Heures supplémentaires : 26 avril 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/02365

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Heures supplémentaires : 26 avril 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/02365
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AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 20/02365 – N° Portalis DBVX-V-B7E-M6DO

[K]

C/

Société GARNIER-GUILLOUET

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA ILE-DE-FRANCE EST

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOURG EN BRESSE

du 06 Mars 2020

RG : 19/00163

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 26 AVRIL 2023

APPELANT :

[C] [K]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Marie POPLAWSKYJ, avocat au barreau de LYON

INTIMÉES :

Société GARNIER-GUILLOUET ès qualités de liquidateur judiciaire de la Société WILLI BETZ FRANCE TRANSPORTS AFFRETEMENT

[Adresse 4]

[Localité 6]

représentée par Me Christophe OHMER de la SELARL PBO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Florence FREDJ-CATEL de la SELAS B.C.D.AVOCATS, avocat au barreau de MEAUX

UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA ILE-DE-FRANCE EST

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Pascal FOREST de la SELARL BERNASCONI-ROZET-MONNET SUETY-FOREST, avocat au barreau d’AIN

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 13 Février 2023

Présidée par Anne BRUNNER, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Joëlle DOAT, présidente

– Nathalie ROCCI, conseiller

– Anne BRUNNER, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 26 Avril 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat de travail à durée déterminée du 20 février 2001, M. [K] a été embauché, pour une durée de trois mois, par la société WILLI BETZ FRANCE, dont le siège social se situait à [Localité 6].

La relation de travail s’est poursuivie au-delà du terme.

La Convention collective applicable est celle des Transports routiers.

M. [K] a été victime d’un accident du travail le 19 mai 2016 et s’est trouvé ensuite en arrêt maladie.

Le 6 janvier 2017, il a été déclaré inapte à son poste, par le Docteur [R], médecin du travail.

Par lettre du 6 mars 2017, la société WILLI BETZ FRANCE TRANSPORTS AFFRETEMENT a notifié à M. [K] son licenciement pour inaptitude.

La société WILLI BETZ FRANCE TRANSPORTS AFFRETEMENT a fait l’objet d’un jugement de redressement judiciaire en date du 27 mars 2017, puis d’un jugement de liquidation judiciaire rendu par le Tribunal de commerce de Meaux le 27 novembre 2017, désignant la SELARL GARNIER GUILLOUET, prise en la personne de Maître Sophie GUILLOUET, ès qualités de liquidateur judiciaire.

Monsieur [C] [K] a saisi le Conseil de prud’hommes de BOURG EN BRESSE par une requête parvenue au greffe le 24 juin 2019.

Par jugement du 6 mars 2020, le conseil de prud’hommes de Bourg en Bresse a débouté M. [K] de ses demandes et l’a condamné aux dépens.

Le 7 avril 2020, M. [K] a fait appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières écritures, notifiées le 3 juillet 2020, il demande à la Cour d’infirmer le jugement et, statuant à nouveau de :

Rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription ;

En conséquence,

Reconnaître comme étant de nature professionnelle son inaptitude prononcée le 6 janvier 2017 par le médecin du travail ;

Reconnaître comme étant sans cause réelle et sérieuse le licenciement ;

Condamner la société WILLI BETZ FRANCE TRANSPORTS AFFRETEMENT à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamner la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT à lui verser la somme de 4 654,80 euros à titre de rappel d’indemnité compensatrice de préavis ainsi que 465,48euros au titre des congés payés afférents ;

Fixer son ancienneté au sein de la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT à la date du 12 août 1986 ;

Condamner la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT à lui verser la somme de 15 849,71 euros à titre de complément d’indemnité de licenciement ;

Condamner la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT à lui verser la somme de 9 000 euros à titre de rappel de frais professionnels ;

Condamner la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires ;

Condamner la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

Condamner la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure de première instance ;

Condamner la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT à lui la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d’appel ;

Condamner la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT à lui remettre à une attestation pôle emploi et un solde de tout compte conformes à la décision à intervenir ainsi que les bulletins de salaire rectifiés ;

Condamner la société WILLI BETZ TRANSPORTS AFFRETEMENT aux entiers dépens ;

Inscrire au passif de la liquidation judiciaire les sommes précitées ;

Déclarer la décision à intervenir opposable à l’UNEDIC délégation AGS-CGEA ILE DE FRANCE EST.

Par conclusions notifiées le 4 septembre 2020, la SELARL GARNIER GUILLOUËT, ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL WILLI BETZ FRANCE TRANSPORTS AFFRETEMENT, demande à la cour de :

À titre principal,

Confirmer le jugement dans toutes ses dispositions

En conséquence,

Juger que l’ensemble des demandes présentées par Monsieur [C] [K] au titre de la rupture ou de l’exécution de son contrat de travail sont irrecevables au titre de la prescription et ce au visa de l’article L. 1471-1 du Code du travail.

À titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la fin de non-recevoir tirée de la prescription serait écartée,

Débouter purement et simplement M. [C] [K] de toutes les demandes indemnitaires qu’il a formulées en raison de l’absence d’éléments matériels et objectifs permettant de rapporter la preuve du préjudice invoqué.

Débouter M. [C] [K] des demandes qu’il a formulées au titre des frais de déplacement.

Débouter M. [C] [K] des demandes qu’il a formulées au titre des heures supplémentaires.

À titre infiniment subsidiaire, dans l’hypothèse où la Cour entendrait faire droit à certaines des demandes formulées par M. [C] [K],

Juger que la décision à intervenir sera opposable à l’AGS dans la limite de sa garantie légale.

En tout état de cause,

Condamner M. [C] [K] à payer à la SELARL GARNIER GUILLOUET, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL WILLI BETZ FRANCE TRANSPORTS AFFRETEMENT, la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le condamner aux entiers dépens de l’instance.

Par conclusions notifiée le 16 juillet 2020, l’AGS CGEA ILE DE France EST demande à la cour de confirmer le jugement, de dire les demandes de M. [K] prescrites et à titre subsidiaire, dire l’arrêt à intervenir inopposable, à titre plus subsidiaire, débouter M. [K] de ses demandes, plus subsidiairement dire que la décision ne lui sera opposable que dans la limite des plafonds de sa garantie.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2023.

SUR CE,

Sur la forclusion :

L’AGS CGEA d’ILE DE France oppose les dispositions de l’article L625-1 du code de commerce.

Elle indique avoir déjà versé des sommes au liquidateur au bénéfice de M. [K] et les détaille.

Le salarié fait valoir que les conditions pour que le délai de forclusion prévu à l’article L625-1 du code de commerce lui soit opposé ne sont pas réunies car il n’a pas été destinataire des informations lui permettant d’exercer ce recours.

***

Aux termes de l’article L625-1 alinéa 2 du code de commerce, le salarié dont la créance ne figure pas en tout ou en partie sur un relevé peut saisir à peine de forclusion le conseil de prud’hommes dans un délai de deux mois à compter de l’accomplissement de la mesure de publicité mentionnée à l’alinéa précédent. Il peut demander au représentant des salariés de l’assister ou de le représenter devant la juridiction prud’homale.

L’AGS ne justifie ni ne précise la date à laquelle le relevé de créance a été établi et a fait l’objet d’une publicité.

Dès lors, il n’est pas démontré que l’action de M. [P] serait forclose.

Sur la prescription de l’action portant sur l’exécution et la rupture du contrat de travail :

La SELARL GARNIER GUILLOUËT objecte que le contrat de travail de Monsieur [C] [K] a été rompu le 6 mars 2017 et que son action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans. Elle ajoute que M. [K] est taisant sur la date à laquelle son licenciement lui a été notifié. Elle estime que la date qui doit être retenue est celle du 6 mars 2017.

L’AGS CGEA d’Ile de France souligne que M. [K] a saisi le conseil de prud’hommes le 24 juin 2019 alors qu’il avait jusqu’au 6 mars 2019 pour le faire, que son action est prescrite pour les demandes en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’indemnité compensatrice et indemnité spéciale de licenciement, complément d’indemnité de licenciement et dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Elle observe que l’attestation Pole emploi, du 15 mars 2017, fait apparaitre la date du 6 mars 2017 comme étant celle de fin des activités du salarié.

Elle fait valoir que dans le cas où la date de licenciement n’est pas certaine, sa garantie n’est pas due sauf si le salarié établit que le licenciement est intervenu dans les 15 jours de la liquidation judiciaire.

Le salarié estime que la prescription prévue à l’article L 1471-1 du code du travail ne lui est pas opposable car le point de départ de ce délai est la notification du licenciement et que la simple mention figurant sur la lettre de licenciement est insuffisante à donner date certaine au licenciement.

***

Aux termes de l’article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l’espèce, toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

En l’espèce, le licenciement a été notifié le 6 mars 2017, comme indiqué sur la lettre, produite par le salarié, qui admet l’avoir reçue.

M. [K] verse aux débats l’attestation ASSEDIC, établie le 15 mars 2017 par la société Willy Betz, document qui fait apparaitre une date de licenciement au 6 mars 2017.

Sa fiche de paie du mois de mars 2017 fait apparaître une sortie au 6 mars 2017 ainsi que le paiement de l’indemnité de licenciement.

L’AGS CGEA verse aux débats les captures d’écran de la base de données Pôle emploi concernant le dossier de M. [K] : il apparaît une fin de contrat et une notification du licenciement au 6 mars 2017, une « date d’origine de l’information » au 15 mars 2017 et une date de saisie au 22 mars 2017.

La date de réception de la lettre de licenciement n’est pas le point de départ du délai de prescription. Il importe peu dès lors que M. [K] ait reçu sa lettre « bien postérieurement », comme il le soutient sans plus de précisions.

M. [K] a saisi le conseil de prud’hommes le 24 juin 2019.

Son action en contestation de la rupture du contrat de travail est prescrite ainsi que l’action s’appuyant sur l’exécution déloyale du contrat de travail.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a, au motif de la prescription, rejeté l’ensemble des demandes de M. [K] alors que la prescription emporte irrecevabilité des demandes consécutives au licenciement et de la demande fondée sur l’exécution déloyale du contrat de travail.

Sur les demandes relatives aux frais professionnels et aux heures supplémentaires :

Le salarié formule des demandes au titre des frais de déplacement et des heures supplémentaires.

Il met en demeure l’employeur de lui transmettre ses feuilles de frais de déplacement.

L’UNEDIC AGS CGEA ILE DE France EST et la SELARL GARNIER GUILLOUET ne soulèvent pas la prescription de l’action en paiement des frais de déplacement.

L’AGS objecte :

que les demandes de M. [K] ne sont pas détaillées ni étayées ;

que les fiches « frais de déplacement » pour les mois de septembre à décembre 2015 et de janvier à 2016 font apparaître des frais pour un total de 6 774,67 euros ;

qu’aucun élément ne permet d’étayer la demande d’heure supplémentaires

que l’examen des fiches de paie de l’année 2016 fait apparaître le paiement des frais de déplacement et heures supplémentaires.

La SELARL GARNIER-GUILLOUET fait valoir, s’agissant des frais de déplacement, que les éléments versés aux débats par le salarié sont insuffisants ; qu’il n’y a pas d’adéquation entre le montant figurant sur les feuilles de déplacement et celui de la demande.

Elle ajoute, s’agissant des heures supplémentaires, que le salarié ne verse aux débats aucun élément et demande qu’il soit débouté de sa demande à ce titre.

***

M. [P] verse aux débats les feuilles de frais de déplacement du mois d’octobre 2015 au mois de mai 2016 ainsi que les fiches de paie du mois de janvier 2016 au mois de mars 2017. Les frais de déplacement sont réglés avec un mois de décalage : par exemple, en janvier 2016, est payée la somme figurant sur la feuille de déplacement de décembre 2015.

M. [P] ne produit pas les fiches de paie de novembre et décembre 2015.

Il n’est pas établi que les frais d’octobre et novembre 2015, dont le montant est connu, n’auraient pas été payés. Du reste, la demande du salarié n’est pas précise sur les périodes au cours desquelles les frais de déplacement n’auraient pas été payés.

Le conseil de prud’hommes a justement rejeté la demande de M [K].

Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

M. [K] ne produit aucun élément permettant à l’employeur d’y répondre.

Le conseil de prud’hommes a justement rejeté la demande de M [K].

Sur les autres demandes :

M. [K], qui succombe en son recours, sera condamné aux dépens d’appel.

Il n’est pas inéquitable de laisser à la SELARL GARNIER GUILLOUET, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Willy Betz France affrètement, la charge des frais non compris dans les dépens qu’elle a dû exposer en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, par arrêt mis à disposition, contradictoirement

Confirme le jugement en ce qu’il a débouté M. [K] de ses demandes au titre des frais professionnels et des heures supplémentaires, l’a condamné aux dépens et a rejeté la demande en paiement d’une indemnité de procédure formée par le liquidateur judiciaire, ès qualités

L’infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevables les demandes en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, en complément sur l’indemnité de licenciement et en dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail formées par M. [K] ;

Y ajoutant

Condamne M. [K] aux dépens d’appel ;

Déboute la SELARL GARNIER GUILLOUET, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Willy Betz France affrètement, de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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