Indemnisation des Victimes Indirectes d’Actes de Terrorisme : Reconnaissance des Préjudices et Nécessité d’Expertise Médicale

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Indemnisation des Victimes Indirectes d’Actes de Terrorisme : Reconnaissance des Préjudices et Nécessité d’Expertise Médicale

Mme [O] [L] épouse [W], employée de Charlie Hebdo, a été victime indirecte de l’attentat du 7 janvier 2015. Après avoir été appelée par son époux, M. [U] [W], qui a échappé à l’attaque, elle a développé un stress post-traumatique. Sa qualité de partie civile a été reconnue par la cour d’assises en avril 2021. N’ayant pas trouvé d’accord avec le FGTI, elle a saisi le juge des référés, qui a rejeté ses demandes d’expertise et de provision. La Cour d’appel a également rejeté sa demande, mais la Cour de cassation a cassé cet arrêt en janvier 2023, renvoyant l’affaire devant une autre chambre de la Cour d’appel.

En septembre et octobre 2022, Mme [O] [L] a assigné le FGTI, le groupe Audiens et la CPAM. En juin 2023, le juge de la mise en état a rejeté la demande d’expertise médicale et a condamné le FGTI à verser 900 euros à Mme [O] [L]. Dans ses dernières écritures, elle a demandé une expertise médicale et des indemnités pour divers préjudices, totalisant plusieurs centaines de milliers d’euros.

Le FGTI a contesté la demande d’expertise et a proposé une indemnisation inférieure. La CPAM et le groupe Audiens n’ont pas constitué avocat. Le tribunal a ordonné une expertise médicale pour évaluer les préjudices de Mme [O] [L] et a fixé une provision de 2.000 euros à valoir sur les frais d’expertise.

Le tribunal a reconnu Mme [O] [L] comme victime indirecte d’un acte de terrorisme et a ordonné une expertise médicale. Il a également condamné le FGTI à indemniser Mme [O] [L] pour certains préjudices, tout en déboutant d’autres demandes. La décision a été rendue le 12 septembre 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

12 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG
22/12101
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

PRPC JIVAT

N° RG 22/12101
N° Portalis 352J-W-B7G-CX656

N° MINUTE :

Assignation du :
28 septembre 2022
29 septembre 2022
05 octobre 2022

JUGEMENT
rendu le 12 Septembre 2024

DEMANDERESSE

Madame [O] [L] épouse [W]
domiciliée chez Me Elodie ABRAHAM
[Adresse 4]
[Localité 7]

représentée par Me Elodie ABRAHAM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0391

DEFENDEURS

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DE TERRORISME ET D’AUTRES INFRACTIONS
[Adresse 5]
[Localité 12]

représenté par Me Patricia FABBRO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0082

CPAM DE [Localité 13]
[Adresse 10]
[Localité 11]

défaillante

GROUPE AUDIENS
[Adresse 6]
[Localité 9]

défaillant

Décision du 12 Septembre 2024
PRPC JIVAT
N° RG 22/12101
N° Portalis 352J-W-B7G-CX656

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Olivier NOËL, Vice-Président
Emmanuelle GENDRE, Vice-Présidente
Monsieur RICHARD, Magistrat à titre temporaire

assistés de Véronique BABUT, Greffier

DEBATS

A l’audience du 13 Juin 2024tenue publiquement
Après clôture des débats, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2024.

JUGEMENT

– Réputé contradictoire,
– En premier ressort,
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

EXPOSE DU LITIGE

Mme [O] [L] épouse [W] était employée au sein du journal Charlie Hebdo et travaillait à son domicile le jour de l’attentat du 7 janvier 2015. Elle s’est immédiatement rendue dans les locaux du journal après avoir été appelée par son époux, M. [U] [W] qui, présent sur les lieux a échappé à l’attaque et a assisté à l’évacuation des victimes.

Sa qualité de partie civile a été reconnue par arrêt civil du 14 avril 2021 de la cour d’assises spécialement composée.

Elle indique avoir présenté un stress post-traumatique à la suite de l’attentat et avoir fait l’objet d’un examen par son médecin conseil le Dr [B] le 13 février 2020.

N’étant pas parvenue à un accord avec le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DE TERRORISME ET D’AUTRES INFRACTIONS (ci-après FGTI), Mme [O] [L] l’a fait assigner devant le juge des référés qui, par ordonnance du 29 octobre 2020, a dit n’y avoir lieu à référé sur les demandes de provision et d’expertise médicale.

Par arrêt du 2 juillet 2021, la Cour d’appel de Paris a rejeté la demande d’expertise et de provision.

Par arrêt en date du 19 janvier 2023, la 2ème chambre civile de la Cour de cassation saisie d’un pourvoi a cassé cet arrêt et a renvoyé l’affaire et les parties devant la Cour d’appel autrement composée. La requérante indique ne pas avoir engagé la procédure de renvoi.

Par actes délivrés les 28 septembre, 29 septembre et 5 octobre 2022, Mme [O] [L] a fait assigner le FGTI, le groupe Audiens et la CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE de [Localité 13] (ci-après CPAM) devant la présente juridiction.

Décision du 12 Septembre 2024
PRPC JIVAT
N° RG 22/12101
N° Portalis 352J-W-B7G-CX656

Par ordonnance du 29 juin 2023, le juge de la mise en état saisi par le FGTI d’un incident aux fins d’expertise a :
rejeté la demande d’expertise médicale ;condamné le FGTI à verser à Mme [O] [L] la somme de 900 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’incident ;renvoyé l’affaire à l’audience de la mise en état.
Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 20 novembre 2023 auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Mme [O] [L] demande à la juridiction de :
La juger recevable et bien fondée en ses demandes ;Rejeter la demande d’expertise du FGTI ;Juger que le FGTI devra lui verser les sommes suivantes :. dépenses de santé actuelles : 17,17 euros ;
. frais divers : 2.850 euros ;
. PGPA : 23.762,87 euros ;
. PGPF : 700.245,47 euros ;
. incidence professionnelle : 416.141,24 euros ;
. déficit fonctionnel temporaire : 20.591,10 euros ;
. souffrances endurées : 40.000 euros
. déficit fonctionnel permanent : 50.000 euros
. préjudice d’agrément : 8.000 euros
. préjudice sexuel : 5.000 euros
. préjudice d’affection : 40.000 euros
. préjudice d’affection pour la perte de ses collègues et amis du journal : 40.000 euros
. préjudice permanent exceptionnel (troubles dans les conditions d’existence) : 25.000 euros
. préjudice exceptionnel des victimes d’actes de terrorisme : 30.000 euros
Condamner le FGTI, partie qui succombe à l’instance, à lui payer la somme de 24.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens
Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 24 janvier 2024, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions demande au tribunal de :
Juger que le rapport du Dr [B] inopposable au Fonds de garantie pour défaut de respect du contradictoire ;Ordonner avant dire droit une mesure d’expertise avec mission habituelleA tout le moins,
Juger Mme [L] mal fondée en toutes ses demandes et l’en débouter sauf à juger conformément à l’offre du fonds de garantie indemnisables les préjudices suivants :. troubles dans les conditions d’existence : 8.000 euros
. préjudice d’affection en relation avec la situation de son époux : 15.000 euros
. préjudice d’affection en relation avec la perte de ses proches : 5.000 euros
Laisser les dépens à la charge de l’Etat.
La Caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 13] et le groupe AUDIENS, quoique régulièrement assignés, n’ont pas constitué avocat.
La présente décision, susceptible d’appel sera donc réputée contradictoire à l’égard de tous.

La clôture de la présente procédure a été prononcée le 25 janvier 2024.

L’affaire a été plaidée à l’audience du 13 juin 2024 et mise en délibéré au 12 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I- SUR LE DROIT À INDEMNISATION

Aux termes de l’article L 126-1 du code des assurances, les victimes d’actes de terrorisme commis sur le territoire national, les personnes de nationalité française victimes à l’étranger de ces mêmes actes, y compris tout agent public ou tout militaire, ainsi que leurs ayants droit, quelle que soit leur nationalité, sont indemnisés dans les conditions définies aux articles L 422-1 à L 422-3.
 
Selon l’article 421-1 du code pénal, « constituent des actes de terrorisme, lorsqu’elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, les infractions suivantes et notamment les atteintes volontaires à la vie, les atteintes à l’intégrité de la personne, l’enlèvement et la séquestration ».

En l’espèce il est constant que Mme [O] [L] ne se trouvait pas dans les locaux du journal au moment de l’attentat terroriste du 7 janvier 2015, mais s’est rendue très rapidement sur place parvenant à outrepasser le cordon de sécurité des forces de l’ordre pour rejoindre son époux et ses collègues. Mme [O] [L] prend par ailleurs acte de la reconnaissance de son droit à indemnisation par le Fonds de garantie.

Le Fonds de garantie fait quant à lui valoir que Mme [O] [L] ne bénéficie pas de la qualité de victime directe puisqu’elle ne s’est pas trouvée exposée à un danger immédiat, à un péril objectif de mort ou d’atteinte corporelle tout en sollicitant une expertise contradictoire aux fins d’évaluation de ses préjudices.

Il en résulte que si aux termes de ses écritures, le Fonds de garantie dénie la qualité de victime directe des attentats de Mme [O] [L], qualité que celle-ci ne revendique du reste pas dans la présente instance, il n’en demeure pas moins qu’il lui reconnaît la qualité de victime par ricochet et sollicite une demande d’expertise aux fins d’évaluation de ses préjudices propres en lien avec cette qualité.

Il ressort par ailleurs des pièces produites que Mme [O] [L] était employée du journal Charlie Hebdo depuis le 28 septembre 2014, que de ce fait elle entretenait des relations professionnelles et affectives avec les victimes de l’attentat, qu’elle est mariée avec M. [U] [W] qui exerçait en tant que directeur financier au sein du même journal et qui a été victime directe de l’attaque terroriste à laquelle il a survécu. Il n’est par ailleurs pas contesté que Mme [O] [L] s’est trouvée dans les locaux du journal dans un temps très proche de la commission de l’attentat en présence de ses collègues ayant pu y échapper et des proches des victimes.

Ainsi, si Mme [O] [L] n’a pas la qualité de victime directe, puisqu’elle n’a pas été exposée directement aux actes perpétrés par les terroristes en ne se trouvant pas sur les lieux de l’attentat, elle a la qualité de victime par ricochet des victimes directes de l’attentat du 7 janvier 2015. A ce titre elle est en droit de solliciter la réparation des préjudices résultant de ses liens avec les victimes atteintes directement, mais aussi de son préjudice corporel propre, c’est-à-dire du préjudice physique ou psychique dont elle a personnellement souffert en lien direct et certain avec l’attentat. Dans ces conditions, le droit à indemnisation de Mme [O] [L] du fait de son préjudice lié aux attentats du 7 janvier 2015 est entier.

II- SUR L’INDEMNISATION DES PRÉJUDICES PROPRES DE MME [O] [L]

Pour s’opposer à l’organisation d’une expertise judiciaire, Mme [O] [L] fait valoir que le juge des référés, par ordonnance du 29 octobre 2020, a rejeté sa demande d’expertise médicale aux fins d’évaluer ses séquelles psychiatriques suivi en cela par la Cour d’appel et que le Fonds de garantie n’a initié aucune expertise amiable en dépit de ses demandes d’indemnisation. Dans le cadre de la procédure au fond, elle expose que la demande formulée par incident par le FGTI aux fins d’organisation d’une expertise a été rejetée par le juge de la mise en état par ordonnance du 29 juin 2023.

Elle rappelle qu’elle a fait l’objet d’une expertise par le Dr [B] le 10 avril 2020 et qu’il est de jurisprudence constante que les expertises médicales privées peuvent constituer une base suffisante pour évaluer les préjudices subis par une victime dès lors qu’elles sont contradictoirement soumises aux débats. Elle revient également sur les qualités du Dr [B] reconnu pour ses compétences et d’ailleurs citée devant la cour d’assises de Paris pour témoigner lors du procès des attentats du 13 novembre 2015. Elle ajoute que l’expertise du Dr [B] est corroborée par les éléments versés aux débats. Elle indique enfin qu’elle ne se soumettra à aucun nouvel examen médical et sollicite la liquidation de son préjudice sur la base des conclusions du rapport du Dr [B] soumis à la discussion.

Le Fonds de garantie pour solliciter une expertise judiciaire rappelle que la jurisprudence de la Cour de cassation considère qu’une expertise amiable isolée est insuffisante en matière de preuve. Il estime qu’il ne peut discuter d’une expertise alors qu’il n’a pas participé à l’examen clinique en sollicitant un médecin conseil, ce qui est primordial s’agissant d’une expertise psychiatrique.
Il ajoute à cet égard que l’importance du respect du principe du contradictoire dans le cadre de l’expertise a été consacré également par la Cour européenne des droits de l’homme. Il relève que le Dr [B] mentionne un récit des faits par la requérante qui n’est pas joint ou reproduit dans le rapport, ce qui ne lui permet pas de solliciter l’avis de son propre médecin conseil.

SUR CE,

Il résulte de l’article 144 du code de procédure civile que les mesures d’instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d’éléments suffisants pour statuer.

L’article 16 du même code dispose que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

Décision du 12 Septembre 2024
PRPC JIVAT
N° RG 22/12101
N° Portalis 352J-W-B7G-CX656

Il prévoit en outre que le juge ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.

Il résulte de ces principes que, si une mesure d’expertise judiciaire est soumise à la contradiction, ce principe s’appliquant dès le stade des opérations d’expertise, l’expertise extra judiciaire n’est en revanche pas soumise à la contradiction au cours de son déroulement et peut être prise en compte sous certaines conditions. Il est ainsi en premier lieu nécessaire que les parties aient été en mesure de discuter contradictoirement du rapport au cours de l’instance permettant au juge de l’exploiter au soutien de sa décision quand bien même les parties n’auraient pas été appelées ou représentées au cours des opérations d’expertise. En deuxième lieu, le juge ne peut fonder sa décision exclusivement sur ce rapport d’expertise qui doit être corroboré par d’autres éléments de preuve.

En l’espèce, il n’est pas contesté, comme l’a relevé le juge de la mise en état dans son ordonnance d’incident du 29 juin 2023, que le rapport du Dr [B], bien que réalisé unilatéralement, a été produit dans le cadre de la mise en état permettant au Fonds de garantie d’en discuter le contenu dans ses écritures successives. Il n’y a dès lors pas lieu de le juger inopposable au Fonds de garantie comme celui-ci le demande.

Il importe cependant de déterminer si les autres éléments de preuve fournis corroborent ses conclusions et sont suffisants pour permettre au juge de statuer.

En lien avec les troubles consécutifs aux attentats, Mme [O] [L] produit les éléments médicaux suivants :
Des prescriptions (anti-dépresseurs, anxiolytiques et somnifères) par un médecin généraliste entre le 17 janvier 2015 et le 15 octobre 2019, le 19 mai 2021 et le 6 juillet 2022 et le 29 décembre 2022 et le 2 août 2023 ;des arrêts de travail : du 4 septembre 2016 au 10 octobre 2016 et du 10 mai 2017 au 31 mars 2018, un certificat du Dr [T], médecin généraliste en date du 13 février 2015 indiquant que Mme [O] [L] présente les signes d’un état de stress post-traumatique en rapport avec les événements survenus dans les locaux de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015 ;un certificat du Dr [R], médecin psychiatre, daté du 11 mars 2018 indiquant suivre Mme [O] [L] régulièrement depuis janvier 2016 et constatant un état dépressif sévère caractérisé où les troubles du sommeil prédominent consécutif à l’attentat Charlie Hebdo chez une patiente indemne de toute pathologie psychiatrique auparavant.. Il retient également que «Mme [W] a été une victime directe de l’attentat puisqu’elle était sur les lieux de l’attentat quelques minutes plus tard et qu’elle a participé à l’aide aux victimes. Elle a été aussi une victime indirecte en raison de l’implication avec son époux au niveau du travail et des bouleversements de la vie familiale. Elle a dû aussi abandonner ses responsabilités dans le groupe de presse.»un rapport médical d’évaluation du taux d’incapacité permanente établi par le Dr [H] le 11 avril 2019 concluant ainsi : «séquelles indemnisables chez une victime d’attentat terroriste consistant en la persistance d’un syndrome de stress post traumatique d’intensité importante» et fixant un taux d’incapacité permanent de 25% ;la notification relative à l’attribution d’une rente accident du travail du 14 mai 2019.
Le Dr [B] lors de la discussion médico-légale indique en premier lieu que médicalement, il n’y aucune raison de ne pas considérer Mme [O] [W] comme une victime directe.
A l’issue de son examen, le médecin psychiatre a conclu ainsi :
Date des éventuelles gênes imputables constitutives d’un déficit fonctionnel temporaire :. déficit fonctionnel temporaire total pendant les périodes d’hospitalisation : non ;
. déficit fonctionnel temporaire 75% avec 3 heures de tierce personne par jour pendant les 5 premières semaines, soit du 08/01/2015 au 12/02/2015 ;
. déficit fonctionnel temporaire 50% du 13/02/2015 au 05/10/2016 (date d’interruption des antidépresseurs)
. déficit fonctionnel temporaire 33% du 06/10/2016 au 03/09/2016
. déficit fonctionnel temporaire 50% du 04/09/2016 au 30/11/2016 (période d’arrêt de travail)
. déficit fonctionnel temporaire 33% du 01/12/2016 au 01/07/2017
. déficit fonctionnel temporaire 50% du 02/07/2017 au 31/03/2018 (période d’arrêt de travail)
. déficit fonctionnel temporaire 33% du 01/04/2018 à la date de consolidation
Arrêt temporaire des activités professionnelles imputable : tous les arrêts de travail entre les faits et la date de consolidation ;Consolidation médico-légale : oui à la date du 11/04/2019 (examen par le Dr [H] de la CPAM)DFP : 20% du fait de la lourdeur du tableau post-traumatique et du tableau dépressif avec alcoolisation secondaire ;Souffrances endurées : 5,5/7Préjudice d’angoisse de mort imminente : non ;Préjudice d’agrément : oui pour les spectacles, les restaurants, les activités dans les lieux publics ;Préjudice sexuel : oui ;Incidence professionnelle : oui. Licenciement du fait des tensions causées par les faits entre les survivants, de la difficulté pour Mme [W] de travailler dans l’entreprise de ses amis morts, de reprendre la même activité… La reprise d’une activité professionnelle dans le même domaine de compétence n’est plus possible et l’absence de formation académique de Mme [O] [W] ne lui permet pas d’envisager un reclassement professionnel dans une autre branche d’activité de façon simple. Une formation est à envisager, en sachant que l’âge, les troubles cognitifs du syndrome post traumatique et l’alcoolisation secondaire sont autant de facteurs compliquant celle-ci.Soins après consolidation : poursuite des soins psychiques 2 ans post-consolidation, en privilégiant une thérapie du type «thérapie des schémas».
Le Fonds de garantie produit quant à lui un avis technique sur pièces établi le 5 octobre 2023 par le Dr [A], médecin légiste médecin coordonnateur du Fonds de garantie procédant à l’analyse critique du rapport du Dr [B] et relève les points suivants :
il ne lui semble pas qu’il soit de la compétence médicale de se prononcer sur le statut de la victime, notamment en matière terroriste ;3 périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel se chevauchent sans doute en raison d’une erreur de plume ;le DFP est évalué à 20% alors que le barème de référence prévoit au vu des séquelles un taux de 10 à 15% et exceptionnellement jusqu’à 20%, sachant que l’alcoolisation mériterait une analyse médico-légale sur le plan de l’imputabilité et de son devenir ;la grille indicative établie par la Société Française de Médecin Légale prévoit en cas de psycho-traumatisme grave suit à agression une cotation de 4/7 pour une victime agressée directement et qu’il existe plusieurs années de prise en charge psychothérapique associée à la prescription de psychotropes pendant plusieurs années. s’agissant de l’incidence professionnelle, il n’y a pas eu d’avis négatif de la médecin du travail à la reprise du poste occupé antérieurement ni d’inaptitude au poste et que le licenciement semble avoir été prononcé pour des causes économiques et non médicales.
Il y a lieu de considérer que les éléments produits par Mme [O] [L], à savoir les certificats du docteur [T], du docteur [R], le rapport du docteur [H] ainsi que les prescriptions médicales et les arrêts de travail permettent de corroborer l’existence des préjudices retenus par le Dr [B] résultant d’un état de stress post traumatique sévère à la suite des attentats. En revanche, ces seules pièces ne permettent pas de confirmer l’évaluation qui en a été faite de manière non contradictoire. De même aucun élément ne vient confirmer les constats du docteur [B] relatifs aux conséquences professionnelles des troubles constatés, alors qu’il ressort des pièces produites que Mme [O] [L] a fait l’objet d’un licenciement économique le 19 octobre 2018 et que pour permettre l’indemnisation des préjudices professionnels, il importe de déterminer si les troubles en lien avec l’attentat lui permettaient ou non de poursuivre son activité au sein du journal Charlie Hebdo en l’absence de licenciement ou d’envisager un autre emploi.

Aussi, si Mme [O] [L] est légitime à déplorer l’absence de réalisation d’une expertise contradictoire antérieurement pour des motifs totalement indépendants de sa volonté résultant de l’opposition du Fonds de garantie à la reconnaissance de son préjudice propre, cette mesure n’en demeure pas moins opportune afin de permettre l’évaluation de l’ensemble de ses préjudices consécutifs aux attentats du 7 janvier 2015.

En conséquence, il y a lieu de surseoir à statuer sur l’indemnisation des préjudices propres de Mme [O] [L] et d’ordonner une expertise médicale afin de les évaluer. Cette mesure étant sollicitée par le Fonds de garantie, il y a lieu de dire que les frais de consignation seront mis à la charge de celui-ci.

III- SUR L’INDEMNISATION DES PRÉJUDICES SUBIS ES QUALITÉS DE VICTIME PAR RICOCHET DE MME [O] [L]

– Préjudice d’affection

Il s’agit du préjudice moral causé par le décès, les blessures, le handicap, les souffrances de la victime directe. Il doit être indemnisé même s’il n’a pas un caractère exceptionnel. Son montant est fixé en fonction de l’importance du dommage corporel de la victime directe et sa réparation implique l’existence d’une relation affective réelle avec le blessé ou le défunt.

Préjudice d’affection en raison de son lien avec M. [U] [W], victime directe :
Mme [O] [L] sollicite à ce titre la somme de 40.000 euros rappelant que M. [U] [W] reste atteint d’un déficit fonctionnel permanent de 20% correspondant à l’évaluation maximum retenue pour les séquelles psychiques. Elle ajoute qu’il a souffert d’un syndrome dissociatif immédiatement après les attentats, puis qu’il s’est brusquement effondré un an plus tard le conduisant à une prise en charge psychiatrique.

Le fonds de garantie offre la somme de 15.000 euros sur les bases des sommes retenues par la Cour d’appel de Paris dans son arrêt du 30 juin 2022 indemnisant les enfants du couple.

Il y a lieu de relever que Mme [O] [L] et M. [U] [W] sont mariés depuis 2005, mais sont en couple depuis 1997. Ils ont deux enfants.

L’attentat du 7 janvier 2015 a provoqué un lourd traumatisme à M. [U] [W] qui était présent lors de l’attaque des terroristes dans les locaux du journal Charlie Hebdo et lors de l’exécution de plusieurs de ses collègues et amis et a échappé de peu aux tirs en se cachant sous son bureau. Lors de l’expertise le concernant, le Dr [P] note un trouble portant essentiellement sur l’installation définitive dans une position personnelle psychique et relationnelle radicalement différente vis-à-vis des autres et de l’existence en général, une incompréhension dans le plupart des échanges, un vécu permanent d’hostilité de l’extérieur et des autres.

Son taux de déficit fonctionnel permanent a été évalué à 12% sur le plan psychique du fait de ces constatations.

Au regard de l’intensité de l’événement traumatique en cause et des conséquences de l’attentat qui a gravement affecté psychologiquement son conjoint, il sera alloué à Mme [O] [L] la somme de 20.000 euros en réparation de son préjudice d’affection.

– préjudice d’affection pour la perte des collègues et amis.

Mme [O] [L] sollicite la somme de 40.000 euros exposant avoir perdu huit de ses collègues dans les attentats. Elle précise qu’elle travaillait avec eux de manière quotidienne et que le fonctionnement particulier de Charlie Hebdo impliquait des liens d’amitié entre eux et le partage de valeurs et d’idéaux communs. Elle estime que son préjudice est parfaitement similaire à celui de son époux qui a été indemnisé à cette hauteur. Elle confirme qu’elle travaillait pour le journal depuis 2010 d’abord sous le statut d’auto-entrepreneur puis sous contrat à durée indéterminée depuis le 1er octobre 2014 en qualité de responsable de ventes en kiosque, étant précisé que son contrat ne prévoyait qu’un jour de télétravail par semaine.

Le fonds de garantie offre la somme de 5.000 euros relevant qu’alors que M. [U] [W] était employé par le journal depuis 1997, Mme [O] [L] a elle-même indiqué qu’elle a initialement travaillé seulement quelques jours par semaine au sein du journal. Le fonds s’appuie en outre sur un extrait du livre «Charlie Hebdo, le jour d’après : Récit» mentionnant que Mme [O] [L] n’était pas enregistrée dans le fichier des effectifs permanents du journal avant le 7 janvier.

Mme [O] [W] rapporte au Dr [B] avoir commencé à travailler au sein du journal Charlie Hebdo en 2010, collaborant d’abord avec le journal comme auto-entrepreneur, puis de salariée en tant que responsable des ventes kiosque à compter d’octobre 2014.
Décision du 12 Septembre 2024
PRPC JIVAT
N° RG 22/12101
N° Portalis 352J-W-B7G-CX656

A l’instar de son époux, elle a déploré le décès de huit de ses collègues tués lors de l’attentat du 7 janvier 2015 et a été présente dans les locaux du journal immédiatement après les faits alors que les forces de police et les secours venaient d’intervenir. Comme l’a souligné la cour d’appel de Paris statuant sur l’indemnisation du préjudice par ricochet de M. [U] [W], il doit être tenu compte de la proximité professionnelle et affective entre les personnes travaillant au sein du journal. Compte tenu de ces éléments, il sera alloué la somme de 30.000 euros à Mme [O] [L] en réparation de ce préjudice d’affection.

– Troubles dans les conditions d’existence

Mme [O] [L] sollicite la somme de 25.000 euros. Elle expose que l’ambiance et les relations familiales ont été radicalement bouleversées au sein du foyer, la famille vivant dans la peur constante. Elle ajoute n’avoir pu s’occuper de ses enfants pendant deux années afin de soutenir son époux et de maintenir l’activité du journal. Elle est en outre confrontée à la présence constante d’officiers de protection auprès de son époux, ce qui a constitué un frein aux activités familiales habituelles. Par ailleurs, elle précise que la famille a dû quitter la région parisienne en raison des menaces.

Le fonds de garantie offre la somme de 8.000 euros.

Mme [O] [L] a vu ses conditions d’existence radicalement et durablement modifiées à la suite des attentats du 7 janvier 2015, son époux faisant l’objet d’une protection policière permanente et elle-même vivant dans la crainte d’un nouvel attentat perturbant ainsi leur mode de vie, leurs relations sociales et conduisant le couple à quitter leur lieu de vie. Au vu de ces éléments il lui sera alloué la somme de 15.000 euros à ce titre.

-Préjudices exceptionnels des victimes d’actes de terrorisme :

Ce poste de préjudice exceptionnel est destiné à prendre en compte la spécificité de la situation des victimes d’un acte de terrorisme et notamment l’état de stress post traumatique et les troubles liés au caractère de cet événement, en raison des circonstances particulières de commission des faits et de leur résonance. Il a été retenu par le Fonds de Garantie à la suite d’une délibération de son conseil d’administration du 19 mai 2014 et est destiné à prendre en compte la spécificité de la situation des victimes directes ou indirectes d’un acte de terrorisme et notamment de l’état de stress post traumatique et des troubles liés au caractère particulier de cet événement.

Mme [O] [L] sollicite au titre de l’indemnisation de ces préjudices en tant que victime par ricochet la somme de 30.000 euros expliquant qu’elle doit comme son époux, composer avec la dimension particulière prise par cet attentat, être confrontée aux hommages, articles et polémiques qui l’entoure.

Le fonds s’y oppose estimant que Mme [O] [L] n’est pas victime directe de l’attentat du 7 janvier 2015 et ne peut prétendre à cette indemnisation qui n’est accordée qu’aux victimes directes et aux proches des victimes décédées en complément de la réparation prévue par la loi.

En l’espèce, l’acte de terrorisme du 7 janvier 2015 a indéniablement été commis dans des circonstances particulières du fait à la fois de sa nature, s’agissant d’un acte d’intimidation et de terreur d’une Nation entière, et de sa dimension collective, cet acte ayant été commis dans le but de gravement déstabiliser ou détruire ses structures et de porter atteinte à l’ensemble de ses citoyens.
Ces faits dramatiques ont, en outre, eu une résonance majeure et durable dans l’opinion publique et dans les médias.

Néanmoins Mme [O] [W] n’a pas été directement victime de ces faits dont elle a subi les conséquences en raison de ses liens avec son époux et ses collègues et amis, victimes directes. Elle ne justifie pas d’un préjudice exceptionnel au titre de ses préjudices par ricochet qui n’aurait pas été indemnisé à un autre titre. Dans ces conditions, Mme [O] [L] sera déboutée de ce chef de demande.

IV- SUR LES AUTRES DEMANDES

Le FGTI prendra à sa charge les dépens de l’instance.

En outre, il sera condamné à payer à Mme [O] [L] une somme de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

En application de l’article 514 du code de procédure civile en vigueur au jour de l’assignation, l’exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

DIT que Mme [O] [L] a été victime indirecte d’un acte de terrorisme commis le 7 janvier 2015 et que son droit à indemnisation de ses préjudices propres et par ricochet est entier en application des dispositions des articles L126-1 et L422-1 et suivants du code des assurances ;

Avant dire droit sur la liquidation des préjudices corporels propres de Mme [O] [L] ;

ORDONNE une expertise médicale de Mme [O] [L] ;

DESIGNE pour y procéder :

Le docteur [M] [X]
Hôpital [16]
GHU [Localité 15] Psychiatrie & Neurisciences
[Adresse 3]
[Localité 8]
Tel : [XXXXXXXX01]
Port : [XXXXXXXX02]
Email : [Courriel 14]

Lequel s’adjoindra si nécessaire tout sapiteur dans une spécialité distincte de la sienne,

avec pour mission de :

1- Convoquer les parties et leur conseil en les informant de la faculté de se faire assister par le médecin-conseil de leur choix ;

2- Recueillir les renseignements nécessaires sur l’identité de la victime et sa situation, les conditions de son activité professionnelle, son niveau scolaire s’il s’agit d’un enfant ou d’un étudiant, son statut ou sa formation s’il s’agit d’un demandeur d’emploi, son mode de vie antérieur à l’attentat et sa situation actuelle .

3- Déterminer l’état de la victime avant l’attentat (anomalies, maladies, séquelles d’accidents antérieurs) et décrire au besoin un état antérieur ;

4- A partir des déclarations de la victime et au besoin de ses proches ou de tout sachant et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales constatées à la suite de l’attentat, les modalités de traitement, en précisant le cas échéant les durées exactes d’hospitalisation et pour chaque période d’hospitalisation le nom de l’établissement, les services concernés et la nature des soins, y compris la rééducation ;

5- Procéder en présence des médecins mandatés par les parties, avec l’assentiment de la victime, à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime ;

6- A l’issue de cet examen, analyser dans un exposé précis et synthétique :
-la réalité des lésions initiales,
-la réalité de l’état séquellaire,
-l’imputabilité directe et certaine des séquelles aux lésions initiales en précisant au besoin l’incidence d’un état antérieur ;

7- Apprécier les différents postes de préjudice corporel ainsi qu’il suit :

-Déficit Fonctionnel Temporaire
Indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été , du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l’incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités personnelles habituelles ;
En cas d’incapacité partielle, préciser le taux et la durée;

-Perte de gains professionnels actuels
Indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l’incapacité d’exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle;
En cas d’incapacité partielle, préciser le taux et la durée ;
Préciser la durée des arrêts de travail retenus par l’organisme social au vu des justificatifs produits et dire si ces arrêts de travail sont liés à l’attentat ;

-Souffrances endurées
Donner un avis sur l’importance des souffrances physiques psychiques découlant des blessures subies pendant la maladie traumatique avant consolidation en prenant en compte l’angoisse de mort imminente ressentie et les évaluer sur une échelle de 1 à 7 ;

– Consolidation
Fixer la date de consolidation et en l’absence de consolidation dire à quelle date il conviendra de revoir la victime ;

-Déficit Fonctionnel Permanent
Indiquer si, après consolidation, la victime subit un déficit fonctionnel permanent médicalement imputable à l’attentat ;
En évaluer l’importance et en chiffre le taux ;

-Préjudice d’agrément
Dire s’il existe un préjudice d’agrément caractérisé par la difficulté ou l’impossibilité du blessé de continuer à s’adonner aux sports et activités de loisirs qu’il pratiquait auparavant ;

-Préjudice sexuel
Si la victime fait état d’un préjudice sexuel, apprécier au regard de ses déclarations la réalité de ce préjudice en expliquant les raisons pour lesquelles il est retenu.

-Dépenses de santé futures
Décrire les soins futurs et les aides techniques compensatoires au handicap de la victime (prothèse, appareillage spécifique, véhicule) en précisant la fréquence de leur renouvellement et s’il y a lieu le coût des soins en moyenne annuelle susceptible de rester à la charge de la victime ;

-Perte de gains professionnels futurs
Indiquer si le déficit fonctionnel permanent entraîne l’obligation pour la victime de cesser totalement ou partiellement son activité professionnelle ou de changer d’activité professionnelle

-Incidence professionnelle
Indiquer si le déficit fonctionnel permanent entraîne d’autres répercussions sur l’activité professionnelle actuelle ou future de la victime (obligation de formation pour un reclassement professionnel, pénibilité accrue dans son activité professionnelle, dévalorisation sur le marché du travail) ;

-Assistance par tierce personne
Indiquer le cas échéant si l’assistance constante ou occasionnelle d’une tierce personne (étrangère ou non à la famille) est ou a été nécessaire pour accomplir les actes de la vie quotidienne ;
Dans l’affirmative, dire pour quels actes de la vie quotidienne, et pendant quelle durée, l’aide d’une tierce personne à domicile a été ou est indispensable,
Dire s’il existe un besoin d’assistance par une tierce personne après consolidation, en précisant en ce cas le nombre d’heures nécessaires et pour quels actes de la vie quotidienne cette assistance est nécessaire.
Dire si l’état de la victime nécessite le placement dans une structure spécialisée en précisant les conditions d’intervention de son personnel (médecins, infirmiers, kinésithérapeutes…) ;

8- Etablir un état récapitulatif de l’ensemble des postes énumérés dans la mission ;

DIT que, pour exécuter la mission, l’expert sera saisi et procédera conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du Code de procédure civile ;

DIT que l’exécution de l’expertise est placée sous le contrôle du juge spécialement désigné à cette fin, en application des articles 155 et 155-1 de ce code ; que toute correspondance émanant des parties, de leurs conseils, de l’expert devra être adressée au juge chargé du contrôle de l’exécution de l’expertise, service du contrôle des expertises de la JIVAT ;

▸ Les pièces

ENJOINT aux parties de remettre à l’expert :
•le demandeur, immédiatement toutes pièces médicales ou para-médicales utiles à l’accomplissement de la mission, en particulier les certificats médicaux, certificats de consolidation, documents d’imagerie médicale, compte-rendus opératoires et d’examen, expertises ;
•le Fonds de garantie, aussitôt que possible et au plus tard 8 jours avant la première réunion, les documents, renseignements, réclamations indispensables au bon déroulement des opérations, à l’exclusion de documents médicaux protégés par le secret professionnel et relatifs aux demandeurs sauf à établir leur origine et l’accord du demandeur sur leur divulgation ;

DIT qu’à défaut d’obtenir la remise des pièces qui lui sont nécessaires l’expert pourra être autorisé par le juge chargé du contrôle des expertises à déposer son rapport en l’état ; Que toutefois il pourra se faire communiquer directement, avec l’accord de la victime ou de ses ayants-droit par tous tiers : médecins, personnels para-médicaux, établissements hospitaliers et de soins, toutes pièces médicales qui ne lui auraient pas été transmises par les parties et dont la production lui paraîtra nécessaire ;

DIT que l’expert s’assurera, à chaque réunion d’expertise, de la communication aux parties des pièces qui lui sont remises, dans un délai permettant leur étude, conformément au principe de la contradiction ; que les documents d’imagerie médicale pertinents seront analysés de façon contradictoire lors des réunions d’expertise ; Que les pièces seront numérotées en continu et accompagnées d’un bordereau récapitulatif ; qu’en matière d’aggravation alléguées seront distinguées en particulier les pièces médicales et les rapports d’expertise pris en considération par la décision judiciaire ou la transaction réparant le préjudice dont la réappréciation est demandée, les pièces médicales ou rapports établis postérieurement ;

▸ La convocation des parties
DIT que l’expert devra convoquer toutes les parties par lettre recommandée avec accusé de réception et leur avocat par lettre simple, les avisant de la faculté qu’elles ont de se faire assister par le médecin-conseil de leur choix;

DIT que l’expert pourra recueillir des informations orales, ou écrites, de toutes personnes susceptibles de l’éclairer ;

DIT que l’expert devra :
-en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations à l’issue de la première réunion d’expertise ; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai,
. en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées ;
.en les informant de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ou son projet de rapport ;
– adresser dans le même temps le montant prévisible de sa rémunération qu’il actualisera s’il y a lieu, procédant parallèlement aux demandes de provisions complémentaires ;
– adresser aux parties un document de synthèse, et arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;

DIT à ce titre que le terme du délai fixé par l’expert pour le dépôt des dernières observations marquera la fin de l’instruction technique et interdira, à compter de la date à laquelle il est fixé, le dépôt de nouvelles observations;

DIT que l’original du rapport définitif (un exemplaire) sera déposé au greffe du Tribunal judiciaire de Paris, service du contrôle des expertises de la JIVAT, tandis que l’expert en adressera un exemplaire aux parties et à leur conseil, au plus tard le 1er juin 2025, sauf prorogation expresse;

FIXE à la somme de 2.000€ le montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée par le Fonds de Garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions, à la Régie d’avances et de recettes du Tribunal judiciaire de Paris au plus tard le 12 novembre 2024 ;

DIT que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera caduque et de nul effet ;

Renvoie l’examen de l’affaire à l’audience de mise en état du 05 juin2025 à 9h40 ;

Condamne le Fonds de Garantie des victimes d’actes de Terrorisme et d’autres Infractions à payer à Mme [O] [L] les sommes suivantes en réparation de son préjudice es qualités de victime per ricochet, en deniers ou quittances, provisions non-déduites :
– préjudice d’affection pour les faits dont M.[U] [W] a été victime : 20.000 euros
– préjudice d’affection pour le décès d’amis et proches : 30.000 euros
– troubles dans les conditions d’existence : 15.000 euros
Ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

Déboute Mme [O] [L] de sa demande en tant que victime par ricochet au titre du préjudice exceptionnel des victimes d’actes de terrorisme ;
Condamne le FGTI aux dépens de l’instance ;

Condamne le FGTI à payer à Mme [O] [L] la somme de 1500€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 12 Septembre 2024

Le Greffier Le Président


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