Indemnité d’éviction : 16 février 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 23/13246

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Indemnité d’éviction : 16 février 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 23/13246
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16 février 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/13246

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 8

ARRÊT DU 16 FEVRIER 2024

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/13246 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CICDL

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 28 Juin 2023 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 23/53499

APPELANTE

S.A.S. ZHONG CAN TING 75015, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Joseph PANGALLO de la SELARL MIELLET & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0281, présent à l’audience

INTIMEE

S.C.I. CAPAU, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Caroline MESSERLI de la SELARL HENRI DE LANGLE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, présente à l’audience

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 janvier 2024, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Florence LAGEMI, Président, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:

Florence LAGEMI, Président,

Michèle CHOPIN, Conseiller,

Patrick BIROLLEAU, magistrat honoraire

Greffier, lors des débats : Jeanne BELCOUR

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Florence LAGEMI, Présidente de chambre et par Jeanne BELCOUR, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Par acte du 26 août 2015, la SCI Capau a donné à bail commercial à la société Erable des locaux situés [Adresse 1], angle de [Adresse 5], à [Localité 4], moyennant un loyer annuel de 15.000 euros hors taxes et hors charges, payable d’avance et trimestriellement.

La société Erable a cédé son fonds de commerce le 21 mars 2022 à la société Zhong Can Ting 75015.

Le 31 octobre 2022, la SCI Capau a fait délivrer à cette dernière un commandement de payer visant la clause résolutoire pour la somme de 7.264,25 euros au titre de l’arriéré locatif.

Par acte du 14 avril 2023, la SCI Capau a fait assigner la société Zhong Can Ting 75015 devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins, notamment, de constatation de l’acquisition de la clause résolutoire, expulsion et paiement, par provision, d’une indemnité d’occupation et de l’arriéré locatif.

Par ordonnance réputée contradictoire du 28 juin 2023, le premier juge a :

constaté l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de plein droit du bail liant les parties à la date du 30 novembre 2022 ;

ordonné l’expulsion de la société Zhong Can Ting 75015 et de tous occupants de son chef des locaux donnés à bail situés [Adresse 1], angle de [Adresse 5] à [Localité 4] avec, le cas échéant, le concours d’un serrurier et de la force publique ;

rappelé que le sort des meubles et objets mobiliers se trouvant sur place est régi par les dispositions des articles L.433-1 et R.433-1 du code des procédures civiles d’exécution ;

condamné la société Zhong Can Ting 75015 à payer à la SCI Capau, à titre de provision, la somme de 10.792,46 euros à valoir sur l’arriéré de loyer et charges et indemnités d’occupation arrêté au 2ème trimestre 2023 inclus ;

condamné la société Zhong Can Ting 75015 à payer à la SCI Capau une indemnité d’occupation mensuelle et provisionnelle égale au montant du loyer contractuel, augmenté des charges et taxes, jusqu’à la libération effective des lieux et la remise des clés ;

dit n’y avoir lieu à référé sur la demande au titre de la conservation du dépôt de garantie ;

condamné la société Zhong Can Ting 75015 à payer à la SCI Capau la somme de 1.200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société Zhong Can Ting 75015 aux dépens.

Par déclaration du 24 juillet 2023, la société Zhong Can Ting 2015 a relevé appel de cette décision en critiquant l’ensemble de ses chefs de dispositif, sauf en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à référé sur la demande au titre de la conservation du dépôt de garantie.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 8 janvier 2024, la société Zhong Can Ting 75015 demande à la cour de :

à titre principal,

juger que la clause résolutoire du bail commercial en date du 26 août 2015 n’est pas acquise par l’effet du commandement de payer du 31 octobre 2022 ;

à titre subsidiaire,

juger n’y avoir lieu à référé ;

à titre infiniment subsidiaire,

lui accorder rétroactivement un délai au 15 août 2023 pour s’acquitter des causes du commandement de payer du 31 octobre 2022 ;

suspendre les effets du commandement de payer et de la clause résolutoire pendant le délai précité ;

juger qu’elle s’est intégralement acquittée des causes du commandement dans les délais accordés ;

juger en conséquence que la clause résolutoire est réputée n’avoir pas joué ;

y ajoutant et en tout état de cause,

concernant la demande formulée par la SCI Capau visant à la validation du congé avec refus de renouvellement pour motif grave et légitime délivré le 7 juin 2023, à effet au 31 décembre suivant, juger, à titre principal, n’y avoir lieu à référé ;

à titre subsidiaire, débouter la SCI Capau de sa demande et annuler le congé avec refus de renouvellement pour motif grave et légitime délivré le 7 juin 2023 ;

débouter la SCI Capau de l’ensemble de ses autres demandes ;

la juger recevable en ses demandes reconventionnelles ;

condamner la SCI Capau, par provision, à lui payer la somme de 2.994,15 euros au titre des charges indûment appelées ;

condamner la SCI Capau, par provision, à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

condamner la SCI Capau aux dépens de première instance et d’appel et à lui payer la somme de 3.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et de l’instance d’appel.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 9 janvier 2024, la SCI Capau demande à la cour de :

confirmer l’ordonnance en toutes ses dispositions ;

dire irrecevable les demandes de condamnation au paiement des sommes de 2.994,15 euros et de 10.000 euros formées par la société Zhong Can Ting 75015 ;

subsidiairement, statuant à nouveau,

constater l’expiration du bail à la date d’effet du congé du 31 décembre 2023 et en conséquence, ordonner l’expulsion de la société Zhong Can Ting 75015 des lieux loués et la condamner au paiement d’une indemnité d’occupation équivalente aux loyers et charges jusqu’à parfaite libération des lieux ;

débouter la société Zhong Can Ting 75015 de toutes ses demandes;

dire et juger que le dépôt de garantie d’un montant de 3.750 euros sera conservé à titre d’indemnité sans que cette somme puisse être imputée sur la dette locative de la société Zhong Can Ting 75015 ;

la condamner au paiement de la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance,

rappeler que l’exécution provisoire est de droit.

La clôture de la procédure a été prononcée le 10 janvier 2024.

A l’issue de l’audience du 18 janvier 2024, fixée pour les plaidoiries, la cour a invité les parties à présenter leurs observations, par une note en délibéré préalablement communiquée entre elles, sur la recevabilité de la demande d’expulsion fondée sur le congé délivré le 7 juin 2023.

La SCI Capau et la société Zhong Can Ting 75015 ont respectivement fait parvenir les 23 et 31 janvier 2024, par voie électronique, une note en délibéré régulièrement notifiée entre elles.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu’aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur la recevabilité des demandes de la société Zhong Can Ting 75015

Il résulte des articles 564, 566 et 567 du code de procédure civile, qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait ; elles ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire ; enfin, les demandes reconventionnelles sont recevables en cause d’appel.

La SCI Capau soutient que les demandes de la société Zhong Can Ting 75015, qui remettent en cause l’acquisition de la clause résolutoire et portent sur sa condamnation au paiement, par provision, de charges indûment appelées et de dommages et intérêts, sont nouvelles en appel et donc irrecevables.

Or, la société Zhong Can Ting 75015 n’ayant pas comparu devant le premier juge et n’ayant donc formulé aucune prétention devant ce dernier, est recevable à former des prétentions en appel, qui ne sauraient être qualifiées de nouvelles.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire

Selon l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

Selon l’article 835 du même code, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d’un bail en application d’une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en oeuvre régulièrement.

Selon l’article L. 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Faute d’avoir payé ou contesté les causes du commandement de payer dans le délai imparti, prévu au bail, le locataire ne peut remettre en cause l’acquisition de la clause résolutoire sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer. L’existence de cette mauvaise foi doit s’apprécier lors de la délivrance de l’acte ou à une période contemporaine à celle-ci.

Au cas présent, il est constant que la SCI Capau a fait délivrer à la société Zhong Can Ting 75015, le 31 octobre 2022, un commandement de payer visant la clause résolutoire pour paiement de la somme en principal de 7.264,25 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 10 octobre 2022 suivant décompte joint au commandement, quatrième trimestre 2022 inclus ; que selon l’extrait de compte produit par le bailleur en pièce n°3, plusieurs règlements ont été effectués par le preneur entre le 31 octobre et le 28 novembre 2022, date à laquelle la dette locative visée au commandement s’élevait à la somme de 1.816,04 euros de sorte que les causes du commandement de payer n’ont pas été intégralement réglées dans le mois de cet acte.

Pour s’opposer aux effets de ce commandement, la société Zhong Can Ting 75015 soutient que dans le mois de celui-ci, elle s’est acquittée de la somme globale de 5.448,21 euros et qu’elle n’était plus débitrice d’aucune autre somme au 30 novembre 2022.

Elle explique en effet que le bailleur appelle trimestriellement une provision pour charges de 598,83 euros alors qu’il n’est stipulé dans le bail aucune clause de provision pour charges ; qu’il a été appelé entre le 22 mars 2022 (date de son entrée dans les lieux) et le 31 octobre 2023, quatrième trimestre inclus, des provisions pour charges d’un montant global de 1.869,68 euros qui n’étaient pas dues, de sorte qu’au 30 novembre 2022, elle était créditrice de 53,64 euros.

Le bail liant les parties met à la charge du preneur l’obligation de régler ‘un loyer principal annuel hors TVA de 15.000 euros, la TVA et les charges en sus que le preneur s’oblige à payer au bailleur ou à son mandataire à terme d’avance par quart aux quatre trimestres d’usage les premiers janvier, avril, juillet et octobre de chaque année’.

Il a été prévu que le preneur sera tenu de rembourser au bailleur les charges et taxes définies aux articles 13, 14 et 15 des conditions générales du bail mais aucune provision pour charges n’a été stipulée dans celui-ci.

Cependant, il a été indiqué dans l’acte de cession de fonds de commerce en date du 21 mars 2022 intervenu entre les sociétés Erable et Zhong Can Ting 75015 et dénoncé au bailleur, que ‘le montant actuel de la provision pour charges s’élève à la somme de 598,83 euros, payable en même temps que le loyer’ et précisé que ‘pour la période du 01/01/2022 au 31/03/2022, le loyer trimestriel s’élève à la somme de 4.041,15 euros HT et HC’.

La société Zhong Can Ting 75015, cessionnaire, a déclaré dans cet acte ‘s’engager vis-à-vis du bailleur au paiement des loyers et charges ainsi qu’à l’entière exécution des clauses et conditions du bail à compter de la prise de possession’.

Cet engagement souscrit par la société Zhong Can Ting 75015 dans l’acte de cession ôte tout caractère sérieux à la contestation émise sur le paiement des provisions pour charges, alors qu’elle ne remet pas en cause l’accord préexistant entre le bailleur et le précédent locataire sur le paiement de ces provisions, dont l’obligation lui a été transmise dans l’acte de cession.

En outre, il n’est pas démontré que la SCI Capau a agi de mauvaise foi lors de la délivrance du commandement de payer alors que la société Zhong Can Ting 75015 a été défaillante dans l’exécution de son obligation de paiement trois mois après son entrée dans les lieux.

Au regard des motifs qui précèdent, il apparaît que la dette locative n’a pas été intégralement réglée dans le mois du commandement de payer et qu’ainsi les conditions d’acquisition de la clause résolutoire sont réunies au 30 novembre 2022.

Sur la demande de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire

Selon l’article 1343-5, alinéa 1, du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années le paiement des sommes dues.

Au cas présent, la société Zhong Can Ting 75015 soutient, sans être contredite, avoir réglé l’intégralité de la dette locative et être à jour des loyers jusqu’au 31 mars 2024.

Condamnée par le premier juge au paiement d’une provision de 10.792,46 euros correspondant aux loyers et charges appelés au 2ème trimestre 2023 inclus, elle justifie par la production d’un extrait de compte arrêté au 1er juillet 2023, de l’encaissement par le bailleur d’une somme de 3.632,14 euros en date du 26 mai 2023, non pris en compte par le premier juge, puis d’un virement de 14.149,70 euros en date du 22 juillet 2023, apurant la dette locative d’un montant de 12.608,53 euros au 1er juillet 2023 (3ème trimestre 2023 inclus) outre les autres condamnations prononcées en première instance, la cour relevant que la dette a été réglée dans le mois de l’ordonnance entreprise. Il est encore relevé que deux autres virements réglant le dernier trimestre 2023 et le premier trimestre 2024 ont été effectués les 30 septembre et 27 décembre 2023.

Saisie de l’entier litige par l’effet dévolutif de l’appel, la cour doit examiner la situation au jour où elle statue et peut accorder des délais de paiement rétroactifs et constater, le cas échéant, leur respect par le locataire.

Il résulte des éléments qui précèdent que le paiement de la dette locative résiduelle visée au commandement de payer et celle due postérieurement à l’acquisition de la clause résolutoire est intervenu au plus tard le 22 juillet 2023, la SCI Capau reconnaissant dans ses écritures que l’intégralité de la créance locative a été réglée à cette date.

Il convient donc d’accorder à la société Zhong Can Ting 75015 un délai de paiement rétroactif jusqu’au 15 août 2023, ainsi qu’elle le sollicite, et de constater que celui-ci ayant été respecté, la clause résolutoire est réputée n’avoir jamais joué.

Ainsi, l’ordonnance entreprise sera infirmée en ce qu’elle a constaté l’acquisition de la clause résolutoire.

Sur la demande tendant à la constatation de l’expiration du bail à la suite du congé délivré le 7 juin 2023

La SCI Capau sollicite, à titre subsidiaire, que soit constatée l’expiration du bail par l’effet du congé qu’elle a fait délivrer à la société Zhong Can Ting 75015 le 7 juin 2023 pour le 31 décembre 2023 et, par suite, que soit ordonnée son expulsion.

Cette demande qui tend, comme en première instance, à l’expulsion du locataire, est recevable en application de l’article 565 du code de procédure civile.

Le 7 juin 2023, la SCI Capau a fait délivrer à la société Zhong Can Ting 75015 un congé avec refus de renouvellement pour motif grave et légitime tenant au défaut de paiement des loyers, pour le 31 décembre 2023, date d’échéance du bail.

La SCI Capau soutient que le bail a pris fin à cette date et que la société appelante est depuis occupante sans droit ni titre des locaux ce qui doit conduire au prononcé de son expulsion.

La société Zhong Can Ting 75015 conteste la validité du congé délivré et soutient qu’il n’existe pas de motif grave et légitime au sens de l’article 145-17 du code de commerce dès lors que le grief tiré des retards de paiement de loyers n’est pas, selon elle, suffisamment grave pour la priver de la poursuite du bail commercial ou du droit au paiement d’une indemnité d’éviction.

La demande d’expulsion fondée sur le congé nécessite implicitement de le valider et, donc d’apprécier la gravité et la légitimité du motif invoqué, ce qui excède les pouvoirs de la juridiction des référés. Il n’y a donc pas lieu à référé sur cette demande.

L’ordonnance entreprise sera donc infirmée en ce qu’elle a ordonné l’expulsion de la société Zhong Can Ting 75015 et condamné cette dernière au paiement d’une indemnité d’occupation.

La demande formée par la SCI Capau au titre de la conservation du dépôt de garantie est sans objet au regard des motifs qui précèdent.

Sur les demandes de provisions

Selon l’article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l’existence d’une obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut être accordé une provision au créancier, ou ordonné l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

La société Zhong Can Ting 75015 sollicite le paiement de la somme provisionnelle de 2.994,15 euros correspondant au montant des provisions pour charges qu’elle a, selon elle, indûment réglées depuis le premier trimestre 2023 (598,83 euros x 5 trimestres).

Or, au regard des motifs qui précèdent quant au paiement de ces provisions pour charges, l’obligation de la SCI Capau à les restituer n’est pas établie avec toute l’évidence requise en référé.

La société Zhong Can Ting 75015 demande en outre le paiement de la somme provisionnelle de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en invoquant la mauvaise foi de la SCI Capau, qui a poursuivi la procédure alors qu’elle lui avait remis trois chèques d’un montant de 3.632,14 euros chacun avant l’audience devant le premier juge. Elle soutient que le maintien de la procédure alors que ces paiements avaient été acceptés et qu’elle pensait qu’un désistement serait prononcé, l’a privée de la possibilité de se défendre en première instance et de solliciter des délais de paiement. Elle indique encore que l’ordonnance entreprise a été signifiée au cours du mois d’août 2023 afin de faire courir le délai d’appel pendant la période de ‘vacances judiciaires’, ce qui l’a contraint à solliciter l’arrêt de l’exécution provisoire et à saisir le juge de l’exécution, un commandement de quitter les lieux lui ayant été signifié le 6 septembre 2023.

Cependant, ne sont caractérisés ni le préjudice invoqué ni le comportement fautif du bailleur.

En effet, la société Zhong Can Ting 75015, qui ne démontre pas que la SCI Capau s’était engagée à se désister de son instance, ne justifie d’aucune circonstance qui l’aurait empêchée de comparaître devant le premier juge.

Elle ne saurait en outre ignorer que deux des trois chèques remis n’ont pu être payés faute de provision suffisante ainsi qu’il résulte des attestations de rejet des 23 mai et 29 juin 2023 du Crédit Mutuel.

La signification de l’ordonnance entreprise au cours du mois d’août 2023 n’a eu aucune incidence sur le délai d’appel dès lors que la société Zhong Can Ting 75015 a exercé ce recours le 24 juillet 2023.

Enfin, le fait de faire délivrer un acte d’exécution d’une décision exécutoire de droit n’est pas constitutif d’un comportement fautif.

Dans ces conditions, l’obligation de la SCI Capau n’étant pas établie, il n’y a pas lieu à référé de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sort des dépens de première instance et l’application de l’article 700 du code de procédure civile ont été exactement appréciés par le premier juge.

Au regard de l’issue du litige en appel, chacune des parties conservera les dépens qu’elle a engagés et les frais irrépétibles qu’elle a exposés.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevables les demandes de la société Zhong Can Ting 75015 ;

Infirme l’ordonnance entreprise sauf en ses dispositions relatives aux dépens et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Constate que les conditions de l’acquisition de la clause résolutoire sont réunies à la date du 30 novembre 2022 ;

Accorde à la société Zhong Can Ting 75015 un délai expirant le 15 août 2023 pour s’acquitter de sa dette locative arrêtée à la somme de 12.608,53 euros, troisième trimestre 2023 inclus, et suspend les effets de la clause résolutoire pendant ce délai ;

Constate que la société Zhong Can Ting 75015 s’est intégralement acquittée de sa dette dans ce délai ;

Dit en conséquence que la clause résolutoire est réputée n’avoir pas joué ;

Constate que la société Zhong Can Ting 75015 s’est par ailleurs acquittée de l’intégralité des loyers et provisions sur charges pour la période du 1er octobre 2023 au 31 mars 2024 ;

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de la SCI Capau tendant à l’expulsion de la société Zhong Can Ting 75015 sur le fondement du congé délivré le 7 juin 2023 ;

Dit n’y avoir à référé sur les demandes de provisions formées par la société Zhong Can Ting 75015 au titre des provisions pour charges et des dommages et intérêts ;

Dit que chacune des parties supportera les dépens exposés en appel ;

Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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