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N° J 15-81.787 FS-P+B
N° 376
SC2
2 MARS 2016
REJET
M. GUÉRIN président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :
REJET du pourvoi formé par Mme [I] [N], contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, chambre 2-7, en date du 6 mars 2015, qui, pour subornation de témoin, l’a condamnée à 5 000 euros d’amende ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 13 janvier 2016 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Béghin, conseiller rapporteur, MM. Castel, Raybaud, Mme Caron, M. Moreau, Mme Drai, M. Stephan, conseillers de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Wallon ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire BÉGHIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général WALLON ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5, 8 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, 34 de la Constitution, 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 434-15 du code pénal, de l’article préliminaire, des articles 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation du principe de la présomption d’innocence :
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Mme [N] coupable de subornation de témoins et l’a condamnée en répression à une peine de 5 000 euros d’amende ;
“aux motifs propres qu’il sera relevé que les déclarations de Mme [S] ont successivement été les suivantes : entendue sur commission rogatoire elle décrit M. [G] comme un individu séduisant ayant différentes facettes et une attitude assez “machiste” vis-à-vis des femmes, puis elle écrit au juge d’instruction pour se rétracter et dénoncer des déclarations extorquées ; qu’entendue à nouveau par la gendarmerie sur ce revirement, elle expose que sa lettre lui a été dictée par Mme [N] ; qu’enfin, elle rétracte ces dernières déclarations devant le premier juge après avoir été accompagnée à l’audience par la prévenue ; que cette dernière n’a pas jugé utile de la faire entendre devant la cour ; que ces multiples revirements non seulement ôtent tout crédit aux déclarations de ce témoin, mais encore, au-delà de la notion de “pressions” sont un élément de démonstration de la relation d’emprise qui la lie à Mme [N] ; que cette dernière tente vainement de donner un double sens à une partie des écoutes qui établissent les instructions données à son amie, sans justifier, néanmoins “l’attente de l’avocat”, la nécessité exprimée par Mme [S] de reprendre “un peu certaines tournures de phrase” ou de se mettre en adéquation avec le gabarit d’écriture de la prévenue ; qu’il est encore difficile de contester les déclarations de la mère du témoin supposé suborné, qui atteste des conditions de rédaction du courrier litigieux et rappelle que sa fille pouvait légitimement se sentir débitrice de Mme [N] qui lui avait trouvé du travail ; qu’enfin, il convient de relever que les attestations produites par la prévenue, émanant de ses proches et de ceux de M. [G] tendent effectivement à décrédibiliser l’action des gendarmes dans l’intérêt de ce dernier, mais n’affectent, en rien sur la sincérité des déclarations de Mme [S] et sur la nature de sa relation avec la prévenue ; qu’en conséquence, ces motifs non contraires à ceux du premier juge, amènent la cour à confirmer la décision déférée, tant sur le principe de la culpabilité de Mme [N], que sur une peine exactement appréciée ;
“aux motifs, à supposer adoptés, que sur l’existence de pressions à l’égard de Mme [S] : les transcriptions des conversations téléphoniques entre les deux femmes dans le cadre des écoutes mises en place par les policiers dans le cadre de l’enquête sur les faits concernant M. [G] sont particulièrement éloquentes :
– conversation du 22 juin 2011 :
CD : “T’es une conasse” ;
MR : “Ma mère… m’a fait un sketch parce qu’elle veut pas que j’écrive ce courrier… Elle m’a interdit de l’écrire” ;
“CD : “Pourquoi, parce qu’elle trouve normal que ta fille soit harcelée par la police ? Elle trouve ça normal…” “En plus, en plus tu l’as déjà dit à un gars… tu l’as déjà eu au téléphone…” ;
MR : “Mais bien sûr, bien sûr, alors je l’ai écrite…” ;
– SMS du 22 juin de Mme [N] : “Suis triste de la réaction de ta maman. Fais vite, c’est important et je pensais que ct déjà OK…” ;
– SMS de Mme [N] du 29 juin : « L’avocat vient de me dire qu’il n’a toujours rien de ta part… Et qu’il attend pour sa démarche. Tu m’avais dit de le faire il y a quinze jours, puis il y a 1 s” ;
– SMS du 30 juin 2011 : “J’attends toujours ton appel…” ;
– conversation du 30 juin 2011 :
MR : “Je pense à toi, vraiment je te le jure. Il me reste une page à écrire” ;
CD : “Non, pas à moi, c’est surtout à [F], quoi…” “… Je m’engage à le faire de toutes façons au plus tard on est vendredi au plus tard ça part lundi quoi…” “Toi, t’écris plus gros… Donc à moi ça me fait moins de pages… mais c’est long quand même… Faut que je fasse attention, j’ reprends un peu certaines… tournures de phrases parce que j’ai pas non plus envie qu’ils croient que… que c’est quand même ton… ton… ta façon de parler tu vois…” ;
que le témoignage de Mme [R], mère de Mme [S] est sans équivoque sur la manière d’agir de Mme [N] : “Il y a environ un an à peu près (le témoin est entendu le 3 avril 2012), Mme [N] est venue chez moi à [Localité 2] où [M] se trouvait… J’ai vu Mme [N] écrire un courrier sur la table de la salle à manger et elle a demandé à [M] de le recopier… J’ai tout de suite dit à ma fille de ne pas faire cela et qu’elle n’était pas concernée. Mme [N] voulait que ma fille porte plainte contre la police parce qu’ils avaient, soit-disant harcelé ma petite-fille [U] au sujet de [F]” ; que, lors de son audition le 3 avril 2012, Mme [S], confrontée aux termes des écoutes téléphoniques a également précisé “je voulais aider une amie qui m’a aidée dans la vie” ; que l’ensemble de ces éléments caractérise une volonté délibérée de Mme [N] d’obtenir de son amie un courrier au juge d’instruction et au procureur, en dépit des réticences affichées, au moyen d’appels et de messages répétés, au moyen d’une lettre recopiée, à l’inverse d’une démarche spontanée de Mme [S], l’ensemble des moyens employés pour parvenir à ses fins constituant des pressions, peu important qu’elles demeurent amicales et non sous-tendues par une quelconque dépendance économique ou financière, même si il résulte du témoignage de la mère de Mme [S] que c’est Mme [N] qui avait procuré à sa fille son travail à Carrefour [Localité 1]… ; que, sur la connaissance du caractère mensonger des termes employés : Les déclarations effectuées devant l’officier de police judiciaire par Mme [S], dans les locaux du commissariat, suite à une convocation, sont revêtues de sa signature, elles témoignent d’une connaissance ancienne de M. [G] par le témoin, d’un regard à la fois critique pour certains aspects de sa personnalité, et bienveillant pour certains autres, et dressent le portrait d’un homme à la fois charmeur et séducteur mais également chaleureux et attentif aux autres ; que, surtout, l’audition a également porté sur les activités nombreuses et variées de l’accusé, dans le domaine immobilier, de la création de sociétés… tous éléments qui ne pouvaient émaner que d’une personne particulièrement proche, dont le frère était également en relation avec le mis en cause pour ses activités immobilières (montage de dossiers de prêts) ; que le témoin cite également de nombreux détails relatifs à la vie de famille de M. [G], ses parents… sur simples questions très courtes de l’enquêteur ; que les termes de cette audition sont sincères, Mme [S] en a paraphé toutes les pages et a signé à la fin, dès lors, les termes du courrier sus-mentionné, obtenus dans les conditions ci-dessus rapportées, dans le dessein d’en faire état en justice ne pouvaient qu’être mensongers et Mme [N] en sollicitant ce courrier de Mme [S] ne pouvait l’ignorer ; que le caractère outrancier du courrier sollicité par la prévenue et son origine exempte de toute spontanéité démontrent le caractère mensonger du document en question ; que le fait que d’autres personnes de l’entourage de M. [F] [G] aient également adressé des courriers au procureur et au magistrat instructeur pour se plaindre également de l’attitude des enquêteurs est sans intérêt dans le cadre de la présente procédure ;
“1°) alors que l’article 434-15 du code pénal porte atteinte aux articles 5, 8 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, 34 de la Constitution ainsi qu’aux principes de légalité des délits et des peines, de clarté de la loi, de prévisibilité juridique et de sécurité juridique, notamment, en ce qu’il ne détermine pas quelles sont les “pressions” susceptibles de caractériser l’infraction de subornation de témoins ; qu’en conséquence, la déclaration d’inconstitutionnalité du texte précité qui sera prononcée après renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel posée par mémoire distinct et motivé, privera l’arrêt attaqué de tout fondement juridique ;
“2°) alors que le délit de subornation de témoins suppose que soient caractérisées de la part du prévenu des promesses, offres, pressions, menaces, voies de fait, manoeuvres ou artifices au cours d’une procédure ou en vue d’une demande ou défense en justice afin de déterminer autrui à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère ; qu’en se bornant en l’espèce à énoncer que Mme [M] [S] était sous “l’emprise” de Mme [N], sans indiquer en quoi consistait cette emprise et si elle impliquait des moyens de pression, la cour d’appel n’a pas caractérisé l’élément matériel du délit et n’a pas donné de base légale à sa décision ;
“3°) alors qu’en matière de subornation de témoins, il appartient aux parties poursuivantes d’établir la preuve des pression ; que, dès lors, la cour d’appel qui, ne constatant nullement l’existence de pressions, se borne à retenir que s’agissant des écoutes téléphoniques, Mme [N] ne justifie pas “l’attente de l’avocat”, la nécessité exprimée par Mme [S] de reprendre “un peu certaines tournures de phrase” ou de se mettre en adéquation avec le gabarit d’écriture de la prévenue, pour entrer en voie de condamnation, a inversé la charge de la preuve et méconnu le principe de la présomption d’innocence, en violation des textes visés au moyen ;
“4°) alors que ne saurait caractériser une quelconque pression le fait que la mère de Mme [S] ait assistée à une entrevue entre sa fille et Mme [N] et qu’elle se soit opposée à la rédaction de la lettre par sa fille ; que, dès lors, en se fondant sur un tel motif inopérant pour justifier la déclaration de culpabilité de Mme [N], la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;
“5°) alors que les motifs des premiers juges, qui ne font que rappeler la relation amicale entre Mmes [N] et [S] qui, après avoir échangée avec son amie par différents moyens de communication sur sa déposition, a décidé d’envoyer elle-même au magistrat instructeur une déclaration éclaircissant sa déposition, ne caractérise pas davantage les pressions qu’auraient exercées Mme [N] pour obtenir une déposition mensongère ;
“6°) alors que le délit de subornation de témoin nécessite de constater le caractère mensonger des déclarations ; qu’en l’espèce, les motifs des juges ne justifient nullement que les propos contenus dans la déclaration de Mme [S], tant sur les pressions employées par les enquêteurs, confirmées par d’autres témoins, que sur les deux anecdotes concernant M. [G], soit faux ou mensongers ; que, dès lors, la cour d’appel a de nouveau privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés” ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que Mme [N] a été poursuivie devant le tribunal correctionnel du chef de subornation de témoin pour avoir exercé sur Mme [S] des pressions l’ayant déterminée à adresser au juge d’instruction, qui l’avait fait entendre sur commission rogatoire, un courrier mensonger dans lequel elle revenait sur les déclarations qu’elle avait faites sous serment aux gendarmes au sujet d’une personne mise en examen ; qu’elle a relevé appel du jugement l’ayant déclarée coupable ;
Attendu que, pour confirmer cette décision, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que, pour vaincre les réticences affichées de Mme [S] et obtenir qu’elle adresse au juge d’instruction le courrier litigieux, dans lequel elle modifiait ses déclarations et dénonçait les conditions de son audition par les gendarmes, la prévenue, bénéficiant d’une emprise sur son amie, lui a fourni un modèle de lettre à recopier et a usé d’appels et messages téléphoniques répétés et insistants ; que les juges ajoutent que la déposition circonstanciée de Mme [S] faite devant les gendarmes était sincère et que son courrier était en conséquence mensonger, ce que la prévenue ne pouvait ignorer ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, qui caractérisent de la part de la prévenue des actes de nature à peser sur la volonté de son amie et qui l’ont directement déterminée à adresser au juge d’instruction une déclaration mensongère, la cour d’appel a justifié sa décision, sans inverser la charge de la preuve ;
D’où il suit que le moyen, devenu sans objet en sa première branche à la suite de l’arrêt du 7 octobre 2015 ayant dit n’y avoir lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 434-15 du code pénal, posée par la demanderesse, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le deux mars deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5, 8 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, 34 de la Constitution, 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 434-15 du code pénal, de l’article préliminaire, des articles 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation du principe de la présomption d’innocence :
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Mme [N] coupable de subornation de témoins et l’a condamnée en répression à une peine de 5 000 euros d’amende ;
“aux motifs propres qu’il sera relevé que les déclarations de Mme [S] ont successivement été les suivantes : entendue sur commission rogatoire elle décrit M. [G] comme un individu séduisant ayant différentes facettes et une attitude assez “machiste” vis-à-vis des femmes, puis elle écrit au juge d’instruction pour se rétracter et dénoncer des déclarations extorquées ; qu’entendue à nouveau par la gendarmerie sur ce revirement, elle expose que sa lettre lui a été dictée par Mme [N] ; qu’enfin, elle rétracte ces dernières déclarations devant le premier juge après avoir été accompagnée à l’audience par la prévenue ; que cette dernière n’a pas jugé utile de la faire entendre devant la cour ; que ces multiples revirements non seulement ôtent tout crédit aux déclarations de ce témoin, mais encore, au-delà de la notion de “pressions” sont un élément de démonstration de la relation d’emprise qui la lie à Mme [N] ; que cette dernière tente vainement de donner un double sens à une partie des écoutes qui établissent les instructions données à son amie, sans justifier, néanmoins “l’attente de l’avocat”, la nécessité exprimée par Mme [S] de reprendre “un peu certaines tournures de phrase” ou de se mettre en adéquation avec le gabarit d’écriture de la prévenue ; qu’il est encore difficile de contester les déclarations de la mère du témoin supposé suborné, qui atteste des conditions de rédaction du courrier litigieux et rappelle que sa fille pouvait légitimement se sentir débitrice de Mme [N] qui lui avait trouvé du travail ; qu’enfin, il convient de relever que les attestations produites par la prévenue, émanant de ses proches et de ceux de M. [G] tendent effectivement à décrédibiliser l’action des gendarmes dans l’intérêt de ce dernier, mais n’affectent, en rien sur la sincérité des déclarations de Mme [S] et sur la nature de sa relation avec la prévenue ; qu’en conséquence, ces motifs non contraires à ceux du premier juge, amènent la cour à confirmer la décision déférée, tant sur le principe de la culpabilité de Mme [N], que sur une peine exactement appréciée ;
“aux motifs, à supposer adoptés, que sur l’existence de pressions à l’égard de Mme [S] : les transcriptions des conversations téléphoniques entre les deux femmes dans le cadre des écoutes mises en place par les policiers dans le cadre de l’enquête sur les faits concernant M. [G] sont particulièrement éloquentes :
– conversation du 22 juin 2011 :
CD : “T’es une conasse” ;
MR : “Ma mère… m’a fait un sketch parce qu’elle veut pas que j’écrive ce courrier… Elle m’a interdit de l’écrire” ;
“CD : “Pourquoi, parce qu’elle trouve normal que ta fille soit harcelée par la police ? Elle trouve ça normal…” “En plus, en plus tu l’as déjà dit à un gars… tu l’as déjà eu au téléphone…” ;
MR : “Mais bien sûr, bien sûr, alors je l’ai écrite…” ;
– SMS du 22 juin de Mme [N] : “Suis triste de la réaction de ta maman. Fais vite, c’est important et je pensais que ct déjà OK…” ;
– SMS de Mme [N] du 29 juin : « L’avocat vient de me dire qu’il n’a toujours rien de ta part… Et qu’il attend pour sa démarche. Tu m’avais dit de le faire il y a quinze jours, puis il y a 1 s” ;
– SMS du 30 juin 2011 : “J’attends toujours ton appel…” ;
– conversation du 30 juin 2011 :
MR : “Je pense à toi, vraiment je te le jure. Il me reste une page à écrire” ;
CD : “Non, pas à moi, c’est surtout à [F], quoi…” “… Je m’engage à le faire de toutes façons au plus tard on est vendredi au plus tard ça part lundi quoi…” “Toi, t’écris plus gros… Donc à moi ça me fait moins de pages… mais c’est long quand même… Faut que je fasse attention, j’ reprends un peu certaines… tournures de phrases parce que j’ai pas non plus envie qu’ils croient que… que c’est quand même ton… ton… ta façon de parler tu vois…” ;
que le témoignage de Mme [R], mère de Mme [S] est sans équivoque sur la manière d’agir de Mme [N] : “Il y a environ un an à peu près (le témoin est entendu le 3 avril 2012), Mme [N] est venue chez moi à [Localité 2] où [M] se trouvait… J’ai vu Mme [N] écrire un courrier sur la table de la salle à manger et elle a demandé à [M] de le recopier… J’ai tout de suite dit à ma fille de ne pas faire cela et qu’elle n’était pas concernée. Mme [N] voulait que ma fille porte plainte contre la police parce qu’ils avaient, soit-disant harcelé ma petite-fille [U] au sujet de [F]” ; que, lors de son audition le 3 avril 2012, Mme [S], confrontée aux termes des écoutes téléphoniques a également précisé “je voulais aider une amie qui m’a aidée dans la vie” ; que l’ensemble de ces éléments caractérise une volonté délibérée de Mme [N] d’obtenir de son amie un courrier au juge d’instruction et au procureur, en dépit des réticences affichées, au moyen d’appels et de messages répétés, au moyen d’une lettre recopiée, à l’inverse d’une démarche spontanée de Mme [S], l’ensemble des moyens employés pour parvenir à ses fins constituant des pressions, peu important qu’elles demeurent amicales et non sous-tendues par une quelconque dépendance économique ou financière, même si il résulte du témoignage de la mère de Mme [S] que c’est Mme [N] qui avait procuré à sa fille son travail à Carrefour [Localité 1]… ; que, sur la connaissance du caractère mensonger des termes employés : Les déclarations effectuées devant l’officier de police judiciaire par Mme [S], dans les locaux du commissariat, suite à une convocation, sont revêtues de sa signature, elles témoignent d’une connaissance ancienne de M. [G] par le témoin, d’un regard à la fois critique pour certains aspects de sa personnalité, et bienveillant pour certains autres, et dressent le portrait d’un homme à la fois charmeur et séducteur mais également chaleureux et attentif aux autres ; que, surtout, l’audition a également porté sur les activités nombreuses et variées de l’accusé, dans le domaine immobilier, de la création de sociétés… tous éléments qui ne pouvaient émaner que d’une personne particulièrement proche, dont le frère était également en relation avec le mis en cause pour ses activités immobilières (montage de dossiers de prêts) ; que le témoin cite également de nombreux détails relatifs à la vie de famille de M. [G], ses parents… sur simples questions très courtes de l’enquêteur ; que les termes de cette audition sont sincères, Mme [S] en a paraphé toutes les pages et a signé à la fin, dès lors, les termes du courrier sus-mentionné, obtenus dans les conditions ci-dessus rapportées, dans le dessein d’en faire état en justice ne pouvaient qu’être mensongers et Mme [N] en sollicitant ce courrier de Mme [S] ne pouvait l’ignorer ; que le caractère outrancier du courrier sollicité par la prévenue et son origine exempte de toute spontanéité démontrent le caractère mensonger du document en question ; que le fait que d’autres personnes de l’entourage de M. [F] [G] aient également adressé des courriers au procureur et au magistrat instructeur pour se plaindre également de l’attitude des enquêteurs est sans intérêt dans le cadre de la présente procédure ;
“1°) alors que l’article 434-15 du code pénal porte atteinte aux articles 5, 8 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, 34 de la Constitution ainsi qu’aux principes de légalité des délits et des peines, de clarté de la loi, de prévisibilité juridique et de sécurité juridique, notamment, en ce qu’il ne détermine pas quelles sont les “pressions” susceptibles de caractériser l’infraction de subornation de témoins ; qu’en conséquence, la déclaration d’inconstitutionnalité du texte précité qui sera prononcée après renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel posée par mémoire distinct et motivé, privera l’arrêt attaqué de tout fondement juridique ;
“2°) alors que le délit de subornation de témoins suppose que soient caractérisées de la part du prévenu des promesses, offres, pressions, menaces, voies de fait, manoeuvres ou artifices au cours d’une procédure ou en vue d’une demande ou défense en justice afin de déterminer autrui à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère ; qu’en se bornant en l’espèce à énoncer que Mme [M] [S] était sous “l’emprise” de Mme [N], sans indiquer en quoi consistait cette emprise et si elle impliquait des moyens de pression, la cour d’appel n’a pas caractérisé l’élément matériel du délit et n’a pas donné de base légale à sa décision ;
“3°) alors qu’en matière de subornation de témoins, il appartient aux parties poursuivantes d’établir la preuve des pression ; que, dès lors, la cour d’appel qui, ne constatant nullement l’existence de pressions, se borne à retenir que s’agissant des écoutes téléphoniques, Mme [N] ne justifie pas “l’attente de l’avocat”, la nécessité exprimée par Mme [S] de reprendre “un peu certaines tournures de phrase” ou de se mettre en adéquation avec le gabarit d’écriture de la prévenue, pour entrer en voie de condamnation, a inversé la charge de la preuve et méconnu le principe de la présomption d’innocence, en violation des textes visés au moyen ;
“4°) alors que ne saurait caractériser une quelconque pression le fait que la mère de Mme [S] ait assistée à une entrevue entre sa fille et Mme [N] et qu’elle se soit opposée à la rédaction de la lettre par sa fille ; que, dès lors, en se fondant sur un tel motif inopérant pour justifier la déclaration de culpabilité de Mme [N], la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;
“5°) alors que les motifs des premiers juges, qui ne font que rappeler la relation amicale entre Mmes [N] et [S] qui, après avoir échangée avec son amie par différents moyens de communication sur sa déposition, a décidé d’envoyer elle-même au magistrat instructeur une déclaration éclaircissant sa déposition, ne caractérise pas davantage les pressions qu’auraient exercées Mme [N] pour obtenir une déposition mensongère ;
“6°) alors que le délit de subornation de témoin nécessite de constater le caractère mensonger des déclarations ; qu’en l’espèce, les motifs des juges ne justifient nullement que les propos contenus dans la déclaration de Mme [S], tant sur les pressions employées par les enquêteurs, confirmées par d’autres témoins, que sur les deux anecdotes concernant M. [G], soit faux ou mensongers ; que, dès lors, la cour d’appel a de nouveau privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés” ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que Mme [N] a été poursuivie devant le tribunal correctionnel du chef de subornation de témoin pour avoir exercé sur Mme [S] des pressions l’ayant déterminée à adresser au juge d’instruction, qui l’avait fait entendre sur commission rogatoire, un courrier mensonger dans lequel elle revenait sur les déclarations qu’elle avait faites sous serment aux gendarmes au sujet d’une personne mise en examen ; qu’elle a relevé appel du jugement l’ayant déclarée coupable ;
Attendu que, pour confirmer cette décision, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que, pour vaincre les réticences affichées de Mme [S] et obtenir qu’elle adresse au juge d’instruction le courrier litigieux, dans lequel elle modifiait ses déclarations et dénonçait les conditions de son audition par les gendarmes, la prévenue, bénéficiant d’une emprise sur son amie, lui a fourni un modèle de lettre à recopier et a usé d’appels et messages téléphoniques répétés et insistants ; que les juges ajoutent que la déposition circonstanciée de Mme [S] faite devant les gendarmes était sincère et que son courrier était en conséquence mensonger, ce que la prévenue ne pouvait ignorer ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, qui caractérisent de la part de la prévenue des actes de nature à peser sur la volonté de son amie et qui l’ont directement déterminée à adresser au juge d’instruction une déclaration mensongère, la cour d’appel a justifié sa décision, sans inverser la charge de la preuve ;