Indemnité d’éviction : 13 avril 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 23/01560

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Indemnité d’éviction : 13 avril 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 23/01560

13 avril 2023
Cour d’appel de Rennes
RG
23/01560

Référés Civils

ORDONNANCE N°54/2023

N° RG 23/01560 – N° Portalis DBVL-V-B7H-TS4U

LOTISSAM SARL

C/

M. [K] [L]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 13 AVRIL 2023

Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 11 avril 2023

ORDONNANCE :

Contradictoire, prononcée publiquement le 13 avril 2023, par mise à disposition au greffe, la date du délibéré fixée au 3 mai 2023 à l’issue des débats étant avancée

****

Vu l’assignation en référé délivrée le 07 mars 2023

ENTRE :

La société LOTISSAM SARL, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Bertrand GAUVAIN de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, avocat au barreau de RENNES et par Me Sophie RAITIF, avocate au barreau de NANTES

ET :

Monsieur [K] [L]

né le 27 Octobre 1956 à [Localité 5] (85)

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Olivier BICHON de la SELARL ANTELIA CONSEILS, avocat au barreau de NANTES substitué par Me Stéphanie FLEURY-GAZET de la SELARL ANTELIA CONSEILS, avocate au barreau de NANTES

EXPOSÉ DU LITIGE’:

Suivant acte sous seing privé du 20 mars 1995, les consorts [I], aux droits desquels se trouve la société Lotissam, ont consenti à M. [K] [L] un bail commercial sur des locaux situés [Adresse 3], pour une durée de 9 ans. À l’issue de ce délai, le bail s’est poursuivi tacitement aux mêmes clauses et conditions.

Par acte sous seing privé du 7 octobre 2001, les consorts [I] aux droits desquels se trouve également la société Lotissam, ont consenti à M. [L] un bail commercial sur des locaux situés à la même adresse pour une durée de 9 ans, également reconduit tacitement par les parties aux mêmes clauses et conditions.

Par exploit du 28 avril 2017, la société Lotissam a fait délivrer à M. [L] un congé sans faculté de renouvellement et avec offre de paiement de l’indemnité d’éviction pour le 31 décembre 2017.

Par ordonnance du 22 février 2018 rendue à la demande de la société Lotissam, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nantes a ordonné une expertise aux fins d’évaluer l’indemnité d’éviction due à M. [L] ainsi que l’indemnité d’occupation devant être mise à sa charge. L’expert a déposé son rapport le 22 octobre 2019.

Les parties n’étant pas parvenues à un accord, la société Lotissam a, par exploit du 13 février 2020, fait assigner M. [L] devant le tribunal judiciaire de Nantes, qui, par jugement du 10’novembre 2022 rectifié le 9 février 2023, a notamment :

– fixé le montant de l’indemnité d’occupation due par M. [L] à la somme de 14’625 euros HT par an, hors charges, à compter du 1er janvier 2018,

– fixé le montant de l’indemnité d’éviction due à M. [L] à la somme totale de 182’475 euros,

– condamné, en conséquence, la société Lotissam à payer à M. [L] la somme de 182’475 euros au titre de l’indemnité d’éviction,

– condamné la société Lotissam à payer à M. [L] la somme de 2’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Lotissam a interjeté appel de cette décision par déclaration du 8 février 2023.

Par exploit du 7 mars 2023, la société Lotissam a fait assigner M. [L], au visa de l’article 521 du code de procédure civile en aménagement de l’exécution provisoire.

Elle soutient, d’une part, qu’il existe un risque de non-restitution des sommes en cas d’infirmation, puisque M. [L] souhaite prendre sa retraite si bien qu’il n’a pas l’intention de poursuivre d’activité.

Elle fait valoir, d’autre part, que sa demande de consignation est justifiée à plusieurs titres. D’abord, elle remet en cause le montant de l’indemnité d’éviction fixée par le jugement, au regard de la date et des éléments sur la base desquels il s’est prononcé. Elle estime, en outre, que c’est à tort que le tribunal a rejeté sa demande de prise en charge de la dépollution du sol et que l’exécution provisoire risque de faire échec à toute demande de compensation de l’indemnité avec ces frais de dépollution. Enfin, elle affirme qu’elle dispose, en sa qualité de bailleresse, d’un droit de repentir que l’exécution provisoire compromet nécessairement.

M. [L] s’oppose à la demande d’aménagement et sollicite le paiement de 3’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il demande, à titre subsidiaire, la limitation de la consignation aux seuls frais annexes.

Il soutient, en premier lieu, que la société Lotissam n’apporte pas la preuve de son intention de prendre sa retraite et qu’en tout état de cause, il ne peut être déduit d’une telle circonstance un risque de non-restitution. Il précise qu’il dispose d’un patrimoine qui lui permettrait de restituer les fonds.

Il fait, en second lieu, valoir que la demande de la société Lotissam au titre de la dépollution du sol, qui n’a pas été accueillie par les premiers juges, n’a pas à être prise en compte dans la présente instance, la preuve de cette pollution n’étant pas rapportée.

Enfin, il relève que contrairement à ce que prétend la requérante, l’exécution provisoire n’a pas pour conséquence de mettre en échec son droit de repentir.

SUR CE :

L’article 521 du code de procédure civile donne le pouvoir discrétionnaire au premier président (2e Civ., 27 février 2014, pourvoi n° 12-24.873, Bull. 2014, II, n° 54 : « Le pouvoir, prévu à l’article 521 du code de procédure civile, d’aménager l’exécution provisoire [est] laissé à la discrétion du premier président ») d’autoriser la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions à consigner, pour éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie, des espèces ou valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

Cette consignation peut n’être que partielle.

Pour justifier sa demande de consignation, la société Lotissam expose, en premier lieu, que M. [L] souhaite cesser son activité pour prendre sa retraite. Si cette hypothèse est plausible compte tenu de l’âge du preneur, elle ne permet nullement de supputer que l’intéressé serait dans l’incapacité de restituer les fonds en cas d’infirmation de la décision, le demandeur s’abstenant d’apporter quelque information que ce soit quant au patrimoine de son locataire.

En second lieu, le tribunal s’est fondé, pour fixer l’indemnité d’éviction dû au preneur évincé, sur le rapport d’expertise judiciaire dont la société Lotissam connaît parfaitement tous les éléments depuis plus de trois ans. Ce rapport précise que si une dépollution du site peut s’avérer nécessaire, son importance dépendra du projet de cette société qui affirme dans le même temps qu’elle n’en a actuellement aucun. Cette attitude ne peut lui permettre de surseoir au payement de l’intégralité de l’indemnité d’éviction jusqu’à ce qu’elle prenne une décision sur le devenir du site qu’elle a acquis en 2013, très vraisemblablement dans la perspective de le revendre si l’on en croit son objet social tel qu’il ressort de l’extrait Kbis qu’elle produit (pièce n° 10′: «’achat et mise en valeur de biens en vue de leur revente, montage et gestion d’opérations immobilières’»).

En troisième lieu, si la société Lotissam souhaite exercer son droit de repentir, rien ne lui interdit de le faire.

En considération de ces éléments mais aussi afin de préserver les droits des deux parties, il sera partiellement fait droit à la demande de consignation dans les conditions et limites précisées au dispositif de la présente décision.

Les dépens seront mis à la charge de la société Lotissam qui devra, en outre, verser à [J] une somme de 1’200 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Vu l’article 521 du code de procédure civile :

Autorisons la société Lotissam à consigner entre les mains du président de la Carpa Bretagne, désigné séquestre, une somme de 50’000 euros.

Rejetons la demande en ce qu’elle porte sur le surplus des condamnations (132 475 euros + 2 000 euros art. 700)

Disons que la société Lotissam devra justifier dans le dit délai au conseil de M. [L] de la consignation ainsi effectuée, faute de quoi ce dernier pourra procéder au recouvrement de la somme dont la consignation a été autorisée.

Condamnons la société Lotissam aux dépens.

La condamnons à payer à M. [K] [L] une somme de 1’200’euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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