviction. Il n’y aura donc pas lieu d’appliquer un coefficient de minoration à la valeur du droit au bail qui sera retenue.
– Sur la valeur du droit au bail :
La valeur du droit au bail se déduit par la différence entre la valeur locative de marché et la valeur du loyer si celui-ci avait été renouvelé, à laquelle il est d’usage d’appliquer un coefficient de situation en fonction de l’attractivité commerciale de la zone où sont situés les locaux.
Il conviendra de se référer au jugement de première instance en ce qui concerne la description des locaux loués. Les lieux ont été restitués le 16 novembre 2020.
Les parties s’accordent sur une surface pondérée de 165 m²B retenue par l’expert judiciaire et le tribunal.
Le bail ne comporte pas de clause exorbitante du droit commun.
La clause de destination limite l’activité exercée dans les locaux à l’« importation, exportation, distribution de tissus, vêtements en tout genre, en gros, demi-gros et détail ». Il sera relevé que le fait que l’activité de restauration soit interdite par le règlement de copropriété comme le souligne le bailleur ne justifie pas une minoration de la valeur locative, seule l’existence d’une clause « tous commerces » dans le bail pouvant constituer un facteur de majoration de la valeur locative.
S’agissant de la valeur locative de marché, l’expert judiciaire retient une valeur unitaire de marché de 1.200 euros/m²B en se fondant sur des références faisant ressortir une valeur moyenne de 841 € du m² dans le premier et deuxième arrondissement de Paris, soit six références anciennes de 2009 à 2014 en locations nouvelles faisant ressortir un prix moyen de 684 € du m², six références anciennes de fixations judiciaires de 2009 à 2014 faisant ressortir un prix moyen de 687 € du m², trois références anciennes de 2010 à 2013 de renouvellements amiables déplafonnés faisant ressortir un prix moyen de 1 208 € du m² et neuf références anciennes de 2009 à 2015 de loyers décapitalisés faisant ressortir un prix moyen de 1481 € mais de 784 € hors décapitalisation.
S’agissant de la prise en compte de la décapitalisation, la cour constate que la quote-part correspondant à la décapitalisation du prix des locations nouvelles ne correspond pas à un loyer mais a le caractère d’une immobilisation que le locataire peut récupérer lors de la vente du fonds.
En effet, à l’occasion du renouvellement de bail, il convient d’apprécier la valeur locative qui se dégage des loyers périodiques et non la valorisation issue de l’amortissement des droits d’entrée ou des prix de cession versés au cédant et non au bailleur. Par ailleurs les références produites ne comportent pas de précision sur le point de savoir si la décapitalisation constituerait en fait un complément de loyer, fait qui ne se présume pas.
Dans ces conditions, ne sera pris en considération que le prix de location hors décapitalisation pour les locations nouvelles.
L’expert [S] mandaté par le bailleur retient dans son rapport de 2019 une valeur locative de marché de 700€ du m² en se fondant sur 11 références de baux nouveaux de 2010 à 2019, 2 références de renouvellement de bail de 2014 et 2017 et d’un loyer en renouvellement judiciaire de 2014, le tout exclusivement dans le deuxième arrondissement de Paris. Il préconise un prix de 630 € du m² dans son rapport de 2022 eu égard à la baisse des valeurs locatives.
L’expert [R] mandaté par le bailleur retient dans son rapport de 2019 une valeur locative de marché de 800 € du m² en se fondant sur 13 références de baux nouveaux de 2010 à 2019, une référence de renouvellement de bail en 2017 et d’un loyer décapitalisé reconstitué de 2017, le tout exclusivement dans le deuxième arrondissement de Paris. Il préconise un prix de 700 € du m² dans son rapport de 2022 eu égard à la baisse des valeurs locatives.
Le bailleur produit également une expertise de M. [O] de 2022 se fondant sur 20 références dans un secteur géographique proche et retenant cette fois une valeur locative de marché de 450 € du m².
Le preneur produit une expertise amiable se basant sur six références de 2013 à 2017, de laquelle il résulte un prix de marché de 692 € du m².
Eu égard à l’ensemble de ces éléments qui doivent prendre en compte les références les plus contemporaines de la date d’éviction et les plus proches géographiquement, il sera retenu une valeur locative de marché de 760 € par m²B.
En conséquence, la différence entre le loyer qui aurait été payé si le bail avait été renouvelé, soit 41.689,35 euros et la valeur locative de marché, soit 125.400 euros (165 m²B x 760 euros/m²B) s’élève à la somme de 83 710,65 euros, arrondie par commodité à la somme de 83.700 euros.
Eu égard au bon emplacement des locaux loués, l’expert judiciaire propose de retenir un coefficient d’emplacement de 7, qui n’est pas contesté par les parties et qui sera donc retenu.
La valeur du droit au bail s’élève donc à la somme de 585 900 euros, soit (83 700 x 7).
L’indemnité principale sera par conséquent fixée à la somme de 585 900 euros et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
Sur les indemnités accessoires :
Frais de remploi ou d’agence :
Ces frais comprennent les frais et droits que doit supporter le locataire évincé pour retrouver notamment un nouveau local.
Les parties s’accordent avec l’expert judiciaire pour voir appliquer, un coefficient de 20% de la valeur locative de marché. Dès lors, les frais de remploi seront fixés à la somme de 25 080 euros, soit (125.400 x 20%).
Trouble commercial :
Cette indemnité compense la perte de temps générée par l’éviction, soit le moindre investissement dans le commerce et le temps de la recherche d’un nouvel emplacement.
Les parties s’accordent avec l’expert judiciaire pour voir retenir la somme de
10.000 euros au titre de l’indemnisation du trouble commercial.
L’indemnité au titre du trouble commercial sera donc fixée à la somme de 10.000 euros.
Frais de déménagement :
L’indemnité pour frais de déménagement a pour objet d’indemniser 1e preneur des frais exposés pour libérer les locaux dont i1 est évincé.
L’expert judiciaire, suite au devis de déménagement communiqué par le preneur, a évalué ces frais à la somme de 9.900 euros, sur une base de 30 euros/m², qui n’est pas contestée par les parties et sera donc retenue.
L’indemnité au titre des frais de déménagement sera donc fixée à la somme de 9.900 euros.
Frais administratifs et juridiques :
Cette indemnité a pour objet de compenser les frais de formalités du transfert de siège social et les frais exposés pour informer la clientèle de la nouvelle adresse.
Les parties s’accordent avec l’expert judiciaire pour voir retenir une indemnité forfaitaire de ce préjudice à hauteur de 3.500 euros.
L’indemnité au titre des frais administratifs et juridiques sera donc fixée à la somme de 3.500 euros.
Frais de double loyer :
Cette indemnité a pour objet de compenser les frais de double loyer supportés par le preneur durant le temps du déménagement.
Conformément à l’accord des parties, conforme à la proposition de l’expert, l’indemnité au titre des frais de double loyer sera fixée à la somme de 3.750 euros.
***
Il ressort de1’ensemble des éléments ci-dessus exposés que l’indemnité d’éviction totale due à la société Via Forum Meeting s’élève à la somme de :
– indemnité principale : 585 900 €,
– frais de remploi : 25 080 €,
– trouble commercial : 10 000 €,
– frais de déménagement : 9 900 €,
– frais administratifs et juridiques : 3 500 €,
– frais de double loyer : 3 750 €,
TOTAL : 638 130 €.
Sur la demande de condamnation de M. [D] [K] à des intérêts de retard sur indemnité d’éviction :
Il résulte de l’article 1231-7 du code civil qu’en toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal qui courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n’en décide autrement et que l’indemnité allouée en appel, si elle est différente dans son quantum, porte intérêt à compter de la décision d’appel.
En l’espèce et s’agissant d’une fixation, le bailleur n’a pas été condamné à payer une indemnité d’éviction en première instance et cette dernière ne se trouve fixée dans son nouveau quantum que par la présente décision. Eu égard au départ du preneur des lieux loués, le bailleur ne dispose plus d’un droit de repentir et sera donc condamné au paiement de l’indemnité d’éviction, étant rappelé que cette condamnation est expressément sollicitée par le preneur. Il y a donc lieu d’assortir l’indemnité d’éviction de l’intérêt légal mais à compter de la date de la présente décision et non du départ de la locataire.
Sur l’indemnité d’occupation :
Il résulte de l’article L.145-28 et R 145-7 du code de commerce que le locataire évincé qui se maintient dans les lieux est redevable d’une indemnité d’occupation qui est égale à la valeur locative compte tenu de tous éléments d’appréciation, notamment les prix couramment pratiqués dans le voisinage concernant des locaux équivalents. En outre, l’indemnité d’occupation est de nature mixte, compensatoire et indemnitaire et son montant relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.
Le bail ayant pris son terme au 30 septembre 2012, l’indemnité d’occupation est exigible à compter du 1er octobre 2012 jusqu’à la libération des locaux, étant rappelé que les lieux ont été restitués le 16 novembre 2020. Par une prétention distincte, la SAS VIA FORUM MEETING sollicite son indemnisation du fait du comportement allégué du bailleur qui serait notamment responsable de la durée excessive de la procédure. Elle ne peut donc invoquer au surplus et au même motif la réduction de l’indemnité d’occupation dont elle est redevable. En outre et en l’absence d’accord entre les parties sur ce point, sa demande de ne pas être tenue à indemniser son occupation effective des locaux du 1er octobre 2012 au 21 septembre 2016 s’avère sans fondement légal et contrevient au principe fixé par l’article L. 145-28 du code de commerce.
La valeur locative de renouvellement retenue par l’expert judiciaire et le premier juge n’est pas contestée par les parties et s’élève à la somme de 123.750 euros (soit 750 euros x165 m²P).
Par une prétention distincte, la société VIA FORUM MEETING sollicite des dommages-intérêts du fait du comportement allégué du bailleur qui serait responsable de la durée excessive de la procédure et partant de son occupation des lieux. Elle ne peut cependant invoquer au même motif la majoration de l’abattement de précarité d’usage.
L’expert judiciaire et le bailleur proposent de retenir un abattement pour précarité de l’indemnité d’occupation de 10%, conformément aux usages et qui sera ainsi retenu par la cour et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
En conséquence et bien que le preneur a restitué les locaux, sa condamnation n’est pas sollicitée par le bailleur. Il y aura donc lieu de fixer l’indemnité d’occupation annuelle due à compter du 1er octobre 2012 par la société VIA FORUM jusqu’au 16 novembre 2020, à la somme annuelle de 111 375 € euros, soit (123.750 – 10%), hors charges et taxes, outre les taxes et les charges prévues au bail et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
En ce qui concerne, la demande d’indexation de l’indemnité d’occupation, aucune disposition légale ou contractuelle ne les prévoyant et eu égard au caractère mixte de l’indemnité d’occupation, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de ces chefs. Le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce point.
Sur la demande de compensation :
La compensation étant invoquée et la société VIA FORUM et M. [D] [K] étant créanciers l’un de l’autre, il y a lieu de constater que la compensation entre leurs créances réciproques s’opère de plein droit en application de l’article 1347 du code civil et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages-intérêts formée par le preneur :
L’exercice d’un droit ne dégénère en abus pouvant donner naissance a une dette de dommages-intérêts que dans 1e cas de malice, de mauvaise foi, ou d’erreur grossière équipollente au dol. En outre l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et’des’libertés fondamentales garantit aux parties l’accès au juge.
En l’espèce, le bailleur a tenté de faire valoir ses droits en refusant le renouvellement du bail, en soutenant ses prétentions et moyens devant le premier juge et lors des opérations d’expertise, en refusant une transaction qui lui était proposée et en interjetant le présent appel. L’expert judiciaire, dans le compte-rendu de ses diligences fait état de différents contretemps, de reports d’opérations ou de rendez-vous et d’absence ou de retard de communication de pièces imputables au preneur. Il n’est pas contesté que le bailleur a répondu à la demande formée le 7 octobre 2020 par le preneur de quitter les locaux et que le preneur a pu quitter les lieux le 16 novembre 2020. En l’occurrence, il n’est pas démontré de manoeuvre dilatoire ou préjudiciable du bailleur dans l’exercice de ses droits ni sa mauvaise foi.
La demande sera donc rejetée.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Le jugement de première instance sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.
L’instance ayant eu pour cause la délivrance par le bailleur d’un congé refusant le renouvellement, il lui appartient de supporter les dépens de l’appel. Il conviendra également d’autoriser Me HERMET-LARTIGUE, avocat, à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il a été fait l’avance sans avoir reçu provision en application de l’article 699 du code de procédure civile. M. [D] [K] devra en outre indemniser la SAS Via Forum Meeting de ses frais irrépétibles d’appel en lui payant la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du même code.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
REJETTE les demandes d’irrecevabilité des rapports du 4 mars 2019 de M. [I] [R], du 11 octobre 2019 de M. [N] [S], du 31 mars 2022 de M. [I] [R], du 17 mai 2022 de M. [N] [S] et du 11 mai 2022 de M. [P] [O],
DIT n’y avoir lieu à ordonner une contre-expertise,
INFIRME le jugement du 28 mai 2020 du tribunal judiciaire de Paris, sauf en ce qu’il a DIT que par l’effet du congé avec refus de renouvellement signifié le 04 juillet 2012, le bail liant M. [D] [K] et la SAS VIA FORUM MEETING, et portant sur des locaux situés [Adresse 1], a pris fin le 30 septembre 2012, DIT que ce refus de renouvellement a ouvert droit pour la SAS VIA FORUM MEETING, au paiement d’une indemnité d’éviction, DIT que la compensation s’opère de plein droit entre les créances réciproques de M.[D] [K] et de la SAS VIA FORUM MEETING ainsi que ses dispositions sur les frais irrépétibles et les dépens,
et statuant à nouveau,
CONDAMNE M. [D] [K] à payer à la SAS VIA FORUM MEETING la somme globale de 638 130 € au titre de l’indemnité d’éviction assortie de l’intérêt au taux légal à compter de la date du présent arrêt, indemnité d’éviction qui se décompose ainsi :
– indemnité principale : 585 900 €,
indemnités accessoires :
– frais de remploi : 25 080 €,
– trouble commercial : 10 000 €,
– frais de déménagement : 9 900 €,
– frais administratifs et juridiques : 3 500 €,
– frais de double loyer : 3 750 €,
FIXE à la somme annuelle de 111 375 € euros, hors charges et taxes, outre les taxes et les charges prévues au bail, l’indemnité d’occupation due par la SAS VIA FORUM MEETING à M. [D] [K] et ce à compter du 1er octobre 2012 jusqu’au 16 novembre 2020,
y ajoutant,
REJETTE la demande de dommages-intérêts formée par la SAS VIA FORUM MEETING à l’encontre de M. [D] [K],
CONDAMNE M. [D] [K] à payer à la SAS Via Forum Meeting la somme de 5 000 € en indemnisation de ses frais irrépétibles d’appel,
CONDAMNE M. [D] [K] aux dépens de l’appel et autorise Me HERMET-LARTIGUE, avocat, à recouvrer directement ceux dont il a été fait l’avance sans recevoir de provision en application de l’article 699 du code de procédure civile,
REJETTE toutes autres demandes.
LE GREFFIER LE CONSEILLER EN L’EMPÊCHEMENT DU PRÉSIDENT