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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
17e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 19 AVRIL 2023
N° RG 21/01103
N° Portalis DBV3-V-B7F-UOA6
AFFAIRE :
[O] [T]
C/
Société POLYCOM FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 9 avril 2021 par le Conseil de Prud’hommes Formation paritaire de NANTERRE
Section : E
N° RG : F 18/02375
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Natacha MIGNOT
Me Martine DUPUIS
Copie numérique adressée à :
Pôle Emploi
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX-NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, dont la mise à disposition a été fixée au 5 avril 2023, puis prorogée au 19 avril 2023, dans l’affaire entre :
Madame [O] [T]
née le 24 mai 1984 à [Localité 5]
de nationalité française
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Natacha MIGNOT, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1645
APPELANTE
****************
Société POLYCOM FRANCE
N° SIRET : 423 714 070
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Sabine SMITH VIDAL du PARTNERSHIPS MORGAN LEWIS & BOCKIUS UK LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J011 et Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 26 janvier 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Aurélie PRACHE, Président,
Monsieur Laurent BABY, Conseiller,
Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Mme [T] a été engagée en qualité de ‘Major Account Manager’ France, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 15 mars 2010, par la société Polycom France.
Cette société, filiale de la société néelandaise Polycom B.V., a pour activité principale la commercialisation des produits audio et video professionnels. L’effectif de la société était, au jour de la rupture, de plus de 10 salariés. Elle applique la convention collective nationale dite Syntec.
La salariée a été élue membre suppléant de la délégation unique du personnel ( DUP) le 11 juin 2015.
La salariée a été en arrêt maladie à compter du 15 mai 2017 puis en congé maternité de septembre à décembre 2017, puis en congé parental à compter du 1er janvier 2018. Elle a repris son activité professionnelle le 2 juillet 2018.
Par lettre de son conseil du 3 septembre 2018, la salariée a fait part de difficultés rencontrées lors de sa reprise le 2juillet 2018 relatives à la liste des comptes qui lui ont été confiés par l’employeur et à son commissionnement, précisant avoir fait l’objet d’une discrimination en raison de sa maternité.
La salariée a été en arrêt maladie à compter du 8 septembre 2018 jusqu’au 13 avril 2019, prolongé après la visite de pré-reprise jusqu’au 9 mai 2019.
Dans l’intervalle, la salariée a saisi le 18 septembre 2018 le conseil de prud’hommes de Nanterre d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.
Le 14 mai 2019, le médecin du travail a déclaré la salariée « inapte sans reclassement possible dans l’entreprise ».
Par lettre du 22 mai 2019, la salariée a été convoquée à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement, fixé le 3 juin 2019.
Par décision du 2 juillet 2019, l’inspecteur du travail a refusé l’autorisation de licenciement de la salariée, la procédure étant irrégulière à défaut de renouvellement, depuis le 11 juin 2019, des mandats arrivés à échéance des membres de la DUP.
Par lettre du 9 juillet 2019, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur dans les termes suivants:
« Je suis contrainte, par la présente, de prendre acte de la rupture de mon contrat de travail, aux torts de la société POLYCOM, en raison des multiples manquements dont je suis victime.
Sans que la liste de ces manquements ne soit exhaustive, je vous rappelle la situation dans laquelle je me trouve de votre fait:
A la suite de mon retour de congé parental, j’ai subi une véritable discrimination liée à mon état de grossesse, puisque mon poste ne m’a pas été restitué, dans les conditions antérieures à mon départ de l’entreprise.
Cette discrimination a été à l’origine de la dégradation de mon état de santé, ayant conduit à la prescription d’arrêts de travail renouvelés.
J’ai de ce fait saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de mon contrat de travail aux torts de l’employeur.
J’ai rencontré par la suite de nouvelles difficultés afin d’obtenir le paiement de mon maintien de salaire durant mon arrêt maladie.
La dégradation de mon état de santé a été telle que le Médecin du travail a conclu à mon inaptitude le 14 mai 2019, constatant l’impossibilité dans laquelle je me trouve, pour des raisons médicales, de persister à travailler dans votre entreprise.
Une procédure d’autorisation de licenciement a donc été mise en place, compte tenu de mon statut de salariée protégée.
Or, par décision en date du 2 juillet 2019, Madame l’inspectrice du travail a refusé d’autoriser mon licenciement pour inaptitude du fait d’un nouveau manquement de votre part, à savoir le défaut de mise en place d’institution représentative du personnel, du fait du non renouvellement de la délégation unique du personnel.
Renseignement pris, il s’avère qu’aucune élection ne pourra être mise en ‘uvre avant plusieurs mois.
Ce nouveau manquement me place dans une situation insupportable puisque, ayant été déclarée inapte, je ne peux envisager de travailler à votre profit, et faute d’institution représentative de licenciement, la procédure de licenciement pour inaptitude ne peut aboutir.
Par ailleurs, depuis l’avis d’inaptitude, vous n’avez pas procédé au paiement intégral de mon salaire, ce qui représente un manque à gagner de 20% de mon salaire moyen depuis le 14 Mai 2019.
Je n’ai donc pas d’autre choix, notamment pour mon équilibre psychique, que de prendre acte de la rupture de mon contrat de travail, à vos torts.
En raison de l’inaptitude médicalement constatée, il m’est impossible de travailler à votre compte, pendant un quelconque préavis.»
Par jugement du 9 avril 2021, le conseil de prud’hommes de Nanterre (section encadrement) a:
– dit que la prise d’acte s’analyse en une démission,
– débouté Mme [T] de l’ensemble de ses demandes,
– débouté la société de sa demande reconventionnelle sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.
Par déclaration adressée au greffe le 12 avril 2021, Mme [T] a interjeté appel de ce jugement.
Une ordonnance de clôture a été prononcée le 13 décembre 2022.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 28 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles Mme [T] demande à la cour de :
– infirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre en date du 9 avril 2021,
– la déclarer tant recevable que bien-fondée en sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur,
– en fixer les effets au 11 juillet 2019,
– dire fondée la prise d’acte de rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur,
– dire que la prise d’acte de contrat travail devra produire les effets d’un licenciement nul,
en tout état de cause,
– condamner la société Polycom à lui verser les sommes de :
. 34 230,64 euros au titre des rappels d’heures supplémentaires,
. 3 423,06 euros au titre des congés payés afférents,
. 9 220,41 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos,
. 71 690,70 euros au titre des dommages et intérêts pour travail dissimulé,
. 35 845,35 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
. 3 584,53 euros au titre des congés payés afférents,
. 37 836,75 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,
. 6 618 euros au titre de rappels de commissions de juillet à septembre 2018,
. 661,80 euros au titre des congés payés afférents,
. 4 024 euros au titre des rappels de salaires du 14 mai 2019 au 11 juillet 2019,
. 402,40 euros au titre des congés payés afférents,
. 107 536,05 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat travail,
. 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
. 59 742,25 euros à titre d’indemnité pour violation du statut protecteur,
. 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Polycom à lui remettre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, des bulletins de paie rectifiés de septembre 2015 à avril 2017,
– condamner la société Polycom à lui remettre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et par document le certificat de travail et de l’attestation Pôle emploi,
– assortir la présente décision des intérêts au taux légal à compter de l’introduction de la demande, capitalisés sur le fondement de l’article 1343-2 du code civil,
– condamner la société Polycom aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société Polycom demande à la cour de :
– confirmer le jugement du conseil des prud’hommes de Nanterre du 9 avril 2021
en conséquence,
– juger que :
. la demande de résiliation judiciaire puis la prise d’acte de rupture du contrat de travail de Mme [T] ne repose sur aucun grief sérieux et démontré,
. la prise d’acte de rupture du contrat de travail de Mme [T] s’analyse en une démission,
. la société a respecté ses obligations et a exécuté le contrat de travail de Mme [T] avec loyauté et sans discrimination,
. la société n’a pas violé le statut protecteur dont bénéficiait Mme [T] du fait de son mandat de représentant du personnel,
– en conséquence débouter Mme [T] de ses demandes à ce titre,
– juger que :
. les demandes de paiement d’heures supplémentaires et des repos compensateurs y afférents ainsi que de dommages et intérêts pour travail dissimulé sont infondées et injustifiées,
– en conséquence débouter Mme [T] de ses demandes à ce titre,
– juger que :
. les demandes de rappel de rémunération de Mme [T] pour les périodes de juillet à septembre 2018 puis du 14 mai au 11 juillet 2019 sont infondées et injustifiées,
– en conséquence débouter Mme [T] de ses demandes à ce titre,
– juger que :
. les demandes de versement des indemnités de licenciement, de préavis et de dommages et intérêts sont infondées, la rupture de son contrat de travail devant s’analyser en une démission,
– en conséquence débouter Mme [T] de ses demandes à ce titre,
– débouter Mme [T] de l’ensemble de ses demandes salariales et indemnitaires,
– condamner Mme [T] au versement de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la demande au titre les heures supplémentaires de septembre 2015 à avril 2017
Sur la nullité de la convention de forfait en jours
La salariée se prévaut de plusieurs décisions de la Cour de cassation pour dire nulle la convention de forfait en jours dès lors que les dispositions de l’article 4 de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, pris en application de cette convention collective ne sont pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, et, donc, ne permettent pas d’ assurer la protection de la sécurité et de la santé des salariés (Soc., 27 septembre 2012, pourvoi n° 11-23.398 – Soc., 6 octobre 2015, pourvoi n° 13-17.250).
La salariée ajoute au surplus que l’employeur est défaillant à démontrer l’existence d’un accord collectif et des mesures concrètes permettant de s’assurer efficacement que sa charge de travail n’était pas excessive.
L’employeur réplique que la salariée oublie de rappeler que les conventions de forfait en jours conclues sur la base d’accords collectifs antérieurs au 10 août 2016 ont été sécurisées par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels à la condition que l’employeur mette en place différentes modalités permettant de pallier l’absence de certaines mentions conventionnelles, lesquelles sont précisées à l’article L.3121-65 du code du travail de sorte que la convention de forfaits en jour de la salariée est parfaitement valable.
**
Un accord d’entreprise qui ne prévoit pas un suivi effectif et régulier ne permet pas de pallier l’insuffisance de la convention collective nationale applicable. Lorsque l’ensemble du dispositif conventionnel (accord de branche et accord d’entreprise) est insuffisant à cet égard, la convention individuelle de forfait en jours est nulle et le salarié est fondé à réclamer le paiement des heures supplémentaires effectuées (Soc., 12 février 2015, pourvoi n° 13-19.889).
Ainsi, par plusieurs décisions, il a été jugé que l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, pris en application de la convention collective dite Syntec, applicable au présente litige, n’était pas de nature à garantir à lui seul que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition dans le temps du travail du salarié (cf. Soc., 24 avril 2013, pourvoi n° 11-28.398, Bull. 2013, V, n° 117).
A la suite de cette décision, les partenaires sociaux ont modifié les dispositions conventionnelles relatives au forfait par un avenant du 1er avril 2014.
Cet avenant prévoit la mise mettre en place d’un décompte des jours travaillés, en instituant notamment des outils de suivi du respect des temps de repos assortis de possibilités d’alertes, une « obligation de déconnexion» des outils de communication à distance, des entretiens individuels au moins deux fois par an voire plus en cas de difficulté inhabituelle, une visite médicale spécifique et une information renforcée du CHSCT et du comité d’entreprise (auquel se substitue le comité social et économique), information reprise dans la base de données économiques et sociales.
Lorsque les dispositions conventionnelles réglementant les conditions de recours au forfait en jours ne sont pas conformes, la sanction est la nullité de la convention individuelle de forfait en jours stipulée dans le contrat de travail ce qui a pour conséquence d’entraîner un décompte du temps de travail selon les modalités du droit commun.
En application de l’article 9 de son contrat de travail, la salariée était soumise à une convention de forfait de 217 jours travaillés par année civile.
La salariée, qui se borne à viser des décisions rendues antérieures à la signature de l’avenant du 1er avril 2014 à l’article 4 de l’accord du 22 juin 1999 pour déclarer nulle la convention de forfait en jours, n’indique pas en quoi les nouvelles dispositions ne sont pas de nature à assurer sa protection de sa sécurité et de sa santé.
Dès lors, les dispositions de l’article 4 de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, pris en application de la convention collective nationale Syntec auxquelles se réfère le contrat de travail initial de la salariée sont de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressée, de sorte que la convention de forfait jours n’est pas entachée de nullité.
Sur l’inopposabilité à la salariée de la convention de forfait en jours
La salariée soutient que l’employeur est défaillant à justifier du nombre de jours réellement travaillés et qu’elle n’a bénéficié que d’un seul entretien pendant l’intégralité de sa période d’activité, au lieu de bénéficier d’un entretien organisé tous les six mois par l’employeur.
L’employeur indique que la salariée a été absente la majeure partie de l’année 2017 et 2018 pour cause de maladie et maternité et qu’elle n’a pas pu avoir le même entretien de suivi que les autres salariés.
L’article L. 3121-46 du code du travail, dans sa rédaction applicable au début de la relation contractuelle jusqu’au 10 août 2016, prévoit qu’un entretien annuel est organisé par l’employeur avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l’année qui porte sur la charge de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale ainsi que sur la rémunération du salarié.
L’article L. 3121-60, dans sa sa rédaction applicable au litige à compter du 10 août 2016, prévoit que l’employeur s’assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.
Lorsque l’employeur ne respecte pas les stipulations de l’accord collectif qui a pour objet d’assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié et de son droit au repos, la convention de forfait en jours est privée d’effet de sorte que le salarié peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires dont le juge doit vérifier l’existence et le nombre.
Au cas présent, pour respecter tant la loi que l’accord, en l’espèce, l’avenant du 1er avril 2014 de la convention collective Syntec, sur lequel s’appuie la convention de forfait en jours litigieuse, l’employeur doit être en mesure d’établir qu’il a abordé la question de la charge de travail du salarié au minimum deux fois par an lors d’un entretien spécifique et qu’au cours de ces entretiens, ont été évoquées la charge individuelle de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie privée.
La salariée a exercé son activité professionnelle sans interruption, pendant toute la période pour laquelle elle réclame un rappel d’heures supplémentaires.
Aussi, la salariée qui devait bénéficier d’au moins trois, voire quatre entretiens, de septembre 2015 à avril 2017, n’a bénéficié que d’ un seul entretien de suivi de son temps de travail, le 25 juillet 2016.
En conséquence, la salariée étant assujettie à une convention de forfait en jours privée d’effet, elle est fondée à solliciter le paiement des heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale du travail, c’est à dire 35 heures par semaine.
Sur le calcul des heures supplémentaires dues
Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences des dispositions légales et réglementaires applicables.
Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, le juge évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
La salariée affirme avoir effectué des heures supplémentaires au-delà de 39 heures hebdomadaires, après avoir pris en compte les jours de RTT dont elle a bénéficié dans le cadre de la convention de forfait jours privée d’effet.
Au soutien de ses demandes, la salariée produit :
– un tableau de calcul par semaine le total des heures effectuées et détaillant le nombre d’heures supplémentaires réalisées (pièce n° 117 de la salariée),
– des tableaux par semaine, par jour et par heures à compter du lundi 21 septembre 2015 jusqu’au 30 avril 2016 ainsi que des copies de son agenda Outlook ( pièces n° 56 et 100 de la salariée),
– l’entretien de ‘ working team regulation’ de juillet 2016 dont il ressort qu’elle a été contrainte régulièrement à travailler le week-end et à participer à des réunions tardives le soir après 18 heures, qu’elle n’applique pas le droit à la déconnexion pendant les périodes de repos pour ‘ question d’urgence- Société internationale (décalage horaire)’,
– des échanges de courriels (pièces n° 52 à 55 de la salariée) pour établir ses horaires de travail outre 7 354 pages correspondant à l’intégralité de ses courriels qu’elle a émis de septembre 2015 à mai 2017, qu’elle s’abstient d’analyser (pièces n° 69 à 99 de la salariée),
– la lettre d’acceptation des termes de la Charte France de Polycom, dans le cadre du passage de la flotte mobile professionnelle à des contrats de téléphonie personnels signée, par la salariée le 24 février 2014, et par laquelle s’engage à respecter les règles d’utilisation de son téléphone portable personnel à usage professionnel.
Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répliquer.
Pour sa part, l’employeur ne produit aucune pièce relative aux horaires de la salariée et se contente de souligner que la situation qu’elle décrit ne correspond pas à la réalité. Il relève que la salariée produit des courriels dont elle a été uniquement destinataire, ou ne nécessitant pas une réponse et soutient qu’elle a répondu de sa propre initiative à des messages à caractère informatif, ou dont elle était uniquement destinataire en copie.
La cour souligne que certains courriels n’attendaient pas une réponse immédiate ou étaient déclaratifs.
Toutefois, l’examen des pièces 52 à 55 de la salariée qu’elle analyse dans ses écritures confirme qu’elle a notamment travaillé à plusieurs reprises pendant ses congés, en décembre 2015 (pièce n° 54 page1 /105 pages) en mai 2016 ( pièce n° 53 page 11/23) et lors de son arrêt maladie, le 5 juillet 2016 (pièce n° 53 page 18/23 et pièce n° 54 page 57 et suivantes /105), un jour férié ou un dimanche pour le lendemain ( pièce n° 54 page 92 et suivantes/105 S- pièce n° 55 page 29/66- page 60/66), en fin de journée sur interpellation de son l’employeur pour le lendemain en 2015 et 2016 ( pièce n° 55 page 4/66) à la suite de commandes tardives (après 18 heures) de sa hiérarchie, demandant une réponse rapide ( pièce n° 55 page 5/66- page 9/66, page 10/66, page 12/66, page 13/66 , page 14/66- pièce n° 56 page 23/66- page 27/66- page 31/66- page 32/66- page 36/66- page 48/66), à la suite de commandes (après 20 heures) à exécuter immédiatement ( pièce n° 55 page 19/66- page 53/66).
Il résulte également de l’examen de l’agenda et du calendrier Outlook, que la salariée a débuté régulièrement sa journée vers 9 heures et l’a terminée vers 18 heures, avec régulièrement des réunions ou des déjeuners en milieu de journée et qu’elle a été amenée à prolonger son temps de travail après 18 heures à plusieurs reprises, outre de se connecter en fin de journée pour répondre à ses courriels, la salariée retenant une moyenne d’environ 10 heures supplémentaires par semaine sur la période litigieuse dans son tableau récapitulatif, et notamment 494 heures en 2016, ce qui n’est pas incompatible avec les pièces produites.
Dès lors, la très grande cohérence qui découle de toutes ces pièces et qui n’est pas utilement combattue par l’employeur, conduit la cour à faire droit à la demande de la salariée dans sa totalité.
Le jugement sera en conséquence infirmé et, statuant à nouveau, il conviendra de condamner l’employeur à payer à la salariée la somme de 34 230,64 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires outre les congés payés afférents.
Sur la demande au titre des repos compensateurs
Il résulte du volume d’heures supplémentaires précédemment retenues que la salariée a dépassé en 2016 le contingent d’heures supplémentaires, fixé à 220 heures, ce qui n’est pas le cas pour les années 2015 et 2017(pièce n° 118 de la salariée).
La salariée peut donc prétendre au paiement, non utilement discuté par l’employeur, de la contrepartie en repos des heures supplémentaires réalisées en 2016, en application des dispositions de l’article L.3121-23 du code du travail.
Il convient, infirmant le jugement de lui allouer de ce chef la somme de 9 220,41 euros outre 922,04 euros au titre des congés payés afférents.
Sur l’indemnité pour travail dissimulé
La dissimulation d’emploi salarié prévue par l’article L.8221-5 du code du travail n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur les bulletins de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
Même si l’inopposabilité de la convention de forfait en jourspermettant à la salariée d’invoquer l’accomplissement d’heures supplémentaires, résulte de la carence de l’employeur – qui ne justifie pas avoir respecté les dispositions de la convention collective et de l’article L. 3121-46 du code du travail – et si la société n’est pas en mesure de justifier les heures effectivement réalisées, la preuve de l’intention de l’employeur se soustraire à ses obligations sociales n’est pas suffisamment rapportée.
Dès lors, l’employeur, qui se croyait régulièrement lié à sa salariée par une convention de forfait en jours, n’a pas intentionnellement manqué à ses obligations déclaratives de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la salariée sa demande d’indemnité pour travail dissimulé.
Sur la rupture
Dans la partie ‘Discussion’ de ses conclusions (p.14), la salarié sollicite (sic) :
‘- d’être déclarée fondée en sa demande de résiliation judiciaire du fait des manquements de l’employeur,
– que les effets de cette demande de résiliation judiciaire soient fixés au 11 juillet 2019,
– que l’employeur soit condamné à lui régler les heures supplémentaires effectuées, les contreparties obligatoires en repos dont elle n’a pu bénéficier, l’exécution déloyale de son contrat de travail,
– que le bien fondé de la prise d’acte de son contrat de travail soit prononcé aux torts de l’employeur et qu’elle produise les effets d’un licenciement nul
– la condamnation de son employeur au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis, d’une indemnité de licenciement et de dommages et intérêts au titre de la rupture du contrat de travail injustifiée’.
Le plan de la Discussion apparaissant dans les écritures est le suivant :
‘A/ – A titre principal : la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur
B/ – Une prise d’acte du contrat de travail aux torts de l’employeur’
Dans le cadre du A/, la salariée indique d’abord (page 17 de ses conclusions) qu’elle ‘justifie de manquements graves de la part de son employeur aux obligations contractuelles, justifiant, la résiliation judiciaire de son contrat travail comme suivant ( sic) :
– Premier manquement : irrespect des dispositions légales et conventionnelles relatives à la durée du travail, ainsi qu’à sa rémunération,
– Absence de paiement des heures supplémentaires
– Pas d’octroi de la contrepartie obligatoire en repos
– Deuxième manquement : Discrimination liée à la prise d’un congé parental
– Troisième manquement : exécution déloyale du contrat de travail’.
La cour constate que ce déroulé ne correspond pas aux développements qui suivent au titre de la résiliation judiciaire, la salariée développant en réalité la question de la discrimination dans la partie réservée à l’exécution déloyale du contrat de travail.
Par ailleurs, dans un souci de clarté et de cohérence de l’arrêt, la cour a statué précédémment sur les demandes relatives au temps de travail.
La salariée indique ensuite (page 41de ses conclusions) qu’elle a pris acte de la rupture du contrat de travail et sollicite le prononcé de la nullité du licenciement pour entrave aux fonctions de membre titulaire de la délégation unique du personnel et absence de mise en place d’un CSE.
La prise d’acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu’il reproche à l’employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail en sorte qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire introduite auparavant ; s’il appartient au juge de se prononcer sur la seule prise d’acte, il doit fonder sa décision sur les manquements de l’employeur invoqués par le salarié tant à l’appui de la demande de résiliation judiciaire devenue sans objet qu’à l’appui de la prise d’acte (Soc., 25 février 2009, pourvoi n° 06-46.436).
Le salarié protégé qui a pris acte de la rupture de son contrat de travail, peut justifier des manquements de son employeur aux règles applicables au contrat de travail et aux exigences propres à l’exécution des mandats dont il est investi, peu important les motifs retenus par l’autorité administrative à l’appui de la décision par laquelle a été rejetée la demande d’autorisation de licenciement antérieurement à la prise d’acte (Soc., 4 juillet 2012, pourvoi n° 11-13.346, Bull. 2012, V, n° 212).
Il convient donc d’examiner successivement les manquements reprochés par la salariée à l’employeur tant au titre de sa demande de la résiliation judiciaire qu’au titre de sa prise d’acte.
1 – Sur la discrimination, qualifiée par la salariée de manquement de l’employeur à son obligation de loyauté
La salariée fait valoir qu’elle a été victime d’une discrimination liée à son état de grossesse et son congé parental, l’employeur objectant que la salariée prétend à tort avoir été victime ‘ d’une mise au placard’ liée à sa maternité et à son congé parental d’éducation, et qu’elle ne produit aucun élément pour en justifier.
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L’article L. 1132-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, dispose qu’ « aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, (…) en raison (…) de sa situation de famille ou de sa grossesse (…) ».
Sur le terrain de la preuve, il n’appartient pas au salarié qui s’estime victime d’une discrimination d’en prouver l’existence. Selon l’article L. 1134-1, il doit seulement présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination. Au vu de ces éléments, il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Aux termes également de l’article L.1225-25 du code du travail, à l’issue du congé de maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente.
Il n’est pas discuté que la salariée a été en congé maternité jusqu’en avril 2015, à l’issue de sa première grossesse, qu’elle a été en arrêt maladie lors de sa seconde grossesse, à compter du 14 mai 2017, et qu’elle repris son activité professionnelle le 2 juillet 2018, à l’issue de son congé parental.
A l’appui des manquements qu’elle reproche à l’employeur, la salariée invoque pêle-mêle les faits suivants que le cour présente par paragraphes.
– sur l’annonce du congé parental et ses conséquences jusqu’en juin 2018
Si la salariée soutient que l’employeur a indiqué à plusieurs responsables du management de la société que l’annonce par la salariée qu’elle prenait un congé parental était ‘une plaisanterie’, elle ne l’établit pas , non plus que le fait que son remplacement ‘ a été annoncé aux équipes non comme une affectation temporaire mais comme une promotion accordée à M. [K] et M. [H]’, cela ne ressort pas en tout état de cause du courriel de l’employeur du 23 juin 2017.
La salariée ne rapporte pas la preuve qu’au moment de l’annonce de son congé parental, l’employeur avait décidé de ne pas lui restituer ses comptes même s’il n’est pas contredit que les comptes qu’elle gérait ont nécessairement été répartis entre plusieurs de ses collègues compte tenu de son absence.
Au surplus, l’employeur a adressé à M. [H] et M. [K] des lettres le 29 juin 2017 présentant les modifications apportées à leur poste à compter du 1er juillet 2017 ‘dues au remplacement provisoire d'[O] [T]’, confirmées par des envois du 19 décembre 2017 à la suite de la ‘prolongation de l’absence d'[O] [T] pour congé parental du 1er janvier 2018 au 29 juin 2018’, avec la mention sur la lettre ‘ fonction temporaire’ ( pièces n° 4 à7 E).
Pas davantage, la salariée ne justifie que les salariées en congé maternité étaient remplacées par des personnels en contrat à durée déterminée ou en mission d’intérim, ce qui ne ressort également pas de la pièce 122 sur laquelle elle se fonde, et l’absence de son nom en début du mois de janvier 2018 sur l’organigramme ne manifeste pas la volonté de l’employeur d’écarter la salariée qui débute pour plusieurs mois son congé parental.
Les manquements allégués de l’employeur pendant le congé parental de la salariée ne sont pas établis.
– sur l’organisation du retour de la salariée le 2 juillet 2018
En janvier 2017, l’employeur a confié à la salariée soixante et un comptes à suivre jusqu’en mars 2017. La salariée a été en congé maladie à compter du mois de mai 2017 puis en congé maternité. A son retour en juillet 2018, l’employeur a confié à la salariée la gestion de trente quatre comptes, dont 4 comptes qu’elle suivait déjà en janvier 2017, la salariée invoquant ‘ le caractère déloyal de la liste des nouveaux comptes’.
La salariée prétend qu’en ne lui restituant pas les comptes gérés avant son départ en congé parental, l’employeur a marqué ouvertement qu’il ne lui accordait plus aucun avenir dans l’entreprise, alors qu’ à son retour de premier congé maternité elle avait récupéré l’essentiel des comptes qui lui étaient affectés.
Il convient cependant de constater que la salariée n’avait alors récupéré en avril 2015 que trente trois comptes et que l’objectif chiffré pour l’année 2015 était de 1 739 192 dollars, proche de celui assigné pour le second semestre 2018, comprenant notamment le mois d’août chômé par la salariée.
La salariée affirme également que ses anciens comptes ont été répartis entre ses collègues et ne lui ont pas été restitués en juillet 2018, sauf quatre d’entre eux.
Certes, M. [K] a été en charge de plusieurs des anciens comptes de la salariée.
Toutefois, l’examen des listes de comptes affectés aux salariés du service montre que de nombreux comptes de la liste de janvier 2017 n’existaient plus dans la liste des comptes répartis en juillet 2018 (Aéroports de [Localité 6], Alinea, Arval services lease, Balenciaga, Banque Accord, Bottega Veneta, Boucheron, Boulanger et d’autres), de sorte que la liste des comptes de la salariée a évolué en son absence et que l’employeur n’a pas réparti entre ses collègues tous ses anciens comptes sans les lui restituer.
Si la salariée souligne que sur la liste des ‘ gros comptes’ d’avril 2018, seuls figurent parmi les siens, ceux de la société Alten et d’Air France, il convient de constater que les comptes de ses trois collègues ne sont pas tous sur cette liste et finalement chacun d’eux n’est pas davantage privilégié que la salariée.
En effet, sur la liste des ‘ gros comptes’, M.[A] assure le suivi de deux d’entre eux, M. [K] assure le suivi de trois comptes, et M. [U] de quatre comptes, mais les comptes de ces trois salariés ont une ‘production’ moindre que les deux comptes de la salariée, notamment le compte Alten, lequel a une ‘production’ de ‘250″ (cf comparaison de ses pièces n° 27 et 42) au lieu d’une production moyenne de ‘100″ à ‘150″ pour les trois autres salariés.
Le courriel écrit en langue anglaise le 3 octobre 2018, ne mentionne également pas que les comptes de la salariée ont été transmis à M. [N], assistant commercial, les courriels suivants échangés entre l’employeur et M. [N] ne portant pas sur des comptes confiés en juillet 2018 à la salariée, ce qui n’établit donc pas que les comptes de la salariée à son retour de congé maternité n’étaient pas des comptes importants.
Dès lors, si la salariée n’a pas retrouvé l’ensemble des comptes qui lui étaient confiés dix huit mois après son retour en juillet 2018, les pièces qu’elle produit démontrent que les listes de comptes ont évolué dans le temps, plusieurs clients ayant disparu au profit de nouveaux clients.
La salariée a ensuite retrouvé la gestion d’anciens comptes le 17 septembre 2018 demeurés actifs.
En outre, les pièces versées par la salariée n’établissent pas davantage qu’elle n’a pas été conviée à des réunions en juillet et septembre 2018 ayant pour objet les comptes de l’ensemble des commerciaux ou un dossier qu’elle suivait.
Par ailleurs, dans le cadre d’un projet de rachat de la société Polycom France par la société Plantronics en 2018, l’employeur a adressé le 13 juillet 2018 un courriel et une liste de comptes tenus par les salariés de la société Polycom France. Le nom de Mme [T] n’y figure pas, tout comme la salariée est encore mentionnée ‘on leave’ le 11 juillet 2018 sur l’organigramme des cinq salariés en charge des comptes. Elle n’apparaît également pas dans une liste des comptes produites le 7 septembre 2018.
Néanmoins, aucun nom des trois autres salariés qui suivent les comptes ne sont sur la liste des personnes destinataires de cet premier envoi de sorte que la salariée qui indique avoir mal vécu cette exclusion, s’est trouvée dans la même situation que celle des salariés ayant repris selon elle ses comptes, et ce message de l’employeur ne peut donc pas être analysé comme une humiliation à l’égard de la salariée.
Si la salariée n’apparaît pas dans le décompte du 8 octobre 2018 , il convient de rappeler qu’elle était alors en arrêt maladie depuis un mois et aucun élément ne permet d’affirmer qu’il s’agit des ‘ gros comptes’ de la liste des comptes par salarié.
Enfin,, la salariée n’a pas obtenu de réponse à sa demande du 25 juillet 2018 de communication de l’historique de chiffre d’affaires sur les trois dernières années des comptes qui lui étaient nouvellement confiés, et ses objectifs ne lui ont été transmis, pour les 3 ème et 4 ème trimestres 2018, que le 6 septembre 2018, après réception par l’employeur de la lettre du conseil de la salariée.
En synthèse de ce qui précède, la cour a retenu comme étant établis les manquements suivants qui laissent présumer l’existence d’une discrimination en raison de la grossesse :
– la transmission seulement début septembre 2018 de l’analyse financière des comptes confiés à la salariée plus d’un mois après sa demande formée le 25 juillet 2018,
– la restitution de tous les comptes de la salariée le 17 septembre 2018 et non le 2 juillet 2018,
– la fixation des objectifs de la salariée en septembre 2018 et non le 2 juillet 2018.
Il revient dès lors à la société de prouver que ses décisions sont étrangères à toute discrimination.
La salariée ne contredit pas que l’employeur a discuté avec elle des conditions de sa reprise dès son retour le 2 juillet 2018, après une absence de dix- huit mois et un départ en congé tout le mois d’août 2018, dans un contexte où l’employeur devait prendre en compte également la situation de la salariée mais également celle des salariés qui l’ont remplacée durant toute cette période.
M. [E], supérieur hiérarchique de la salariée indique le 5 septembre 2018, dans un courriel adressé à Mme [C], autre salariée de la société, avoir rencontré Mme [T] en juillet 2018 et avoir convenu de la liste des comptes qui lui étaient confiés. Il indique : ‘ j’ai également parlé que j’avais conscience que cette liste de comptes n’est pas celle qu’elle avait précédemment mais nous nepouvions laisser en jachère les clients Polycom pendant 18 mois; Sa réponse a été très compréhensive … ( …) Je lui ai d’ailleurs informé qu’en fin d’année nous allions rebattre les cartes (comme nous le faisons souvent) et profiter de cela pour revoir sa liste. (…) Elle était tout à fait satisfaite de la situation qu’elle comprenait très bien. [G] n’ayant pas pu préparer ses objectifs avant son départ en congés je l’ai informée qu’elle recevrait une garantie de commission pendant les trois premiers mois.
Suite au fait qu’ensuite elle était en vacances je lui ai indiqué que nous ne serons pas en mesure de finaliser son plan qu’à la rentrée. (…) [G] y travaille et nous serons prêt vendredi prochain. Il est vrai que je suis rentré il y a trois jours et que je n’ai pas eu droit à un bonjour…’.
Dans ce contexte, l’employeur justifie qu’il était convenu de la fixation des objectifs de la salariée à son retour de congés payés, en septembre 2018.
S’agissant de la demande de la salariée du 25 juillet 2018 de communication d’informations sur les résultats précédents des comptes attribués par l’employeur, ce dernier communique des échanges de courriels à ce sujet de début septembre 2018. Une salariée, Mme [G] [D], indique ainsi le 6 septembre 2018, qu’elle ‘ pensai(t) pouvoir lui remettre son quota avant mais cela demande pour (elle) beaucoup de contrôle et avoir les chiffres réels H1 pour définir H2″.
L’employeur établit ainsi que la salariée a formé sa demande le 25 juillet 2018 au seuil des vacances estivales de la personne en charge de cette tâche et, suivant d’autres échanges de courriels en septembre 2018, il est démontré qu’il a tout mis en oeuvre auprès de ses services pour transmettre une réponse à la salariée, dont il est démontré qu’elle a pas renouvelé sa demande auprès de l’employeur.
Enfin, la salariée n’a pas fait état de la moindre contestation sur les conditions de sa reprise avant d’adresser à l’employeur des reproches par lettre de son conseil le 3 septembre 2018.
En conséquence, il n’est pas établi que l’employeur a marqué ouvertement qu’il n’accordait plus aucun avenir dans l’entreprise à la salariée. L’existence d’une discrimination en raison de sa grossesse sera en conséquence écartée.
2- Sur le maintien du salaire, qualifié par la salariée de manquement de l’employeur à son obligation de loyauté
Par trois courriels et une lettre recommandée entre le 6 décembre 2018 et le 14 janvier 2019, la salariée a interrogé l’employeur sur le maintien de son salaire en prenant en compte les commissions.
La salariée indique que la situation a été régularisée par l’employeur à la fin du mois de janvier 2019, la personne en charge du dossier lui répondant le 2 janvier 2019 qu’elle ‘ conteste (son) interprétation selon laquelle un silence de quelques jours fin décembre, en période de congés annuels et de clôture annuelle de paie serait synonyme de discrimination ou de représailles’. Cette personne, Mme [C], précise que l’employeur fait appel à un expert en prestation de paie qui n’est pas informé des situations personnelles des salariés et qu’elle va lui demander de vérifier la méthode de calcul du maintien du salaire de Mme [T].
Le manquement est établi en ce que la situation a été régularisée tardivement, soit plusieurs semaines après la demande de la salariée, qui n’indique toutefois pas le montant précis de la somme due à ce titre par l’employeur.
3- Sur les demandes de rappel de salaire
Sur les commissions de juillet à septembre 2018
La salariée indique qu’en l’absence d’objectifs fixés, l’employeur devait lui régler l’intégralité de ses commissions contractuelles. Elle explique qu’elle percevait un salaire annuel de 117 000 euros, dont 40% de commissions, avant son départ en congé maternité et qu’elle aurait dû percevoir un montant égal de commissions à son retour.
L’employeur expose que la salariée n’a pas travaillé pendant les cinq semaines entre son retour de congé parental et son arrêt-maladie et qu’il lui a garanti le paiement de ses commissions à hauteur de 65%, sans contrepartie de travail, alors que les commissions ne sont pas un dû mais la contrepartie d’une activité commerciale.
Le contrat de travail de la salariée prévoit qu’elle perçoit un salaire brut annuel fixe et qu’elle est ‘éligible de participer au plan de commission. Si les objectifs sont atteints durant l’exercice financier, une commission de EUR 30 000 sera accordée sur cette période déterminée.’.
Il n’est pas discuté que la salariée a toujours perçu des commissions depuis son recrutement, dont le montant a varié comme il ressort des bulletins de paye produits au dossier.
D’abord, le contrat imposait à l’employeur de fixer des objectifs, ce qui a été le cas en septembre 2018, les parties ayant auparavant convenu du versement d’une garantie de commission sur trois mois, ce que n’a alors pas contesté la salariée, avant septembre 2018.
Par ailleurs pour la période postérieure, la salariée a été en arrêt maladie à compter du 8 septembre 2018 de sorte qu’elle a dû perçu la même rémunération que celle versée par l’employeur pendant plusieurs mois lors de son arrêt maladie jusqu’en mai 2019, somme qu’elle n’a pas contestée durant toute cette période.
Aussi, la salariée ne justifie pas d’un droit au versement de la totalité des commissions durant ses absences pour maladie uniquement entre le 8 et le 30 septembre 2018.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la salariée de sa demande de rappels de commissions et congés payés afférents.
Sur les salaires du 14 mai au 11 juillet 2019
La salariée réclame le paiement de son salaire intégral sur la période postérieure à l’avis d’inaptitude du médecin du travail et jusque sa prise d’acte, l’employeur ne lui ayant versé que 80% de son salaire comme il l’avait effectué au titre de la prévoyance pendant l’arrêt maladie antérieur au constat d’inaptitude.
L’employeur affirme que la salariée a bénéficié en mai et juin 2019 du maintien de sa rémunération fixe et de la moyenne des commissions reçues au cours des douze derniers mois conformément aux dispositions de la convention collective. Il ajoute que la salariée ne s’est pas présentée à son poste de travail en juillet 2019, s’est trouvée en absence injustifiée et a pris acte de sa rupture le 11 juillet 2019.
Selon les dispositions de l’article L. 1226-4 du code du travail, lorsque, à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n’est pas reclassé dans l’entreprise ou s’il n’est pas licencié, l’employeur lui verse, dès l’expiration de ce délai, le salaire correspondant à l’emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.
Ces dispositions s’appliquent également en cas d’inaptitude à tout emploi dans l’entreprise constatée par le médecin du travail.
Au cas présent, la visite de reprise s’est tenue le 14 mai 2019 et la circonstance que la salariée était protégée a allongé le délai de notification du licenciement pour inaptitude, ne doit pas être préjudiciable à la salariée, alors que l’employeur n’a pas organisé les élections des représentants du personnel.
Il y a donc lieu de condamner l’employeur à verser à la salariée le montant du salaire qu’elle percevait avant la suspenstion de son contrat pour maladie, en application des dispositions de l’article cité précédemment, dès lors que la salariée n’était pas en abandon de poste mais dans l’attente de voir aboutir la procédure de licenciement déclarée irrégulière par l’inspection du travail à la suite d’un manquement de l’employeur, lequel ne pouvait toutefois pas verser à la salariée le même salaire que celui retenu lors de la période de suspension pour maladie.
L’employeur, qui ne conteste pas avoir versé la somme de 8 638 euros correspondant à 80 % du salaire intégral de la salariée pendant son arrêt maladie, doit donc lui verser la somme mensuelle de 10 650 euros réclamée par la salariée, non utilement contestée en son calcul par l’employeur.
Par voie d’infirmation du jugement, l’employeur sera condamné à verser à la salariée la somme de 4 024 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 402 euros au titre des congés payés afférents.
4 – ‘Sur l’entrave aux fonctions de membre titulaire de la délégation unique du personnel’ faute de transmission à la salariée des procès-verbaux des réunions du CSE
Aux termes de l’article L. 2315-35 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, le procès-verbal des réunions du comité social et économique peut, après avoir été adopté, être affiché ou diffusé dans l’entreprise par le secrétaire du comité, selon des modalités précisées par le règlement intérieur du comité.
La salariée qui ne conteste pas avoir reçu les convocations aux réunions du comité, ne peut se prévaloir de ce que l’employeur ne lui a pas adressé les procès-verbaux des réunions, alors qu’il n’appartenait pas à ce dernier de l’effectuer.
La salariée n’établit donc pas l’entrave reprochée à l’employeur.
5- Sur l’absence de mise en place d’un CSE
Aux termes de l’article L. 2421-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, le licenciement envisagé par l’employeur d’un membre élu à la délégation du personnel au comité social et économique titulaire ou suppléant ou d’un représentant syndical au comité social et économique ou d’un représentant de proximité est soumis au comité social et économique, qui donne un avis sur le projet de licenciement dans les conditions prévues à la section 3 du chapitre II du titre Ier du livre III.
Il n’est pas contredit qu’il appartient à tout employeur d’organiser les élections du comité social d’entreprise (CSE).
Au cas présent, aucune instance n’a été régulièrement consultée pour examiner la demande de licenciement pour inaptitude de la salariée protégée, comme l’a relevé l’inspecteur du travail qui a refusé de faire droit à la demande en raison de l’irrégularité de la situation.
C’est donc à juste titre que la salariée invoque le caractère préjudiciable de cette situation en raison du manquement de l’employeur, qui n’a pas organisé les élections pour la mise en place du CSE, étant précisé que la régularisation ne pouvait pas intervenir à court terme et que la salariée s’est retrouvée effectivement dans une situation la conduisant à prendre acte de la rupture de son contrat de travail, compte tenu de la carence de l’employeur dans l’organisation des élections du CSE.
EN CONSEQUENCE de tout ce qui précède, les manquements suivants de l’employeur ont été relevés :
– l’absence de paiement des heures supplémentaires entraînant le paiement de leur contrepartie en repos compensateurs,
– l’absence de maintien de la totalité du salaire dû à la salariée entre le 4 décembre 2018 et la fin du mois de janvier 2019,
– le défaut de versement du salaire dû à la salariée entre le 14 juin et le 11 juillet 2019 à l’issue de la décision d’inaptitude médicale,
– l’absence d’organisation de la tenue d’élections du CSE empêchant l’autorisation de licenciement pour inaptitude de la salariée protégée.
Les manquements de l’employeur étaient d’une gravité telle qu’ils empêchaient la poursuite du contrat de travail et ont justifié la prise d’acte de la rupture du contrat de travail.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a débouté la salariée à ce titre.
Sur les conséquences de la rupture
Lorsqu’un salarié titulaire d’un mandat de représentant du personnel prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d’un licenciement nul ( Soc., 12 novembre 2015, pourvoi n° 14-16.369, Bull. 2015, V, n° 227).
Le délégué du personnel dont la prise d’acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement nul lorsque les faits invoqués la justifiaient, a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis son éviction jusqu’à l’expiration de la période de protection, dans la limite de deux ans, durée minimale légale de son mandat, augmentée de six mois, ce dont il résulte que la rémunération servant de base au calcul de l’indemnité devait comprendre la prime de vacances prévue par la convention collective applicable, quand bien même celle-ci est versée postérieurement à la prise d’effet de sa prise d’acte (Soc., 21 septembre 2017, pourvoi n° 15-28.932, Bull. 2017, V, n° 152).
Dès lors que la salariée, en raison de son mandat, bénéficiait du statut de salarié protégé, la prise d’acte de la rupture produit les effets d’un licenciement nul.
Mme [T] est en droit d’obtenir, d’une part, l’indemnité due au titre de la méconnaissance du statut protecteur et correspondant au montant de la rémunération due jusqu’au terme de la période de protection, d’autre part, outre les indemnités de rupture, une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement.
Le dernier mandat de Mme [T], membre suppléant de la délégation unique du personnel, a pris fin le 11 juin 2019 et la période de protection s’est prolongée de 6 mois à partir de cette date, soit jusqu’au 11 décembre 2019, quand bien même la salariée a pris acte entre temps de la rutpure de son contrat de sorte qu’elle peut prétendre au paiement de la somme de 59 742,25 euros, non utilement contestée en son montant par l’employeur.
Il y a également lieu de faire droit, ainsi qu’il sera dit au dispositif, aux demandes de la salariée au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents et de l’indemnité de licenciement, dont les montants ne sont également pas utilement contestés par l’employeur.
Le salarié victime d’un licenciement nul qui ne demande pas sa réintégration a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à six mois de salaire en application de l’article L 1235-3-1. Toutefois, la salariée sollicite une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qu’il convient de requalifier en indemnité de licenciement nul dans la mesure où la cour a précédemment annulé le licenciement, comme sollicité par la salariée.
Statuant dans les limites de la demande , compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée (11 948,45 euros bruts), de son âge ( 35 ans), de son ancienneté, de sa formation et de son expérience professionnelle, de ce qu’elle a retrouvé un emploi en septembre 2019, quelques semaines après la prise d’acte, et des conséquences du licenciement à son égard, tel qu’elles résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de condamner la société Polycom France à lui payer la somme de 71 690, 70 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul. Le jugement est infirmé de ce chef.
En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur, à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de 6 mois d’indemnités.
Sur l’exécution déloyale du contrat
Selon les dispositions de l’article L.1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Il a été précédemment retenu plusieurs manquements de l’employeur au soutien de la demande de requalification de la prise d’acte de la rupture de la salariée et pour lesquels il a été précédemment alloué à la salariée une indemnisation réparant le préjudice résultant de son licenciement injustifié.
La salariée qui ne démontre aucun autre manquement distinct de la perte injustifiée de son emploi sera donc déboutée de se demande et le jugement confirmé de ce chef.
Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral
L’issue du litige, en l’absence de discrimination en raison de la grossesse, conduit la cour à rejeter la demande de réparation du préjudice résultant de la ‘rétrogradation fonctionnelle’ alléguée par la salariée pour avoir ‘sollicité un congé parental’.
Sur les autres demandes
Il convient d’ordonner à l’employeur de remettre à la salariée un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et les bulletins de paye rectifiés de septembre 2015 à avril 2017 conformes à la présente décision, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette mesure d’une astreinte.
Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d’orientation et les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Les intérêts échus des capitaux porteront eux- mêmes intérêts au taux légal dès lors qu’ils seront dus pour une année entière à compter de la demande qui en a été faite.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Succombant, l’employeur sera condamné aux dépens de première instance et d’appel.
Il sera également condamné à payer à la salariée la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS:
Statuant publiquement et contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement mais seulement en ce qu’il déboute Mme [T] de ses demandes au titre du travail dissimulé et du rappel de commissions de juillet à septembre 2018, en ce qu’il rejette les demandes de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat et préjudice moral, et en ce qu’il déboute la société Polycom France de sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile,
INFIRME le jugement entrepris pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,
DIT que la prise d’acte de contrat travail produit les effets d’un licenciement nul,
DIT que la convention de forfait en jours est privée d’effet,
CONDAMNE en conséquence la société Polycom France à verser à Mme [T] les sommes suivantes :
. 34 230,64 euros de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires,
. 3 423,06 euros au titre des congés payés afférents,
. 9 220,41 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos,
. 3 584,53 euros au titre des congés payés afférents,
. 37 836,75 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,
. 4 024 euros au titre des rappels de salaires du 14 mai 2019 au 11 juillet 2019,
. 402,40 euros au titre des congés payés afférents,
. 59 742,25 euros à titre d’indemnité pour violation du statut protecteur,
. 71 690,70 euros euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement nul,
. 59 742,25 euros à titre d’indemnité pour violation du statut protecteur,
CONDAMNE la société Polycom France à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage éventuellement versées à Mme [T] dans la limite de six mois,
ORDONNE à la société Polycom France à remettre à Mme [T] les bulletins de paie rectifiés de septembre 2015 à avril 2017, le certificat de travail et de l’attestation Pôle emploi,
DIT que les intérêts au taux légal sur les créances indemnitaires courront à compter du prononcé de la présente décision, et à compter de la date de réception par l’employeur de sa convocation à comparaître à l’audience de conciliation pour les créances salariales,
ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,
REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires,
CONDAMNE la société Polycom France aux dépens de première instance et d’appel, et à verser à Mme [T] une indemnité de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
. signé par Madame Aurélie Prache, Président et par Madame Marcinek, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente