19 octobre 2022
Cour d’appel de Paris
RG n°
19/11600
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 3
ARRET DU 19 OCTOBRE 2022
(n° , 14 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/11600 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CACS6
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Mai 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 17/02353
APPELANT
Monsieur [B] [M]
né le 17 Mars 1937 à [Localité 10] de nationalité française
[Adresse 7]
Représenté par Me Frédérique ETEVENARD, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : K0065
Assisté de Me Géraldine MACHINET, avocat plaidant du barreau des Hauts-de-Seine
INTIMEE
La société L’ATELIER MAREY
venant aux droits de la SA LES TISSUS MAREY par changement de dénomination sociale
Immatriculée au RCS de sous le numéro 784 839 086
Agissant poursuites et diligences en la personne de son Directeur Général
[Adresse 5]
Représentée par Me Sylvie KONG THONG de l’AARPI Dominique OLIVIER – Sylvie KONG THONG, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0069
Assisté Me Gérard VANCHET, avocat plaidant du barreau de PARIS
INTERVENANTE
Société OCTAVE 2
RCS de Paris sous le N° SIRET : 908 124 969
Prise en la personne de son représentant légal, domicilié es qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0020
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 21 Juin 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Gilles BALAY, Président de chambre
Madame Sandrine GIL, Conseillère
Mme Emmanuelle LEBEE, Magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Claudia CHRISTOPHE
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Gilles BALAY, Président de chambre et par Anaïs DECEBAL, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCEDURE
La société Les Tissus Marey devenue aujourd’hui l’Atelier Marey, exploite un fonds de commerce de vente de tissus et d’articles textiles destinés au prêt à porter depuis 1962 dans un immeuble sis à [Adresse 5], où elle est titulaire de neuf baux. Le bailleur unique était Monsieur [B] [M], propriétaire de tout l’immeuble depuis le décès de son père survenu en 1978.
Elle s’est vue consentir un premier bail dépendant de l’immeuble du [Adresse 5], dans les années soixante. Par la suite, au fur et à mesure du développement de son activité, elle a étendu son occupation de l’immeuble en devenant titulaire de 8 autres baux par acquisition des droits aux bail ou fonds de commerce initialement loués à des tiers (et notamment à la Société de Construction Immobilière et Industrielle, et à la société Anitex), ou par fusion-absorption (avec les Etablissements Colin). Elle occupe à présent la majeure partie (1.100 m2) de l’immeuble du [Adresse 5] aux termes de 9 baux distincts ayant des dates d’échéance différentes, désignés par les lots 30, 40, 50, 60, 80, 150, 160, 170, 190.
Les parties sont en conflit ayant donné lieu à plusieurs litiges et a plusieurs décisions de justice auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits et procédure, et notamment :
Un jugement du juge des loyers commerciaux du 10 juin 2015 confirmé par arrêt de la Cour du 10 mai 2017 rejetant la demande de fixation des loyers des lots 150 et 160 à la valeur locative.
Un jugement rendu le 1er avril 2019 confirmé par arrêt rendu le 15 septembre 2021 par la cour d’appel de Paris, ayant annulé un acte de sommation du 12 décembre 2014, rejeté les demandes du bailleur aux fins de résiliation du bail du lot 170, tant sur le fondement de la clause résolutoire, que par l’appréciation au fond de la gravité des manquements reprochés à la société locataire.
Mais aussi trois autres jugements qui sont l’objet du présent arrêt :
La Cour est saisie d’un appel formé contre le jugement rendu le 10 mai 2019, qui a fait l’objet de l’instance enrôlée sous le n° 19/11600, ayant notamment rejeté la demande de résiliation des baux des lots 40,60, 160,170 et 190, dans les termes suivants :
Dit que les 5 commandements de payer délivrés le 30 décembre 2016 par M. [M] à la société LES TISSUS MAREY n’ont pas régulièrement mis en jeu la clause résolutoire et rejette la demande de M. [M] en constat de l’acquisition de la clause résolutoire des 5 baux liant les parties, ainsi que sa demande subséquente en expulsion,
Déclare recevable la demande dc M. [M] en paiement des charges récupérables pour les années 2005, 2006, 20l2, 2013, 2014, 2015 et 2016,
Déclare irrecevable comme prescrite la demande dc M. [M] en paiement des charges récupérables pour les années 2007, 2008, 2009, 2010 et 2011,
Condamne la société LES TISSUS MAREY à payer à M. [M] la somme de 11.435,29 euros au titre des charges des années 2005, 2006, 2012, 2013, 2014, 2015 et 2016 échues et impayées pour les baux afférents aux lots 40, 60, 160, 170 et 190 de l’immeuble situé [Adresse 5],
Rejette la demande de M. [M] en prononcé de la résiliation judiciaire des baux le liant à la société LES TISSUS MAREY ainsi que sa demande subséquente en expulsion,
Rejette la demande de la société LES TISSUS MAREY en paiement dc dommages et intérêts,
Condamne M. [M] aux dépens, qui comprendront le cout des commandements délivrés le 30 décembre 2016, et qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile,
Dit n’y avoir lieu a application de l’article 700 du code dc procédure civile.
La Cour est saisie d’un appel formé contre le jugement rendu le 19 décembre 2019 qui a fait l’objet de l’instance enrôlée sous le numéro de 20/03582ayant notamment rejeté la demande de nullité des congés délivrés pour les lots 40, 60 et 80 en ordonnant une expertise en vue de la fixation d’une indemnité d’éviction et d’une indemnité d’occupation dans les termes suivants :
REJETTE les demandes de nullité des congés des lot 40, 60 et 80,
DIT que le congé sans offre de renouvellement délivré le 20 juillet 2012 par Monsieur [B] [M] à la société LES TISSUS MAREY à la suite d’une demande de renouvellement délivrée par le preneur le 23 avril2012 a mis fin à compter du 30 juin 2012 au contrat de bail portant sur les locaux (lot 40) situés [Adresse 3],
DIT qu’en l’absence de motifs graves et légitimes établis, Monsieur [B] [M] est redevable d’une indemnité d’éviction et la société LES TISSUS MAREY a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du bail du lot 40 expiré jusqu’au paiement de cette indemnité d’éviction,
DIT que le congé sans offre de renouvellement délivré le 29 juin 2012 par Monsieur [B] [M] à la société LES TISSUS MAREY a mis fin à compter du 31 décembre 2012 au contrat de bail portant sur les locaux (lot 60) situés [Adresse 3],
DIT qu’en l’absence de motifs graves et légitimes établis, Monsieur [B] [M] est redevable d’une indemnité d’éviction et la société LES TISSUS MAREY a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du bail du lot 60 expiré jusqu’au paiement de cette indemnité d’éviction,
DIT que l’itératif du congé sans offre de renouvellement délivré le 20 novembre 2017 par Monsieur [B] [M] à la société LES TISSUS MAREY suite à une demande de renouvellement délivrée par le preneur le 26 juin 2013 à effet du 1er juillet 2013 a mis fin à compter du 30 juin2013 au contrat de bail portant sur les locaux (lot 80) situés [Adresse 3],
DIT qu’en l’absence de motif justifié et établi, Monsieur [B] [M] est redevable d’une indemnité d’éviction et la société LES TISSUS MAREY a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du bail du lot 80 expiré jusqu’au paiement de cette indemnité d’éviction,
Avant dire droit au fond sur le montant de l’indemnité d’éviction, tous droits et moyens des parties demeurant réservés à cet égard, désigne en qualité d’expert [N] [O], [Adresse 6] (‘) avec mission (‘) de visiter les lieux, à savoir les lot 40,60 et 80 situés [Adresse 5], (‘), de donner tous éléments pour déterminer si les neuf baux liant les parties constituent une entité économique et si l’éviction du preneur de trois lots a une incidence sur l’intégralité du fonds de commerce du preneur, rechercher, en tenant compte de la nature des activités professionnelles autorisées par les baux, de la situation et de l’état des locaux, tous éléments permettant de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction des lots 40, 60 et 80 dans le cas d’une perte de fonds, de la possibilité d’un transfert de fonds, sans perte conséquente de clientèle, sur un emplacement de qualité équivalente, et, en tout état de cause, le coût d’un tel transfert, d’apprécier si l’éviction entraînera la perte du fonds ou son transfert, eu égard aux autres baux subsistants, de déterminer le montant de l’indemnité d’occupation due par le locataire pour l’occupation des lieux, objets des baux des lots 40,60 et 80, depuis respectivement les 1er juillet 2012, 1er janvier 2013 et 1er juillet 2013 jusqu’à leur libération effective, à titre de renseignement, dire si, à son avis, le loyer aurait été ou non plafonné en cas de renouvellement des baux et préciser, en ce cas, le montant du loyer calculé en fonction des indices qui aurait été applicable à la date d’effet des congés,(‘)
DECLARE irrecevable la demande en paiement des régularisations de charges des lots 40 et 60 de Monsieur [B] [M],
REJETTE les demandes de résiliation judiciaire des baux des lots 40 et 60,
REJETTE les demandes d’expulsion,
REJETTE la demande d’expertise de Monsieur [B] [M] visant à vérifier l’existence des manquements contractuels du preneur,
FIXE l’indemnité d’occupation provisionnelle des lots 40, 60 et 80 due par la société LANG pour la durée de l’instance au montant du dernier loyer contractuel en principal, outre les charges,
RENVOIE l’affaire à l’audience de mise en état du 27 février 2020 à 11h pour vérification du versement de la consignation,
RENVOIE l’affaire pour reprise des débats après dépôt du rapport de l’expert, à l’audience du juge de la mise en état de la l8eme chambre 1ère section de ce tribunal à la date qui sera fixée ultérieurement par le juge de la mise en état,
La Cour est saisie d’un appel formé contre le jugement rendu le 24 septembre 2020 qui a fait l’objet de l’instance enrôlée sous le numéro de 20/16725 portant sur les baux des lots 170 et 190, qui a notamment rejeté la demande de nullité des actes de refus de renouvellement en ordonnant une expertise en vue de la fixation d’une indemnité d’éviction et d’une indemnité d’occupation dans les termes suivants :
DEBOUTE la société LES TISSUS MAREY de sa demande de nullité des refus de renouvellement sans indemnité d’éviction à elle délivrés le26 mars 2018 au titre des baux portant respectivement sur les locaux composant le lot n’170 et sur les locaux composant le lot n’190 de l’immeuble sis [Adresse 5],
DEBOUTE, en conséquence, la société LES TISSUS MAREY de ses demandes tendant à voir dire que les baux portant sur les lots n »170 et n »190 se sont renouvelés et que le présent jugement vaudra bail,
DIT que le refus de renouvellement sans offre d’indemnité d’éviction délivré le 26 mars 2018 par M. [B] [M] à la société LES TISSUS MAREY a mis fin à compter du 3l décembre2017 au bail les liant portant sur les locaux composant le lot nol70 de l’immeuble sis [Adresse 5],
DIT que les motifs du refus de renouvellement sans offre d’indemnité d’éviction délivré le 26 mars 2018 par M. [B] [M] à la société LES TISSUS MAREY au titre du bail susvisé ne sont ni graves ni légitimes, au sens de l’article L.145-I7 du code de commerce,
DIT, en conséquence, que ce refus de renouvellement ouvre droit pour la société LES TISSUS MAREY à une indemnité d’éviction et au maintien dans les lieux loués à compter du 1er janvier 201 8 et jusqu’à son paiement,
DEBOUTE M. [B] [M] de sa demande en validation du refus de renouvellement sans indemnité d’éviction du26 mars 2018 susvisé, de sa demande d’expulsion de la société LES TISSUS MAREY des locaux composant le lot n »170 de l’immeuble sis [Adresse 5] »‘ » et de sa demande de condamnation de la société LES TISSUS MAREY à lui payer la somme de 17 474,54 euros au titre des travaux afférents à l’appentis vitré compris dans les locaux loués,
DIT que le refus de renouvellement sans offre d’indemnité d’éviction délivré le 26 mars 201 8 par M. [B] [M] à la société LES TISSUS MAREY a mis fin à compter du 31 décembre 2017 au bail les liant portant sur les locaux composant le lot n’190 de l’immeuble sis [Adresse 5],
DIT que les motifs du refus de renouvellement sans offre d’indemnité d’éviction délivré le 26 mars 20 I 8 par M. [B] [M] à la société LES TISSUS MAREY au titre du bail susvisé, soit ne sont ni graves ni légitimes, au sens de l’article L.l45-17 I- I er du code de commerce, soit ne rentrent pas dans le champ d’application de l’article L.145-17-1I-2e du même code,
DIT, en conséquence, que ce refus de renouvellement ouvre droit pour la société LES TISSUS MAREY à une indemnité d’éviction et au maintien dans les lieux loués à compter du 1″‘ janvier 2018 et jusqu’à son paiement, Déboute M. [B] [M] de sa demande en validation du refus de renouvellement sans indemnité d’éviction dt26 mars 2018 susvisé et de sa demande d’expulsion de la société LES TISSUS MAREY des locaux composant le lot n’190 de l’immeuble sis [Adresse 5],
DEBOUTE M. [B] [M] de sa demande d’expertise portant sur la réalité des manquements contractuels de la société LES TISSUS MAREY, notamment en ce qui concerne les travaux réalisés sans autorisation du bailleur et de constater les travaux réalisés aux frais du bailleur dans les lots nol70 et 190,
AVANT DIRE DROIT au fond sur le montant de l’indemnité d’éviction et sur le surplus des demandes de la société LES TISSUS MAREY, tous droits et moyens des parties demeurant réservés à cet égard, Ordonne une expertise et désigne en qualité d’expert [N] [O] [Adresse 6] (‘) avec mission, (‘) de visiter les lieux, à savoir les lots n’170 et 190 sis [Adresse 5], les décrire, dresser le cas échéant la liste du personnel employé par le locataire, donner tous éléments permettant au tribunal de déterminer si les locaux, objets des neuf baux consentis à la société LES TISSUS MAREY dans l’immeuble sis [Adresse 5], constituent un ensemble économiquement indivisible et si l’exploitation du fonds de commerce peut se poursuivre dans les seuls locaux dont les baux sont en cours, de rechercher, en tenant compte de la nature des activités professionnelles autorisées par le bail, de la situation et de l’état des locaux, tous éléments permettant de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction dans le cas d’une perte de fonds (‘), de la possibilité d’un transfert de fonds, sans perte conséquente de clientèle, sur un emplacement de qualité équivalente, et, en tout état de cause, le coût d’un tel transfert, (‘), d’apprécier si l’éviction entraînera la perte du fonds ou son transfert, eu égard aux autres baux subsistants, à titre de renseignement, de dire si, à son avis, le loyer, dans chacun des deux baux concernés, aurait été ou non plafonné en cas de renouvellement du bail et préciser, en ce cas, le montant du loyer calculé en fonction des indices qui auraient été applicables à la date du 3 I décembre 2017, (‘)
ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision,
RESERVE les dépens et l’article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La société Les Tissus Marey a changé de dénomination sociale et elle est dénommée L’Atelier Marey.
Aux termes d’un acte de vente reçue par Maître [L] [V], notaire à [Localité 9], en date du 15 décembre 2021, la société Octave 2 a acquis l’immeuble de Monsieur [B] [M]. L’acquéreur est intervenu volontairement dans les trois instances susvisées.
Par arrêt avant-dire droit ordonnant la réouverture des débats, en date du 9 février 2022, la Cour a ordonné la jonction des instances 20/16 725 et 20/03 582 ; et dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, ces instances ont été jointes le 9 mars 2022 avec l’instance 19/11 600.
La procédure a été clôturée le 21 juin 2022.
MOYENS ET PRETENTIONS
Vu les conclusions déposées au greffe le 14 juin 2022 au nom de la société l’Atelier Marey;
Vu les conclusions déposées au greffe le 10 mai 22 au nom de Monsieur [B] [M] ;
Vu les conclusions déposées au greffe le 14 juin 2022 au nom de la société Octave 2 ;
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.
MOTIFS DE L’ARRET
Sur l’intervention volontaire de la société Octave2
Il résulte de deux attestations de la SCP Wargny Katz, notaire, en date du 16 décembre 2021 et de la société Screeb Notaires du 7 avril 2022 que par acte du 15 décembre 2021, la société Octave 2 a acquis de monsieur [M] l’immeuble litigieux, en totalité, avec transfert de jouissance immédiat ; cet acte informe l’acquéreur de la situation locative, des procédures en cours, subroge l’acquéreur dans l’exercice des baux, avec transfert des dépôts de garantie pour la somme de 19 500, 89 €.
La société Octave 2 est en conséquence recevable en son intervention volontaire en qualité de nouveau bailleur.
Sur la validité des actes de congés et des actes de refus de renouvellement, par lesquels Monsieur [S] [M] prétend s’opposer au renouvellement des baux relatifs aux lots 40,60, 80,170 et 190
Le bailleur étant toujours en droit de refuser le renouvellement du bail expiré en payant une indemnité d’éviction, l’absence de justification de motifs graves et légitimes, n’entraîne pas la nullité du congé. Il laisse subsister le refus de renouvellement mais ouvre droit, pour le preneur, au paiement d’une indemnité d’éviction conformément aux dispositions de l’article L145-14 du code de commerce.
Cependant, il est communément admis que la fraude corrompt tout.
De même, suivant les termes de l’ancien article 1134 du Code civil dans sa rédaction applicable au litige, dont la règle est à nouveau énoncée par l’article 1104 du Code civil dans sa rédaction actuellement en vigueur, les contrats doivent être exécutés de bonne foi.
Il doit être rappelé qu’en l’espèce, la société locataire exploite un fonds de commerce unique dans des locaux réunis au fil du temps pour former un ensemble qui a été nécessaire au développement de son exploitation, selon la volonté commune des parties, situé dans un immeuble qui était l’entière propriété de Monsieur [S] [M].
Il est certain que les parties, dans le passé, auraient pu réunir l’ensemble des baux en une seule convention et qu’elles ne l’ont pas fait, usant de la liberté contractuelle rappelée par l’article 1102 du Code civil.
Ainsi, il est normal que chaque bail fasse l’objet de décisions distinctes, de la part du bailleur comme du preneur, qu’il s’agisse de leur exécution, ou de leur renouvellement.
Néanmoins, considérant l’unicité du fonds de commerce, la société Atelier Marey entend légitimement, soit obtenir le renouvellement de tous les baux, soit obtenir une juste indemnisation en cas d’éviction ; c’est la raison pour laquelle elle a demandé le renouvellement des baux venant à expiration, concernant les lots 80,170 et 190, pour lesquels le bailleur n’avait pas donné congé, et elle tente légitimement de s’opposer aux congés qui ont été délivrés pour les lots 40 et 60 et ultérieurement pour le lot 80. Elle ne peut pas envisager en effet de maintenir son fonds de commerce en étant évincée, avec ou sans indemnité, des lots 40 et 60 d’une part, et des lots 80,170 et 190 d’autre part, en ne conservant la jouissance que des lots 30, 50,150 et 160.
À l’inverse, Monsieur [S] [M] a pris des décisions radicalement différentes et presque simultanées, en faisant signifier un congé avec offre de renouvellement pour les lots 150 et 160 par des actes du 29 juin 2012, alors qu’il a fait signifier à la société locataire congé pour le lot 60 par acte du 29 juin 2012, pour le lot 40 par acte du 20 juillet 2012.
Cependant, cette contradiction apparente ne démontre pas la mauvaise foi ni la fraude, mais révèle tout au plus que par la délivrance d’actes de congés, il a entendu défendre la valeur de son patrimoine, quitte à exercer une certaine pression sur le locataire dans le cadre de discussions pouvant se poursuivre pour le renouvellement de l’ensemble des baux venant à expiration à cette période.
Les commandements de payer visant la clause résolutoire qui ont été signifiés le 30 décembre 2016, concernant tous les 5 baux faisant l’objet du présent litige, ont certes été annulés par le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 10 mai 2019, mais la mauvaise foi contractuelle relevée par le tribunal n’avait alors pas de rapport avec le renouvellement des baux et résultait du fait d’avoir invoqué la clause résolutoire pour des sommes faisant l’objet de litiges et discussions sérieuses entre les parties depuis 2012, sans que le défaut de paiement de certaines charges soit d’ailleurs considéré comme une infraction suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire.
De même, l’arrêt de la Cour du 15 septembre 2021, confirmant le jugement du 1er avril 2019 ayant annulé la sommation délivrée le 12 décembre 2014, concernant des travaux et modification des lieux se rapportant au lot 170, n’est pas fondée sur une fraude mais sur l’analyse des obligations contractuelles des parties concernant l’entretien, et concernant des travaux de transformation et de modification du cloisonnement sans autorisation du bailleur.
Compte tenu des congés signifiés pour les lots 40,60 et 80, il n’était pas déloyal que le bailleur refuse par deux actes en date du 26 mars 2018 le renouvellement des baux portant sur les lots 170 et 190, sous réserve bien sûre de l’appréciation des motifs de refus invoqué, qui font l’objet de la discussion ci-après.
Ainsi, la fraude n’est pas démontrée et le tribunal doit être approuvé d’avoir rejeté le moyen de nullité des actes de congés et des actes de refus de renouvellement.
Sur la demande de constat d’acquisition de la clause résolutoire
La société Octave 2 demande la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire pour les lots 160 et 190 en se référant dans ses conclusions aux commandements signifiés le 30 décembre 2016.
Cependant, la société Octave 2 demande à la Cour à titre principal de confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que par l’effet des congés valablement signifiés à la requête de monsieur [M], les baux portant sur les lots 170 et 190 avaient pris fin le 31 décembre 2017.
Sa demande de résiliation par constat d’acquisition de la clause résolutoire est une demande alternative, nécessairement subsidiaire, pour le lot 190.
Il en va de même pour les baux des lots 40, 60 et 80 dont il est demandé à titre principal de juger qu’ils ont pris fin par l’effet des congés à des dates très antérieures à la signification des commandements.
S’agissant du lot 160, Un commandement est visé dans les conclusions mais le bailleur ne précise à aucun moment dans ses conclusions quelles sont les obligations du preneur qui ont été visées par cet acte, et s’agissant des charges, quel était le montant réclamé pour ce lot.
Le jugement entrepris doit être approuvé d’avoir jugé que ce commandement, comme les quatre autres signifiés le même jour, invoquait la clause résolutoire dans une attitude de mauvaise foi contractuelle, qui justifie l’annulation de ces actes et prive d’effet la clause résolutoire.
Les contestations du preneur ne suffisent pas à faire échec à la clause résolutoire ; mais la situation complexe des neufs baux, l’absence d’exigence ou de régularisation des charges pendant de nombreuses années, alors que malgré les pièces produites, un litige persistant sur la prescription d’une partie des charges rendait nécessaire un apurement de comptes, caractérise cette mauvaise foi qui procède d’une volonté de faire pression de manière anormale sur la société preneuse, alors qu’un congé avait été signifié le 29 juin 2012 à effet du 31 décembre 2012.
Sur le sort des baux des lots 40, 60, 80, 170 et 190
C’est par des motifs pertinents qu’il convient d’adopter entièrement que le tribunal, par jugement du 19 décembre 2019, a estimé que les motifs allégués dans les congés des 29 juin 2012, 20 juillet 2012, et 20 novembre 2017 ne sont pas graves et légitimes, au sens de l’article Ll45-17 1° du code de commerce et que le bailleur étant toujours en droit de refuser le renouvellement du bail expiré en payant une indemnité d’éviction, l’absence de justification de motifs graves et légitimes n’entraîne pas la nullité du congé, laisse subsister le refus de renouvellement mais ouvre droit, pour le preneur, au paiement d’une indemnité d’éviction conformément aux dispositions de l’article L145-14 du code de commerce.
Le congé sans offre de renouvellement délivré le 20 juillet 2012 par Monsieur [B] [M] a mis fin à compter du 30 juin 2012 au contrat de bail portant sur le lot 40,
Le congé sans offre de renouvellement délivré le 29 juin 2012 a mis fin à compter du 3l décembre2012 au contrat de bail portant sur le lot 60,
L’itératif congé sans offre de renouvellement délivré le 20 novembre 2017 suite à une demande de renouvellement délivrée par le preneur le 26 juin 2013 à effet du 1er juillet 2013 a mis fin à compter du 30 juin2013 au contrat de bail portant sur le lot 80.
En application de l’article L.145-28 du code de commerce, la société Atelier Marey a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses des baux expirés jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction.
C’est par des motifs pertinents qu’il convient d’adopter entièrement que le tribunal, par jugement du 24 septembre 2020, a estimé que les motifs allégués dans les actes de refus de renouvellement du 26 mars 2018 concernant les baux portant sur les lots 170 et 190 ne sont pas graves et légitimes, au sens de l’article Ll45-17 1° du code de commerce et que le bailleur étant toujours en droit de refuser le renouvellement du bail expiré en payant une indemnité d’éviction, l’absence de justification de motifs graves et légitimes n’entraîne pas la nullité du congé, laisse subsister le refus de renouvellement mais ouvre droit, pour le preneur, au paiement d’une indemnité d’éviction conformément aux dispositions de l’article L145-14 du code de commerce.
Les actes de refus de renouvellement du 26 mars 2018 ont mis fin à compter du 31 décembre 2017 aux contrats de bail portant sur les lots 170 et 190.
En application de l’article L.145-28 du code de commerce, la société Atelier Marey a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses des baux expirés jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction.
Sur l’indemnité d’éviction
La configuration des lieux, l’historique des relations contractuelles, et les conditions d’exploitation actuelle du fonds de commerce unique par la société Atelier Marey, obligent à rechercher si les 9 baux liant les parties sont ou non indivisibles, de sorte que le tribunal doit être approuvé, en l’absence d’éléments suffisants permettant de se prononcer sur cette question, d’avoir donné pour mission à l’expert judiciaire, chargé de donner son avis sur les indemnités d’éviction, de donner au tribunal tous éléments permettant de déterminer si les locaux qui font l’objet de ces 9 baux constituent un ensemble économiquement indivisible, ou si l’exploitation du fonds de commerce pourrait se poursuivre dans les seuls locaux dont les baux sont en cours.
Les deux jugements entrepris en date du 19 décembre 2019 et 24 septembre 2020 doivent donc être confirmés en ce qu’ils ont ordonné avant-dire droit sur l’évaluation des indemnités d’éviction, l’expertise confiée à Madame [N] [O].
Il n’y a pas lieu d’évoquer et de statuer sur la demande d’indemnité d’éviction présentée en appel par la société Atelier Marey, le tribunal demeurant saisi de ces prétentions, ayant par ailleurs été saisi d’une nouvelle demande d’indemnité d’occupation par assignation du 26 avril 2021.
Sur Les indemnités d’occupation
Dans l’instance enrôlée sous le numéro 20/03 582, aucune partie ne critique la disposition du jugement ayant dit que pendant la durée de l’instance il y a lieu de fixer le montant de l’indemnité d’occupation provisionnelle à une somme égale au montant du loyer contractuel en cours des baux des lots 40, 60 et 80.
Cette disposition doit en conséquence être confirmée de même que la mesure d’expertise ayant pour objet « 3) de déterminer le montant de l’indemnité d’occupation due par le locataire pour l’occupation des lieux, objets des baux des lots 40,60 et 80, depuis respectivement les 1 er juillet 2012, 1er janvier 2013 et 1er juillet 2013 jusqu’à leur libération effective, à titre de renseignement, dire si, à son avis, le loyer aurait été ou non plafonné en cas de renouvellement des baux et préciser, en ce cas, le montant du loyer calculé en fonction des indices qui auraient été applicables à la date d’effet des congés,
Dans l’instance enrôlée sous le numéro 20/16 725, le jugement précise que la société locataire a droit au maintien dans les lieux aux clauses et conditions du bail expiré et la mission donnée à l’expert de , dire si, à son avis, le loyer aurait été ou non plafonné en cas de renouvellement des baux et préciser, en ce cas, le montant du loyer calculé en fonction des indices qui auraient été applicables au 31 décembre 2017 permettra au tribunal de statuer sur le montant de l’indemnité d’occupation due par le locataire pour l’occupation des lieux qui font l’objet des baux des lots 170 et 190 à compter du 1er janvier 2018.
Sur la demande de résiliation judiciaire des baux
Il n’y a pas lieu de statuer sur cette demande formée à titre nécessairement subsidiaire de la demande principale du bailleur qui est accueillie, ayant constaté que les baux litigieux ont pris fin par l’effet des congés.
Sur la demande de remboursement du coût des travaux de l’appentis vitré
Monsieur [M] demande à la Cour la condamnation de la Société Les Tissus Marey à rembourser à Monsieur [M] la somme de 17.474,54 € au titre des travaux de l’appentis vitre’; il reproche au tribunal d’avoir fait une interprétation de la clause 35 du bail trop favorable à la société locataire, alors que le bail met les réparations de cette couverture vitrée à sa charge.
C’est pourtant par une analyse pertinente que le tribunal a rejeté cette prétention par des motifs que la Cour adopte, en jugeant que le bail du 6 avril 1978 met à la charge du preneur les seules réparations des couvertures vitrées en cas d’infiltrations de leur chef et les seuls travaux d’entretien du « ciel vitré » tels que déterminés dans l’article 606 du code civil, sans aucunement stipuler l’obligation du preneur relativement aux grosses réparations des couvertures. Or, il résulte de l’attestation de M. [W] [D], architecte du patrimoine, que les travaux concernant la « zone appentis verrière » du lot 170 réalisés sous sa direction ont consisté dans la dépose et l’évacuation de la couverture existante, dans la dépose du chéneau, dans la réfection intégrale des deux pans de couverture et dans la réalisation d’une couverture entièrement neuve en zinc en remplacement de celle déposée, travaux qui, par leur nature et leur ampleur, excèdent les réparations et l’entretien de la couverture vitrée incombant contractuellement à la société locataire.
Sur les charges locatives
Monsieur [M] demande la condamnation de la société Les Tissus Marey à lui payer la somme totale en principal de 96.720,78 € au titre de charges dont:
Et de juger que les sommes dues pour les lots n° 40, 170 et 190 doivent être augmentées de 5% au titre des pénalités contractuelles ; et que toutes les sommes dues porteront intérêt à compter de la date du 30 décembre 2016 pour les sommes comprises dans les commandements de payer, et à compter du 30 août 2019 pour les sommes échues postérieurement au 30 décembre 2016.
En application de l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Il est constant que la demande en justice interruptive de prescription résulte en l’espèce des conclusions signifiées le 7 juillet 2017 dans le cadre de la procédure de première instance ayant donné lieu au jugement du 10 mai 2019, par lesquelles le bailleur formait une demande de condamnation au titre des régularisations de charges des années 2005 à 2015.
En application de l’article 2238 du code civil, la prescription est suspendue à compter du jour où, après la survenance d’un litige, les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation ou, à défaut d’accord écrit, à compter du jour de la première réunion de médiation ou de conciliation.
La médiation ordonnée en l’espèce par ordonnance du 19 mai 2015 dans le cadre de la procédure ayant donné lieu au jugement du 1er avril 2019 confirmé par arrêt du 15 septembre 2021, qui n’avait pas pour objet le recouvrement des charges, n’a pas eu d’effet suspensif, même si une mesure de médiation pouvait permettre un règlement global des différends. L’effet suspensif ne s’attache qu’à l’objet du litige strictement défini par les prétentions soumises au juge.
En application de l’article 2244 du code civil, le délai de prescription ou le délai de forclusion est également interrompu par une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d’exécution ou un acte d’exécution forcée.
Les commandements de payer du 30 décembre 2016, en ce qu’ils n’engagent pas une mesure d’exécution forcée, n’ont pas interrompu la prescription.
En application de l’article 2240 du code civil, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription.
En l’espèce, il est constant que pendant de nombreuses années, le bailleur ou son mandataire avait appelé des provisions sur charges sans opérer de régularisation annuelle, ce qui faisait l’objet de discussions et de désaccords.
La première demande de régularisation est intervenue par lettre du 29 novembre 2011 portant sur les exercices 2009 et 2010. Et par lettre du 20 février 2015 le bailleur réclamait une régularisation de charges pour les exercices 2005 à 2008 et 2011 à 2013.
Les lettres échangées à l’issue de ces réclamations ne comportent pas la reconnaissance de la créance du bailleur mais expriment des contestations. La demande de justificatifs et même l’engagement de payer les sommes dues à réception des justificatifs ne constituent pas la reconnaissance du droit, laquelle ne saurait porter que sur un montant déterminé et sans conditions de vérifier le bien-fondé par l’analyse de justificatifs, d’autant que des contestations avaient été émises sur la nature des charges exigées et pas seulement sur leur montant.
En application de l’article 2251 du code civil, la renonciation à la prescription est expresse ou tacite. La renonciation tacite résulte de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription. L’article 2250 précise que seule une prescription acquise est susceptible de renonciation.
Les multiples demandes de régularisation des charges pour des exercices antérieurs prescrits ne peuvent pas s’analyser en une volonté non équivoque de renoncer à invoquer la prescription, alors que dans le courrier du 8 décembre 2011, c’est la société Les Tissus Marey qui voulait écarter la prescription, non pour sa dette qu’elle aurait reconnue, mais pour sa créance contre le bailleur en restitution de charges indues payées par provision. Il ne s’agissait donc pas d’une renonciation à une prescription qu’elle aurait invoquée mais d’une opposition à la prescription que le bailleur ou son mandataire semblait vouloir opposer à sa réclamation de remboursement pour éviter d’avoir à refaire des comptes fastidieux négligés depuis plusieurs années.
C’est pourquoi la participation à une réunion au sujet des charges, ou la demande de justificatifs par mail du 16 mars 2015 ne peut davantage s’interpréter en une renonciation à prescription acquise.
D’ailleurs, le bailleur le reconnaît en écrivant dans ses conclusions que « Ce n’est qu’en s’apercevant que le montant de sa dette, au titre des charges, ne faisait qu’augmenter, en procédant aux régularisations sur les années antérieures, pourtant expressément demandées, que le locataire a subitement changé de stratégie en invoquant la prescription des charges antérieures ». Cela démontre aussi que la société locataire ne voulait pas qu’on lui oppose la prescription tant qu’elle s’estimait créancière mais n’a jamais renoncé à invoquer à son profit la prescription, ce qu’elle a fait par sa lettre du 24 février 2015.
Il résulte des constations qui précèdent que l’action de Monsieur [M] est irrecevable en raison de la prescription en ce qu’elle porte sur le recouvrement de charges exigibles avant le 7 juillet 2012.
Ainsi sont exigibles les charges de régularisation de l’exercice 2012 et les charges ultérieures. Pour la détermination des charges exigibles, la Cour adopte la motivation du jugement entrepris, en ce que les charges pour la rémunération de la gardienne sont à réduire de 60%, et la taxe foncière à exclure, sauf pour le lot 160.
Le tableau récapitulatif versé aux débats (pièce 32-2) inclut un report des sommes visées dans le commandement du 30 décembre 2016, qu’il faut rectifier en fonction de ce qui précède ; et les charges appelées pour les exercices 2017 à 2021 appellent le même retraitement en se reportant aux notifications annuelles de régularisation.
Le compte des charges doit être ainsi refait pour les lots 40, 60, 160, 170, 190, en fonction des demandes dont la Cour est saisie.
Cela suppose la consultation d’un technicien en application des articles 256 et suivants du code civil, selon la mission précisée au dispositif ci-après.
Sur la restitution du dépôt de garantie
En l’absence de résiliation et en l’état du maintien dans les lieux, la demande relative au dépôt de garantie n’est pas fondée car prématurée.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Les dispositions du jugement du 10 mai 2019 relatives aux dépens et frais irrépétibles sont confirmées.
Les dépens et frais irrépétibles d’appel seront réservés.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
REÇOIT la société Octave2 en son intervention volontaire,
CONFIRME, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 19 décembre 2019 par le tribunal judiciaire de Paris (RG 14/09095),
CONFIRME, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 24 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Paris (RG 18/07034)
Dit n’y avoir lieu d’évoquer,
INFIRME partiellement le jugement rendu le 10 mai 2019 par le tribunal judiciaire de Paris (RG 17/02353),
LE CONFIRME en toutes ses dispositions à l’exception de celle ayant déclaré recevable l’action en paiement des charges locatives exigibles pour les exercices, 2005, 2006 et 2012 et de celle ayant condamné la société Les Tissus Marey à payer à monsieur [S] [M] la somme de 11 435,29 € en rejetant le surplus de ses demandes en paiement de charges locatives,
Et statuant à nouveau de ces seuls chefs,
DÉCLARE irrecevable en raison de la prescription la demande de Monsieur [S] [M] en paiement de charges exigibles avant le 7 juillet 2012,
Avant dire droit sur le montant des charges dues par la société L’Atelier Marey postérieurement au 7 juillet 2012,
Ordonne une consultation,
DÉSIGNE pour y procéder Monsieur [Z] [P] [Adresse 1] ([Courriel 8]).Avec pour mission, les parties ayant été convoquées et dans le respect du principe du contradictoire, de:
1/ se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l’accomplissement de sa mission,
2/ Proposer un apurement du compte des charges locatives exigibles, depuis le 7 juillet 2012 jusqu’au 15 décembre 2021, pour les lots 40, 60, 160, 170 et 190 tenant compte des provisions appelées, des paiements effectués, d’éventuels crédits de charges sur les quatre autres lots loués, et en réduisant de 60% les charges récupérables au titre du salaire de la gardienne de l’immeuble et en incluant la taxe foncière pour le seul lot 160,
DIT que le technicien sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 256 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au greffe de la 3ème chambre du pôle 5 (5-3) de la cour d’appel de Paris avant le 28 février 2023 ;
FIXE à la somme de 1.500 euros la provision à valoir sur la rémunération du technicien, somme qui devra être consignée par Monsieur [S] [M] à la Régie de la cour d’appel de Paris, [Adresse 4] avant le 30 novembre 2022;
DIT que, faute de consignation de la provision dans ce délai, la désignation du technicien sera caduque et privée de tout effet ;
DIT qu’un des magistrats de la chambre sera délégué au contrôle de cette mesure d’instruction,
ORDONNE la réouverture des débats à l’audience du 5 avril 2023 à 14 heures, et fixe la clôture de l’instruction au 29 mars 2023;
SURSOIT à statuer sur les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile;
RÉSERVE les dépens.
REJETTE les autres demandes.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT