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16 janvier 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n°
23/52428
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS
■
N° RG 23/52428 –
N° Portalis 352J-W-B7H-CZHUW
N°: 2-CB
Assignation du :
10 Mars 2023
EXPERTISE[1]
[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:
+ 1 Expert
ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 16 janvier 2024
par Emmanuelle DELERIS, Vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Clémence BREUIL, Greffier.
DEMANDERESSE
La S.A.S. PATLOG
[Adresse 6]
[Localité 9]
représentée par Maître Jean-bernard LUNEL, avocat au barreau de PARIS – #A0924
DEFENDERESSE
La S.A.R.L. LE CRISTAL
[Adresse 8]
[Localité 10]
représentée par Maître Patricia ROULET de la SELARL GOMBERT ROULET, avocats au barreau de PARIS – #C2487
DÉBATS
A l’audience du 05 Décembre 2023, tenue publiquement, présidée par Emmanuelle DELERIS, Vice-présidente, assistée de Clémence BREUIL, Greffier,
Nous, Président,
Après avoir entendu les parties représentées de leur conseil,
Madame [N] [E], aux droits de laquelle vient la société PATLOG, a donné à bail commercial à la société JAURES BAR, aux droits de laquelle est venue la société FLORENT puis la société LE CRISTAL, divers locaux situés [Adresse 8]- [Adresse 5], pour une durée de neuf années à compter du 1er avril 2005.
Les locaux sont loués à usage de ” commerce- bar- brasserie “.
Par exploit du 25 septembre 2013, l’indivision [E] venant aux droits de Madame [N] [E] a signifié à la société LE CRISTAL un congé avec offre de renouvellement moyennant un loyer annuel hors charges et hors taxes de 24.000 euros.
La société PATLOG a acquis l’immeuble situé [Adresse 8]- [Adresse 5] par acte authentique du 17 août 2020.
Par avenant régularisé le 24 juin 2014, le bail a été renouvelé pour une durée de neuf ans à compter du 1er avril 2014, moyennant un loyer annuel hors charges hors taxes de 20.000 euros, outre des charges locatives à hauteur de 7% du loyer hors provision d’eau, le preneur s’étant engagé à faire installer un compteur d’eau et régler ses consommations d’eau directement auprès de la compagnie des eaux.
Par exploit du 7 septembre 2022, la société PATLOG a délivré à la société LE CRISTAL un congé avec refus de renouvellement et offre d’indemnité d’éviction pour la date du 31 mars 2023.
C’est dans ces circonstances que, par exploit du10 mars 2023, la société PATLOG a assigné en référé sa locataire en désignation d’expert afin d’évaluer le montant de l’indemnité d’éviction due des suites du congé ainsi notifié.
L’affaire a été appelée à l’audience du 11 avril 2023 et a fait l’objet de plusieurs renvois à la demande des parties, qui ont reçu injonction de rencontrer un médiateur et sont entrées en médiation mais n’ont pas mené le processus à son terme.
Les parties ont déposé des conclusions qu’elles ont oralement soutenues à l’audience du 5 décembre 2023.
La société PATLOG maintient sa demande d’expertise et demande par ailleurs demande au juge des référés de :
-Débouter la société LE CRISTAL de sa demande de condamnation de la société PATLOG au paiement d’une provision de 4.847,94 euros en remboursement des charges forfaitisées,
-Débouter la société LE CRISTAL de sa demande d’ajout de mission à l’expertise judiciaire portant sur l’analyse des charges locatives et de copropriété de l’immeuble dont dépendent les lieux loués, aux fins notamment de vérifier le mode de calcul des sommes recouvrées sur le locataire au titre de sa consommation d’eau,
-Juger que chacune des parties conservera la charge des dépens et frais qu’elle a exposés au titre de la présente instance.
La société LE CRISTAL demande au juge des référés de :
-Lui donner acte qu’elle s’associe à la demande d’expertise en vue de la fixation des indemnités d’éviction et d’occupation,
-Dire que la mission de l’expert portera sur l’ensemble des activités exercées dans les locaux loués, en ce compris celle de PMU/FDJ,
-Mettre la provision à valoir sur les honoraires de l’expert à la charge de la société PATLOG,
-A titre reconventionnel, condamner la société PATLOG au paiement d’une provision de 4.847,94 euros en remboursement des charges forfaitisées en l’absence de contrepartie,
-Subsidiairement, compléter la mission de l’expert comme précisé au dispositif de ses conclusions, afin qu’il détermine notamment quel serait le montant des charges réelles imputables au locataire et l’éventuelle part excédentaire eu égard au forfait contractuel, et qu’il vérifie le mode de calcul des sommes recouvrées sur le locataire au titre de sa consommation d’eau,
-En tout état de cause, condamner la société PATLOG au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé à l’assignation et aux conclusions visées à l’audience pour un plus ample exposé des prétentions et moyens.
La decision a été mise en délibéré au 16 janvier 2024.
MOTIFS
Sur la demande d’expertise
Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
L’application de ce texte, qui subordonne le prononcé d’une mesure d’instruction à la seule démonstration d’un intérêt légitime à établir ou à préserver une preuve en vue d’un litige potentiel, n’implique aucun préjugé sur la recevabilité et le bien-fondé des demandes formées ultérieurement, sur la responsabilité des personnes appelées comme partie à la procédure, ni sur les chances du procès susceptible d’être engagé.
Le congé avec refus de renouvellement signifié par le bailleur ouvre droit au profit du locataire, d’une part, en vertu de l’article L 145-14 du code de commerce, à une indemnité d’éviction dont le principe n’est pas discuté en l’espèce, et d’autre part, selon l’article L 145-28 du même code, au maintien dans les lieux jusqu’au paiement de cette indemnité.
En l’espèce, la bailleresse a délivré au preneur, un congé avec refus de renouvellement et offre d’indemnité d’éviction, laquelle n’a pu être fixée amiablement.
Il est ainsi justifié d’un motif légitime, au sens de l’article 145 du code de procédure civile, de recourir à une mesure d’expertise, qui sera ordonnée et effectuée dans les conditions précisées au dispositif de la présente décision.
La consignation à valoir sur les frais d’expertise sera mise à la charge de la partie demanderesse, qui sollicite cette mesure d’instruction.
Sur la demande de provision
Aux termes de l’article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal peut accorder, en référé, une provision au créancier.
L’octroi d’une provision suppose le constat préalable par le juge de l’existence d’une obligation non sérieusement contestable au titre de laquelle la provision est demandée. Cette condition intervient à un double titre : elle ne peut être ordonnée que si l’obligation sur laquelle elle repose n’est pas sérieusement contestable et ne peut l’être qu’à hauteur du montant non sérieusement contestable de cette obligation, qui peut d’ailleurs correspondre à la totalité de l’obligation.
Cette condition est suffisante et la provision peut être octroyée, quelle que soit l’obligation en cause. La nature de l’obligation sur laquelle est fondée la demande de provision est indifférente, qui peut être contractuelle, quasi-délictuelle ou délictuelle.
L’existence d’une contestation sérieuse s’apprécie à la date de la décision du juge des référés et non à celle de sa saisine.
La contestation est dite sérieuse dès lors qu’elle implique, pour être tranchée, d’être discutée au fond du litige. A ce titre, la juridiction de céans ne peut se livrer à l’interprétation d’un acte sans outrepasser ses pouvoirs ; elle peut en revanche tirer les conséquences d’un acte clair. Enfin, il est rappelé que le caractère sérieux de la contestation s’apprécie à la date de la décision et non à celle de la saisine.
Au cas présent, la société LE CRISTAL soutient, sur le fondement des dispositions de l’article 1131 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, que le paiement de charges dont il n’est pas justifié par le bailleur de la contrepartie, est sans cause.
Elle souligne qu’en vertu du bail la liant à la société PATLOG, les charges locatives sont été fixées à 7% du loyer principal, mais que, l’immeuble ne bénéficiant plus d’aucune prestation au titre de son entretien, son gardiennage ou sa maintenance, de sorte que le forfait de charges appelé sur le locataire est dépourvu de toute contrepartie. Elle sollicite ainsi le remboursement des charges forfaitisées qu’elle a réglées pour la période du 17 août 2020 au 31 décembre 2023, à hauteur de 4.847,94 euros.
En réplique, la société PATLOG soutient que cette demande, qui existe un examen du fond du litige et l’analyse de pièces comptables, ne relève pas des attributions du juge des référés.
Aux termes de l’article 1134 du code civil, dans sa version applicable à la date de signature du renouvellement du contrat de bail du 1er avril 2005 et de son avenant régularisé le 24 juin 2014, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ce qui les ont faites.
Les parties ont convenu ensemble d’un paiement des charges locatives dues par le preneur, hors provision de consommation d’eau, sous la forme d’un forfait équivalent à 7% du loyer en principal.
Les pièces versées aux débats par la société LE CRISTAL ne permettent pas d’étayer l’allégation selon laquelle l’immeuble ne bénéficie plus d’aucune prestation d’entretien, de gardiennage ou de maintenance, ni d’établir que les sommes versées aux titres des charges locatives seraient dépourvues de toute contrepartie.
L’obligation invoquée de remboursement à la charge de la société PATLOG n’apparaît ainsi pas incontestable, de sorte qu’il n’y a pas lieu à référé sur cette demande.
Sur la demande subsidiaire de complément de la mission de l’expert
Il résulte des éléments exposés ci-dessus que le calcul des charges recouvrables sur la locataire fait l’objet d’un contentieux entre les parties, qui n’a pas pu être soldé amiablement dans le cadre de la médiation conventionnelle entreprise, et qui est en lien avec les comptes qu’elles devront établir des suites du congé délivré à la société LE CRISTAL.
Il est donc justifié d’un motif légitime au soutien de la demande de complément de mission de l’expert, à laquelle il sera fait droit dans les termes précisés au dispositif.
Sur les demandes accessoires
La société PATLOG, demanderesse à la mesure d’expertise, sera condamnée aux dépens.
Les responsabilités n’étant pas établies à ce stade, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant par mise à disposition au greffe le jour du délibéré, après débats à l’audience publique, par ordonnance contradictoire et rendue en premier ressort,
Ordonnons une expertise et désignons en qualité d’expert :
Monsieur [X] [P]
[Adresse 7]
[Localité 9]
Tél : [XXXXXXXX01]
Port : [XXXXXXXX04]
Email : [Courriel 11]
lequel pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne,
avec mission de :
– fournir au tribunal, en tenant compte des activités professionnelles autorisées par le bail et des facilités offertes à celles-ci par la situation des lieux, tous éléments utiles à l’estimation de l’indemnité compensatrice du préjudice résultant de la perte du fonds de commerce, indemnité comprenant notamment la valeur marchande du fonds, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que les frais et droits de mutation afférents à la cession d’un fonds de commerce de même valeur et du montant du préjudice correspondant au trouble commercial que subirait le locataire ;
– fournir, en donnant des références précises, tous éléments permettant de déterminer dans quelle mesure le locataire aurait la possibilité de transférer son fonds, sans perte importante de clientèle, sur un emplacement de qualité équivalente et quel serait, dans l’affirmative, le coût d’un tel transfert, en ce compris l’acquisition d’un titre locatif comportant les mêmes avantages juridiques que l’ancien bail, les frais et droits de mutation afférents à cette acquisition et les dépenses nécessaires de déménagement et de réinstallation, ainsi que la réparation du trouble commercial qui résulterait d’un tel transfert de fonds ;
-fournir tous éléments permettant au Tribunal d’apprécier le montant de l’indemnité dûe par le locataire pour l’occupation des lieux objets du bail, à compter du 31 mars 2023 et jusqu’à leur libération effective ;
-Se faire communiquer par la société PATLOG l’ensemble des factures acquittées afférentes aux charges et prestations relatives à l’immeuble depuis le 17 août 2020, date de son acquisition ;
-Déterminer sur la base des justificatifs produits et du caractère effectif des prestations fournies par la société PATLOG quel serait le montant des charges réellement imputables au locataire et le comparer au montant du forfait contractuel de 7% ;
-Determiner sur la base des justificatifs produits la part incombant à la société LE CRISTAL dans la consommation d’eau de l’immeuble depuis le 17 août 2020 ;
-Verifier le mode de calcul des sommes recouvrées sur le locataire au titre de sa consommation d’eau depuis le 17 août 2023 ;
Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :
– convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise ;
– se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission ;
– se rendre sur les lieux situés [Adresse 8]- [Adresse 5],
– à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations ; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
* en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;
* en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge chargé du contrôle des expertises des
demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent ;
* en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées ;
* en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;
– au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par exemple : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations :
*fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;
* rappelant aux parties, au visa de l’article 276, alinéa 2, du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai ;
Disons que, dans le but de favoriser l’instauration d’échanges dématérialisés et de limiter la durée et le coût de l’expertise, le technicien devra privilégier l’usage de la plateforme Opalexe et qu’il proposera en ce cas à chacune des parties, au plus tard lors de la première réunion d’expertise, de recourir à ce procédé pour communiquer tous documents et notes par la voie dématérialisée dans les conditions de l’article 748-1 du code de procédure civile et de l’arrêté du 14 juin 2017 portant application des dispositions du titre XXI du livre Ier du code de procédure civile aux experts judiciaires ;
Fixons à la somme de 4 000 euros (quatre mille euros) le montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée par la société PATLOG à la Régie d’avances et de recettes du tribunal judiciaire de Paris avant le 16 mars 2024 ;
Disons que, faute de consignation de la présente provision initiale dans ce délai impératif ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l’article 271 du code de procédure civile ;
Disons que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au greffe du tribunal judiciaire de Paris (service du contrôle des expertises) avant le 16 septembre 2024 sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge chargé du contrôle des expertises ;
Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge chargé du contrôle des expertises, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du code de procédure civile ;
Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande de provison ;
Condamnons la société PATLOG aux dépens ;
Disons n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procedure civile ;
Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision.
Fait à Paris le 16 janvier 2024.
Le Greffier,Le Président,
Clémence BREUILEmmanuelle DELERIS
Service de la régie :
[Adresse 14]
☎ [XXXXXXXX03]
Fax [XXXXXXXX02]
✉ [Courriel 13]
Sont acceptées les modalités de paiements suivantes :
➢ virement bancaire aux coordonnées suivantes :
IBAN : [XXXXXXXXXX012]
BIC : [Numéro identifiant 15]
en indiquant impérativement le libellé suivant :
C7 “Prénom et Nom de la personne qui paye” pour prénom et nom du consignataire indiqué dans la décision + Numéro de RG initial
➢ chèque établi à l’ordre du régisseur du Tribunal judiciaire de Paris (en cas de paiement par le biais de l’avocat uniquement chèque CARPA ou chèque tiré sur compte professionnel)
Le règlement doit impérativement être accompagné d’une copie de la présente décision. En cas de virement bancaire, cette décision doit être envoyée au préalable à la régie (par courrier, courriel ou fax).
Expert : Monsieur [X] [P]
Consignation : 4000 € par
le 16 Mars 2024
Rapport à déposer le : 16 Septembre 2024
Juge chargé du contrôle de l’expertise :
Service du contrôle des expertises
[Adresse 14].