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COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 3 octobre 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X…, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 11175 F
Pourvoi n° S 17-11.077
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Maïa, société anonyme, dont le siège est […] 05,
contre l’arrêt rendu le 23 novembre 2016 par la cour d’appel de Lyon (chambre sociale A), dans le litige l’opposant à Mme Maud Y…, domiciliée […] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 5 septembre 2018, où étaient présents : M. X…, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Z…, conseiller rapporteur, Mme Basset, conseiller, Mme A…, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Didier et Pinet, avocat de la société Maïa, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de Mme Y… ;
Sur le rapport de M. Z…, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Maïa aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Maïa à payer à Mme Y… la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Maïa.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à compter du 14 mai 2014 aux torts exclusifs de l’employeur et, en conséquence, condamné ce dernier à verser à la salariée les sommes de 21 .000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et 10.260 euros à titre d’indemnité de préavis, outre 1.026 euros de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE sur le fond de la demande de résiliation judiciaire : à titre principal, Mme Y… a demandé à la cour de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail, et ce, aux torts exclusifs de son employeur, notamment en prétendant que ce dernier, pourtant informé de faits de nature à mettre en cause sa sécurité physique ou morale, n’avait pris aucune mesure pour y mettre fin ; que l’article L4121-1 du code du travail dispose que l’employeur prend les mesures nécessaires pour protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; qu’il est ainsi tenu vis à vis de son personnel d’une obligation de sécurité de résultat en vertu de laquelle il doit prendre les mesures nécessaire pour assurer la sécurité et protection de la santé mentale et/ou physique de ses salariés ; qu’en cas de litige, il lui incombe de justifier avoir pris des mesures suffisantes pour s’acquitter de cette obligation ; que s’agissant de faits pouvant être qualifiés de harcèlement, violences ou même de risques psycho-sociaux, l’employeur est également tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs ; qu’il manque à cette obligation lorsqu’un salarié est victime sur le lieu de travail, d’agissements de harcèlement moral ou sexuels exercés par l’un ou l’autre de ses salariés, quand bien même, il aurait pris des mesures pour faire cesser ces agissements ; qu’il est également constant que l’employeur doit répondre des agissements des personnes qui exercent de fait ou de droit, une autorité sur les salariés ; que le harcèlement moral se caractérise par la conjonction et la répétition de certains faits laissés à l’appréciation souveraine des juges du fond ; que dans un tel cadre, il convient également de rechercher si les éléments invoqués par le salarié sont établis, et s’ils sont de nature à laisser présumer un harcèlement moral ; que dans l’affirmative, il devra être envisagé si l’employeur a ou non pris les mesures nécessaires pour faire cesser une telle situation ; que Mme Y… a précisé qu’en sa qualité de contrôleur de gestion, elle était amenée à être en relation régulière avec les dirigeants et responsables des autres sociétés du groupe Maïa Sonnier ; que dans le cadre de son travail, il lui arrivait d’être en contact avec M. B…, directeur de la société L… , filiale de la société Maïa et anciennement directeur délégué et administrateur « ad hoc » de la société Maïa Sonnier (cf Kbis pièce 65) ; qu’à l’occasion d’un problème informatique, Mme Y… a expliqué être intervenue auprès d’autres salariés, M. B… n’étant pas parvenu à les régler ; que Mme Y… a ainsi reçu le 30 mai 2013 à 9h34 un mail de M. B… dont le contenu et la réalité n’ont jamais été contestés, et rédigé en ces termes : « Objet : Erreur d’appréciation. Bon, toi, tu vas te faire voir chez les grecs !!!!!!!! CON(Patir) de travailler avec moi. .. Comme si c’était difficile. En revanche, me taper un hilmoine … Là tu n’imagines pas !!! Pfffffffffff En plus d’un Chilese, Stoter, Vanstaver … et (CON) sore s… Mais c’est parce que je n’ai pas les codes d’accès, sinon, EVIDEMMENT, je leur dépatouillerai leur Pb informatique. Et toi, ce sera une fessée (à C … tout nu- Hummmmmmmmmmmmm) si tu (CON)tinues ce genre de remarques à mes collaborateurs (qui EVIDEMMENT, n’hésitent pas à le crier HAUT et FORT ici. .. ) » ; qu’en guise de signature, ce mail était conclu par la reproduction d’une tête de mort, symbole de la piraterie ; qu’à l’occasion de la visite médicale de reprise, le médecin du travail a conclu à l’inaptitude totale de Mme Y… ; qu’elle prétend ainsi établir un lien certain entre l’envoi de ce mail et son état de santé ayant motivé un arrêt de travail pendant plusieurs mois ; qu’en raison de la connotation sexuelle de ce message, elle a estimé ne plus être en mesure de travailler dans un tel climat de harcèlement moral et permanent ; que le jour de réception du mail litigieux, Mme Y… est demeurée dans l’entreprise jusqu’à la fin de la matinée, pour ensuite ne plus réapparaitre de la journée ; qu’elle a été le jour même placée en arrêt maladie par son médecin traitant, s’estimant anéantie après avoir reçu un tel message et ne cessant d’en ressasser le contenu depuis lors ; qu’elle s’est vue prescrire par son médecin traitant le 30 mai des somnifères et des anxiolytiques , que le 4 juin 2013, Mme Y… a informé son employeur des motifs de cet arrêt, s’estimant alors toujours en « état de choc » ; qu’elle écrit en effet à ses responsables les mots suivants : « depuis quatre jours, je ressasse tes insultes, tes motifs humiliants, dégradants et avilissants, ainsi que tes remarques sexuelles. Depuis 4 jours je ne dors pas et visualise tes propos… Ce n’est pas la première fois que tu profères des paroles à connotation sexuelle à mon égard, et ce, même en présence de tierces personnes. Je vivais déjà très mal ces nombreuses situations où tu me demandais de me mettre nue en réunion au point de gestion avec approbation implicite des participants qui ne réagissaient pas à tes propos, si ce n’est se moquer de moi. Ton mail est dans la continuité de tes paroles. Cela me terrorise encore plus. Je ne peux plus travailler dans ce climat de harcèlement moral et sexuel permanent. De ce comportement sexuellement agressif ajouté à tes menaces de mort, je crains pour mon intégralité physique » ; qu’à l’occasion de la visite médicale de reprise, le médecin du travail a conclu à l’inaptitude totale de Mme Y… ; qu’elle prétend ainsi établir un lien certain entre l’envoi de ce mail et son état de santé ayant motivé un arrêt de travail pendant plusieurs mois ; qu’en raison de la connotation sexuelle de ce message, elle a estimé ne plus être en mesure de travailler dans un tel climat de harcèlement moral et permanent ; qu’informé de la nature des révélations faites par Mme Y…, M. B… n’est pas resté taisant et a quasi immédiatement écrit à cette dernière pour s’excuser et tenter d’expliquer le contenu et la nature de son courrier : « Mon envoi faisait suite aux remarques que tu avais faites devant les salariés de la société L… en mettant en cause mes « incompétences » en matière informatique. Il s’agissait évidemment d’une réponse humoristique à ce que j’avais moi-même pris sur le ton de la plaisanterie et non comme un dénigrement public. En effet, ce mail faisait suite à une blague que tu as faite avec Richard lors d’un échange pour un problème d’accès à la démat. J’ai essayé de lui régler son problème puis vous avez discuté, en lui demandant comment son arrivé chez ED se passait. Et là, vous avez ri ensemble en disant que le « plus dur chez ED était de trouver mes compétences en informatique … Comme il n’est pas le dernier à blaguer il est venu me le dire ainsi, en rigolant. Ma réaction , en rigolant et en acceptant comme d’habitude de me faire « charrier » sur ce genre de sujet, et en tout simplicité, je t’ai envoyée ce mot, qui lors de son écriture était sur un ton blagueur identique au votre à mon encontre … C’est bien pour cela que je me plains devant d’avoir « d’autres hilmoines (nom d’un salarié de l’entreprise) » comme Julien, Denis et autres… Tout en justifiant, mon incapacité informatique au fait que je n’avais pas les codes d’accès. J’ai bien compris que tel n’a pas été ton ressenti et je tiens donc d’abord à m’excuser pour ce mail qui, pour moi, n’était qu’une plaisanterie en réponse à une autre plaisanterie. Je regrette que ce mail ait pu te choquer à un tel point. Je n’ai jamais eu les intentions que tu me prêtes dans ton mail. Sorti de son contexte en le relisant sous ton envoi, je me rends bien compte des interprétations possibles et erronées qui pourraient être faites de ce mail. J’en suis donc confus et m’en excuse à nouveau … jamais quoi que j’ai pu dire ne doit (et ne peut) être considéré comme tu le notes dans ton mail. Je tiens donc à m’en expliquer auprès de toi. Sur la teneur de mon mail qui semble t’avoir fait réagir ainsi : Pour l’expression des « grecs », ne t’ayant pas eu en ligne depuis tes congés et pensant que tu étais allée en Grèce en vacances, je t’invitais ainsi à y retourner, en sous entendant que lorsque tu était absente, j’avais géré tous les problèmes informatiques. Pour l’expression de la fessée, elle était censée insister (en blaguant) sur le fait que tous ici me charriaient en utilisant ta confirmation sur mon incapacité à résoudre ces problèmes d’informatiques. La seconde partie de cette phrase est bien dans ce sens … Enfin, le signe pirate était pour moi un symbole humoristique de BOULEVARD indiquant j’étais en colère de me faire charrier, avec justement cette pointe d’humour liée à la BOULEVARD (j’avais reçu cela d’un copain et je l’avais « copier-coller » puisque c’est la seule chose que je maîtrise en informatique. L’ensemble des ponctuations, jeux de mots et autres changements d’écritures insistent bien sur le côté blagueur et ironique de mon petit mot maladroit, nul, bête. .. mais sans arrières pensées … Je travaille à Hondscoote et toi à Lyon. Nous sommes tous les deux des personnes mariées, avons des enfants et je ne me serai jamais permis d’envoyer ce mail en dehors d’un contexte d’une réponse à une plaisanterie de ta part. Nous nous rencontrons de manière plus qu’épisodique, nos échanges étant essentiellement par mails. Nous n’avons au demeurant aucun lien hiérarchique. Je t’envoie juste les tableaux de gestion mensuels ainsi que ceux de la prise de commande. Je ne me souviens pas au demeurant t’avoir un jour manqué de respect. Je ne comprends donc pas du tout ce que tu indiques dans ton mail. Pour ma part, crois-moi, j’ai été consterné par ta réponse tant elle m’apparaissait en décalages avec mes intentions qui n’étaient que de plaisanter. Nous aurions pu éclaircir immédiatement la situation si tu m’avais appelé à réception du mail » ; qu’une telle lettre d’excuse ne peut toutefois être assimilée qu’à un repentir actif, et ne peut en aucune manière constituer un quelconque fait justificatif ; que bien plus, en écrivant ces mots, M. B… a manifestement compris l’impact qu’ils avaient pu générer sur l’état de santé de Mme Y… ; que l’intimée a toutefois produit plusieurs attestations de membres du personnel qui attestent du comportement adapté de M. B… à l’égard des personnels féminins (pièces 33 et 34) et de l’attitude de Mme Y… à son égard : – M. C…, conducteur de travaux, indique qu’ « elle s’est mise à charrier M. B… sur ses capacités informatiques et sur sa mémoire défaillante due à son âge » … « je ne comprends pas comment Mme Y… peut considérer un tel mail humoristique et l’exploiter, alors que Maud blaguait et riait ou faisait elle-même des blagues ciblant M. B… » ; – Mme D…, assistante de direction : « Mme Y… a été amenée à venir rarement dans le nord. L’ambiance lors de ses venues était très bonne et sa relation avec M. B… était amicale, elle plaisantait avec lui, comme avec nous tous. Elle d’ailleurs poussé à la plaisanterie jusqu’à dire devant nous que le plus compliqué chez L… , c’était de trouver les compétences en informatique de M. B…, nous avions été surpris sur l’instant d’une telle blague de sa part, mais M. B… avait comme à son habitude, pris cette déclaration avec humour. Jamais je n’ai entendu M. B… manquer de respect à Maud. » ; que si les termes contenus dans le message électronique de M. B… du 30 mai 2013 peuvent être aisément qualifiés de déplacés, sexistes, insultants voire menaçants, ils ne peuvent en revanche être qualifiés de faits constitutifs d’un harcèlement sexuel ; qu’il ne peut être considéré que les termes utilisés avaient pour objet d’exercer une pression grave sur Mme Y…, dans le but d’obtenir un emploi, une augmentation, une formation ou encore, l’assurance d’échapper à une situation dommageable tel qu’un licenciement ; que seule la possibilité d’un harcèlement moral peut en l’espèce être envisagée ; qu’afin de démontrer la réalité d’une situation de harcèlement moral, Mme Y… a prétendu qu’outre le message litigieux, elle était régulièrement, voire quotidiennement, confrontée à des remarques à caractère sexuel ; qu’elle se fonde sur un message qui aurait été laissé sur la messagerie de son téléphone professionnel en 2009 et dont le contenu a été retranscrit par un huissier de justice ; que ce dernier a ainsi mentionné dans son procès-verbal (pièce 48) les termes suivants : « bienvenue, salut si tu cherches un plan coquin (ricanements), n’hésites pas à appeler le […] . OOOOOh ça fait chaud ( … ) d’amour, oh allez vas te faire mettre hein » ; que force est de constater que l’auteur de ce message n’est pas formellement identifié ; que Mme Y… a également prétendu que M. B… n’hésitait pas à demander au début d’une réunion, l’augmentation de la température dans la salle de réunion, afin que Mme Y… soit contrainte de retirer sa robe ; qu’elle produit également une attestation rédigée par Mme Sylvie E… (pièce 58) salariée de la société Maïa Sonnier de janvier 2012 à février 2014 : « à l’évocation d’un dépôt de plainte d’une autre collègue lyonnaise, il m’a été expliqué qu’il ne s’agissait là que de propos bon enfant de quelqu’un qui aime rire. Ces messieurs (directeurs d’agence et de filiale) m’ont expliqué qu’il était ridicule de porter plainte contre un collègue qui avait fait une blague en demandant à une jeune collègue de retirer sa robe si elle voulait obtenir le droit de déposer des dossiers sur un bureau » ; que madame Caroline F… témoignait le 24 juin 2013 (soit postérieurement au licenciement) de sa surprise suite aux propos de M.Christophe G…, président de la société Maïa qui « regrettait d’avoir embauché des femmes et qu’il n’en embauchera plus) ; que Mme Y… regrettait également être fréquemment rabaissée, en citant pour exemple les termes utilisés par monsieur Pascal H… s’adressant à elle en usant régulièrement de l’expression (avoir l’obligeance de .. ), en utilisant des polices de caractère dans ses messages électroniques destinés à rendre ses propos plus agressifs… ; que Mme Sylvie E… affirme avoir été le témoin du manque total de considération et de compréhension par les directeurs et filiales ; qu’elle affirme également qu’au cours de l’arrêt maladie de Mme Y…, elle soulevait l’incompréhension et le dédain ; qu’elle confirme également que sous couvert d’une profession à dominante masculine, les propos misogynes étaient de rigueur ; que Mme Y… a ainsi démontré la réalité de différents faits laissant présumer une situation de harcèlement moral, rendant impossible son maintien dans l’entreprise ; que Mme Y… a également démontré avoir attiré l’attention de sa direction sur les remarques déplacées qui lui avaient faites ; qu’à titre d’exemple, le 3 février 2012, elle interpellait M . Bruno I…, directeur administratif et financière de la société Maïa de la manière suivante : « Même en arrêt maladie, les attaques de M. H… continuent ! Cela me pèse beaucoup, d’autant plus dans une période où le médecin me prescrit du repos » ; qu’elle avait également interpellé en décembre 2011 M. J… président de la filiale Deluermoz du groupe Maïa et directeur général de Maïa Sonnier, à la suite de propos qu’auraient tenu M. H… : « il est le seul à réagir de la sorte. Je ne comprends pas cette réaction. C’est loin d’être la première fois, sur d’autres sujets notamment. Cette situation me pèse. Je souhaite en discuter avec toi demain puis je viens à Saxe. Sur la question du respect, il y aurait effectivement beaucoup à dire sur le comportement de ses équipes envers moi-même ou Laure K… (qui je tiens à le rappeler, est partie à cause de cela) » ; que pour tenter de s’exonérer la société Maïa a toutefois considéré que les agissements ou propos tenus par M. B… ne pouvaient lui être imputés, ce dernier n’étant plus salarié de l’entreprise mais dirigeant de la société L… ; que le seul fait que cette société soit une filiale de la société Maïa Sonnier ne permet pas de démontrer à lui seul, que M. B… exerçait une quelconque autorité de fait ou de droit sur Mme Y… elle-même cadre de gestion ; qu’il ne peut pas non plus être considéré que M. B… était en mesure d’exercer un quelconque pouvoir de contrainte en raison de l’importance du chiffre d’affaires généré par la société L… pour la société Maïa ; que cette dernière a en effet démontré que le chiffre d’affaires correspondant ne représentait qu’un pour cent de leur chiffre d’affaires total ; que cependant en l’espèce, les différentes pièces produites aux débats par les deux parties démontrent que M. B… était fréquemment en contact professionnel avec Mme Y…, soit par téléphone ou courrier électronique, soit physiquement dans les locaux de la société L… , soit au sein de la société Maïa; que ces relations intervenaient dans un cadre professionnel, impliquant nécessairement la société Maïa ; qu’au titre de son obligation de sécurité de résultat, elle se devait de prendre toutes mesures pour faire cesser les agissements ou propos tenus par M. B… ; que bien qu’alertée à plusieurs reprises par plusieurs salariés, la société Maïa n’a pris aucune disposition pour fa ire cesser les faits de harcèlement dont a été victime Mme Y… ; que ce n’est que très tardivement et après avoir été informée de son arrêt maladie pour dépression, que la direction a proposé à l’appelante un éventuel aménagement de son poste de travail ; que ce faisant, elle a persisté à contester la réalité des faits dénoncés et leur qualification de harcèlement ; qu’il est en outre d’ores et déjà démontré que sous couvert d’une apparente décontraction et convivialité, les rapports de travail à l’égard des femmes étaient de manière générale teintés de sexisme et misogynie, et n’impliquaient pas le seul M. B… ; qu’il doit ainsi être jugé que la société Maïa a méconnu son obligation de sécurité de résultat à l’égard de Mme Y… ; qu’en conséquence, le jugement déféré doit être réformé en ce qu’il a débouté Mme Y… de sa demande de résiliation judiciaire aux torts de son employeur ; qu’en statuant à nouveau, le contrat de travail signé par Mme Y… avec la société Maïa sera résilié aux torts exclusifs de l’employeur ; que ce dernier ayant ultérieurement procédé à son licenciement pour inaptitude, et Mme Y… ayant été placée en arrêt maladie, la date de résiliation judiciaire doit être fixée à la date de la lettre de licenciement, soit en l’espèce le 14 mai 2014 ; qu’il n’y a pas lieu de statuer sur la cause réelle et sérieuse du licenciement prononcé pour inaptitude ; 2°) que sur les demandes financières de Mme Y… : il doit préalablement être remarqué que la demande relative à l’éventuelle application de la clause de « dédit formation » est devenue sans objet, la société Maïay ayant expressément renoncé ; 2-1 que sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif : Mme Y… d’une ancienneté au sein de l’entreprise de plus de deux ans, était entrée à son service en août 2007 ; que cette dernière employait plus de 10 salariés ; qu’en l’espèce, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’octroi en faveur de la salariée de dommages et intérêts n’aurait pas été inférieur à six mois de salaires, soit la somme de 20.520 euros, sa rémunération mensuelle moyenne étant fixée à 3.420 euros (cf Pièce 40 appelante) ; qu’afin d’étayer sa demande de dommages et intérêts, Mme Y… n’a produit aucune pièce ou document permettant d’établir la réalité d’un préjudice particulier, notamment en ne précisant pas sa situation actuelle, tant sur le plan médical que sur le plan professionnel ; qu’en conséquence, la société Maïa sera condamnée à lui verser la somme de 21 .000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ; 2-2 que sur l’indemnité de préavis : il sera alloué à Mme Y… la somme sollicitée équivalente à trois mois de salaire, soit en l’espèce la somme de 10.260 euros, outre 1.026 euros au titre des congés payés y afférents ;
ALORS QUE si l’employeur est tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, et que l’absence de faute de sa part ne peut l’exonérer de sa responsabilité, il doit uniquement répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés ; qu’après avoir constaté que la société Maïa concluait à son irresponsabilité des agissements imputés à M. B… à raison de sa qualité de tiers à l’entreprise et de l’absence d’autorité de ce dernier sur Mme Y…, la cour d’appel a estimé que l’employeur était néanmoins tenu de répondre de ses actes dès lors que « les différentes pièces produites aux débats par les deux parties démontrent que M. B… était fréquemment en contact professionnel avec Mme Y…, soit par téléphone ou courrier électronique, soit physiquement dans les locaux de la société L… , soit au sein de la société Maïa », que « ces relations intervenaient dans un cadre professionnel, impliquant nécessairement la société Maïa » ; qu’en statuant ainsi par des motifs inopérants, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé en quoi M. B… exerçait, de fait ou de droit, une autorité sur la salariée, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 4121-1 du code du travail en leur rédaction applicable au litige.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société Maïa à payer à Mme Y… la somme de 11 .928,6 euros au titre des heures supplémentaires, outre celle de 1192,8 euros au titre des congés payés y afférents;
AUX MOTIFS QUE, sur le rappel de salaires pour heures supplémentaires : le contrat de travail signé par Mme Y… avec la société Maïa a été conclu antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi N°2008-789 du 20 août 2008 ; qu’à cette date, l’article L3121-38 du code du travail disposait que la durée de travail des salariés ayant la qualité de cadre au sens de la convention collective de branche ou au sens du premier alinéa de l’article 4 de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du servie ou de l’équipe auquel ils sont intégrés, peut être fixé par des conventions individuelles de forfait ; que ces conventions peuvent être établies sur une base hebdomadaire, mensuelle ou annuelle ; que l’article 6 du contrat de travail stipule qu’il est « entendu que cette rémunération dans son ensemble constitue une convention de forfait, soit la contrepartie de votre activité dans le cadre de l’horaire hebdomadaire appliqué, ainsi que tous les dépassements que vous pourrez être amenée à effectuer compte tenu de vos responsabilités et de la disponibilité qui implique la nature de votre activité » ; que ce contrat ne précise en aucune manière si le forfait est conclu en jours ou en heures ; qu’il n’est justifié par la société intimée aucun accord d’entreprise ou de branche autorisant une telle pratique ; qu’il n’existe aucun suivi du temps de travail effectivement réalisé par la salariée, de même qu’il n’est justifié d’aucun entretien individuel annuel ; que l’appelante a en outre considéré que les dispositions du titre Ill de l’accord national du 6 novembre 1998 relatif à la durée du travail dans les entreprises du bâtiments et des travaux publics n’étaient pas de nature à garantir l’amplitude et la charge de travail de l’intéressé, et donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié ; qu’elle en a déduit que la convention de forfait prise sur ce seul fondement, devait être déclarée nulle ; qu’en toutes hypothèses, elle s’estime recevable à solliciter le paiement d’heures supplémentaires ; que l’article L3171-4 du code du travail dispose expressément qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu’au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ; que la preuve des heures supplémentaires effectuées n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des partie ; qu’afin de démontrer la réalité de l’amplitude de ses horaires de travail, Mme Y… a produit aux débats une succession de mails professionnels entre le 15 avril 2010 et le 17 juin 2013 (pièce 51) révélant des envois parfois très tardifs (au-delà de 23 heures) ; qu’elle a également prétendu travailler pendant les week-ends ; qu’elle a ainsi sollicité le paiement de 7 heures supplémentaires par semaine, représentant au total depuis le premier août 2010,987 heures (7 heures supplémentaires par semaine x 47 semaines travaillées par an x trois ans ) ; que la société Maïa s’est contentée de rappeler que les cadres de l’entreprise réalisaient 39 heures de présence hebdomadaire en cours de journée et qu’en contrepartie, ils bénéficient de 10 jours de R.T.T. par an ; qu’elle a prétendu que la demande de Mme Y… ne peut prospérer, les preuves apportées lui apparaissant notablement insuffisantes ; que Mme Y… n’a en effet produit aucun décompte précis des heures qu’elle prétend avoir travaillées, calculées mois par mois ; qu’en outre, l’appelante n’a justifié d’aucun élément extérieur à l’envoi de ces mails, tels qu’une copie d’agenda ou encore un planning de travail, susceptibles d’étayer l’évaluation forfaitaire du nombre d’heures supplémentaires ; que pour autant, rappelant à cet égard que la convention de forfait annuel signée par les parties était manifestement nulle, la société Maïa n’a pas fourni en retour les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; que la seule affirmation selon laquelle Mme Y… n’a pas pu demeurer au sein des locaux de l’entreprise au-delà des heures de fermeture de l’entreprise, apparaît en effet notablement insuffisante ; qu’en conséquence, le jugement déféré doit être réformé en ce qu’il a intégralement débouté Mme Y… de sa demande en paiement d’heures supplémentaires ; qu’au vu cependant des éléments produits aux débats, et conformément à la remarque contenue à cet égard dans les conclusions de la société intimée, le nombre d’heures supplémentaires sera calculé sur la base, non pas de 7 heures par semaine, mais seulement 3 par semaine, au-delà de la durée hebdomadaire de 39 heures ; qu’ainsi, il convient de rémunérer, dans la limite de la prescription salariale triennale, 423 heures supplémentaires ; qu’après application de la majoration de 25%, le coût horaire peut être fixé à la somme de 28,20 euros ; qu’ainsi, la société Maïa sera condamnée à verser à Mme Y… la somme de 11 .928,6 euros au titre des heures supplémentaires, outre 1192,8 euros au titre des congés payés y afférents ;
1°) ALORS QU’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu’en jugeant dès lors que les courriels professionnels tardifs produits par Mme Y… suffisaient à étayer sa demande de rappel d’heures supplémentaires, quand elle constatait que la salariée ne fournissait « aucun décompte précis des heures qu’elle prétend avoir travaillées, calculées mois par mois », ce dont il résultait que les éléments disparates et imprécis versés aux débats par elle n’étaient pas suffisamment précis quant aux horaires réalisés pour permettre à l’employeur d’y répondre utilement en fournissant ses propres éléments de preuve de nature à justifier de son temps de travail, la cour d’appel a violé l’article L. 3171-4 du code du travail ;
2°) ET ALORS, subsidiairement, QUE l’employeur n’est tenu au paiement que des seules heures supplémentaires accomplies avec son accord, au moins implicite, ou rendues nécessaires par les tâches confiées au salarié ; qu’en faisant droit au paiement des heures supplémentaires réclamées par Mme Y…, sans constater qu’elles avaient été réalisées selon les instructions de l’employeur ou du moins avec l’accord, au moins implicite, de celui-ci, ni si celles-ci étaient nécessaires à la réalisation des tâches confiées au salarié, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.3121-22 et L.3171-4 du code du travail.