Indemnité d’éviction : 17 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00414

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Indemnité d’éviction : 17 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00414
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17 mai 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
22/00414

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 MAI 2023

N° RG 22/00414

N° Portalis DBV3-V-B7G-U735

AFFAIRE :

[S] [Z] épouse [F]

C/

S.A.S.U. ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Janvier 2022 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : 19/01027

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Arnaud OLIVIER

la SCP Herald

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [S] [Z] épouse [F]

née le 25 Novembre 1958 à [Localité 4] (Algérie)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Arnaud OLIVIER, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0476, substitué par Maître Denis DERRENDINGER, avocat au barreau de PARIS – N° du dossier 18-044

APPELANTE

****************

S.A.S.U. ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE

N° SIRET : 303 40 9 5 93

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Guillaume ROLAND de la SCP Herald anciennement Granrut, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0014

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 31 Mars 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,

EXPOSE DU LITIGE

Mme [S] [Z] épouse [F] a été engagée par la société Elior Services Propreté et Santé suivant un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 4 juin 2007 en qualité d’agent de service, niveau As1.

Le 12 mars 2013, Mme [F] a été victime d’un accident du travail, se faisant une entorse à la cheville gauche et a fait l’objet d’arrêts de travail.

Le 4 mai 2017, Mme [F] a été victime d’un accident de travail alors qu’elle travaillait pour son autre employeur la société Elis et a fait l’objet d’arrêts de travail.

Après un premier avis du 8 janvier 2018, le médecin du travail a rendu le 9 février 2018 l’avis suivant : ‘inapte à tous postes d’agent de propreté debout. Reclassée en poste assise par 2ème employeur MAJ adapté ; Lien entre accident du travail du 4 mai 2017 et inaptitude au poste d’agent de service de 6h à 9h30 de ménage de bureaux et salles de réunion toilettes du site EDF Capital à [Localité 3]. Echanges téléphoniques et par email 9 janvier 2018 avec chef d’agence Elior ; Fiche d’entreprise faite le 3 mai 2017. 2ème visite ce jour’.

Par lettre du 28 mars 2018, Mme [F] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 9 avril 2018.

Par lettre du 18 avril 2018, l’employeur a licencié la salariée pour inaptitude professionnelle et impossibilité de reclassement.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés.

Le 15 avril 2019, Mme [F] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre afin d’obtenir la condamnation de la société Elior Services Propreté et Santé au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de diverses indemnités et sommes au titre de l’exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement en date du 14 janvier 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a confirmé que le licenciement de Mme [F] reposait sur une cause réelle et sérieuse, condamné la société Elior Services Propreté et Santé à lui verser :

* 191,02 euros au titre du complément de maintien de salaire,

* 19,10 euros au titre des congés payés afférents,

avec intérêt au taux légal à compter de la saisine de la juridiction,

– débouté Mme [F] du surplus de ses demandes,

– débouté la société Elior Services Propreté et Santé de sa demande au titre de l’article 700 code de procédure civile,

– laissé à chaque partie la charge de ses dépens.

Le 10 février 2022, Mme [F] a interjeté appel à l’encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 4 octobre 2022, Mme [F] demande à la cour d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il a condamné la société Elior Services Propreté et Santé à lui verser 191,02 euros au titre du complément de maintien de salaire et 19,10 euros au titre des congés payés afférents, et statuant à nouveau, de :

– à titre principal, juger nul son licenciement,

– ordonner sa réintégration au sein de la société Elior Services Propreté et Santé, étant précisé que celle-ci devra lui payer une indemnité de 738,50 euros pour chaque mois écoulé entre son éviction de l’entreprise (18 avril 2018) et sa réintégration, le tout sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, la juridiction de céans réservant sa compétence pour la liquidation de l’astreinte,

– à titre subsidiaire par rapport à la réintégration, condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer les sommes suivantes :

* 17 724 euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement nul,

* 1 518,90 euros à titre de rappel d’indemnité de licenciement,

* 1 477 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 147,70 euros au titre des congés payés afférents,

– à titre subsidiaire par rapport à la nullité, dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer les sommes suivantes :

* 17 724 euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 518,90 euros à titre de rappel d’indemnité de licenciement,

* 1 477 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 147,70 euros au titre des congés payés afférents,

– en tout état de cause, condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer une somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

* avec intérêts légaux à compter de la convocation de la défenderesse,

* et capitalisation des intérêts au titre de l’article 1343-2 du code civil,

– dire et juger qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision dans un délai d’un mois, et en cas d’exécution forcée par voie extrajudiciaire, les frais «normalement» supportés par le créancier (et en particulier les honoraires d’huissier de justice), seront supportés par la partie condamnée au principal en sus de l’indemnité mise à sa charge au titre de 700 du code de procédure civile,

– ordonner le remboursement des indemnités Pôle emploi au titre de l’article L. 1235-4 du code du travail,

– débouter l’intimée de toutes demandes reconventionnelles et d’article 700 code de procédure civile.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 13 juillet 2022, la société Elior Services Propreté et Santé demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de débouter Mme [F] de l’ensemble de ses demandes. A titre subsidiaire, elle demande à la cour de :

– limiter le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au minimum fixé par le barème prévu par l’article L.1235-3 du code du travail soit l’équivalent de 3 mois de salaire,

– déclarer irrecevable la demande de réintégration nouvelle en cause d’appel, à titre subsidiaire, débouter Mme [F] de sa demande de réintégration en ce que celle-ci est matériellement impossible, à titre infiniment subsidiaire, limiter le montant de l’indemnité d’éviction à l’équivalent des salaires courant entre le 10 mai 2022 et sa réintégration,

– limiter le montant de l’indemnité pour licenciement nul au minimum fixé par le barème prévu par l’article L. 1235-3-1 du code du travail soit l’équivalent de 6 mois de salaire,

– en tout état de cause, condamner Mme [F] à payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, la condamner aux entiers dépens.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L’ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 21 mars 2023.

MOTIVATION

Sur l’origine de l’inaptitude

La salariée indique que les douleurs aux chevilles résultant de l’accident du travail de 2013 ont participé avec les douleurs au dos à son inaptitude en raison de l’impossibilité d’occuper un poste debout, l’employeur ayant connaissance de ces douleurs aux chevilles.

L’employeur soutient que l’inaptitude n’a aucun lien avec l’accident du travail survenu en 2013, la salariée ayant été consolidée en 2015 et ayant fait l’objet d’un certificat médical initial et non de rechute en 2017.

Les règles particulières relatives à la protection des accidentés du travail doivent recevoir application dès lors que l’inaptitude du salarié a au moins partiellement pour origine un accident du travail et que l’employeur avait connaissance de cette origine au moment du licenciement.

Aux termes de l’article L. 1226-6 du code du travail, les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux rapports entre un employeur et son salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, survenu ou contractée au service d’un autre employeur.

En l’espèce, la salariée a subi un premier accident du travail le 12 mars 2013 au sein de la société Elior lui ayant causé un traumatisme à la cheville gauche. Si les conséquences dommageables consécutives à cet accident ont été considérées comme consolidées par le médecin traitant de la salarié, celui-ci a noté que la salariée présentait des séquelles et a établi en accord avec le médecin conseil un protocole pour soins après consolidation.

Cependant, la salariée a subi un second accident du travail le 4 mai 2017 alors qu’elle travaillait pour un second employeur.

Dans son avis, le médecin du travail a explicitement mentionné un lien entre l’inaptitude de la salariée à un poste d’agent de service et l’accident du travail du 4 mai 2017. Il n’a pas fait état de l’accident du travail du 12 mars 2013, aucun lien n’étant ainsi caractérisé entre ce premier accident du travail et l’inaptitude de la salariée.

Au vu de ces éléments, il n’est pas établi que l’inaptitude de la salariée ait au moins partiellement pour origine l’accident du travail du 12 mars 2013 ou qu’il y ait eu rechute de l’accident du travail du 12 mars 2013.

Le second accident du travail étant survenu alors que la salariée était au service d’un second employeur, les dispositions relatives aux accidents du travail ne sont pas applicables aux rapports entre la salariée et la société Elior Service Propreté et Santé.

Sur la recevabilité de la demande de réintégration

L’employeur soulève l’irrecevabilité de la demande de réintégration, s’agissant d’une demande nouvelle.

La salariée indique que la demande tend aux mêmes fins que celle relative au licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu’elle est donc recevable.

Aux termes de l’article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

En l’espèce, la salariée a contesté son licenciement devant le conseil de prud’hommes formant une demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La demande en réintégration pour nullité du licenciement étant consécutive à la contestation du licenciement pour nullité, elle tend aux mêmes fins que la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse formée devant le conseil de prud’hommes.

Par conséquent, la demande n’est pas nouvelle, le moyen d’irrecevabilité soulevé par la société Elior Services Propreté et Santé doit être rejeté.

Sur la validité du licenciement et ses conséquences

La salariée soutient que son licenciement est nul au motif qu’il revêt un caractère discriminatoire, en ce que le licenciement est intervenu sans consultation par l’employeur d’un service de maintien dans l’emploi alors que le médecin du travail avait demandé la saisie de la cellule maintien dans l’emploi dans son premier avis d’inaptitude.

L’employeur conclut au débouté de la demande, faisant valoir que les dispositions de l’article L. 5213-6 du code du travail sont exclusivement applicables aux travailleurs handicapés et que la salariée ne rapporte pas la preuve qu’elle aurait été reconnue travailleur handicapé au moment des recherches de reclassement et l’en aurait informé.

En application des dispositions de l’article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé.

Aux termes de l’article L. 1134-1 du code du travail, lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

En l’espèce, la salariée invoque l’absence de consultation par l’employeur d’un service de maintien dans l’emploi, comme préconisé par le médecin du travail.

Cependant, elle ne démontre pas avoir été reconnue travailleur handicapé au moment où l’employeur était tenu d’effectuer des recherches de reclassement, ni en avoir informé l’employeur et n’est pas fondée à solliciter le bénéfice de l’application des dispositions de l’article L. 5213-6 du code du travail.

En outre, elle n’invoque pas d’autre fondement imposant à l’employeur cette consultation, l’employeur ayant échangé avec le médecin du travail le 9 janvier 2018 au vu de l’avis de ce dernier et ce, avant que le médecin du travail rende son avis le 9 février 2018.

Par conséquent, la salariée ne présente pas d’élément de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination en raison de son état de santé.

La demande en nullité du licenciement formée par la salariée doit donc être rejetée ainsi que les demandes subséquentes en réintégration et en paiement d’une indemnité d’éviction sous astreinte et subsidiairement en dommages et intérêts pour licenciement nul.

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences

La salariée indique que l’employeur n’a pas produit son registre du personnel ainsi que celui des autres sociétés du groupe auquel elle appartient, qu’il ne rapporte donc pas la preuve d’une éventuelle recherche de reclassement. Elle précise qu’elle n’a jamais refusé de poste et qu’elle ne sait pas lire le français, que les documents invoqués sont des faux. Subsidiairement, elle ajoute que la liste de postes prétendument proposée constitue une liste de postes non individualisée et incomplète, d’emplois à temps complet alors qu’elle travaillait à temps partiel. Elle reproche, enfin, à l’employeur de ne pas avoir consulté les représentants du personnel.

L’employeur fait valoir que l’obligation de reclassement n’est qu’une obligation de moyen. Il soutient avoir mené des recherches de manière sérieuse et loyale. Il dénie avoir produit un document faux, celui-ci étant signé de la salariée, qui ne conteste pas la véracité des informations qu’il contient sur ses qualifications et compétences, notamment l’absence de maîtrise des logiciels bureautiques et de l’outil informatique et son souhait de ne pas s’éloigner de son domicile. Il précise avoir proposé un poste qui a été refusé par la salariée. Il indique avoir régulièrement consulté les représentants du personnel.

Aux termes de l’article L. 1226-2 du code du travail dans sa version applicable au litige, lorsque le salarié victime d’une maladie ou d’un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l’article L. 4624-4, à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l’application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du code de commerce.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu’il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d’une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

La charge de la preuve pèse sur le débiteur de l’obligation de reclassement.

En l’espèce, le médecin du travail a indiqué que la salariée pouvait être reclassée en poste assis et a procédé à une étude de poste et à des échanges avec l’employeur.

L’employeur indique avoir consulté la salariée sur ses connaissances et ses compétences ainsi que ses souhaits et produit aux débats un questionnaire de connaissance signé par la salariée. La salariée dénie être l’auteur de ce document, cependant elle ne conteste pas le contenu de celui-ci, à savoir qu’elle ne connaît pas les logiciels de traitement de texte et de tableur, qu’elle souhaite être formée à ce titre, qu’elle n’est pas mobile au-delà de 10 kilomètres de son domicile et que son niveau d’étude correspond à la classe de 5ème.

L’employeur justifie avoir adressé des recherches de reclassement par l’envoi d’un courriel le 1er mars 2018 reprenant les avis du médecin du travail, les connaissances de la salariée et son absence de mobilité géographique, ces recherches ayant été adressées au niveau d’un correspondant ‘RH Global – reclassement’ correspondant au périmètre de recherche du reclassement, comprenant les sociétés du groupe exerçant tant en matière de nettoyage que de restauration collective sur l’ensemble du territoire national.

L’employeur indique avoir reçu des réponses négatives en majorité et avoir identifié un seul poste disponible d’employé polyvalent de restauration/caisse au sein de la société Elior Restauration mais que la salariée a refusé.

Cependant, la salariée dénie avoir reçu une proposition de poste et l’avoir refusée.

Le document produit par l’employeur comprend une liste de cinq postes d’employé polyvalent de restauration/caisse à [Localité 5] ou dans les Hauts-de-Seine, ces emplois étant tous à temps complet alors que la salariée est à temps partiel. Il comprend également une annotation manuscrite et une signature, la salariée étant présentée comme l’auteur de ceux-ci.

Or, la salariée ne sachant pas écrire le français, l’annotation manuscrite ne peut être de sa main.

La cour relève également que l’employeur s’est abstenu de produire aux débats les registres du personnel de la société et des sociétés du groupe auquel elle appartient de sorte qu’elle n’est pas en mesure de vérifier l’exhaustivité des recherches de reclassement menées par l’employeur, et notamment l’existence d’un poste disponible correspondant aux compétences et aux souhaits de la salariée et à temps partiel.

Il s’en déduit que l’employeur ne démontre pas avoir mené ses recherches de reclassement de manière loyale et sérieuse. Par conséquent, le licenciement de la salariée est sans cause réelle et sérieuse.

En application de l’article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige,la salariée qui compte une ancienneté de plus de 10 ans et qui est âgée de 59 ans lors de la rupture du contrat de travail a droit à des dommages et intérêts compris entre trois et dix mois de salaire brut.

Il n’y a pas lieu d’écarter les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, puisqu’elles ne sont pas contraires au stipulations de l’article 10 de la Convention internationale du travail n° 158 et que les stipulations de l’article 24 de la Charte sociale européenne n’ont pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers.

La société Elior Services Propreté et Santé sera donc condamnée à payer à Mme [F] une somme de 7 300 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application des dispositions de l’article L. 1234-1 du code du travail, la salariée a droit à une indemnité compensatrice de préavis de deux mois de salaire d’un montant de 1 477 euros, outre 147,7 euros au titre des congés payés afférents, le quantum étant non contesté par la société intimée.

Il n’y a pas lieu à doublement de l’indemnité de licenciement de 1 518,9 euros déjà versée, les dispositions au titre de l’origine professionnelle de l’inaptitude n’étant pas applicables.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ces points, sauf en ce qu’il a débouté Mme [F] de sa demande de complément d’indemnité de licenciement.

Sur l’application de l’article L. 1235-4 du code du travail

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d’ordonner le remboursement par la société Elior Services Propreté et Santé aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à la salariée du jour du licenciement au jour du présent arrêt et ce, dans la limite de six mois d’indemnités.

Sur le cours des intérêts

En application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt. Il n’y a pas lieu de faire courir le point de départ des intérêts à une date antérieure.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a ordonné que les intérêts couraient à compter de la saisine de la juridiction.

Les intérêts échus pour une année entière seront capitalisés, le jugement ayant omis de statuer sur cette demande.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Elior Services Propreté et Santé succombant à la présente instance, en supportera les dépens de première instance et d’appel. Elle devra également régler à Mme [F] une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en ce qu’il a :

– condamné la société Elior Services Propreté et Santé à payer à Mme [S] [Z] épouse [F] les sommes suivantes :

191,02 euros au titre du complément de maintien de salaire

19,1 euros au titre des congés payés afférents,

– débouté Mme [S] [Z] épouse [F] de sa demande de rappel d’indemnité de licenciement,

L’infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Rejette le moyen d’irrecevabilité soulevé par la société Elior Services Propreté et Santé,

Déboute Mme [S] [Z] épouse [F] de ses demandes en nullité du licenciement,

Dit que le licenciement de Mme [S] [Z] épouse [F] est dénué de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Elior Services Propreté et Santé à payer à Mme [S] [Z] épouse [F] les sommes suivantes:

7 300 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

1 477 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

147,7 euros au titre des congés payés afférents,

Dit que les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus pour une année entière,

Ordonne le remboursement par la société la société Elior Services Propreté et Santé à l’organisme Pôle Emploi concerné des indemnités de chômage versées à Mme [S] [Z] épouse [F] dans la limite de six mois d’indemnités,

Condamne la société Elior Services Propreté et Santé aux dépens de première instance et d’appel,

Condamne la société Elior Services Propreté et Santé à payer à Mme [S] [Z] épouse [F] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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