Indemnité d’éviction : 1 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/04692

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Indemnité d’éviction : 1 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/04692
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1 juin 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/04692

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 8

ARRÊT DU 01 JUIN 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 22/04692 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFUBM

Sur requête en omission de statuer et en rectification d’erreur matérielle contre un arrêt rendu par la cour d’appel de Paris en date du 7 octobre 2021.

DEMANDEUR À LA REQUÊTE

M. [D] [C]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Assisté par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B1024

DÉFENDEUR À LA REQUÊTE

S.A.S. MDSA

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Mme [M] [F], responsable des ressources humaines en vertu d’un pouvoir spécial et par Me Cécile RENEVEY avocat au barreau de DIJON, toque : 2 substituée par Me Pierrick BECHE, avocat au barreau de DIJON, toque : 43,

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 16 mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente, rédactrice

Madame Nicollette GUILLAUME, présidente

Madame Emmanuelle DEMAZIERE, vice-présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Nolwenn CADIOU, lors des débats

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [D] [C] a été engagé par la société Tangara dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée du 29 décembre 1997.

Il a été engagé en qualité d’attaché commercial.

M. [C] a été désigné délégué syndical par la CGT-FO.

Par ordonnance du 25 novembre 2002, le tribunal de commerce de Paris a autorité la reprise du fonds de commerce par la société Extan, aux droits de laquelle vient la société MDSA.

Le 18 décembre 2002, la société Extan a sollicité l’accord de M. [C] quant à la reprise de son contrat de travail.

Le 8 janvier 2003, M. [C] a notifié à la société Extan son refus.

Le 21 février 2003, la société Extan a procédé au licenciement économique de M. [C].

Contestant son licenciement, M. [C] par acte du 29 mars 2004 saisissait le conseil de prud’hommes de Paris.

Par jugement du 7 mai 2009, notifié aux parties par lettre du 26 août 2009, le conseil de prud’hommes de Paris a :

-condamné la société Extan à verser à M. [C] :

-3 100 euros à titre d’indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement,

Avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement,

-100 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-débouté du surplus des demandes,

-reçu le défendeur en ses demandes reconventionnelles, mais l’en déboute,

-condamné la société Extan aux dépens.

Par déclaration parvenue au greffe le 20 octobre 2009, M. [C] a interjeté appel du jugement.

Par arrêt du 24 octobre 2012, le pôle 6, chambre 6 de la cour d’appel de Paris a :

-déclaré l’appel recevable,

-infirmé le jugement déféré, et statuant à nouveau,

-dit que le licenciement de M. [D] [C] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

-condamné la société Extan à payer à M. [C] la somme de :

-31 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-débouté M. [C] du surplus de ses demandes,

-débouté la société Extan de ses demandes reconventionnelles,

-condamné la société Extan aux entiers dépens.

M. [C] a formé un pourvoi contre l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris.

La Cour de cassation par arrêt du 2 juillet 2014 (n°1244 F-D, pourvoi n° V12-29.529) a cassé et annulé l’arrêt rendu le 24 octobre 2012 et a renvoyé les parties devant la cour d’appel de Paris autrement composée.

Par arrêt du 30 janvier 2018, le pôle 6, chambre 4 de la cour d’appel de Paris a :

-infirmé le jugement rendu le 7 mai 2009 par le conseil de prud’hommes de Paris en ce qu’il a condamné la société Extan à payer à M. [C] la somme de 3 100 euros à titre d’indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement et en ce qu’il a débouté M. [C] de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

statuant à nouveau et y ajoutant,

-prononcé la nullité du licenciement notifié le 21 février 2003 par la société Extan à M. [C], titulaire d’un mandat de délégué syndical,

-condamné en conséquence la société MDSA venant aux droits de la société Extan à payer à M. [C] les sommes suivantes, nettes de tous prélèvements sociaux :

-37 200 euros au titre de la violation du statut protecteur,

-31 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-dit que ces condamnations porteront intérêt au taux légal à compter du présent arrêt,

-ordonné la capitalisation des intérêts, sous réserve qu’ils soient dûs pour une année entière,

-dit que les condamnations prononcées et les sommes déjà versées en exécution des décisions précédemment rendues entre les parties pourront faire l’objet d’une compensation,

-rejeté toute autre demande, plus ample ou contraire,

-condamné la société Extan aux dépens d’appel et à payer à M. [C] la somme de :

-2 500 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile au titre des faits irrépétibles exposés en cause d’appel.

M. [C] a formé un pourvoi contre l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris.

La Cour de cassation par arrêt du 10 juillet 2019 (n°1143 F-D, pourvoi n° S 18-13.933) a cassé et annulé l’arrêt rendu le 30 janvier 2018 et a renvoyé les parties devant la cour d’appel de Paris autrement composée.

Par arrêt du 7 octobre 2021, le pôle 6, chambre 8 de la cour d’appel de Paris a :

-infirmé le jugement entrepris,

-rejeté la demande de mise hors de cause de la société MDSA,

-ordonné la réintégration de M. [C] à son poste ou à un poste équivalent dans l’entreprise, devenue la société MDSA, sous astreinte de 10 euros par jour de retard, un mois à compter de la notification de la présente décision,

-condamné la société MDSA à payer à M. [C] la somme de :

-696 734.58 euros à titre de provision fixée au 31 mai 2021, indemnité à parfaire à la date de la réintégration effective, au titre de l’indemnité d’éviction,

-condamné la société MDSA à payer à M. [C] la somme de :

-6 200 euros à titre d’indemnité au titre de la priorité de réembauchage,

-ordonné à la société MDSA la remise d’un bulletin de salaire récapitulatif pour l’indemnité d’éviction,

-fixé le point de départ des intérêts légaux sur ces indemnités à compter du présent arrêt,

-ordonné la capitalisation des intérêts échus pour une année entière,

-déclaré la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse irrecevable,

-débouté les parties du surplus de leurs demandes,

-condamné la société MDSA à payer à M. [C] la somme de :

-8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-l’a condamné aux entiers dépens.

Cet arrêt fait actuellement l’objet d’un pourvoi en cassation.

Par requête du 23 février 2022, M. [C] a saisi la cour d’appel d’une demande en rectification/omission de statuer de l’arrêt du 7 octobre 2021.

Dans ses dernières conclusions, déposées au greffe de la cour le 16 mars 2023, et soutenues à l’audience du même jour, M. [C] demande à la cour :

-de dire M. [C] recevable et bien fondé en sa requête,

en conséquence,

– d’interpréter sa décision selon laquelle le montant de la provision de 696 734,58 euros doit s’entendre en net ou en brut,

– de rectifier l’omission de statuer,

– de missionner tout expert qu’il plaira à la cour de désigner aux fins de se faire communiquer tous éléments utiles pour voir reconstituer la carrière de M. [C] et l’évolution de son salaire brut mensuel afin d’actualiser le montant de l’indemnité d’éviction due et la parfaire au jour de la réintégration effective,

– de rectifier l’erreur matérielle omettant de qualifier l’arrêt de partiellement avant-dire droit, tant au regard de la mesure d’expertise que du caractère provisoire de la condamnation à payer la somme de 696 745,58 euros à titre de provision,

– de surseoir à statuer dans l’attente des résultats de l’expertise et de la réintégration effective de M. [C].

Dans ses dernières conclusions, déposées au greffe le 20 septembre 2022, et soutenues à l’audience du 16 mars 2023, la société MDSA demande à la cour :

-de déclarer M. [C] recevable en sa demande mais mal fondé,

-de débouter M. [C] de sa demande de rectification d’omission de statuer,

-de déclarer sans objet la demande de rectification d’erreur matérielle de M. [C],

-de débouter M. [C] de ses potentielles autres demandes.

L’affaire a été appelée à l’audience du 16 mars 2023.

MOTIFS

I-Sur l’omission de statuer

Les demandes formées devant la cour telles que reprises dans l’arrêt du 7 octobre 2021 incluaient la prétention suivante :

‘ la cour d’appel (…)

– ordonnera une mesure d’expertise aux fins de voir reconstituer la carrière de M. [C] et l’évolution de son salaire brut mensuel afin d’actualiser le montant de l’indemnité d’éviction due et la parfaire au jour de la réintégration effective, avant dire droit’.

L’arrêt ne comporte pas de motivation relativement à la demande d’expertise expressément formulée dans le dispositif des conclusions soutenues devant la cour, la formule du dispositif ‘déboute les parties du surplus de leurs demandes’, ne pouvant être considérée comme répondant à la demande ainsi formée.

En application de l’art.463 du code de procédure civile, il y a lieu de statuer sur le chef de demande ainsi omis.

Sur ce point, il est admis, que lorsque le salarié demande sa réintégration pendant la période de protection, il a droit au titre de la méconnaissance du statut protecteur, à une indemnité égale à la rémunération qu’il aurait perçue, depuis la date de son éviction jusqu’à sa réintégration.

Par ailleurs, l’article 263 du code de procédure civile dispose que l’expertise n’a lieu d’être ordonnée que dans le cas où des constatations ou une consultation ne pourraient suffire à éclairer le juge, et selon l’art.265, ‘la décision qui ordonne l’expertise : expose les circonstances qui rendent nécessaire l’expertise (…)’.

La cour d’appel a dans son arrêt ordonné la réintégration de M. [C] à son poste ou à un poste équivalent et condamné la société MDSA à lui verser la somme de 696 734,58 euros à titre de provision fixée au 31 mai 2021, une indemnité à parfaire à la date de réintégration effective au titre de l’indemnité d’éviction.

M. [C] n’apporte pas d’élément permettant de considérer que la mesure d’expertise est utile alors que la réintégration emporte droit à l’indemnité d’éviction telle que précédemment définie, les éventuelles difficultés d’exécution de la décision tenant au calcul des sommes dues à ce titre ne pouvant relever d’une mesure d’expertise ordonnée à ce stade, ce d’autant que la date à laquelle la réintégration interviendra n’est pas connue.

La demande d’expertise ainsi formée doit donc être rejetée.

II-Sur la rectification de l’erreur matérielle

M. [C] soutient que l’arrêt ne peut être rendu en dernier ressort et qu’il doit être qualifié de partiellement avant dire droit, soulignant que la société MDSA a été condamnée à verser une indemnité à titre de provision à parfaire.

Les articles 450 et suivants du code de procédure civile, fixent les conditions dans lesquelles les jugements doivent être rendus et plus spécifiquement les mentions devant y figurer.

Il est admis que ces dispositions s’étendent aux arrêts des cours d’appel.

L’article 454 du code de procédure civile détermine les indications que les décisions doivent contenir.

Il n’en résulte pas qu’il appartient à la cour de qualifier ses arrêts d’avant dire droit ou de partiellement avant dire droit, selon qu’il tranche ou non une partie du principal.

Il ne peut être considéré que la cour a commis une erreur matérielle sur la qualification de l’arrêt qu’elle a rendu le 7 octobre 2021 dès lors que conformément à l’article précité, aucune mention n’y figure sur ce point.

Dès lors la demande en rectification d’erreur matérielle doit être rejetée.

III- sur la demande en interprétation

M. [C] a également sollicité que la cour précise le caractère brut ou net de la somme allouée au titre de l’indemnité d’éviction.

Il est admis que faute de précision contraire, la condamnation prononcée à l’encontre de l’employeur tant à titre de rappels de salaire que de dommages-intérêts doit s’entendre en brut.

Ainsi dès lors que le juge ne se prononce pas sur le caractère brut ou net de la somme, la condamnation est nécessairement exprimée en brut, de sorte que la somme versée au salarié est égale au montant de la condamnation dont auront été déduites les charges sociales.

Il en résulte qu’en condamnant la société MDSA à verser ‘la somme de 696 734,58 euros à titre de provision fixée au 31 mai 2021 indemnité à parfaire à la date de réintégration effective au titre de l’indemnité d’éviction’, sans se prononcer sur le caractère net ou brut de la somme allouée, la cour a nécessairement exprimé la condamnation en brut.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant sans frais ni dépens,

DÉCLARE RECEVABLE la requête en omission de statuer,

Ajoutant à l’arrêt du 7 octobre 2021,

REJETTE la demande d’expertise formée par M. [C],

DÉCLARE recevable la requête en rectification d’erreur matérielle,

REJETTE la demande de rectification d’erreur matérielle,

DÉCLARE recevable la requête en interprétation,

Y faisant droit,

INTERPRÈTE la mention :

‘CONDAMNE la société MDSA à payer à M. [C] la somme de 696 734,58 euros à titre de provision fixée au 31 mai 2021 indemnité à parfaire à la date de réintégration effective au titre de l’indemnité d’éviction’,

comme emportant la condamnation de la société MDSA à verser à M. [C] la somme de 696 734,58 euros brut à titre de provision fixée au 31 mai 2021 indemnité à parfaire à la date de réintégration effective au titre de l’indemnité d’éviction.

REJETTE l’ensemble des autres demandes.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

 


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