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AC/EL
Numéro 23/01463
COUR D’APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 27/04/2023
Dossier : N° RG 21/01823 – N° Portalis DBVV-V-B7F-H4KC
Nature affaire :
Demande de paiement de créances salariales sans contestation du motif de la rupture du contrat de travail
Affaire :
[A] [B]
C/
[H] [Y]
Grosse délivrée le
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 27 Avril 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 09 Février 2023, devant :
Madame CAUTRES-LACHAUD, magistrat chargé du rapport,
assistée de Madame BARRERE, greffière.
Madame [N], en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame CAUTRES, Présidente
Madame SORONDO, Conseiller
Madame PACTEAU, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [A] [B]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Christian KLEIN de l’AARPI KLEIN AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TARBES
INTIME :
Monsieur [H] [Y], exerçant en nom propre.
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par de Me Magalie MARCHESSEAU LUCAS de la SELARL AVOCADOUR, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 17 MAI 2021
rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION DE DEPARTAGE DE TARBES
RG numéro : F 19/00149
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [A] [B] (le salarié) a été embauché à compter du 1er août 2019 par M. [H] [Y] (l’employeur) en qualité de chef cuisinier, niveau I, échelon 3, suivant contrat à durée déterminée régi par la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants.
Selon ce contrat, la relation contractuelle devait en principe se terminer le 31 août 2019.
Le contrat prévoit une durée hebdomadaire de 42 h, hors temps de repas, soit un horaire mensuel de 182 h, réparti sur 5 jours pour un salaire mensuel fixé à la somme de 2 610,92 €, incluant les avantages en nature, à savoir un repas par jour travaillé, fourni par l’employeur et consommé dans l’entreprise et un logement.
Avant le terme prévu, M. [A] [B] a quitté son poste.
Le 22 août 2019, il a été mis en demeure de justifier de son absence.
Le 26 août 2019, il a indiqué que son départ était justifié par les conditions de travail.
Le 1er octobre 2019, M. [A] [B] a saisi la juridiction prud’homale.
Par jugement du 17 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Tarbes a notamment’:
– débouté M. [A] [B] de ses demandes financières pour la période antérieure au 1 août 2019,
– débouté M. [A] [B] de ses demandes de requalification de CDD en CDI,
– débouté M. [A] [B] de ses demandes de travail dissimulé,
– condamné M. [H] [Y] à verser à M. [A] [B] la somme de 526,12 €, correspondant aux heures supplémentaires majorées à 50 % pour la période du 1er août au 20 août 2019,
– débouté M. [A] [B] de sa demande de rappel des salaires et d’indemnité de congés payés y afférents pour le mois d’août 2019,
– débouté M. [H] [Y] de sa demande reconventionnelle d’indemnisation du préjudice pour rupture anticipée du contrat de travail à l’initiative du salarié,
– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,
– rejeté les demandes croisées fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné chaque partie aux dépens par elle exposés.
Le 1er juin 2021, M. [A] [B] a interjeté appel limité de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 25 octobre 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, M. [A] [B] demande à la cour de :
– infirmer la décision prud’homale en ce qu’elle :
* l’a débouté de ses demandes financières pour la période antérieure au 1er août 2019,
* l’a débouté de ses demandes de requalification de CDD en CDI,
* l’a débouté de ses demandes de travail dissimulé,
* l’a débouté de sa demande de rappel de salaire et d’indemnité de congés payés afférents pour le mois d’août 2019,
* l’a débouté de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
– dire qu’il a commencé à travailler pour le compte de M. [H] [Y] le 19 juillet 2019,
– en conséquence condamner M. [H] [Y] à la somme de 1 096 € à titre de salaire outre 936 € au titre des heures supplémentaires, pour le mois de juillet 2019,
– condamner l’employeur à lui payer 222,72 € à titre de rappel de salaire de base d’août outre 22,27’€ à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire,
– requalifier son contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
– en conséquence condamner M. [H] [Y] à 3 000 € au titre de l’indemnité afférente,
– dire que l’absence de déclaration auprès des organismes sociaux et l’absence de bulletin de paye pour le mois de juillet constituent un travail dissimulé,
– en conséquence, condamner l’employeur M. [H] [Y], à lui verser 15 660 € à ce motif,
– subsidiairement, condamner l’employeur à payer 10 % de l’ensemble des sommes payées au titre de l’indemnité de précarité, soit 521 €,
– en tout état de cause, condamner l’employeur à :
* 2 000 € au titre des frais engagés,
* 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure prud’homale,
* 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel,
* aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 10 septembre 2021, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, M. [H] [Y], formant appel incident, demande à la cour de’:
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a’:
* débouté M. [A] [B] de ses demandes financières antérieures au 1er août 2019,
* débouté M. [A] [B] de sa demande de requalification du CDD en CDI,
* débouté M. [A] [B] de sa demande au titre du travail dissimulé,
* débouté M. [A] [B] de ses demandes de rappel de salaire et indemnités de congés payés y afférents pour le mois d’août 2019,
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il’:
* l’a condamné à la somme de 526,12 € au titre des heures supplémentaires majorées à 50% pour la période du 1er au 20 août 2019,
* l’a débouté de sa demande reconventionnelle en réparation du préjudice résultant de la rupture anticipée du contrat,
* a rejeté sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
– juger que M. [A] [B] a été intégralement rempli de ses droits en matière d’heures supplémentaires sur le mois d’août 2019,
– condamner M. [A] [B] à la somme de 1 000 € en réparation du préjudice causé par son départ prématuré de l’entreprise, avant le terme de son contrat saisonnier,
– débouter M. [A] [B] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– condamner M. [A] [B] à la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 9 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de requalification d’un CDD en CDI
Le contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leur convention mais des conditions dans lesquelles la prestation de travail s’est exécutée.
Il appartient à celui qui revendique l’existence d’un contrat de travail d’en rapporter la preuve et par conséquent d’établir qu’il accomplissait une prestation de travail dans un lien de subordination à l’égard de la personne ou de la société avec laquelle il invoque une relation de travail salariée et à celui qui invoque le caractère fictif d’un contrat apparent d’en rapporter la preuve.
Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, le travail au sein d’un service organisé pouvant constituer un indice du lien de subordination lorsque l’employeur détermine unilatéralement les conditions d’exécution du travail.
L’appréciation des faits par les juges du fond pour caractériser le contrat de travail est souveraine.
Aux termes de l’article L. 1242-12 du code du travail le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit, à défaut de quoi il est réputé conclu pour une durée indéterminée.
Au cas d’espèce, M. [A] [B] sollicite la requalification de son contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée. Il fait valoir qu’il a commencé à travailler, non pas le 1er août 2019, comme l’indique le contrat de travail non signé par l’employeur, mais dès le 19 juillet, comme cela figure dans son dispositif.
Pour en justifier, il s’appuie sur plusieurs pièces’:
– l’attestation de Mme [U], une amie, qui relève l’avoir accompagné à son entretien d’embauche le 14 juillet 2019, dans le restaurant situé à [Localité 5], le Bocadillo, pour y occuper un poste de chef de cuisine à compter du 18 juillet, soit deux jours avant le passage du tour de France pour l’étape [Localité 6] du samedi 20 juillet 2019. Ce restaurant se situe effectivement dans la station de sports d’hiver du domaine du [7], à quelques kilomètres du col du Tourmalet et de l’arrivée de l’étape du tour de France du 20 juillet 2019,
– l’attestation de M. [V], époux du salarié, lequel relève que son compagnon est bien parti le 18 juillet 2019 tôt le matin pour rejoindre [Localité 5], lieu où se trouve le restaurant, pour une prise de poste de chef de cuisine. Il relève que c’est ce jour que son conjoint a pris possession de l’appartement mis à sa disposition par son employeur, mise à disposition que l’on retrouve dans le contrat de travail écrit du 1er août,
– cette attestation de M. [V] est complétée par des échanges whatsapp entre lui et le salarié datés des 18, 19, 21 et 26 juillet 2019, dont on ne peut suspecter l’authenticité au regard du réalisme des photographies et captures d’écran. Aux termes de ces derniers, si le nom du restaurant n’est pas expressément visé, il apparaît, photographies à l’appui, que M. [A] [B] a bien déménagé à proximité d’un restaurant le 18 juillet 2019. Il apparaît également que M. [A] [B] après avoir déposé ses bagages indique se rendre le soir du 18 juillet 2019, après le service au restaurant. Le message du 19 juillet 2019 témoigne de ce que le salarié était d’ores et déjà en poste relevant avoir fait 120 couverts à midi, évoquant une ouverture exceptionnelle le soir, témoignant d’une astreinte à des horaires de travail. Cette astreinte est confirmée par le message du 21 juillet 2019, où le salarié évoque des «’heures de fou’». Le message du 21 juillet 2019 témoigne de ce qu’alors que le salarié était en poste depuis deux jours, avec 200 couverts à gérer, une personne, identifiée comme la compagne du patron du restaurant le Bocadillo et serveuse, critique auprès du salarié l’état de la cuisine laissé par ce dernier, témoignant d’un contrôle de l’activité et par suite d’un lien de subordination. – le message du 26 juillet 2019 est une série de deux photographies d’une cuisine professionnelle que le salarié surnomme « ma cuisine’»,
-l’attestation de Mme [W], sa mère laquelle relève que son fils a bien pris le poste de chef de cuisine le jeudi 18 juillet 2019. Elle fait état d’une photo de l’installation dans l’appartement, laquelle n’est pas produite,
– son courrier du 26 août 2019 adressé à son employeur relevant qu’il a bien débuté le 19 juillet,
– la reprise des écritures de l’employeur lequel admet avoir initialement prévue une embauche le 18 juillet 2019.
Il résulte de ces éléments que le salarié établit que sa relation de travail avec M. [Y] a bien débuté le 19 juillet 2019, date à laquelle les échanges permettent de retenir l’existence réelle d’un lien de subordination.
Au demeurant si l’employeur conteste l’existence de cette relation de travail dès le 19 juillet 2019, aucun des arguments et éléments produits ne permet de prospérer. A l’exception du registre du personnel, qui, au regard des dates d’entrée des salariés dans l’établissement, lesquelles ne sont pas par ordre chronologique, n’est pas conforme aux dispositions de l’article L. 1221-13 du code du travail, aucun planning n’est produit sur la période antérieure au 1er août. Toutes les attestations produites procèdent par affirmations sans retracer de témoignages. De plus, ni M. [X] et M. [T] n’étaient pas en poste au moment du passage de M. [B]. Mme [F] [G] est la compagne du gérant. M. [R] [C], qui relève qu’il n’a aucun lien de subordination, était un salarié de M. [Y], arrivé au regard du registre le 1er juillet 2019, mais dont la mention sur le registre est postérieure à des arrivées en août 2019. Si M. [Z] [M] relève la présence de M. [B] à compter du 1er août, le registre du personnel relève que M. [M] n’ a intégré l’entreprise que le 5 août 2019.
Il résulte de ces éléments que la cour a la conviction que M. [A] [B] a bien pris ses fonctions auprès de M. [Y] à compter du 19 juillet 2019, sans qu’aucun écrit n’ait été établi.
Il s’ensuit que le contrat de travail doit être réputé à durée indéterminée.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
Il y a lieu de condamner l’employeur à payer au salarié la somme de 2700 € correspondant à l’indemnité prévue à l’article L.1245-2 du code du travail, en cas de requalification du contrat.
De même, l’employeur ne justifie pas avoir réglé le salaire du salarié du 19 juillet 2019 au 31 juillet 2019, de telle sorte que M. [A] [B] est en droit de solliciter la condamnation de l’employeur à lui verser la somme de 1 080 € à titre de rappel de salaire et 108 € d’indemnité compensatrice de congés payés.
Sur les heures supplémentaires des mois de juillet et août 2019
En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l’accord au moins implicite de l’employeur, soit s’il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.
En application des articles L.3171-1 et D.3171-1 et suivants du code du travail, lorsque tous les salariés d’un atelier, d’un service ou d’une équipe travaillent selon le même horaire collectif :
l’horaire collectif est daté et signé par l’employeur ou, sous la responsabilité de celui-ci, par la personne à laquelle il a délégué ses pouvoirs à cet effet. Il est affiché en caractères lisibles et apposé de façon apparente dans chacun des lieux de travail auxquels il s’applique. Lorsque les salariés sont employés à l’extérieur, cet horaire est affiché dans l’établissement auquel ils sont attachés, un double de cet horaire collectif et des rectifications qui y sont apportées est préalablement adressé à l’inspecteur du travail.
En application de l’article L.3171-2 du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.
En l’espèce, il n’ est pas justifié d’un horaire collectif.
Suivant le contrat de travail du salarié, la durée hebdomadaire de travail est fixé à 42 h, hors temps de repas, soit un horaire mensuel de 182 h, réparti sur 5 jours.
Le salarié expose qu’il a accompli de nombreuses heures supplémentaires non rémunérées, à raison de 155 h pour le mois de juillet et 215 h pour le mois d’août 2019.
Pour étayer ses dires, il produit notamment un décompte journalier du nombre d’heures réalisées.
Il produit ainsi à l’appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies sur les mois de juillet et août 2019, afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
> Concernant le mois de juillet 2019, l’employeur, qui soutient que le salarié n’était pas présent au sein de l’entreprise, relève certaines incohérences dans le tableau produit par le salarié mais ne produit aucun élément de nature à justifier les heures effectivement réalisées.
Au vu des éléments produits de part et d’autre, et sans qu’il soit besoin d’une mesure d’instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que le salarié a effectué des heures supplémentaires non rémunérées au mois de juillet et qu’il n’a pas été rempli de ses droits en ce qui concerne la contrepartie obligatoire en repos.
L’employeur doit en conséquence être condamné à lui verser la somme de 300 € à ce titre outre 30 € de congés payés y afférents.
> Concernant le mois d’août 2019, l’employeur qui sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il lui a accordé la somme de 526,12 € correspondant aux heures supplémentaires majorées à 50% pour la période du 1er au 20 août, produit un planning hebdomadaire du volume horaire journalier réalisé par l’ensemble des salariés. Ce planning, établi par l’employeur, qui ne porte pas la mention de la signature du salarié est en contradiction’:
avec les données figurant sur le registre d’entrée du personnel, lequel relève l’existence d’un salarié, M. [E] [S], recruté du 1er au 16 août 2019 pour le service et qui n’apparaît pas sur le planning,
avec le planning des heures produit par le salarié, lequel indique ne pas avoir travaillé le 20 août tandis que l’employeur mentionne un certain nombre d’heures réalisées,
avec les bulletins de salaires sur les jours d’absence du salarié.
Au vu des éléments produits de part et d’autre, et sans qu’il soit besoin d’une mesure d’instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que le salarié a effectué des heures supplémentaires non rémunérées au mois d’août 2019 et qu’il n’a pas été rempli de ses droits en ce qui concerne la contrepartie obligatoire en repos.
Si l’employeur relève avoir régularisé un certain nombre d’heures et produit un chèque de régularisation, ce dernier fait suite à l’établissement du deuxième bulletin de salaire édité par l’employeur, lequel est toujours contesté par le salarié, dont le montant diffère des sommes demandées au titre des heures supplémentaires et dont il n’est pas justifié qu’il ait été encaissé.
L’employeur doit en conséquence être condamné à verser au salarié la somme de 400 € à ce titre outre 40 € de congés payés y afférents. Le jugement sera infirmé sur ce point.
Sur le rappel de salaire du mois d’août 2019
Le salarié soutient que son salaire brut se retrouve à 2 336,02 € dans la dernière édition du bulletin de salaire d’août contre 2 610,92 € comme prévu au contrat, soit un manque à gagner de 222,72 €, dont il demande le paiement.
Cependant, ni le 1er bulletin de salaire édité au mois d’août, qui relève un brut de 2 620, 60 € conforme au contrat, ni le second bulletin qui mentionne un brut désormais fixé à 3 540,07 €, supérieur au montant du contrat ne permet d’établir un manque à gagner, étant relevé en outre que M. [A] [B] a quitté son poste plusieurs jours avant la fin de son contrat.
Le moyen sera rejeté et le jugement confirmé sur ce point.
Sur le travail dissimulé
Selon les dispositions de l’article L.8221-5 du code du travail : ‘Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.’
Selon les dispositions de l’article L.8223-1 du code du travail :
‘En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
La dissimulation d’emploi salarié prévu par l’article L.8221-5 du code du travail n’est caractérisé que s’il est établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie, un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué.’
Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.
Le salarié sollicite la condamnation de l’employeur à lui verser la somme de
15 660 € à titre d’indemnité pour travail dissimulé, dès lors que ce dernier ne lui a pas fourni de contrat de travail pour le mois de juillet 2019 et ne l’a pas déclaré auprès des organismes sociaux.
L’employeur sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de reconnaissance d’un travail dissimulé, considérant qu’il a embauché le salarié à compter du 1er août 2019.
Il ressort des précédents développements que le salarié a commencé son activité le 19 juillet 2019 et que l’employeur ne l’a pas déclaré à cette date auprès des organismes sociaux, pas plus qu’il n’a établit des bulletins conformes. Il n’a donc pas respecté les formalités à la déclaration préalable au sens des dispositions de l’article L.1221-10 du code du travail, mais également n’a pas délivré des bulletins de salaire conformes au sens de l’article L. 8221-5- 2° du code du travail.
L’employeur, qui reconnaît avoir initialement envisagé d’embaucher le salarié le 18 juillet 2019 et dont il ressort des pièces qu’il lui a mis à disposition un appartement dès le 18 juillet 2019 pour une embauche le 19 juillet, soit la veille d’un événement majeur dans la région, et qui a régularisé les formalités à compter du 1er août, sans toutefois respecter le formalisme du registre d’entrée du personnel, ne pouvait ignorer méconnaître les dispositions susvisées.
Le caractère intentionnel des manquements susvisés est donc établi. Le quantum de la demande du salarié n’étant pas discuté, il convient de faire droit à cette demande pour son entier montant soit la somme de 15 660 €.
Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
Sur la demande du salarié en remboursement des frais engagés
Le salarié sollicite la condamnation de l’employeur à lui verser la somme de
2 000€ au titre des frais engagés. S’il fait valoir qu’il a du faire appel à un comptable pour corriger son bulletin de salaire d’août, il n’en justifie pas, les frais engagés pour se rendre à l’audience de conciliation et prendre un avocat, relevant de l’article 700 du code de procédure civile, demande distincte.
Le salarié sera débouté de sa demande, formée à ce titre, le jugement déféré n’ayant pas statué sur ce point.
Sur la demande reconventionnelle de l’employeur en dommages intérêts
M. [Y] sollicite la condamnation du salarié au paiement de 1000 € en réparation du préjudice causé par son départ prématuré de l’entreprise, avant le terme de son contrat saisonnier.
A titre liminaire, la cour relève qu’elle a procédé à la requalification du contrat en CDI.
Au demeurant, s’il résulte des pièces produites que le salarié a effectivement quitté son poste avant le terme du contrat, l’employeur n’en a pas tiré de conséquences, ne mettant pas en ‘uvre les procédures appropriées. De même, s’il soutient que le salarié est parti le 21 août, le premier bulletin de salaire, lequel fixe une sortie du salarié le 31 août, comme les différents documents de fin de contrat, n’évoque qu’une seule absence’: celle du 31 août 2019.
Il résulte de ces constatations que l’employeur n’établit pas la réalité de son préjudice.
La demande sera rejetée et le jugement sera donc confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes
L’employeur succombe de sorte que le jugement sera infirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.
M. [H] [Y] sera condamné aux entiers dépens et au paiement d’une indemnité en application de l’article 700 du code de procédure civile d’un montant de
2 000 euros pour les frais irrépétibles de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, en toutes ses dispositions qui lui sont soumises :
Confirme le jugement du conseil des prud’hommes de Tarbes du 17 mai 2021 en ce qu’il a’:
-débouté M. [A] [B] de sa demande de rappel des salaires et d’indemnité de congés payés y afférents pour le mois d’août 2019,
– débouté M. [H] [Y] de sa demande reconventionnelle d’indemnisation du préjudice pour rupture anticipée du contrat de travail à l’initiative du salarié,
l’infirme pour le surplus,
Statuant de nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,
Requalifie le contrat de travail de M. [A] [B] en contrat à durée indéterminée,
Dit que la relation de travail a débuté à compter du 19 juillet 2019,
Condamne M. [H] [Y] à payer à M. [A] [B] les sommes suivantes’:
– 2 700 € correspondant à l’indemnité prévue à l’article L.1245-2 du code du travail,
– 1 080 € à titre de rappel de salaire du mois de juillet 2019, et 108 € d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
– 300 € au titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires du mois de juillet 2019, et 30 € au titre des congés payés y afférents
– 400 € au titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires du mois d’août 2019 et 40 € au titre des congés payés y afférents
– 15 660 € de dommage-intérêts au titre du travail dissimulé,
Déboute M. [A] [B] de sa demande de dommage-intérêts pour frais engagés,
Condamne M. [H] [Y] aux entiers dépens et à payer à M. [A] [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame CAUTRES, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,