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1 février 2024
Cour d’appel de Versailles
RG n°
22/04149
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 30C
Chambre commerciale 3-1
(ex-12e chambre)
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 1er FEVRIER 2024
N° RG 22/04149 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VIW4
AFFAIRE :
S.E.L.A.R.L. JSA
C/
S.C.I. CHESNAY PIERRE 2
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Juin 2022 par le TJ de VERSAILLES
N° Chambre : 3
N° RG : 21/04120
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Oriane DONTOT
Me Stéphanie BRAUD
TJ VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE PREMIER FEVRIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.E.L.A.R.L. JSA prise en la personne de Me [H] [G], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société INTERNATIONAL MAGNETIC COMPANY
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 et Me Gilles HITTINGER ROUX de la SCP HB & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P497
APPELANTE
****************
S.C.I. CHESNAY PIERRE 2
RCS Paris n° 389 635 749
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Stéphanie BRAUD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 12 et Me Samuel GUILLAUME de la SCP BLATTER SEYNAEVE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0441
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 26 Septembre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur François THOMAS, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur François THOMAS, Président,
Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,
Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,
EXPOSÉ DES FAITS
Par acte sous seing privé du 26 août 2003, la SNC Chesnay Pierre 2, aux droits de laquelle se trouve désormais la SCI Chesnay Pierre 2, a donné en renouvellement de bail à la société International Magnetic Company (ci-après ‘la société IMC’), un local à usage commercial au sein d’un centre commercial pour une durée de douze années à compter du 1er août 2003 moyennant un loyer de base de 75.736 €, outre une part variable de 7.25 % HT du chiffre d’affaires.
Parallèllement, par acte sous seing privé du 5 novembre 2003, les mêmes parties ont conclu un bail commercial portant sur un local à usage de réserve situé au sous-sol du même centre commercial, pour un montant de 8.550 € HT et une durée de dix années à compter du 1er décembre 2003.
Le 16 septembre 2014, la SCI Chesnay Pierre 2 a donné congé à la société IMC pour la surface de vente pour le 31 juillet 2015 et lui a offert le paiement d’une indemnité d’éviction.
Par actes des 28 août 2015 et 22 janvier 2016, deux procédures ont été diligentées, l’une par la société IMC en fixation de l’indemnité d’éviction, l’autre par la SCI Chesnay Pierre 2 en fixation de l’indemnité d’occupation à compter du 1er août 2015.
Elles ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 22 juin 2016.
Par jugement du 18 juillet 2017, le tribunal de grande instance de Versailles a désigné un expert, M. [U] – remplacé par Mme [K] par ordonnance du 30 janvier 2018 – pour évaluer les indemnités d’éviction et d’occupation dues.
Entre-temps, par acte extrajudiciaire du 19 juin 2017, la SCI Chesnay Pierre 2 a exercé son droit de repentir. Le bail a donc été renouvelé et la mission d’expertise modifiée pour que l’expert évalue le montant des loyers des baux renouvelés et des indemnités d’occupation.
L’expert a déposé son rapport d’expertise le 20 octobre 2020. L’expert conclut à :
– une valeur locative annuelle au 19 juin 2017 à hauteur de 129.038 € s’agissant de la boutique, et de 11.400 € s’agissant de la réserve ;
– une indemnité d’occupation annuelle au 1er août 2015 de 91.248 € s’agissant de la boutique, et de 10.545 € s’agissant de la réserve.
Par jugement du tribunal de commerce de Versailles du 3 février 2022, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l’encontre de la société IMC.
La Selarl JSA, prise en la personne de Me [H] [G], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société IMC, est intervenue volontairement à l’instance par conclusions notifiées le 17 mars 2022.
Par jugement en date du 7 juin 2022, le tribunal judiciaire de Versailles a :
– révoqué l’ordonnance de clôture rendue le 25 janvier 2022 pour admettre :
– les conclusions en intervention volontaire notifiées le 17 mars 2022 par la Selarl JSA, prise en la personne de Me [H] [G], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société IMC ;
– les dernières conclusions notifiées par la SCI Chesnay Pierre 2 le 1er avril 2022 ;
– ordonné la clôture au 5 avril 2022, date des plaidoiries ;
– déclaré recevable l’intervention volontaire de la Selarl JSA, prise en la personne de Me [H] [G], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société IMC ;
– fixé le loyer de base renouvelé au 19 juin 2017 pour le local à usage de boutique à la somme de 211.991 € par an hors charges et hors taxes ;
– fixé le loyer de base renouvelé au 19 juin 2017 pour le local à usage de réserve à la somme de 11.400 € par an hors charges et hors taxes ;
– dit que les loyers de renouvellement du local à usage de boutique et du local à usage de réserve seront indexés, à compter du 19 juin 2017, sur l’indice des loyers commerciaux ;
– dit que les intérêts au taux légal dus sur les loyers arriérés et les trop-perçus de loyers courront à compter de la demande en justice et seront capitalisés dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;
– fixé l’indemnité d’occupation due pour le local à usage de boutique par la société IMC pour la période courant du 1er août 2015 au 18 juin 2017 24h à la somme de 107.838,90 € par an ;
– fixé l’indemnité d’occupation due pour le local à usage de réserve par la société IMC pour la période courant du 1er août 2015 au 18 juin 2017 24h à la somme de 9.234 € par an ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 à restituer à la société IMC, sur la période comprise entre le 1er août 2015 et le 18 juin 2017 24h, les trop-perçus entre le montant de l’indemnité d’occupation versé à titre provisionnel pour les locaux à usage de réserve et le montant de l’indemnité d’occupation pour les mêmes locaux à usage de réserve fixé par la présente décision ;
– dit qu’il appartiendra aux parties, conformément aux dispositions de l’article L.145-57, alinéa 1, du code de commerce, de faire leurs comptes ;
– rappelé que les indemnités d’occupation ne sont soumises ni à l’indexation contractuelle, ni à la taxe sur la valeur ajoutée ;
– dit que les intérêts au taux légal dus sur les indemnités d’occupation arriérées et les trop-perçus d’indemnités d’occupation courront à compter du jugement ;
– rejeté les autres demandes en restitution ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 à acquitter les frais de l’instance enrôlée sous le numéro RG 15/07527, en ce compris :
– la facture de la Selarl Franck Cherki & Virginie Rigot, huissiers de justice associés, pour la signification du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Versailles le 18 juillet 2017 pour un montant de 87,76 € ;
– les honoraires d’avocats exposés par la société IMC en amont de l’exercice par le bailleur de son droit de repentir, lesquels s’élèvent à la somme de 10.812,59 € ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 et la société IMC, à concurrence des deux tiers pour la première et un tiers pour la seconde, aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise judiciaire, avec droit de recouvrement au profit de Maître Bertrand Rol, avocat au barreau de Versailles ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 à verser à la société IMC la somme de 3.000 € au titre de ses frais irrépétibles ;
– rejeté les autres demandes ;
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
Par déclaration en date du 23 juin 2022, la Selarl JSA, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société IMC, a interjeté appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 9 juin 2023, la société JSA ès qualités de liquidateur judiciaire de la société IMC demande à la cour de :
– infirmer le jugement en ce qu’il a :
– fixé le loyer de base renouvelé au 19 juin 2017 pour le local à usage de boutique à la somme de 211.991 € par an hors charges et hors taxes ;
– fixé le loyer de base renouvelé au 19 juin 2017 pour le local à usage de réserve à la somme de 11.400 € par an hors charges et hors taxes ;
– dit que les loyers de renouvellement du local à usage de boutique et du local à usage de réserve seront indexés, à compter du 19 juin 2017, sur l’indice des loyers commerciaux ;
– dit que les intérêts au taux légal dus sur les loyers arriérés et les trop-perçus de loyers courront à compter de la demande en justice et seront capitalisés dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;
– fixé l’indemnité d’occupation due pour le local à usage de boutique par la société IMC pour la période courant du 1er août 2015 au 18 juin 2017 24h à la somme de 107.838,90 € par an ;
– fixé l’indemnité d’occupation due pour le local à usage de réserve par la société IMC pour la période courant du 1er août 2015 au 18 juin 2017 24h à la somme de 9.234 € par an ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 à restituer à la société IMC, sur la période comprise entre le 1er août 2015 et le 18 juin 2017 24h, les trop-perçus entre le montant de l’indemnité d’occupation versé à titre provisionnel pour les locaux à usage de réserve et le montant de l’indemnité d’occupation pour les mêmes locaux à usage de réserve fixé par la décision ;
– dit qu’il appartiendra aux parties, conformément aux dispositions de l’article L.145-57, alinéa 1, du code de commerce, de faire leurs comptes ;
– rejeté les autres demandes en restitution ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 et la société IMC, à concurrence des deux tiers pour la première et un tiers pour la seconde, aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise judiciaire ;
– rejeté les autres demandes ;
– confirmer le jugement pour le surplus ;
Et, statuant à nouveau :
– fixer l’indemnité d’occupation au 1er août 2015, pour le local boutique, à la somme annuelle de 67.099,76 € hors taxes, hors charges ;
– fixer l’indemnité d’occupation au 1er août 2015, pour le local réserve, à la somme annuelle de 7.980 € hors taxes, hors charges ;
– fixer le loyer en renouvellement au 19 juin 2017, pour le local boutique, à la somme annuelle de 95.856,60 € hors taxes, hors charges ;
– fixer le loyer en renouvellement au 19 juin 2017, pour le local réserve, à la somme annuelle de 9.120 €, hors taxes, hors charges ;
– condamner la S.C.I Chesnay Pierre 2 à restituer à société IMC les sommes suivantes :
Pour la boutique :
– 72.224,90 € HT au titre de l’indemnité d’occupation du 1er août 2015 au 19 juin 2017,
– 63.781,65 € HT au titre du loyer renouvelé à compter du 19 juin 2017, à parfaire au jour de la décision à intervenir,
Pour la réserve :
– 7.379,04 € HT au titre de l’indemnité d’occupation du 1er août 2015 au 19 juin 2017,
– 14.546,66 € HT au titre du loyer renouvelé à compter du 19 juin 2017, à parfaire au jour de la décision à intervenir,
Augmentées de la TVA afférente ;
– juger que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du 1er août 2015 pour l’indemnité d’occupation et du 19 juin 2017 pour le loyer de renouvellement ;
– condamner la S.C.I Chesnay Pierre 2 au paiement de 28.805,14 €, représentant les frais de l’instance par application de l’article L.145-58 du code de commerce ;
– déclarer irrecevables et/ou rejeter l’ensemble des demandes, fins et prétentions de la SCI Chesnay Pierre 2 qui ne seraient pas conformes aux siennes, étant rappelé les articles L.641-3 et L.622-21 du code de commerce (arrêt des poursuites après jugement d’ouverture) ;
– condamner la S.C.I Chesnay Pierre 2 aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction au bénéfice de Maître Oriane Dontot, Avocat au Barreau de Versailles, par application de l’article 699 du code de procédure civile ainsi qu’à la somme de 20.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions du 3 juillet 2023, la SCI Chesnay Pierre 2, demande à la cour de :
– débouter la société IMC de toutes ses demandes ;
– déclarer la société Chesnay Pierre 2 bien fondée en son appel incident ;
– infirmer le jugement du 7 juin 2022 en ce qu’il a :
– fixé le loyer de base renouvelé au 19 juin 2017 pour le local à usage de boutique à la somme de 211.991 € par an hors charges et hors taxes ;
– fixé le loyer de base renouvelé au 19 juin 2017 pour le local à usage de réserve à la somme de 11.400 € par an hors charges et hors taxes ;
– fixé l’indemnité d’occupation due pour le local à usage de boutique par la société IMC pour la période courant du 1er août 2015 au 18 juin 2017 24h à la somme de 107.838,90 € par an ;
– fixé l’indemnité d’occupation due pour le local à usage de réserve par la société IMC pour la période courant du 1er août 2015 au 18 juin 2017 24h à la somme de 9.234 € par an ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 à restituer à la société IMC, sur la période comprise entre le 1er août 2015 et le 18 juin 2017 24h, les trop-perçus entre le montant de l’indemnité d’occupation versé à titre provisionnel pour les locaux à usage de réserve et le montant de l’indemnité d’occupation pour les mêmes locaux à usage de réserve fixé par la décision ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 à acquitter les frais de l’instance enrôlée sous le numéro RG 15/07527, en ce compris :
– la facture de la Selarl Franck Cherki & Virginie Rigot, huissiers de justice associés, pour la signification du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Versailles le 18 juillet 2017 pour un montant de 87,76 € ;
– les honoraires d’avocats exposés par la société IMC en amont de l’exercice par le bailleur de son droit de repentir, lesquels s’élèvent à la somme de 10.812,59 € ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 aux deux tiers des dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise judiciaire ;
– condamné la SCI Chesnay Pierre 2 à verser à la société IMC la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau :
– fixer le loyer de base renouvelé au 19 juin 2017 pour le local à usage de boutique à la somme annuelle de 240.563,70 € hors charges et hors taxes, toutes les autres clauses, charges et conditions du bail expiré demeurant inchangées ;
– fixer le loyer de base renouvelé au 19 juin 2017 pour le local à usage de réserve à la somme annuelle de 12.255 € hors charges et hors taxes, toutes les autres clauses, charges et conditions du bail expiré demeurant inchangées ;
– juger qu’il y a lieu d’indexer annuellement le loyer de renouvellement selon la variation de l’indice des loyers commerciaux (ILC) à compter du 19 juin 2017 en application de l’article R.145-22 du code de commerce ;
– condamner la société IMC à payer à la société Chesnay Pierre 2 des intérêts au taux légal sur les loyers arriérés depuis la date de la demande en justice, à compter de chaque date d’exigibilité en application de l’article 1231-6 du code civil et la capitalisation dans les conditions de l’article 1343-2 du même code pour ceux dus au moins depuis une année entière ;
– fixer l’indemnité d’occupation due pour le local à usage de boutique par la société IMC pour la période du 1er août 2015 au 18 juin 2017 à la somme de 129.038 €, puis à compter du 1er janvier 2016, à la somme de 128.480,77 € et, à compter du 1er janvier 2017, à la somme de 129.117,60 € ;
– fixer l’indemnité d’occupation due pour le local à usage de réserve par la société IMC pour la période du 1er août 2015 au 18 juin 2017 à la somme de 10.545 €, puis à compter du 1er janvier 2016, à la somme de 10.499,46 € et, à compter du 1er janvier 2017, à la somme de 10.551,50 € ;
– condamner la société IMC à payer à la société Chesnay Pierre 2 les dépens, y compris les frais d’expertise, ainsi que la somme de 8.000 €, à parfaire, par application de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 juillet 2023.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit par l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION
La cour observe que le jugement n’est pas contesté en ce qu’il a révoqué l’ordonnance de clôture pour admettre les conclusions en intervention volontaire de la Selarl JSA ès qualités de liquidateur judiciaire de la société IMC et les conclusions notifiées par la SCI Chesnay Pierre 2 le 1er avril 2022, ordonné la clôture au 5 avril 2022, et déclaré recevable l’intervention volontaire de la Selarl JSA ès qualités de liquidateur judiciaire de la société IMC.
Il revient à la cour de déterminer l’indemnité d’occupation due pour les locaux de vente et de remise, entre le 1er août 2015 (date d’effet du congé) et le 19 juin 2017 (date d’effet du repentir), ainsi que le loyer de renouvellement.
Le bail initial du 26 août 2003 porte sur un local commercial de 92,17 m², au niveau 1, destiné à la ‘vente de chaussures et tous articles habituellement et effectivement réalisés à la signature du bail’ ; le bail du 5 novembre 2003 porte sur une surface de 28,50 m², au sous-sol, à usage de réserve, et a été tacitement prolongé.
Sur le loyer de renouvellement et la détermination de la valeur locative
La Selarl JSA expose que la détermination de la valeur locative doit se faire selon les critères posés par l’article L.145-33 du code de commerce, et avance que les dispositions contractuelles n’écartent pas l’application de ces dispositions légales. Elle ajoute que les éléments de référence doivent se trouver dans le centre commercial, et que si la volonté des parties exprimée dans le contrat doit être prise en compte, les règles légales de fixation du loyer de renouvellement s’appliquent à défaut d’avoir été expressément écartées.
Elle soutient que la jurisprudence est favorable à l’application de correctifs pour estimer la valeur locative, et fait état de la disposition particulière du local loué à la société IMC, qui dispose d’un faible linéaire qu’a pu relever l’expert, lequel a indiqué que la disposition du local comme de la réserve n’étaient pas adaptées à l’activité de vente de chaussures. Elle en déduit qu’un abattement de 20% sur la valeur locative devrait être appliqué.
Elle souligne que l’activité de vente de chaussures connaît une concurrence nouvelle et dégage moins de marge que le prêt-à-porter, de sorte qu’aucune majoration ne devrait être appliquée.
Elle fait état des obligations particulièrement lourdes reposant sur le preneur, dont certaines dérogent aux règles applicables aux baux commerciaux. Elle conteste toute uniformisation des conditions locatives au sein du centre commercial, et souligne la marge de négociation limitée de la société IMC face à la société Chesnay Pierre 2, qui appartient à Unibail, première foncière européenne. Elle en déduit qu’un abattement devrait être retenu.
Elle mentionne également la baisse de fréquentation des centres commerciaux depuis les attentats de janvier 2015 et l’impact incontestable sur la clientèle des travaux de rénovation et d’extension menés sur une longue période, de sorte que les facteurs locaux de commercialité n’étaient pas favorables au 1er août 2015.
Elle relève que les éléments de référence avancés par la société Chesnay Pierre 2 sont sans rapport avec les locaux loués, s’agissant tant de leurs surfaces que de leur destination.
Elle conclut à un loyer de renouvellement au 19 juin 2017 de 1.040 €/m² soit 95.856,80 € HT/HC/an.
La société Chesnay Pierre 2 soutient que les règles de l’article L.145-34 du code de commerce ne s’appliquent pas en cas de bail d’une durée supérieure à 9 années, ce qui est le cas, et que le bail doit être fixé à la valeur locative ce qui a été contractuellement prévu. Elle ajoute que la détermination de la valeur locative de marché est encadrée dans le contrat, et que les critères de l’article L.145-33 du code de commerce ne sont pas d’ordre public, de sorte que le juge doit s’en tenir à la volonté des parties en appliquant la méthode qu’elles ont retenue. Elle fait état de décisions de jurisprudence intervenues sur l’application de l’article L.145-33 lorsque les parties ne l’ont pas visé au contrat, et soutient qu’en l’espèce les parties ont implicitement, mais nécessairement, écarté les articles du statut des baux commerciaux relatifs à la fixation judiciaire du loyer du bail renouvelé, en prévoyant des modalités particulières de fixation de la valeur locative.
Elle fait état de l’excellente situation et commercialité du centre commercial relevées par l’expert judiciaire, et écarte ses observations sur la dégradation de la situation s’agissant de la fréquentation et de la prétendue « vacance » dans le centre commercial, qu’elle explique par la rotation des enseignes et les travaux d’extension et de rénovation réalisés dans certaines parties du centre commercial. Elle conteste l’appréciation de l’expert qui a retenu que l’emplacement du magasin était « moyen », alors qu’il se situe à proximité du mail principal, des escaliers, ascenseurs et accès au parking, et est entouré d’enseignes réputées.
S’agissant des caractéristiques des locaux loués, elle soutient que les observations de l’expert judiciaire sont partiales et erronées, car le local présente un linéaire de plus de 3 mètres permettant de présenter aux chalands un large éventail des produits vendus, et est adapté à l’activité de vente de chaussures.
Elle sollicite la confirmation des surfaces locatives retenues par le jugement (92,17m² pour la boutique, 28,5 m² pour la réserve). Elle conteste l’appréciation de l’expert quant à la valeur locative de marché, l’expert ayant retenu la fourchette la plus basse des valeurs de renouvellement analysées, et ayant comparé la surface du local à des surfaces bien plus importantes, ce qui est un facteur de minoration de la valeur locative. Elle cite cinq références qui devraient seules être prises en compte pour apprécier la valeur locative conformément aux critères contractuels, et qui s’échelonnent de 2.608 € à 4.912 €/m².
Elle relève que M. [U], expert désigné le 18 juillet 2017, a dressé une estimation que la société IMC n’a pas communiquée, ce qu’elle déplore, et fait état du rapport d’un autre expert judiciaire, Mme [Z], pour le local [L] [D], se situant à proximité immédiate du local exploité par l’appelante, dans lequel la valeur locative a été estimée à 2.100 € /m², ce qui était retenu par le tribunal judiciaire de Versailles. Au vu des valeurs décapitalisées et de la surface inférieure du local, elle demande que soit retenue une valeur de 2.610 €/m², et de 430 €/m² pour la réserve.
Elle sollicite également que soient dus les intérêts au taux légal depuis la demande en justice, et la confirmation du jugement s’agissant de l’indexation.
*****
L’article 1134 du code civil, dans sa version applicable au fait, indique que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
Le contrat de renouvellement de bail, conclu le 26 août 2003 pour le local commercial, est d’une durée de 12 années à compter du 1er août 2003.
Le contrat de bail commercial pour la réserve, conclu le 5 novembre 2003, est d’une durée de 10 années à compter du 1er décembre 2003.
Ces deux contrats comportent :
– un article 4.1.1 « loyer de base » prévoyant notamment :
« il est expressément convenu entre les parties à titre de condition essentielle et déterminante que lors des renouvellements successives éventuels, le loyer de base ne pourra en aucun cas être inférieur à la valeur locative telle qu’elle est déterminée dans les conditions de l’article 4.7 ci-après ».
– un article 4.7 « fixation du loyer de renouvellement » ainsi rédigé:
« a)- il est expressément convenu entre les parties à titre de condition essentielle et déterminante, que lors des renouvellements successifs, le loyer de base qui constitue un minimum garanti, ne pourra en aucun cas être inférieur à la valeur locative.
À défaut d’accord sur le loyer de base de renouvellement, les parties en cas de litige, attribuent expressément compétence au juge des loyers commerciaux, à l’effet de fixer le loyer de base de renouvellement par référence à la valeur locative des seuls autres locaux commerciaux du « centre commercial », qui constitue un marché autonome des références locatives.
Seront pris en considération pour la fixation du loyer de renouvellement :
– les loyers de base additionnés d’un dixième (1/10ème) des prix de cession ou des indemnités d’entrée des locaux de comparaison, présentant des caractéristiques comparables au local loué et à son bail,
– lesdits loyers de base augmentés du dixième des prix de cession ou des indemnités d’entrées pris à titre de référence pour la définition du loyer, seront ceux concernés contractuellement dans les trois années précédant la date de renouvellement du bail.
Il est expressément convenu entre les parties :
– que pour les besoins de la comparaison, les surfaces contractuelles seront retenues sans application d’une pondération,
– que le bail se renouvellera par ailleurs aux clauses et conditions du bail expiré, notamment pour ce qui concerne le loyer variable.
b)- en tant que de besoin, le bailleur bénéficiera conventionnellement du droit d’option prévu à l’article L.145-57 du code de commerce (anciennement article 31 du décret du 30 septembre 1953), et du droit de repentir prévu à l’article L.145-58 du code de commerce (anciennement article 32 du décret du 30 septembre 1953) ».
Enfin, les conditions particulières prévoient le paiement d’un loyer de base (75.736 € HT et HC pour la boutique) et d’un loyer variable additionnel fixé à 7,25 % HT du chiffre d’affaires annuel HT réalisé par le preneur dans le local. Le bail de la réserve prévoit aussi un loyer de base et un loyer variable additionnel.
La société IMC soutient que la détermination de la valeur locative des locaux doit s’effectuer selon les dispositions de l’article L.145-33 du code de commerce, lequel ne voit pas son application écartée par l’article 4.7 du contrat, alors que la société Chesnay Pierre 2 avance que l’article L.145-34 du code de commerce ne s’applique pas pour les baux d’une durée supérieure à neuf ans.
Rien ne s’oppose à ce que les parties choisissent d’un commun accord de déterminer à l’avance par une stipulation du bail les conditions de fixation du prix du bail renouvelé, les articles L.145-33 et L.145-34 du code de commerce n’étant pas d’ordre public.
Si l’article L.145-33 du code de commerce dispose que le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative, cette disposition n’est pas d’ordre public de sorte que rien ne s’oppose à ce que les parties choisissent d’un commun accord de déterminer à l’avance par une stipulation du bail les conditions de fixation du prix du bail renouvelé.
En l’espèce, il n’est pas contestable que les parties ont convenu d’un mécanisme de fixation du loyer de renouvellement, et la clause contractuelle précitée ne fait aucune référence aux articles L.145-33 et L.145-34 du code de commerce.
Elles ont décidé que le loyer de base de renouvellement sera fixé par référence à la valeur locative des seuls autres locaux commerciaux du « centre commercial », qui constitue selon le contrat de bail un marché autonome des références locatives, et en prenant en considération les loyers de base additionnés d’1/10e des prix de cession ou des indemnités d’entrée, comme indiqué par le contrat.
Aussi, le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu que les loyers devaient être fixés selon les stipulations contractuelles.
*****
Le rapport d’expertise judiciaire de Mme [K] indique qu’il s’agit d’un bail restrictif (interdiction de sous-louer, accord du bailleur en cas de vente du fonds avec droit de préférence) contenant des clauses exorbitantes du droit commun (paiement par le preneur de toutes les taxes, charges, grosses réparations de l’article 606 du code civil, assurance propriétaire, honoraires de gestion…). Mais c’est aussi le cas pour les références situées dans le centre commercial.
Il rappelle l’emplacement du centre commercial [4] dans le sud-ouest [Localité 3], à proximité de [Localité 3] comme des communes alentours, son accessibilité par les routes et transports en commun.
Il précise que le local occupé par la société IMC est situé au niveau 1 de l’extension du centre commercial, retient qu’il est à proximité d’une sortie sur le parking souterrain mais éloigné du mail principal et des « locomotives » du centre commercial. Il estime l’emplacement moyen dans le centre, sur un bras secondaire, dépourvu d’escaliers roulants à proximité.
Il décrit le local comme de forme rectangulaire avec un linéaire en façade d’allée entièrement vitré, de 3,3 m, l’aire de vente présentant une longueur de 27 m, étant virtuellement coupée en deux parties par une volée de trois marches ce qui réduit la hauteur sous plafond de la deuxième partie de l’aire de vente. Il conclut à une configuration étroite, toute en longueur, peu optimale pour présenter les produits, avec un faible linéaire en façade, tout en retenant que les locaux sont agencés au mieux et en bon état d’entretien.
S’agissant de la réserve, il la décrit comme un local aveugle classique dont la configuration (présence d’un angle obtus) n’est pas idéale pour le rangement.
Il présente la clientèle du centre commercial comme à fort pouvoir d’achat, relève une baisse générale de fréquentation des centres commerciaux en France, plus marquée depuis 2015. Il mentionne que le taux de vacances des locaux le plus élevé du centre commercial se situe au premier étage, secteur de la place du marché, et que la rotation des enseignes sur la période 2004/2019 montre un nombre de départs plus élevé que le nombre d’arrivées, ce qui peut s’expliquer par la gêne due aux travaux en cours et leur coût financier supporté par les locataires.
Il retient une valeur locative de renouvellement au 19 juin 2017 pour la boutique de 1.400 €/m², en se fondant sur des termes de référence choisis au 1er étage du centre commercial, soit 129.038 €, et pour la réserve de 400 €/m², soit 11.400 €.
La société IMC souligne l’importance des travaux de rénovation et d’extension et leur durée sur une période de sept années, l’expert relevant que les sommes appelées au titre de ces travaux pour la locataire se sont élevées, entre 2015 et 2017, à 112.519,40 €, travaux qui ont eu un impact sur la clientèle du centre commercial, pour en déduire que les facteurs locaux de commercialité dudit centre commercial n’étaient pas favorables au 1er août 2015.
La société Chesnay Pierre 2 rappelle la situation privilégiée du centre commercial et conteste les observations de l’expert judiciaire sur la baisse générale de fréquentation des centres commerciaux, l’aggravation de la situation du fait des travaux, et le taux élevé de vacances des locaux relevés.
Toutefois, l’expert a noté que le centre commercial [4], s’il était historique et bien entretenu, avait été supplanté par le centre commercial voisin [5] d’une superficie et d’une fréquentation supérieures, ce que ne peut ignorer le bailleur, propriétaire de ces deux centres commerciaux. Par ailleurs, la société Chesnay Pierre 2 reconnaît dans ses conclusions l’existence d’une érosion de la fréquentation, qu’elle qualifie d’ancienne et régulière, tout en considérant que la fréquentation du centre reste exceptionnelle. Cette société ne peut se limiter à évoquer, s’agissant de vacances dans le centre, un rapport judiciaire « [L] [D] » relatif à une autre instance, sans présenter dans ses conclusions ses éléments qui contrediraient les observations de l’expert judiciaire Mme [K]. Elle ne verse pas de pièces de nature à contester les chiffres de fréquentation retenus par l’expert, soit 14 millions de visiteurs en 2008 et un peu moins de 11 millions en 2017, correspondant à une perte d’environ 22 %.
Le local fait face à un magasin Hugo Boss et est à côté d’un magasin IKKS. Si la société Chesnay Pierre 2 soutient qu’il se trouve à proximité des « locomotives » du centre (Le Printemps, Auchan Gourmand, BHV, Monoprix), l’expert judiciaire a relevé que le local n’était pas visible de ces « locomotives », et inversement. Par ailleurs, l’escalier et l’ascenseur à proximité, non visibles depuis le local, sont situés vers les parkings, de sorte qu’ils présentent un intérêt moindre que s’ils étaient en milieu de mail. Aussi, l’avis de l’expert judiciaire missionné, qui a qualifié cet emplacement de « moyen », sera suivi, étant du reste relevé que l’expertise judiciaire « [L] [D] » avait également retenu cette qualification pour un emplacement situé en face.
L’analyse de l’expert judiciaire sera également suivie s’agissant des caractéristiques des locaux loués, lesquels sont tout en longueur et présentent comparativement une faible largeur (27 mètres de profondeur sur 3,3 mètres de largeur), de sorte que la surface de présentation en façade à la clientèle des produits proposés à la vente, n’est pas importante.
Il ressort de l’analyse des plans que d’autres locaux présentent, comparativement, une surface de vitrine plus importante.
Cette disposition particulière a aussi des conséquences sur la circulation de la clientèle.
Par ailleurs, il ne peut être contesté qu’une disposition rectangulaire de la remise pourrait faciliter son usage de rangement.
La surface des locaux, soit 92,17 m² pour la boutique, et 28,5 m² pour la remise, n’est pas contestée.
S’agissant de la valeur locative de la boutique, l’expert judiciaire a retenu 33 valeurs correspondant toutes à des locaux situés au 1er étage du centre commercial, parmi lesquelles le jugement n’en a retenu que 5, au vu des stipulations contractuelles sur les modalités de détermination de la valeur locative.
Le contrat de bail prévoit que les loyers à prendre en compte pour la fixation du loyer de renouvellement sont « les loyers de base additionnés d’un dixième (1/10ème) des prix de cessions ou des indemnités d’entrée des locaux de comparaison, présentant des caractéristiques comparables au local loué et à son bail,
lesdits loyers de base augmentés du dixième des prix de cessions ou des indemnités d’entrées pris à titre de référence pour la définition du loyer, seront ceux concernés contractuellement dans les trois années précédant la date de renouvellement du bail ».
Dans ces conditions, les valeurs retenues par le jugement – soit des valeurs correspondant à des nouvelles locations conclues dans les trois années ayant précédé le renouvellement du bail en cause- sont les seules susceptibles d’être prises en compte, en ce qu’elles répondent aux critères fixés par l’article 4-7 du contrat.
local
activité
surface
prise d’effet
loyer de base
loyer facial
loyer décapitalisé /m²
223B
prêt-à-porter enfant
81 m²
16.05.2015
169.236 €
2.089 €
2.608 €
118
prêt-à-porter
94 m²
20.10.2015
208.600 €
2.219 €
2.857 €
222
prêt-à-porter
84 m²
01.03.2016
250.000 €
2.976 €
3.274 €
232
bagagerie
140 m²
10.10.2016
300.000 €
2.143 €
3.214 €
117
bijoux
68 m²
17.10.2016
224.000 €
3.294 €
4.912 €
La cour observe cependant que le loyer du local n°117, est d’un montant considérablement plus élevé que celui des autres locaux retenus, qu’il concerne une activité dégageant des plus-values élevées, et que le rapport « [L] [D] » a indiqué qu’il bénéficiait d’une situation favorable, au croisement de plusieurs travées. Ce rapport précise aussi que le bailleur a participé, pour ce local n°117, aux travaux à hauteur de 50’000 €, a concédé une remise de 15 % sur le loyer de base la 1ère année et de 10 % la 2ème année.
En conséquence, la cour écartera cette référence.
Le jugement a également relevé, s’agissant du local n°222, qu’il présentait une situation privilégiée, au croisement de plusieurs travées, et bénéficiait d’un large linéaire de façade en angle, de sorte qu’il dispose d’une situation préférable à celle du local en cause.
Le rapport d’expertise judiciaire concernant le local « [L] [D] » – qui se situe à proximité immédiate du local en cause – a retenu une valeur de 2.100 €/m² (aussi retenue par le jugement de 1ère instance du 11 mars 2011). Si la société Chesnay Pierre 2 souligne qu’il s’agit d’une plus grande surface (146 m²) et que les prix des petites surfaces sont plus élevés, le local « [L] [D] » bénéficie aussi d’une surface de vitrine deux fois plus importante (6,60 m²).
Les dispositions contractuelles doivent conduire à tenir compte des caractéristiques du local loué, qui présente une faible surface de linéaire de façade et une disposition en profondeur, et un emplacement moyen dans le centre commercial dans une allée « secondaire ».
Aussi, et au regard des valeurs de référence précitées, la valeur locative sera justement évaluée au 19 juin 2017 à la somme de 1.900 € par m², soit 175.123 €, le jugement étant réformé sur ce point.
Sur la valeur locative de la réserve, l’expert a retenu une valeur de 400 €/m² au 19 juin 2017, soit 11.400 € pour l’année, en se fondant sur 5 références, et le jugement sera suivi en ce qu’il a considéré qu’une seule de ces références pouvait être retenue au vu de l’article 4.7 du contrat (soit la référence du local 9, de 34 m², pour un nouveau bail au prix de 399 €/m²).
Le jugement a validé l’analyse de l’expert judiciaire sur un prix de 400 €/m², soit une valeur de 11.400 € au 19 juin 2017.
La configuration de la réserve n’étant pas optimale (présence d’un angle rendant le rangement plus malaisé), et ni la demande d’abattement de 20% présentée par la société IMC ni celle de fixation à 430 €/m² de la société Chesnay Pierre 2 n’apparaissant justifiées, ce chiffrage sera retenu.
S’agissant de l’indexation des montants des loyers des baux renouvelés, le jugement a arrêté qu’ils seront indexés, à compter du 19 juin 2017, sur l’indice des loyers commerciaux.
La société IMC ne présentant aucun développement sur ce point dans ses conclusions, et la société Chesnay Pierre 2 sollicitant la confirmation, il sera fait droit à cette demande.
Sur la fixation des indemnités d’occupation
La société IMC s’oppose à l’indexation sur le montant de l’indemnité d’occupation, du fait de son caractère indemnitaire, et soutient qu’il convient de pratiquer un abattement de précarité sur la valeur locative.
Elle rappelle que le bailleur a exercé son droit de repentir après avoir demandé son éviction,
de sorte qu’une période intermédiaire s’est créée entre le lendemain de la date d’expiration des baux (1er août 2015) et la veille du renouvellement (18 juin 2017), pendant laquelle le preneur est redevable d’une indemnité d’occupation. Elle déclare que le refus de renouvellement lui a interdit toute initiative, qu’il est d’usage d’appliquer un abattement sur l’indemnité d’occupation au vu de la précarité de la situation du preneur. Elle propose de retenir un abattement de 30 %, celui proposé par l’expert (10 %) étant insuffisant, soit 728 €/m² pour la boutique, et 280 €/m² pour la réserve.
La société Chesnay Pierre 2 conteste le montant d’indemnité d’occupation de la boutique retenue par le jugement, soit 1.170 €/m² après abattement de 10 % pour précarité, comme la valeur proposée par l’expert judiciaire (1.100 € -10%). Elle soutient que l’indemnité d’occupation doit être fixée à la valeur locative statutaire, relève que les baux renouvelés à compter du 3 novembre 2014 sont favorables au preneur qui ne supporte plus les grosses réparations et honoraires de gestion locative, et fait état de la fréquentation du centre commercial et de sa zone de chalandise. Elle conteste un quelconque abattement pour précarité, qui ne peut en tout état de cause être supérieur à 10 %, le preneur ayant pu poursuivre normalement son activité, et rappelle avoir exercé son droit de repentir qui exclut tout abattement de la sorte. Elle conteste le caractère indemnitaire de l’indemnité d’occupation, s’agissant de la contrepartie de la jouissance des lieux. Elle propose de retenir le montant de 1.400 €/m² pour la boutique, sans pratiquer d’abattement, et sollicite l’indexation de cette indemnité d’occupation.
Elle suggère de fixer l’indemnité pour la réserve à 370 €/m².
*****
Les parties s’accordent pour fixer la période pour laquelle l’indemnité d’occupation est due, soit du 1er août 2015 au 18 juin 2017, du congé reçu par le locataire à l’exercice du droit de repentir par le bailleur.
L’expert a retenu, au vu des éléments précédemment développés sur le centre commercial à l’occasion de la fixation de la valeur locative, un montant d’indemnité d’occupation de 1.100 € pour la boutique, auquel il a appliqué un coefficient de précarité de 10 %. Il a proposé un montant de 370 €/m² pour la réserve.
Répondant notamment aux critiques du bailleur, il a indiqué qu’une situation d’éviction crée souvent, pour une activité comme celle de la société IMC, une incertitude quant à la stratégie commerciale à suivre, incertitude qui a perduré jusqu’à l’exercice du droit de repentir, de sorte que l’activité de la locataire en a été peu ou prou perturbée.
L’article L.145-28 du code de commerce prévoit notamment qu’ « aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d’éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l’avoir reçue. Jusqu’au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré. Toutefois, l’indemnité d’occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d’appréciation ».
Il convient par conséquent d’appliquer les dispositions de l’article L.145-33 (section 6) permettant l’estimation de la valeur locative statutaire, lequel dispose “Le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.
A défaut d’accord, cette valeur est déterminée d’après :
1° Les caractéristiques du local considéré ;
2° La destination des lieux ;
3° Les obligations respectives des parties ;
4° Les facteurs locaux de commercialité ;
5° Les prix couramment pratiqués dans le voisinage.
Un décret en Conseil d’Etat précise la consistance de ces éléments”.
Cette valeur locative est déterminée en fonction des articles R.145-3 et suivants du code de commerce, l’article R.145-3 prévoyant notamment “Les caractéristiques propres au local s’apprécient en considération :
1° De sa situation dans l’immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public ;
2° De l’importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l’exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux ;
3° De ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d’activité qui y est exercée ;
4° De l’état d’entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail ;
5° De la nature et de l’état des équipements et des moyens d’exploitation mis à la disposition du locataire”.
L’expert avait retenu pour évaluer cette valeur locative, 15 références au titre des nouvelles locations et 18 références au titre des renouvellements, et le jugement a retenu ces 18 dernières valeurs, mais a écarté 4 valeurs au titre de nouvelles locations correspondant à des baux ayant pris effet après la date de congé.
Cinq commerces retenus à titre de référence ont pour activité, comme la société IMC, le commerce de chaussures, et 4 d’entre eux ont des superficies considérablement plus grandes (180 m² et plus) que la société IMC (92,17 m²), un seul ayant une surface inférieure (65 m²).
Néanmoins, ils présentent tous des loyers de base correspondant à un prix allant de 1.500 € à 2.000 € le m². Par ailleurs, ces 5 baux correspondant à des locaux de vente de chaussures ont tous été conclus ou renouvelés avant l’entrée en application de l’article L.145-35, favorable aux preneurs.
Il s’agit de locaux situés dans le centre commercial, au 1er étage, comme le local en cause. Si les éléments permettant la détermination de cette valeur locative ont été précédemment analysés, il sera rappelé que l’emplacement des locaux loués à la société IMC est « moyen » en ce qu’il est sur un axe secondaire, qu’aucune « locomotive »ne se trouve à proximité, qu’il présente un faible linéaire de façade et une disposition des locaux tout en longueur. Par ailleurs, si ce centre commercial est bien relié et couvre un bassin de population à fort pouvoir d’achat, il a connu pendant une longue période des travaux et subit une baisse notable de sa fréquentation.
Au vu de ces éléments, le jugement a fait une exacte appréciation de la valeur locative des locaux au 1er août 2015, en retenant la valeur de 1.300 € /m², soit 119.821 €.
S’agissant de l’abattement, la société IMC est fondée à présenter une demande à ce titre pour la période antérieure à l’exercice par le bailleur de son droit de repentir, dès lors qu’elle s’est trouvée pendant près de deux ans dans une incertitude, empêchant toute prise de décision relative à l’exploitation de son commerce, la dissuadant de réaliser des travaux ou aménagements dans le local loué, et la pénalisant dans l’évolution de sa stratégie commerciale, ce qui a eu nécessairement des conséquences sur son activité.
Aussi, un abattement de 10% sera retenu, par confirmation du jugement sur ce point.
S’agissant de la réserve, l’expert a proposé un montant de 370 €/m², et le jugement sera suivi en ce qu’il a fixé à 360 €/m² ce montant, au vu notamment de la présence d’un angle obtus ne permettant pas une disposition optimale des rangements.
Un taux de précarité de 10 % sera également appliqué.
En conséquence, l’indemnité d’occupation sera fixée à 107.838,90 € (1.300 x 92,17 x 0,90) pour la boutique, et à 9.234 € (360 x 28,5 x 0,90) pour la réserve, le jugement étant confirmé sur ce point.
Au vu des éléments d’appréciation soumis à la cour, et à défaut de justification d’une variation particulière, à la hausse comme à la baisse, de la valeur locative des locaux en cause, entre 2015 et 2017, il ne sera pas fait droit à la demande d’indexation de l’indemnité d’occupation.
Sur la demande de restitution des trop-perçus
L’article L.145-57 al 1er du code de commerce prévoit que « pendant la durée de l’instance relative à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé, le locataire est tenu de continuer à payer les loyers échus au prix ancien ou, le cas échéant, au prix qui peut, en tout état de cause, être fixé à titre provisionnel par la juridiction saisie, sauf compte à faire entre le bailleur et le preneur, après fixation définitive du prix du loyer ».
Le 2ème alinéa indique que « dans le délai d’un mois qui suit la signification de la décision définitive, les parties dressent un nouveau bail dans les conditions fixées judiciairement, à moins que le locataire renonce au renouvellement ou que le bailleur refuse celui-ci, à charge de celle des parties qui a manifesté son désaccord de supporter tous les frais. Faute par le bailleur d’avoir envoyé dans ce délai à la signature du preneur le projet de bail conforme à la décision susvisée ou, faute d’accord dans le mois de cet envoi, l’ordonnance ou l’arrêt fixant le prix ou les conditions du nouveau bail vaut bail ».
La société IMC indiquant avoir réglé, pour le local boutique, à compter du 1er août 2015, une indemnité d’occupation correspondant au loyer précédent, soit 1.100 € /m², et tant l’indemnité d’occupation que le loyer renouvelé étant supérieurs à ce montant (2.000 €/m² pour le bail renouvelé, 1.170 €/m² pour l’indemnité d’occupation), le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de restitution présentée par le preneur.
S’agissant du local de réserve, le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu que le montant de l’indemnité d’occupation de ce local a été fixé à une somme inférieure (324 €/m²) à celle versée à titre provisionnel (400 €/m²).
Aussi la société Chesnay Pierre 2 sera condamnée à verser à la société IMC le trop-perçu reçu de sa part, au titre de la période pour laquelle l’indemnité d’occupation du local réserve est due, soit du 1er août 2015 au 18 juin 2017.
Sur le point de départ des intérêts
L’article 1343-1 du code civil, relevant de dispositions particulières aux obligations de sommes d’argent, prévoit que « lorsque l’obligation de somme d’argent porte intérêt, le débiteur se libère en versant le principal et les intérêts. Le paiement partiel s’impute d’abord sur les intérêts.
L’intérêt est accordé par la loi ou stipulé dans le contrat. Le taux de l’intérêt conventionnel doit être fixé par écrit. Il est réputé annuel par défaut ».
L’article 1343-2 précise que « les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l’a prévu ou si une décision de justice le précise ».
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a dit que les intérêts au taux légal dus sur les loyers arriérés et les trop-perçus de loyers devaient courir à compter de la demande et être capitalisés.
L’article 1231-7 du code civil indique en son 1er alinéa : « en toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l’absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n’en décide autrement ».
Aussi, le jugement sera confirmé en ce qu’il a indiqué que les intérêts au taux légal, s’agissant des indemnités d’occupation, devaient courir à compter du prononcé de la décision de 1ère instance. Toutefois, le cours des intérêts et leur capitalisation seront arrêtés au 3 février 2022, date du jugement de liquidation judiciaire de la société IMC, en application de l’article L.622-28 du code de commerce.
Sur les frais d’instance
La société IMC soutient que le bailleur doit être condamné aux dépens de l’instance, ayant exercé son droit de repentir, soit un montant de 28.805,14 €. Elle sollicite également sa condamnation à lui verser la somme de 20.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Chesnay Pierre 2 indique avoir fait appel des dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et d’instance. Elle avance que l’expertise judiciaire avait été sollicitée d’un commun accord des parties, et conteste la décision ayant mis à sa charge les deux tiers des frais d’instance. Elle sollicite le partage des frais d’instance et dépens de 1ère instance, et la condamnation de la société IMC au paiement des dépens d’appel ainsi qu’au versement de la somme de 3.496,60 € à parfaire sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
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L’article L.145-58 du code de commerce prévoit notamment que le propriétaire peut, jusqu’à l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l’indemnité d’éviction, à charge pour lui de supporter les frais de l’instance et de consentir au renouvellement du bail.
La société Chesnay Pierre 2 a exercé son droit de repentir le 19 juin 2017, soit après la clôture et la plaidoirie du 18 mai 2017 à l’issue de laquelle a été rendu le jugement du 18 juillet 2017 ordonnant la désignation d’un expert aux fins d’estimer les indemnités d’éviction et d’occupation.
Aussi, le jugement sera confirmé en ce qu’il a mis à la charge de la SCI Chesnay Pierre 2 la facture de signification du jugement du 18 juillet 2017 par huissier (87,76 €) et les honoraires d’avocat engagés par la société IMC avant l’exercice du droit de repentir (10.812,59 €).
Le jugement a aussi relevé qu’il existait un accord des parties sur la modification de la mission confiée à l’expert, afin que celui-ci éclaire la juridiction de première instance sur la fixation des loyers des baux renouvelés et la détermination des indemnités d’occupation, ce qui n’est pas contesté en appel.
Chacune des parties ayant intérêt à la fixation du loyer en renouvellement, c’est à raison que le tribunal a mis les dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise, à la charge des deux tiers pour la société Chesnay Pierre 2 et d’un tiers pour la société IMC, sauf à fixer cette créance au passif de cette société.
Les dépens d’appel seront mis à la charge de la société Chesnay Pierre 2, qui sera également condamnée au versement de la somme de 4.000 € à la société IMC, représentée par la société JSA, ès qualités, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant contradictoirement dans les limites de l’appel,
Confirme le jugement, sauf s’agissant du loyer de base renouvelé pour le local à usage de boutique, du cours des intérêts et de leur capitalisation et sauf à fixer la part des dépens mise à la charge de la société IMC au passif de la procédure de liquidation judiciaire de celle ci,
Statuant à nouveau,
Fixe le loyer de base renouvelé au 19 juin 2017 pour le local à usage de boutique à la somme de 175.123 € par an hors charges et hors taxes,
Arrête le cours des intérêts et leur capitalisation au 3 février 2022, date du jugement de liquidation judiciaire de la société IMC,
Fixe la part des dépens de première instance mise à la charge de la société IMC (un tiers) au passif de la procédure de liquidation judiciaire de celle-ci ;
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne la société Chesnay Pierre 2 au paiement de la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile à payer à la société IMC, représentée par la société JSA, ès qualités, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel dont distraction au bénéfice de Maître Oriane Dontot, Avocat au Barreau de Versailles, par application de l’article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Bérangère MEURANT, Conseiller pour le Président empêché, et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le conseiller,