Heures supplémentaires : 20 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/02230

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Heures supplémentaires : 20 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/02230
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 8

ARRET DU 20 AVRIL 2023

(n° , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/02230 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBTOS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Novembre 2019 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LONGJUMEAU – RG n° 17/00843

APPELANT

Monsieur [I] [W]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Cécile SERRANO, avocat au barreau d’ESSONNE

INTIMÉE

SOCIÉTÉ [F] CONSEILS GROUPE – B.E.T. [W]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Cédric GARNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D2149

MINISTERE PUBLIC

L’affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis le 21 décembre 2022 par le biais d’observations transmises aux parties le 03 janvier 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Nathalie FRENOY, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Nathalie FRENOY, présidente

Madame Nicolette GUILLAUME, présidente

Madame Emmanuelle DEMAZIERE, vice-présidente placée

Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– signé par Madame Nathalie FRENOY, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [I] [W], gérant de l’entreprise BET-[W], bureau d’études techniques spécialisé dans le secteur thermique, climatisation, ventilation, chauffage, a cédé à Monsieur [F] – dont il avait été le tuteur dans le cadre d’un contrat d’alternance – 70 % des parts de sa société, les parties s’accordant sur la nécessité pour le premier de continuer à travailler au sein de l’entreprise.

Monsieur [W] a donc été engagé par la société BET [W], aujourd’hui dénommée [F] Conseils Groupe – BET [W], par contrat à durée indéterminée à temps partiel à compter du 7 décembre 2012 en qualité de directeur commercial, coefficient 270 de la convention collective des bureaux d’études techniques, dite Syntec.

La cession des parts restantes (à hauteur de 30 %) a eu lieu en février 2016.

Par courrier du 11 octobre 2017, la société [F] Conseils Groupe – BET [W] l’a convoqué à un entretien préalable fixé au 19 octobre suivant et l’a mis à pied à titre conservatoire.

Par lettre du 23 octobre 2017, la société [F] Conseils Groupe – BET [W] lui a notifié son licenciement pour faute grave.

Contestant notamment la rupture de son contrat de travail, M. [W] a saisi le 21 décembre 2017 le conseil de prud’hommes de Longjumeau qui, par jugement du 28 novembre 2019, notifié aux parties par lettre du 20 février 2020, a :

-dit que le licenciement pour faute grave est fondé,

-débouté M. [W] de l’ensemble de ses demandes,

-débouté la sasu BET -[W] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamné M. [W] aux entiers dépens de l’instance.

Par déclaration du 10 mars 2020, M. [W] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 janvier 2023, M. [W] demande à la cour :

-d’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Longjumeau,

et statuant à nouveau :

-vu que la société [F] Conseils Groupe ‘ B.E.T [W] n’avait aucun motif pour le licencier,

-que Monsieur [I] [W] n’a commis aucune faute grave,

-que la société [F] Conseils Groupe ‘ B.E.T [W] n’a pas payé l’intégralité des heures supplémentaires de Monsieur [I] [W],

-que la société [F] Conseils Groupe ‘ B.E.T [W] a dissimulé une partie de la rémunération de Monsieur [I] [W],

-que le licenciement de Monsieur [I] [W] était prévu depuis la fin 2016,

-vu le caractère particulièrement humiliant du licenciement de Monsieur [W],

-de juger que le licenciement de Monsieur [W] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

-d’annuler l’avertissement du 31 août 2017,

en conséquence,

-d’allouer à Monsieur [I] [W] :

-49 789,48 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

-16 043,28 euros au titre de l’indemnité de licenciement conventionnelle,

-29 873,69 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

-2 987,37 euros au titre des congés payés afférents,

-3 223,63 euros au titre du rappel de mise à pied conservatoire,

-322,36 euros au titre des congés payés afférents,

-29 873,69 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

-59 747,38 euros au titre du harcèlement moral,

-2 488,12 euros au titre du rappel d’heures supplémentaires de décembre 2014,

-248,81 euros au titre des congés payés afférents,

-25 047,09 euros au titre du rappel d’heures supplémentaires 2015,

-2 504,71 euros au titre des congés payés afférents,

-8 841,12 euros au titre du rappel d’heures supplémentaires 2016,

-884,11 euros au titre des congés payés afférents,

-59 747,38 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

-1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-d’ordonner la remise de l’attestation Pôle Emploi et d’un bulletin de paie conformes aux demandes,

-de dire que les condamnations seront soumises à l’intérêt légal,

-de condamner la société [F] Conseils Groupe ‘ B.E.T [W] aux entiers dépens,

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 janvier 2023, la société [F] Conseils Groupe – BET [W] demande à la cour :

-de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Longjumeau le 28 novembre 2019 en toutes ses dispositions,

en conséquence :

-de dire et juger que le licenciement dont a fait l’objet Monsieur [W] le 23 octobre 2017 repose sur une faute grave,

-de débouter Monsieur [W] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

et statuant à nouveau :

-de condamner Monsieur [W] à verser à la société [F] Conseils Groupe – B.E.T [W] une somme d’un montant de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-de condamner Monsieur [W] aux entiers dépens.

Par observations du 21 décembre 2022, le ministère public a considéré que le manquement de M. [W] à son obligation de subordination justifiait le licenciement pour faute grave et que le harcèlement moral ne pouvait être retenu en l’espèce.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 10 janvier 2023 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 14 mars 2023.

Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, ainsi qu’aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur l’avertissement :

L’avertissement qui a été notifié par courrier du 31 août 2017 à Monsieur [W] contient les motifs suivants :

‘Je suis au regret de constater que malgré la note de service qui a été portée à votre connaissance le 15 juin dernier et les rappels à l’ordre qui vous ont été faits par la suite, et en dernier lieu les 23 juin, 19 juillet et 25 août 2017, vous persistez à refuser de renseigner les feuilles de temps hebdomadaires qui vous ont été transmises par la direction.

Je vous avoue être désemparé face à cette situation je ne sais plus comment parvenir à obtenir votre coopération.

Vous n’avez pourtant pas manqué de me faire comprendre récemment que vous souhaitiez être traité désormais comme un salarié comme les autres, et non plus comme salarié à part bénéficiant d’un certain nombre d’avantages, du fait de votre qualité de créateur, de propriétaire et d’ancien gérant de la société.

Je vous ai alors clairement rappelé qu’il vous appartenait, à l’image de l’ensemble des salariés de l’entreprise, d’observer les règles en vigueur au sein de la société, et notamment celles relatives au suivi de l’activité et du temps de travail.

Ces mesures sont parfaitement légitimes puisqu’elles ont vocation à me permettre de décompter la durée quotidienne de travail réalisé par chacun et de disposer des informations nécessaires pour assurer une facturation cohérente des dossiers traités.

De la même manière, je vous ai demandé le 30 mai 2017 de bien vouloir rédiger chaque semaine un bref compte rendu me présentant l’état d’avancée des dossiers en cours et vos perspectives d’action à court terme, afin de me permettre de bénéficier de plus de visibilité sur votre activité.

Lors de nos échanges en date du 25 août dernier, j’ai pu constater que vous persistiez à ne pas fournir ce compte rendu et que vous ne sembliez pas en mesure d’établir une liste exhaustive des chantiers sur lesquels vous travailliez.

Vos refus réitérés d’observer les directives qui vous sont données ne sont pas acceptables.

Ce faisant, vous m’empêchez d’avoir la visibilité nécessaire sur votre travail et vous portez atteinte à mon autorité auprès de vos collègues qui sont soumis aux mêmes règles et qui, eux, les respectent.

De tels actes d’insubordination de votre part ne peuvent être tolérés plus longtemps et je ne comprends pas le but que vous poursuivez en vous opposant de manière ostentatoire à mon autorité.

Aussi, au regard de l’ensemble de ces éléments, je n’ai d’autre solution que de vous adresser par la présente un avertissement […]’

M. [W] soutient que cet avertissement est injustifié, dans la mesure où il a réalisé l’ensemble de ses tâches et où certaines directives de l’employeur lui étaient exclusivement destinées. Il en sollicite l’annulation.

Au soutien du bien-fondé de la sanction disciplinaire critiquée, la société [F] Conseils Groupe – BET [W] invoque son courrier au conseil de Monsieur [W] en date du 30 mai 2017 rappelant que ce dernier ‘a toujours pu organiser son planning à sa convenance et déterminer, de son propre chef, les deux demi-journées par semaine au cours desquelles il ne travaillait pas’, jouissant ‘d’un statut à part au sein de la société’ et rappelant qu’à la demande de renseignement d’une feuille d’heures avec un décompte précis, l’intéressé a ‘alors clairement indiqué qu’il ne souhaitait pas être considéré comme salarié ordinaire, ni être astreint à remplir des feuilles de temps pour justifier des heures effectivement accomplies’, suggérant que lui soit rappelée son obligation de se conformer ‘à l’image de l’ensemble des salariés de l’entreprise, aux obligations suivantes :

– renseigner dans l’agenda Outlook commun ses rendez-vous clients ;

– communiquer le planning prévisionnel de chaque semaine travaillée au plus tard chaque vendredi pour la semaine suivante ;

– rédiger un compte rendu hebdomadaire d’activité ;

– respecter le jeudi comme jour non travaillé ;

– solliciter une autorisation préalable de la direction avant d’effectuer toute heure complémentaire ;

– justifier tous les frais professionnels engagés ( identification de la personne invitée et du dossier concerné).’

La société [F] Conseils Groupe – BET [W] verse également aux débats l’e-mail de Monsieur [F] en date du 23 juin 2017 indiquant à Monsieur [W] ‘vous avez à nouveau attiré mon attention sur les heures supplémentaires que vous auriez prétendument réalisées de l’année 2013 au mois de février 2016, avant de poursuivre en indiquant que vous seriez prêt à revoir à la baisse le montant de vos prétentions et ne solliciter que 20’000 € à ce titre. Ainsi que je vous l’ai indiqué au cours de notre entretien et par courrier adressé le 30 mai 2017 à votre avocat, je suis extrêmement surpris par une revendication d’une telle nature dans la mesure où vous n’avez jamais effectué les heures complémentaires et supplémentaires que vous prétendez avoir accomplies.[…] vos soudaines revendications salariales, notamment en matière d’heures supplémentaires, me laissent à penser que vous souhaitez surtout, en demandant à être traité comme un salarié comme les autres, réaliser une belle opération financière. Dès lors je vous remercie de bien vouloir prendre note qu’à compter de ce jour, vous devrez vous conformer, à l’image de l’ensemble des salariés de l’entreprise aux obligations suivantes […]’, à savoir celles déjà énumérées dans le courrier adressé à l’avocat.

Il est établi que la note de service n°1 en date du 7 juin 2017, mettant en place une feuille de temps informatisée à renseigner par les salariés, a été adressée par courriel du 15 juin 2017 à Monsieur [W] ainsi qu’aux autres membres du personnel, lesquels ont renseigné lesdits documents, et que par courrier du 7 août 2017 la société [F] Conseil Groupe – BET [W] a réitéré sa demande de respect des consignes. Il est justifié par l’employeur d’ un e-mail en date du 19 juillet 2017 dans lequel Monsieur [W] considère comme ‘concrètement impossible de décomposer son emploi du temps journalier sauf à passer des heures improductives pour le remplir’ ainsi que d’une feuille de temps hebdomadaire au nom de l’appelant, laissée non renseignée au 25 août 2017.

Si Monsieur [W] produit un échange de courriels avec son employeur le 25 août 2017 au sujet de l’état de la facturation des dossiers en cours et la liste renseignée des chantiers le 28 août à 9h59, il ne justifie nullement avoir satisfait à la remise hebdomadaire de ce document, ni aux autres obligations imposées par son employeur et destinées à le renseigner notamment sur la durée du travail accompli.

La démonstration de la réalité des faits à l’origine de la sanction disciplinaire est donc faite, sans que la proximité géographique des bureaux – même si elle peut faciliter la communication- ne puisse réduire leur caractère fautif, pas plus que le nombre de dossiers rapportés à l’entreprise par le salarié.

La sanction, proportionnée à la faute commise, ne saurait donc être annulée.

Le jugement de première instance doit donc être confirmé de ce chef.

Sur le harcèlement moral :

Alors que, selon lui, l’employeur souhaitait se débarrasser de la famille [W] dans la mesure où Madame [T], sa s’ur, a été licenciée pour motif économique le 3 octobre 2017 et où [D] [W], son fils, a démissionné le 30 novembre suivant, l’appelant – à qui une rupture conventionnelle a été proposée en 2017- affirme avoir subi des agissements caractéristiques d’un harcèlement moral, ayant vu ses mails détournés, se trouvant confronté aux nouvelles exigences de l’employeur, qui n’a pas hésité à engager une procédure de licenciement, laquelle procède également du harcèlement moral subi.

Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En vertu de l’article L. 1154-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En ce qui concerne le déroutement de sa boîte mail, Monsieur [W] produit aux débats un courriel du 6 septembre 2017 demandant à son employeur des explications au sujet de ses mails passant par lui, et le courriel de son employeur du 7 septembre 2017 demandant la création de deux boîtes e-mail au support technique.

Affirmant avoir été le seul au sein de l’entreprise à devoir réaliser un compte rendu détaillé de son activité, puis à renseigner les heures hebdomadaires effectuées sur une feuille de temps alors que cela lui était matériellement impossible, le salarié verse aux débats son courrier du 2 septembre 2017 faisant état de cette incapacité et sollicitant ‘compte tenu que ces tâches’ (celles d’ingénieur d’études) ‘ne relèvent pas de ma fonction, je vous demande de faire reprendre l’ensemble de ces affaires par une tierce personne sous quinzaine, étant entendu que je continuerai en attendant à suivre les dossiers en cours, et/ou si le client souhaite que je continue à suivre son dossier, en espérant que vous aurez compris le sens de ma démarche’.

Il produit aussi les tableaux de feuilles de temps renseignés par trois autres salariés, le plan des locaux de l’entreprise montrant la proximité géographique des bureaux, ainsi qu’une capture d’écran des fichiers clients sur lesquels étaient répertoriés tous les devis faits par lui.

Monsieur [W] produit en outre le courrier du 27 septembre 2017 de son employeur lui reprochant un manque d’information sur les devis, sur les feuilles de temps ainsi que sur les commandes passées par les clients, réfutant tout harcèlement moral et considérant ‘normal’ d’obtenir de sa part un compte rendu plus détaillé de son activité au regard des fonctions particulières qu’il est le seul à exercer dans l’entreprise, son propre courriel du 29 septembre 2017 critiquant les ‘pratiques scandaleuses’de son employeur (détournement de boîte mail sans en être averti, messagerie du portable professionnel se déclenchant au bout de 14 sonneries) et sollicitant qu’il arrête ‘d’introduire dans ses écrits des propos polémiques et infondés’ .

Il produit la copie de sa convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement en date du 11 octobre 2017 lui notifiant sa mise à pied conservatoire et fait état également de deux courriels du 12 octobre 2017 de son employeur lui demandant de lui laisser les codes d’accès à son téléphone ainsi qu’à sa tablette dans le cadre de la mise à pied conservatoire, outre les clés du bureau.

Le salarié produit le courriel du président d’une société cliente s’étonnant des reproches faits par l’employeur et l’attestation du gérant d’une société de génie climatique (pièce n° 34) indiquant ‘vous ne m’avez jamais dénigré le BET [W] dans lequel vous vous trouviez en position de salarié depuis la cession de vos parts’, ainsi que le courriel d’un avocat n’ayant pas été informé, lors d’une conversation téléphonique à son initiative, de l’identité de la personne répondant au numéro correspondant initialement à Monsieur [W].

Indiquant que Monsieur [F] a bloqué son dossier par son abstention, le salarié produit enfin le courrier de Pôle Emploi sollicitant des justificatifs au sujet de l’entreprise, son dossier médical ainsi qu’un arrêt de travail pour symptôme anxio-dépressif réactionnel à compter du 12 octobre 2017.

Monsieur [W] présente des éléments relatifs au déroutement de sa boîte mail, à un contexte délicat pour la famille [W] juste avant le licenciement de l’appelant, diverses pressions pour justifier du temps consacré à son activité et à l’avancement des chantiers, des reproches au sujet de comportements déloyaux et du dénigrement de l’entreprise, une obstruction à son inscription à Pôle Emploi, éléments laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral à son encontre.

Expliquant les départs successifs des membres de la famille [W], la société [F] Conseils Groupe – BET [W] considère que l’appelant n’apporte pas la preuve d’éléments faisant présumer l’existence de faits de harcèlement moral, ayant fait un usage légitime de son pouvoir de direction, de contrôle et de sanction à l’encontre d’un salarié souhaitant tirer avantage de son statut privilégié et ayant commis des actes d’insubordination et de déloyauté.

La société intimée verse aux débats un échange de courriers relatifs à la démission de Monsieur [D] [W] en décembre 2017, à sa dispense de préavis et au licenciement pour motif économique de Mme [T] et souligne l’absence de tout contentieux à ces sujets. Elle se réfère également à une note adressée par l’employeur à Monsieur [D] [W], se félicitant de leur collaboration et lui souhaitant son anniversaire.

Elle produit le contrat de travail à temps partiel de Monsieur [I] [W] ainsi que ses bulletins de salaire, outre différents textes conventionnels montrant qu’il a bénéficié d’une classification parmi les plus hautes, d’une rémunération très supérieure aux minima conventionnels, à savoir 170’241 € pour l’année 2016 , outre les charges dédiées et frais de véhicule, de restaurant, de téléphone pris en charge en sus par la société, et très supérieure à celle d’autres salariés (même celle de Monsieur [F]), comme en attestent des éléments issus de la comptabilité émanant de l’expert-comptable de l’entreprise, faisant de la rémunération et des charges au nom de Monsieur [W] la plus grosse part de la masse salariale, à savoir 40 %.

Relativement au prétendu détournement de courriels, la société [F] Conseils Groupe – BET [W] en a donné l’explication au salarié, ayant été contrainte de reprendre la main sur la boîte mail générale de l’entreprise à la suite de plaintes de clients et justifie avoir mis en place une nouvelle messagerie commune avec Monsieur [W], à qui les mots de passe ont été transmis (pièce n° 19 du salarié).

En ce qui concerne les exigences de l’employeur en termes de reporting, force est de constater que les pièces produites par l’employeur en soutien du bien-fondé de l’avertissement montrent, après un traitement de faveur initial et à sa demande -en sa qualité d’ex-gérant de l’entreprise- , un traitement égalitaire du salarié , ainsi que le bien-fondé des demandes formulées relativement au temps de travail accompli, aux devis remis, à l’avancement des chantiers, le pouvoir de direction de l’entreprise allant de pair avec la transparence des activités du personnel et notamment celles du directeur commercial, seul dans ces fonctions qui plus est.

En ce qui concerne le défaut de justificatifs bloquant le dossier d’allocation d’aide au retour à l’emploi de Monsieur [W], la société [F] Conseils Groupe – BET [W] verse aux débats sa réponse du 28 novembre 2017 à 21h37 contenant diverses pièces jointes, répliquant ainsi au message du salarié sollicitant à 15 heures 09 lesdits justificatifs sous forme numérique, ainsi qu’un nouvel échange du même ordre à 8h28 le 7 décembre 2017 de la part du salarié, avec une réponse à 19h21 le lendemain de la part de l’employeur indiquant transmettre directement au Pôle Emploi les documents sollicités.

Enfin, quant à la mise en demeure de cesser les agissements déloyaux commis par l’ancien salarié, adressée après le licenciement le 9 novembre 2017, elle apparaît justifiée par l’intérêt de l’entreprise, au vu d’une part des courriels produits ( pièce 23 de la société) dans lesquels Monsieur [W] critique son licenciement et celui de sa s’ur, affirmant – à l’attention de plusieurs destinataires extérieurs à l’entreprise- mettre ‘dorénavant à partir de ce jour (son) énergie à défendre son honneur. Ayant déjà reçu de nombreux messages de soutien, je me permettrai de revenir vers vous prochainement’, au vu d’autre part des différents justificatifs versés montrant la création par Monsieur [W] d’une société BET LX à compter du 5 mars 2018 et d’un courriel contenant un devis adressé par ‘[Y] [T] pour [I].[W]’ au nom de ladite société ayant pour activité l’ingénierie et les études techniques.

Par conséquent, la société [F] Conseils Groupe – BET [W] démontre que ses décisions, mises en exergue par le salarié pour les critiquer, étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.

La demande présentée à ce titre doit donc être rejetée.

Sur le licenciement :

La lettre de licenciement adressée à Monsieur [W] contient les motifs suivants :

‘Pour mémoire, vous avez embauché en qualité de Directeur commercial, statut Cadre, en vertu d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel (32 heures hebdomadaires), à compter du 7 décembre 2012, suite au rachat des parts sociales de la société BET [W] dont vous étiez jusqu’alors le fondateur et le gérant.

Il apparaît que vous n’avez pas voulu comprendre que votre changement de statut impliquait un changement de comportement.

Vous n’avez jamais accepté la mise en place d’une relation de subordination et avez cru, au contraire, pouvoir vous affranchir du respect des normes et directives données par la nouvelle direction de l’entreprise dans le cadre de l’exécution de vos missions.

Votre opposition s’est faite petit à petit de manière plus frontale.

Il y a lieu de relever d’une part que, malgré la note de service qui a été portée à votre connaissance le 15 juin dernier et les rappels à l’ordre qui vous ont été faits par la suite, et notamment les 23 juin, 19 juillet , 25 août 2017, 12 septembre et 27 septembre 2017, vous persistez à refuser de renseigner les feuilles de temps hebdomadaires qui vous ont été transmises par la direction.

Pour tenter de justifier le refus de vous soumettre à ces directives, vous m’avez indiqué qu’il ne vous était pas possible, contrairement à vos collègues de travail techniciens ou dessinateurs, de faire état du temps réellement passé sur vos dossiers, au motif que vous traitiez une trentaine d’affaires et que vous seriez contraint de passer de l’une à l’autre

« en permanence ».

Un tel argument n’est évidemment pas recevable dans la mesure où il s’agit là d’une tâche qui peut être fastidieuse mais qui est tout à fait réalisable, même pour un salarié devant gérer un certain nombre de dossiers.

Bien plus, outre qu’elles permettent le décompte de la durée quotidienne du travail que vous effectuez, les données sollicitées sont indispensables à la société afin d’avoir une visibilité complète sur le temps passé par chaque salarié sur les dossiers en cours, vérifier la rentabilité de ceux-ci et l’adéquation entre les forfaits négociés et la réalité du travail fourni.

Malgré l’avertissement qui vous a été notifié le 31 août 2017 pour vous rappeler à vos obligations, vous avez persisté dans une attitude d’opposition hostile et avez passé outre les consignes qui vous étaient données à cet égard.

D’autre part, il vous a été demandé, depuis le 30 mai 2017 de bien vouloir rédiger chaque semaine un bref compte rendu me permettant de connaître l’état d’avancée des dossiers en cours et vos perspectives d’actions à court terme, afin de me permettre de bénéficier de la visibilité nécessaire sur votre activité.

Force est d’observer qu’à ce jour, vous n’avez jamais pris la peine de vous conformer à cette sollicitation légitime, malgré plusieurs relances de ma part, notamment aux termes du courrier du 7 août 2017.

À l’occasion de nos échanges des 25 et 28 août 2017, j’ai par ailleurs pu constater que vous ne sembliez pas en mesure ou que vous ne souhaitiez pas être en mesure, de manière extrêmement surprenante, d’établir une liste exhaustive des chantiers sur lesquels vous travailliez.

Par la suite, la mauvaise volonté manifeste avec laquelle vous avez accepté de réaliser un inventaire des dossiers en cours a, de plus fort, mis en lumière la déloyauté et le manque de transparence dont vous faites désormais preuve dans la réalisation de vos fonctions.

À maintes reprises, multipliant les courriers recommandés pour entretenir artificiellement une polémique qui n’avait pas lieu d’être, vous n’avez pas hésité à employer un ton condescendant à mon égard pour tourner en dérision les demandes qui vous étaient faites, allant même jusqu’à afficher votre opposition auprès de vos collègues de travail, aux termes d’un mail adressé à l’ensemble des salariés de l’entreprise le 19 juillet 2017.

Ce faisant, vous avez porté atteinte à mon autorité auprès de vos collègues qui sont tenus aux mêmes règles et qui, eux, les respectent.

Vos actes d’insubordination qui perdurent malgré mes mises en garde et qui s’aggravent ne peuvent être tolérés plus longtemps[…]

Vos agissements, qui sont d’autant plus inacceptables au regard de votre statut de Cadre et de votre ancienneté, ont perturbé le bon fonctionnement de l’entreprise.

Ils ont également participé à la démotivation des autres salariés de l’entreprise et à la détérioration de l’atmosphère du travail.

Il m’apparaît, au regard de la gravité de vos manquements, que votre attitude rend impossible votre maintien, même temporaire, dans l’entreprise.’

La faute grave, qui seule peut justifier une mise à pied conservatoire, résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise; il appartient à l’employeur d’en rapporter la preuve.

En l’espèce, la société [F] Conseils Groupe – BET [W] verse aux débats la note de sevice n°1 adressée le 15 juin 2017 ainsi que différents courriels et courriers échangés avec le salarié relativement à la consigne donnée à tous de renseigner des feuilles de temps hebdomadaires, d’indiquer le temps passé effectivement sur chaque dossier, ainsi que l’état d’avancement de chacun d’eux.

Il est démontré en outre, que malgré plusieurs relances dont il est justifié le 23 juin, le 7 et le 25 août et le 27 septembre 2017, les consignes données par l’employeur n’ont pas été respectées ou seulement ponctuellement, Monsieur [W] se montrant non exhaustif sur les dossiers en cours -lui-même ayant, dans son courriel du 2 septembre 2017 (pièce 37 de la société), adressé une ‘liste non exhaustive des affaires que je traite actuellement’ à son employeur.

Il est justifié par ailleurs de plusieurs courriers et courriels du salarié critiquant les demandes de l’employeur – dont un en date du 19 juillet 2017 adressé à tout le personnel de l’entreprise-, répondant point par point pour ‘rectifier certains propos déformés ou mal interprétés’ (courrier recommandé avec accusé de réception du 30 juin 2017 contenant huit pages dactylographiées ), contestant la teneur de l’avertissement notifié par courrier du 31 août 2017, s’interrogeant sur la légalité de la modification d’une messagerie professionnelle, contestant la teneur d’un courrier de l’entreprise en date du 31 août 2017 ou sollicitant (cf le courrier du 2 septembre 2017) ‘ de faire reprendre l’ensemble de ces affaires par une tierce personne sous quinzaine, étant entendu que je continuerai en attendant à suivre les dossiers en cours, et/ou si le client souhaite que je continue à suivre son dossier […] Ainsi et comme prévu par mon contrat de travail, je pourrai occuper pleinement mon poste de Directeur Commercial’, enfin réitérant sa demande d’annulation de l’avertissement (cf la lettre recommandée avec accusé de réception du 29 septembre 2017).

La société intimée justifie donc d’actes d’insubordination répétés de la part du salarié, ainsi que de la contestation de l’autorité de l’employeur et de son pouvoir de direction, d’un manque de transparence certain quant à la liste complète des dossiers en cours et à leur état d’avancement, faits réitérés après l’avertissement du 31 août 2017, ainsi que des contestations élevées par le salarié à l’occasion de nombreux courriers et courriels chronophages pour l’employeur et perturbateurs de l’ambiance de travail notamment.

Si ces faits, compte tenu de leur réitération, de la persistance comportementale de leur auteur et de l’état d’esprit ainsi manifesté incompatible avec la subordination requise, sont de nature à justifier la rupture de la relation de travail, ils ne légitiment pas un licenciement pour faute grave, la preuve de l’impossible maintien du salarié au sein de l’entreprise n’étant pas rapportée.

Il convient donc, par infirmation du jugement entrepris, de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et d’accueillir la demande présentée par le salarié au titre des indemnités de rupture, à hauteur des montants sollicités, non strictement contestés.

Sur le caractère vexatoire du licenciement :

Invoquant le caractère humiliant de son licenciement intervenu alos que la volonté de l’employeur était de l’écarter, ainsi que sa famille, de l’entreprise, Monsieur [W] sollicite la somme de 29 873,69 € à titre de dommages-intérêts.

La société [F] Conseils Groupe – BET [W] conclut au rejet de la demande.

Toute demande d’indemnisation suppose, pour être accueillie, la démonstration d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre eux.

Alors que son insubordination était persistante, le choix d’une mesure de mise à pied conservatoire ne saurait être considéré comme vexatoire, le statut de salarié permettant cette mesure qui n’est pas démontrée, en l’espèce, pas plus que la notification d’un avertissement et les courriers de l’employeur, comme ayant été entourée de circonstances vexatoires ni humiliantes pour Monsieur [W].

Il convient donc de rejeter la demande de réparation à ce titre.

Sur les heures supplémentaires:

M. [W] estime avoir réalisé de nombreuses heures supplémentaires, affirmant avoir en réalité toujours travaillé -malgré le temps partiel contractualisé – 5 jours par semaine et à hauteur de 40 heures hebdomadaires, son employeur ne pouvant ignorer l’accomplissement de ces heures qu’il lui a implicitement demandé de réaliser. Il réclame les sommes de

2 488,12 euros au titre du rappel d’heures supplémentaires de décembre 2014, de 248,81 euros au titre des congés payés afférents, de 25 047,09 euros au titre du rappel d’heures supplémentaires en 2015, de 2 504,71 euros au titre des congés payés afférents, de 8 841,12 euros au titre du rappel d’heures supplémentaires en 2016 et de 884,11 euros au titre des congés payés afférents.

Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Monsieur [W] verse aux débats plusieurs tableaux de calcul d’heures supplémentaires en 2014, 2015 et 2016, ses bulletins de salaire correspondant auxdites périodes, divers courriels envoyés par lui tardivement dans la soirée, ou un vendredi ( jour non travaillé) ou un dimanche, par exemple.

Sont produits aussi ses écrits réclamant paiement d’une prime (cf son courriel du 28 décembre 2016 et la réponse de l’employeur disant attendre ‘le bilan comptable pour calculer’).

Monsieur [W] présente ainsi, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis sur la durée de travail qu’il dit avoir accomplie pour permettre à l’employeur d’y répondre.

La société [F] Conseils Groupe – BET [W] affirme que les premières réclamations à ce sujet sont intervenues à l’occasion des négociations relatives au rachat du reliquat des parts sociales, en février 2016, le salarié étant désireux de compenser la ‘perte financière’ résultant de la suppression de son droit à dividendes, que l’intéressé n’apporte aucun élément objectif de nature à étayer sa demande, à défaut de décompte précis et vérifiable. Elle ajoute que les heures qui ont pu être effectuées exceptionnellement, en soirée ou le week-end, ont fait l’objet de récupérations, que Monsieur [W] qui disposait de la plus grande autonomie dans l’organisation de son travail et utilisait sa messagerie professionnelle pendant son temps de travail pour des envois de messages sexistes ou racistes sans aucun lien avec ses activités, agissait de son propre chef, n’ayant jamais été contraint d’accomplir des heures supplémentaires.

La société intimée verse aux débats la promesse de cession de parts sociales en date du 24 octobre 2012, ses statuts mis à jour en décembre 2012, la demande de rachat de parts sociales en date du 13 janvier 2016, son courriel en date du 24 mars 2016 sollicitant du salarié qu’il fixe ses jours et heures de travail et ne lui accordant pas son accord pour l’accomplissement d’heures supplémentaires, ainsi que sa réponse – à la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires- consistant à rappeler la liberté d’action de l’intéressé mais aussi la nécessité dorénavant de renseigner son temps de travail hebdomadaire de façon précise et régulière.

Elle fait état également de la demande faite à Monsieur [W] à plusieurs reprises de se conformer à la consigne contenue dans la note de service diffusée le 15 juin 2017 à ce sujet, outre divers courriels adressés par l’appelant à des horaires normalement ouvrés, sur des sujets divers sans aucun lien avec ses fonctions de directeur commercial de l’entreprise.

La société intimée n’apporte toutefois aucun élément précis quant à la durée exacte du temps de travail accompli par Monsieur [W].

Par conséquent, il convient de constater l’existence d’heures complémentaires et supplémentaires non rémunérées.

En tenant compte cependant d’une part, de la période postérieure au 15 juin 2017 au cours de laquelle le salarié a refusé de renseigner des feuilles de temps qui aurait permis le contrôle du temps de travail réellement accompli et plus de transparence à ce sujet, d’autre part des heures complémentaires et supplémentaires d’ores et déjà payées, telles qu’elles figurent sur les bulletins de salaire, mais aussi de l’autonomie de Monsieur [W] dans la gestion de son emploi du temps et des envois nombreux par lui de messages sans lien avec son activité pendant les heures ouvrées, il y a lieu de fixer à 1 603,95 € le rappel de salaire lui revenant à ce titre.

Sur le travail dissimulé :

Selon l’article L8221-5 du code du travail ‘ est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.’

L’article L8223-1 du code du travail dispose qu’ ‘en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.’

Il appartient au salarié d’apporter la preuve d’une omission intentionnelle de l’employeur, laquelle ne saurait résulter de la seule mention sur les bulletins de salaire d’un nombre insuffisant d’heures de travail effectif.

Se bornant à évoquer l’omission intentionnelle de son employeur de mentionner les heures supplémentaires, sans la démontrer par des éléments objectifs, et ce alors que des demandes réitérées de renseignement du temps de travail ont été formulées, Monsieur [W] doit voir sa demande d’indemnité rejetée.

Sur les intérêts:

Conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du Code civil et R1452-5 du code du travail, les intérêts au taux légal courent sur les créances de sommes d’argent dont le principe et le montant résultent du contrat ou de la loi (rappels de salaire, indemnités compensatrices de préavis et de congés payés sur préavis, indemnité de licenciement) à compter de l’accusé de réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation et sur les autres sommes à compter du présent arrêt.

Sur la remise de documents:

La remise d’une attestation Pôle Emploi et d’un bulletin de salaire rectificatif conformes à la teneur du présent arrêt s’impose.

Sur les dépens et les frais irrépétibles:

L’employeur, qui succombe, doit être tenu aux dépens de première instance, par infirmation du jugement entrepris, et d’appel.

L’équité commande de faire application de l’article 700 du code de procédure civile et d’allouer à ce titre la somme de 1 500 € à Monsieur [W].

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe à une date dont les parties ont été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

INFIRME le jugement déféré, sauf en ses dispositions rejetant les demandes d’annulation de l’avertissement, de dommages-intérêts pour rupture abusive, licenciement vexatoire, harcèlement moral, travail dissimulé, et la demande reconventionnelle au titre des frais irrépétibles,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT le licenciement de Monsieur [I] [W] fondé sur une cause réelle et sérieuse mais non sur une faute grave,

CONDAMNE la société [F] Conseils Groupe – BET [W] à payer à [I] [W] les sommes de :

– 3 223,63 € de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire,

– 322,36 € au titre des congés payés y afférents,

– 1 603,95 € à titre de rappel d’heures complémentaires/supplémentaires,

– 160,39 € au titre des congés payés y afférents,

– 29 873,69 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 2 987,36 € au titre des congés payés y afférents,

– 16 043,28 € à titre d’indemnité de licenciement,

– 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

DIT que les intérêts au taux légal sont dus à compter de l’accusé de réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation pour les créances de sommes d’argent dont le principe et le montant résultent du contrat ou de la loi et à compter du présent arrêt pour le surplus,

ORDONNE la remise par la société [F] Conseils Groupe – BET [W] à Monsieur [W] d’une attestation Pôle Emploi et d’un bulletin de salaire récapitulatif conformes à la teneur du présent arrêt, au plus tard dans le mois suivant son prononcé,

REJETTE les autres demandes des parties,

CONDAMNE la société [F] Conseils Groupe – BET [W] aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

 


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