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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf janvier deux mille sept, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire VALAT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de Me ROUVIERE, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général DAVENAS ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
– X… Claude, partie civile,
contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, 11e chambre, en date du 12 janvier 2006, qui, dans la procédure suivie contre Philippe Y… et Philippe Z…, des chefs de diffamation publique envers un particulier et complicité, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a dit que les propos ” mais lui, il avait déjà en tête de soutirer de l’argent à d’éventuels adeptes ” ne présentent aucun caractère diffamatoire et a débouté en conséquence la partie civile de ses demandes ;
“aux motifs propres que c’est à juste titre que les premiers juges ont retenu que le passage, exprimant une simple opinion sur les projets de A…, ne contenait aucun fait précis susceptible de faire l’objet d’une preuve et d’un débat contradictoire ;
“et aux motifs adoptés que Philippe Z… se contentait de spéculer sur une intention qu’il prêtait à l’intéressé et ne pouvait donc imputer à celui-ci un quelconque fait précis ;
“alors, d’une part, que l’imputation d’un fait précis, nécessaire à caractériser la diffamation, ne se limite pas à la seule imputation d’un acte ; que l’imputation d’une intention frauduleuse, définie et déterminée, comme en l’espèce celle d’avoir en tête de “soutirer de l’argent” à autrui, porte atteinte à l’honneur et à la considération et caractérise en tous ses éléments la diffamation prévue à l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé ce texte ;
“alors, d’autre part, que le propos selon lequel le dirigeant d’un mouvement spirituel avait, à la création de ce mouvement, ” déjà en tête de soutirer de l’argent à d’éventuels adeptes ” insinue clairement que l’intéressé anime ce mouvement dans le seul but de soutirer l’argent à ses adeptes, porte ainsi sur un fait précis et déterminé de nature à porter atteinte à l’honneur et à la considération et constitue une imputation diffamatoire ; qu’en conséquence, la cour d’appel a violé les articles 29 e t 31 de la loi du 29 juillet 1881″ ;
Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel, par des motifs exempts d’insuffisance ou de contradiction et répondant aux conclusions dont elle était saisie, a exactement apprécié le sens et la portée des propos visés au moyen et a, à bon droit, estimé qu’ils ne constituaient pas le délit de diffamation ;
D’où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a dit que les propos ” comme tout le monde, j’ai suivi son parcours : les affaires de moeurs, les escroqueries, jusqu’à ces histoires de clonage ” ne constituent pas une diffamation punissable et a débouté en conséquence la partie civile de ses demandes ;
“aux motifs que l’article en cause s’inscrivait dans l’actualité de la rediffusion d’une rencontre de Philippe Z… avec Claude X… dit A… ; qu’elles ont été exprimées sans animosité personnelle et avec mesure et sur la base d’information qui permettaient de les tenir ; que le journal Le Parisien poursuivait en l’espèce un but légitime d’information de ses lecteurs ; que, si Philippe Z… fait preuve d’un humour mordant dans l’interview, les termes employés ne révèlent toutefois aucune animosité personnelle ; que dans l’interview publié, Philippe Z… livre ses souvenirs sur ses rencontres avec A… ; qu’il s’exprime, en l’espèce, non en qualité de journaliste astreint à une obligation d’effectuer une enquête sérieuse sur les faits qu’il rapporte mais, ainsi qu’il l’indique lui-même, comme un ” honnête homme “, simple témoin de faits de société de son époque ; que Philippe Z… a pu légitimement nourrir son opinion des éléments dont il a eu connaissance sur le mouvement raëlien et rendus publics tant dans le rapport déposé le 22 décembre 1995 au nom de la commission d’enquête parlementaire à l’Assemblée nationale sur les sectes – lequel impute à ce mouvement des faits de “détournements des circuits économiques, de recours au travail clandestin, de fraude ou d’escroquerie” – que dans des articles de presse faisant état de détournements commis par la secte des raëliens et de doléances d’anciens membres de la secte, éléments dont il n’est pas allégué qu’ils aient donné lieu à l’exercice de poursuites par le mouvement raëlien ; que c’est dans ces conditions avec raison que les premiers juges ont reconnu aux prévenus le bénéfice de la bonne foi ;
“alors, d’une part, que le fait justificatif de la bonne foi, propre à la diffamation, est subordonné à la prudence dans l’expression de la pensée ; qu’en l’espèce, Philippe Z… a directement affirmé que Claude X… avait été mêlé à des affaires de moeurs et d’escroquerie sans préciser qu’il ne faisait là que reprendre à son compte des informations contenues dans un rapport parlementaire et des articles de presse et non issues d’une procédure judiciaire, la cour d’appel a violé les articles 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881 ;
“alors, d’autre part, que la circonstance que les articles de presse dont ont été tirés les affirmations diffamatoires n’aient eux-mêmes donné lieu à des poursuites judiciaires de la part de la partie civile est inopérante pour caractériser le sérieux des vérifications préalables, élément constitutif de la bonne foi, auxquelles toute personne, même si elle ne s’exprime pas en qualité de journaliste, est tenue ; qu’en conséquence, en affirmant que Philippe Z… avait légitiment pu nourrir son ” opinion ” à partir d’informations publiées dans la presse dès lors qu’il n’est pas allégué que ces dernières aient donné lieu à des poursuites, la cour d’appel a violé les articles 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881;
“alors, enfin, que les propos litigieux imputaient à Claude X… une implication tant dans des affaires de moeurs que dans des escroqueries ; qu’en conséquence, en relevant la bonne de foi Philippe Z… au regard des informations contenues dans le rapport parlementaire sur les sectes et divers articles de journaux portant exclusivement sur des affaires d’escroquerie ou de détournement, la cour d’appel n’a pu légalement caractériser la bonne foi du prévenu dans l’imputation faite à Claude X… d’avoir été mêlé à des affaires de moeurs ; qu’en conséquence, la cour d’appel a violé les articles 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881” ;