Heures supplémentaires : 26 avril 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 21/00184

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Heures supplémentaires : 26 avril 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 21/00184
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COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

————————–

ARRÊT DU : 26 AVRIL 2023

PRUD’HOMMES

N° RG 21/00184 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-L4CQ

Monsieur [G] [R]

c/

S.A.S. AGORA

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 décembre 2020 (R.G. n°F 20/00291) par le Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d’appel du 12 janvier 2021,

APPELANT :

Monsieur [G] [R]

né le 17 Janvier 1957 à [Localité 3] de nationalité Française Profession : Mécanicien, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Olivier MEYER de la SCP GUEDON – MEYER, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SAS Agora, prise en la personne de son représentant légal en sa qualité de présidente domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 1]

N° SIRET : 390 356 483

représentée par Me PILLOIX substituant Me Charlotte VUEZ de la SELARL ELLIPSE AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 27 février 2023 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

***

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [G] [R] né en 1957, a été engagé en qualité de dépanneur remorqueur automobile par la SARL Garage Agora, par contrat de travail à durée déterminée à compter du 3 août 2009. La relation contractuelle s’est ensuite poursuivie dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à compter du 4 novembre 2009.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du commerce et de la réparation de l’automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes, ainsi que du contrôle technique automobile.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de M. [R] s’élevait à la somme de 1.532 euros hors primes.

Par courriers des 20 février et 6 juin 2016, M. [R] a sollicité la société Garage Agora afin qu’elle lui remette les documents justifiant des modalités de calcul de sa rémunération variable, soutenant que cette dernière ne les lui communiquait plus depuis 2016.

M. [R] a fait valoir ses droits à la retraite le 1er février 2017.

Au 1er février 2017, M. [R] avait une ancienneté de 7 ans et 6 mois et la société occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Afin d’obtenir le paiement de diverses indemnités dont une pour travail dissimulé, une au titre des jours de congés de fractionnement, des dommages et intérêts pour privation de la contrepartie obligatoire en repos et pour perte de droit à la retraite, outre des rappels de salaire pour heures supplémentaires, des rappels de primes et un rappel de commissions à déterminer, M. [R] a saisi le 27 décembre 2017 le conseil de prud’hommes de Bordeaux.

M. [R] demandant avant dire droit la communication des factures correspondant aux interventions réalisées par lui de février 2014 à décembre 2016 sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du trentième jour calendaire suivant la notification de la décision, le conseil de prud’hommes de Bordeaux par jugement de départage du 6 mai 2019 l’a débouté de sa demande et a renvoyé l’examen de l’affaire à une audience ultérieure.

Statuant sur le fond par jugement de départage rendu le 11 décembre 2020, le conseil de prud’hommes de Bordeaux, a :

– condamné la société Garage Agora à payer à M. [R] les sommes suivantes :

* 25.127,32 euros brut au titre des heures supplémentaires effectuées de

janvier 2014 à décembre 2016, outre 2.515,73 euros brut au titre des congés payés afférents,

* 8.314,46 euros en indemnisation de la contrepartie obligatoire en repos,

* 689,50 euros en indemnisation des jours de congés de fractionnement,

* 900 euros net au titre de la prime incident,

– rejeté les demandes M. [R] au titre de l’indemnité de travail dissimulé, de la prime de bilan, des commissions sur chiffre d’affaires et de la perte de droits à la retraite,

– condamné la société Garage Agora aux dépens et à payer à M. [R] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que la moyenne des 3 derniers mois de salaire de M. [R] s’élève à 3.271,58 euros,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement.

Par déclaration du 12 janvier 2021, M. [R] a relevé appel de cette décision, notifiée le 14 décembre 2020.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 5 août 2021, M. [R] demande à la cour de :

– réformer le jugement rendu le 6 mai 2019 par le conseil de prud’hommes de Bordeaux en ce qu’il a débouté M. [R] de sa demande de communication de pièces,

– réformer le jugement rendu le 11 décembre 2020 par le conseil de prud’hommes de Bordeaux en ce qu’il a rejeté les demandes de M. [R] au titre de l’indemnité de travail dissimulé, de la prime de bilan, des commissions sur chiffre d’affaires et de la perte de droits à la retraite,

– confirmer le jugement rendu le 11 décembre 2020 pour le surplus et notamment en ce qu’il a condamné la société Garage Agora à verser à M. [R] les sommes suivantes:

* heures supplémentaires : 25.127,32 euros,

* congés payés sur heures supplémentaires : 2.515,73 euros,

* contrepartie obligatoire en repos : 8.314,46 euros,

* jours de congés de fractionnement : 689,50 euros,

* prime d’incident : 900 euros,

* indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile:1.500 euros,

Statuant à nouveau,

Avant dire droit,

– ordonner à la société Garage Agora de remettre à M. [R] l’intégralité des factures correspondant aux interventions réalisées par celui-ci de février 2014 à décembre 2016, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification à la société Garage Agora de l’arrêt à intervenir,

– se réserver la liquidation de ladite astreinte,

Au fond,

– a titre principal, surseoir à statuer sur les demandes de rappel de commissions sur chiffre d’affaires mensuel et d’indemnités de congés payés afférents,

– a titre subsidiaire, condamner la société Garage Agora à verser à M. [R] la somme de 3.287,50 euros à titre de rappel de commissions sur chiffre d’affaires mensuels, outre la somme de 328,75 euros à titre d’indemnité de congés payés afférents,

– en tout état de cause, condamner la société Garage Agora à verser à M. [R] les sommes suivantes :

* indemnité forfaitaire pour travail dissimulé : 18.950 euros,

* prime de bilan au titre de l’année 2016 : 1.551,26 euros,

* dommages et intérêts pour perte sur droits à la retraite : 7.200 euros,

* indemnité sur le fondement de l’article 700 1° du code de procédure civile : 2.500 euros,

– débouter la société Garage Agora de ses demandes,

– la condamner aux dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 5 juillet 2021, la société Garage Agora demande à la cour de :

S’agissant du jugement du 6 mai 2019 :

– confirmer le jugement rendu le 6 mai 2019,

– rejeter la demande de M. [R] visant à obtenir l’intégralité des factures correspondant aux interventions réalisées par celui-ci de février 2014 à décembre 2016, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification à la société Garage Agora de l’arrêt à intervenir,

– rejeter la demande de sursis à statuer formée par M. [R],

– le débouter de l’ensemble de ses demandes,

S’agissant du jugement du 11 décembre 2020 :

– réformer le jugement rendu le 11 décembre 2020 par le conseil de prud’hommes de Bordeaux uniquement en ce qu’il a condamné la société Garage Agora à payer à M. [R] les sommes suivantes :

* 25.127,32 euros bruts au titre des heures supplémentaires effectuées de janvier 2014 à décembre 2016, outre 2.515,73 euros brut au titre des congés payés afférents,

* 8.314,46 euros en indemnisation de la contrepartie obligatoire en repos,

* 689,50 euros en indemnisation des jours de congés de fractionnement,

* 900 euros net au titre de la prime incident,

* 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Pour le surplus,

– confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions, notamment en ce qu’il a rejeté les demandes de M. [R] au titre de l’indemnité de travail dissimulé, prime de bilan, commissions sur chiffre d’affaires et de la perte de droits à la retraite,

En tout état de cause,

– débouter M. [R] de l’intégralité de ses demandes,

– le condamner à la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 13 février 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 27 février 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les heures supplémentaires

Aux termes de l’article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Enfin, selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.

Se fondant sur les dispositions de son contrat, M. [R] produit à l’appui de la demande de paiement d’heures supplémentaires ses agendas 2014, 2015 et 2016 avec un décompte faisant apparaître un rappel de salaire de 9.852,85 euros pour l’année 2014, de 8.503,11 euros pour 2015 et de 6.801,36 euros pour 2016.

Il indique avoir contesté les décomptes générés automatiquement par l’appareil de géolocalisation Masternaut, mais également le décompte forfaitaire appliqué par l’employeur de 45mn de travail pour toute intervention en période d’astreinte, comme ne correspondant pas au travail réellement fait et produit des fiches mensuelles de travail qu’il a refusé de signer. Il soutient qu’il appartient à la société de produire les bons d’intervention remplis par les salariés mentionnant les heures d’appel de l’assistance, l’arrivée sur site, départ du site et arrivée au dépôt et départ du dépôt.

M. [R] produit ainsi des relevés hebdomadaires des heures de travail effectuées depuis 2014 qui constituent des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de fournir les horaires effectivement réalisés.

Pour s’opposer au paiement des heures supplémentaires, la société soutient que :

– M. [R] n’en a jamais demandé le paiement pendant le temps de la relation contractuelle,

– la seule production d’agenda sans autre élément ne saurait être suffisant pour étayer une demande d’heures supplémentaires, aucun élément ne permettant de déterminer avec certitude si ces agendas ont été remplis sur le moment ou a posteriori, la période du 29 décembre 2014 au 23 mai 2015 n’étant par ailleurs pas renseignée,

– il ne rapporte pas la preuve de ce que les horaires correspondraient à un travail commandé par l’employeur,

– il ne fait pas de distinction entre temps de travail et temps d’astreinte, en comptabilisant en heures supplémentaires des heures d’astreinte de nuit, autoroute week-end ou de samedi de renfort, qui étaient des astreintes à domicile, les interventions réalisées générant le paiement d’heure de travail effectif, voir supplémentaire,

– la société dispose d’un document de suivi du temps de travail, à partir du planning établi chaque mois et des fiches mensuelles de travail éditées en fin de mois et attachées aux bulletins de paie, lesquelles n’ont pas fait l’objet de contestation. En revanche, elle indique que le système de suivi via la géolocalisation Masternaut, n’était pas fiable et ne servait pas à comptabiliser le temps de travail.

En vertu de l’article L 3121-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent litige, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

Conformément à l’article L. 3121-9 du même code, une période d’astreinte s’entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, doit être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise. La durée de cette intervention est considérée comme du temps de travail effectif, comptabilisée en fonction de sa durée réelle et non forfaitairement comme l’a fait l’employeur.

Le paiement des heures supplémentaires s’impose même en l’absence de preuve d’un travail commandé : les heures supplémentaires sont dues en cas d’accord implicite de l’employeur et si ces heures ont été rendues nécessaires par les tâches confiées au salarié, ce qui est le cas en l’espèce, les interventions en période d’astreinte correspondant à des déplacements sur le lieu de la panne pour effectuer le remorquage des véhicules jusqu’au garage et retour au domicile.

L’absence de réclamation du salarié pendant la relation de travail ne rend pas irrecevable sa demande en paiement.

Au vu des agendas détaillés de M. [R], des tableaux récapitulatifs mensuels et annuels reprenant le nombre d’ interventions, le nombre d’heures travaillées, de la majoration appliquée, de l’absence de signature des fiches mensuelles par le salarié, ou alors après mention d’une contestation, sans que l’employeur, qui a la charge d’assurer le contrôle des heures effectivement travaillées par un système fiable ne produise d’élément permettant de rejeter ou même minorer le décompte du salarié, notamment par la production des bons d’intervention, c’est à bon droit que les premiers juges ont condamné la société à verser à M. [R] la somme de 25.157,32 euros au titre des heures supplémentaires effectuées au cours des années 2014 à 2016, outre la somme de 2.515,73 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés y afférent.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la contrepartie obligatoire en repos

En vertu de l’article L. 3121-11 du code du travail dans sa rédaction applicable à l’espèce , toute heure supplémentaire accomplie au delà du contingent annuel donne droit à une contrepartie obligatoire en repos, laquelle est fixée à 50% pour les entreprises de moins de 20 salariés et à 100% pour les entreprises de plus de 20 salariés, en vertu de l’article 18-IV de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 et le décret n° 2008-1132 du 4 novembre 2008 repris sous l’article D. 3121-14-1 du code du travail fixe le contingent annuel à 220 heures par an, lequel est applicable en l’absence de contingent conventionnel autre.

Ce même article précise que le salarié dont le contrat de travail prend fin avant qu’il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit reçoit une indemnité dont le montant correspond aux droits acquis.

Au vu du décompte établi par M. [R] pour chaque année, il convient de faire droit à ses demandes et de condamner la société à lui verser la somme de 8.314,46 euros au titre du dépassement de 328,21 heures en 2014, de 253,12 heures en 2015 et de 166,98 heures en 2016, correspondant à une indemnité de repos compensateur de 50%.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la demande au titre du travail dissimulé

Pour voir la société condamner à lui verser la somme de 18.950 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé, M. [R] soutient qu’elle a intentionnellement calculé les interventions d’astreinte sur une base forfaitaire de 45 mn et non sur la base de la durée réelle de l’intervention, qu’elle a rajouté en 2016 une indication dans la grille des primes et astreintes en ce que seules les heures effectuées de 20h30 à 7h30, les nuits et week-end de renfort et jour fériés seraient comptabilisées comme heures supplémentaires, refusant volontairement de rémunérer toutes les heures supplémentaires, l’intentionnalité se déduisant de la parfaite connaissance des heures effectuées qu’elle avait grâce au dispositif de géolocalisation Mastrnaut et des bons individuels d’intervention.

La société conteste l’élément matériel de l’infraction, soutenant que toutes les heures travaillées sont bien mentionnées sur les bulletins de paie.

En vertu des dispositions de l’article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement soit à l’accomplissement de la formalité relative à la déclaration préalable à l’embauche, soit à la délivrance d’un bulletin de paie ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie, soit aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L’intention de dissimuler requise par l’article L. 8221-5 du code du travail n’est pas suffisamment établie en sorte que M. [R] doit être débouté de sa demande en paiement au titre de l’indemnité forfaitaire prévue par l’article L. 8223-1.

Le jugement déféré sera confirmé.

Sur l’indemnité afférente aux jours de fractionnement

M. [R] sollicite le paiement de la somme de 238,56 euros correspondant à 16 jours pris en dehors de la période légale et ouvrant droit à deux jours ouvrables de congés supplémentaires de juin 2013 à mai 2014 , de 234,31 euros pour 18 jours pris en dehors de la période légale de juin 2014 à mai 2015 et de 216,63 euros pour 22 jours pris en dehors de la période légale de juin 2015 à mai 2016 en soutenant que les dates de congés étaient imposées par l’employeur. Il conteste avoir renoncé à ces jours de fractionnement.

La société s’y oppose soutenant que le salarié a renoncé à ces jours de fractionnement ayant sollicité la prise de congés payés en dehors de la période légale, sans contrainte, la direction lui ayant par ailleurs accordé un congé de 30 jours en février pour aller voir sa famille en Nouvelle Calédonie.

En application de l’article L. 3141-19 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l’espèce, en cas de fractionnement du congé principal en dehors des périodes du 1er mai au 31 octobre, le salarié est attributaire de deux jours de congés supplémentaires lorsque le nombre de jours pris en dehors de cette période est au moins égal à six ou un jour supplémentaire lorsque ce nombre est compris entre trois et cinq.

Le droit à congés supplémentaires naît du seul fait du fractionnement, que ce soit le salarié ou l’employeur qui en ait pris l’initiative, et la renonciation à ce droit ne se présume pas. En l’absence de pièce permettant de démontrer que M. [R] aurait renoncé à ses droits, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a condamné la société à verser à M. [R] la somme de 689,50 euros en indemnisation de six jours de congés de fractionnement bénéficiant au salarié.

Sur la prime bilan au titre de l’année 2016

M. [R] sollicite le versement de la prime bilan qu’il aurait dû percevoir au 1er trimestre 2017 calculée sur le bilan clos au 31 décembre 2016. Il dit avoir reçu une telle prime en mars 2016 pour l’activité 2015, son collègue toujours en poste en 2017 l’ayant perçu pour l’activité 2016.

La société soutient que la production d’un seul bulletin de démontre pas la généralité du versement de la prime. Elle soutient par ailleurs que le salarié a perçu en mars 2017 le versement de la prime de l’exercice clos en mars 2017.

Cette prime n’est pas mentionnée sur le contrat de travail.

Le versement d’un bulletin de paye d’un autre salarié, la société en comptant plus de dix, mentionnant une prime de bilan n’établit pas l’existence d’un usage présentant les caractères de généralité, de constance et de fixité. La demande de M. [R] n’est pas fondée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le paiement des primes d’incident illégalement retenues

M. [R] sollicite le paiement de la prime d’incident qu’il s’est vue retirer sans justification d’août à octobre 2014 et d’août 2016 à janvier 2017 pour un montant total de 900 euros, ce retrait constituant une sanction.

La société justifie cette prime par son caractère incitatif à la vigilance dans le maniement des outils de travail à disposition, la présentant non comme une sanction mais comme un objectif à atteindre, faisant le parallèle avec la prime d’assiduité ou de présence.

Il ressort des pièces versées et notamment la grille des primes annuellement fixée par l’employeur, le cahier des charges applicable dans l’entreprise et remis au salarié détaillant ‘la liste des sanctions impactant la prime d’incident’, le compte rendu de la réunion du 28 novembre 2014 selon lequel le refus de livraison sera sanctionné par la prime d’incident et l’attestation de M.[K] que le retrait de la prime de 100 euros prime, laissée à la discrétion de l’employeur en sanction du non respect du cahier des charges constitue une sanction financière prohibée par l’article L. 1331-2 du code du travail.

Il sera fait droit à la demande en paiement de M. [R] en rappel de cette prime pour les périodes considérées et le jugement déféré sera confirmé.

Sur le paiement des rappels de commissions sur chiffre d’affaires mensuel

M. [R] soutient que la communication par la société de l’état du chiffre d’affaires par intervenant n’est pas de nature à lui permettre de contrôler la rémunération versée car les chiffres d’affaires ressortant de ces documents sont différents de ceux mentionnés sur les bulletins de salaire comme assiette des commissions, les références des interventions ne correspondent pas aux numéros de mission donnée. Ne pouvant pas s’assurer que l’intégralité du chiffre d’affaires généré par son activité a bien été inclus dans l’assiette de calcul de sa rémunération variable, il sollicite que soit ordonné à la société de produire ces pièces détaillées et qu’il soit sursis à statuer dans l’attente de leur versement.

Subsidiairement, ayant décompté 249 interventions entre février 2014 et décembre 2016 n’apparaissant pas sur les relevés de facturations produits par la société, il sollicite le paiement de la somme de 3.287,50 euros correspondant aux 249 commissions qui lui auraient été dues entre 2014 et 2016 si l’intégralité des interventions qu’il a réalisées avait été pris en compte.

La société s’oppose à la production des documents demandés en ce qu’ils ne seraient pas pertinents, certaines interventions n’apparaissant pas sur le listing des factures en raison d’un décalage entre la date des interventions effectuées en fin de mois et la date de facturation effectuée en début de mois suivant. En tout état de cause, elle soutient que les commissions versées sont calculées sur le chiffre d’affaires ressortant des interventions facturées aux clients.

Les états de facturation produits par la société ne comportent pas les mêmes références que les bons d’intervention et numéros de dossier détenus par M. [R] en amont des interventions. Un décalage existe entre les dates d’interventions et les dates de facturation. La production de toutes les factures correspondant aux interventions réalisées par M. [R] de février 2014 à décembre 2016 ne serait donc pas une mesure utile et le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande principale de communication.

Au regard de la simulation versée en pièce 23 par le salarié, calculée sur la base du coût moyen d’un dépannage et d’un nombre d’interventions que la société ne conteste pas utilement, il sera fait droit à la demande subsidiaire en paiement de la somme de 3 287,50 euros majorée des congés payés afférents au titre du rappel de commissions sur chiffre d’affaires sur les années 2014 à 2016 outre 328,75 euros au titre des congés payés y afférents,

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur l’indemnisation de la perte sur droits à retraite

M. [R] sollicite l’indemnisation de la perte de pension sur ses droits à retraite, à partir de la réintégration des créance salariales constituées par les heures supplémentaires et les primes. Il soutient ainsi que le revenu de base pris en compte par la Caisse d’assurance retraite pour le calcul de la pension de retraite aurait dû être de 32.881 euros au lieu de 32.189,09 euros soit un différentiel de 28,85 euros par mois.

La société s’oppose à la production de pièces volumineuses et qui sont redondantes avec les états de synthèse du chiffre d’affaires qui ont été produits.

Comme l’a parfaitement indiqué le premier juge, le rappel de paiement des heures supplémentaires accordé étant soumis à cotisation retraite, il appartiendra à M. [R] de solliciter une révision de la pension auprès de la Caisse de retraite.

Sa demande sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La SARL Garage Agora partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel ainsi qu’au paiement à M. [R] de la somme complémentaire de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour

Confirme les jugements déférés du 6 mai 2019 et 11 décembre 2020 sauf en ce que le jugement du 11 décembre 2020 a débouté M. [R] de sa demande de paiement d’un rappel de commissions sur chiffre d’affaires entre 2014 et 2016,

Statuant à nouveau,

Condamne la SARL Garage Agora à payer à M. [R] les sommes de :

– 3.287,50 euros à titre de appel de commissions sur chiffre d’affaires mensuels de 2014 à 2016,

– 328,75 euros au titre des congés payés y afférents,

Condamne la SARL Garage Agora à payer à M. [R] la somme complémentaire de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d’appel

Condamne la SARL Garage Agora aux dépens.

Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard

 


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