Heures supplémentaires : 16 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/02241

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Heures supplémentaires : 16 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/02241
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 11

ARRET DU 16 MAI 2023

(n° , 15 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/02241 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBTV2

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Février 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de VILLENEUVE-SAINT-GEORGES – RG n° 18/00397

APPELANT

Monsieur [R] [D]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Anais MOLINIE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2185

INTIMEE

S.A.S. DIMPLEX SOLUTIONS THERMODYNAMIQUES

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Claire LITAUDON, avocat au barreau de PARIS, toque : C1844

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,

Madame Catherine VALANTIN, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [R] [D], né en 1964, a été engagé par la SAS Dimplex Solutions Thermodynamiques (ci-après société Dimplex), par un contrat de travail à durée indéterminée du 11 décembre 2012 avec une prise d’effet initiale au 18 mars 2013 en qualité de responsable régional des ventes, statut cadre niveau VIII échelon 3. Il était soumis à une convention de forfait de 215 jours de travail par an.

Par avenant du 14 février 2013, la prise d’effet du contrat de travail a été avancée au même jour.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du commerce de gros.

Par lettre datée du 29 janvier 2018, M. [D] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 9 février 2018 avec mise à pied conservatoire avant d’être licencié pour faute grave par lettre datée du 13 février 2018.

Par courrier du 21 février 2018, M. [D] a contesté son licenciement auprès de la société, cette dernière lui a répondu par courrier du 6 mars 2018.

A la date du licenciement, le salarié avait une ancienneté de 5 ans et la société Dimplex occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités, outre des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, des rappels d’heures supplémentaires pour nullité de sa convention de forfait-jours, des rappels de salaires au titre de la rémunération variable et le remboursement de frais professionnels, M. [D] a saisi, le 27 juin 2018, le conseil de prud’hommes de Villeneuve-Saint-Georges qui, par jugement du 3 février 2020, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit :

– fixe la rémunération moyenne de M. [D] à 5.921,42 euros bruts ;

– dit que le licenciement pour faute grave prononcé le 13 février 2018 par la société Dimplex, prise en la personne de son représentant légal, à l’encontre de M. [D] est dépourvu de cause réelle et sérieuse’;

– dit qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’application du barème prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail en raison de son inconventionnalité’;

– dit nulle la convention de forfaits en jours conclue entre M. [D] et la société Dimplex’;

– condamne la société Dimplex prise en la personne de son représentant légal à verser à M. [D] les sommes brutes suivantes’:

* 17.764,26 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 15.227 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

* 1.522 euros au titre des congés payés y afférents

* 7.401 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

* 2.192euros au titre de la mise à pied conservatoire,

* 219,20 euros au titre des congés payés y afférents,

* 1.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejette le surplus des demandes’;

– rappelle conformément aux dispositions de l’article 1231-6 du code civil que les créances à caractères conventionnelles et légales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société Dimplex prise en la personne de son représentant légal, de la convocation devant le bureau de conciliation soit le 27 juin 2018′;

– rappelle conformément aux disposition de l’article 1231-7 du code civil que les créances à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement, soit au 3 février 2020′;

– rappelle conformément aux disposition de l’article 1231-7 du code civil, que la somme allouée en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile portera intérêts aux taux légal à compter du jour du prononcé du jugement, soit le 3 février 2020′;

– ordonne en tant que de besoin, le remboursement par la société Dimplex aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités chômages versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du prononcé du jugement, dans la limite d’un mois d’indemnité de chômage.

– dit qu’à l’expiration du délai d’appel, une copie certifiée conforme du présent jugement sera transmise à pôle emploi, conformément aux articles R. 1235-1 et R. 1235-2 du code du travail, en précisant si ce dernier a fait ou non l’objet d’un appel. Cette copie est transmise à la direction régionale de cet établissement ;

– rappelle que le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire relativement aux éléments de rémunération prévus par l’article R. 1454-28 du code du travail dans la limite de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne brute des trois derniers mois de salaire, fixée à la somme de 5.921,42 euros’;

– déboute la société Dimplex de sa demande reconventionnelle ;

– condamne la société Dimplex aux entiers frais et éventuels dépens de la présente instance.

Par déclaration du 10 mars 2020, M. [D] a interjeté appel de cette décision, notifiée le 14 février 2020.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 23 janvier 2023, M. [D] demande à la cour de :

– dire et juger M. [D] bien fondé en son appel ;

– confirmer le jugement en ce qu’il a’:

*fixé la rémunération moyenne de M. [D] à 5.921,42 euros ;

*constaté la nullité de la convention de forfait en jours conclue entre M. [D] et la société Dimplex ;

*constaté que le licenciement de M. [D] était dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, condamné la société Dimplex à lui verser les sommes suivantes :

7.401 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;

15.227 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 1.523 euros au titre des congés payés afférents ;

-infirmer le jugement entrepris en ses dispositions suivantes, autrement dit réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :

*débouté M. [D] de ses demandes relatives au paiement des jours de RTT non-rémunérés;

– Et, statuant à nouveau, condamner la société Dimplex à verser à M. [D] la somme de 438,39 euros au titre des jours de RTT non rémunérés, décomptés à tort comme étant des absences injustifiées ;

*débouté M. [D] de ses demandes relatives au paiement de la mise à pied conservatoire;

– Et, statuant à nouveau, condamner la société Dimplex à verser à M. [D] la somme de 4.969,20 euros au titre de la mise à pied à titre conservatoire et 497 euros au titre des congés payés afférents ;

*débouté M. [D] de ses demandes relatives aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, statuant à nouveau :

– A titre principal, dire et juger que doit être écarté le plafonnement prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail en raison du fait que le montant des dommages et intérêts ne répare pas l’intégralité des préjudices subis par M. [D] ;

– Condamner en conséquence la société Dimplex Solutions Thermodynamiques verser à M. [D] la somme de 53.292,78 euros (9 mois de salaire) à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, réparant l’ensemble des préjudices professionnels, financiers et moraux subis dans le cadre de son licenciement.

– A titre subsidiaire, si la cour appliquait les dispositions de l’article L. 1235-5 du code du travail, condamner la société Dimplex Solutions Thermodynamiques à verser à M. [D] la somme de 35.528,52 euros (6 mois de salaire) à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

*débouté M. [D] de sa demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail;

– Et, statuant à nouveau, constater que Dimplex Solutions Thermodynamiques a manqué à son obligation d’exécution loyale du contrat de travail et, en conséquence, condamner Dimplex Solutions Thermodynamiques à verser à M. [D] la somme de 17.764,26 euros (3 mois de salaire) à titre de dommages et intérêts ;

*débouté M. [D] de ses demandes de paiement des heures supplémentaires et congés payés afférents ;

– Et, statuant à nouveau, condamner Dimplex Solutions Thermodynamiques à verser à M. [D] les sommes suivantes :

18.223 euros au titre des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées en 2015 et 1.822 euros au titre des congés payés afférents ;

21.510 euros au titre des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées en 2016 et 2.151 euros au titre des congés payés afférents ;

28.304 euros au titre des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées en 2017 et 2.830 euros au titre des congés payés afférents ;

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour ne confirmerait pas le jugement du conseil de prud’hommes de Villeneuve-Saint-Georges en ce qu’il a considéré que le forfait-jour n’était pas nul, condamner Dimplex Solutions Thermodynamiques à verser à M. [D] les sommes suivantes au titre des jours hors-forfait, non rémunérés :

474 euros au titre des jours travaillés et non rémunérées en 2015, somme à laquelle s’ajoutent 47 euros au titre des congés payés afférents ;

632 euros au titre des jours travaillés et non rémunérées en 2015, somme à laquelle s’ajoutent 63 euros au titre des congés payés afférents ;

1.264 euros au titre des jours travaillés et non rémunérées en 2015, somme à laquelle s’ajoutent 126 euros au titre des congés payés afférents ;

*débouté M. [D] de ses demandes au titre de la rémunération variable pour les années 2015 à 2018 ;

– Et, statuant à nouveau, condamner Dimplex Solutions Thermodynamiques à verser à M. [D] les sommes suivantes :

Au titre de la rémunération variable 2015- 2016 : 7.425 euros et 742,50 euros au titre des congés payés afférents ;

Au titre de la rémunération variable 2016- 2017 : 7.425 euros et 742,50 euros au titre des congés payés afférents ;

Au titre de la rémunération variable 2017- 2018 : 7.920 euros et 792 euros au titre des congés payés afférents ;

* débouté M. [D] de ses demandes au titre du remboursement de frais professionnels;

– Et, statuant à nouveau, condamner Dimplex Solutions Thermodynamiques à verser à Monsieur [D] la somme de 127,35 euros au titre du reliquat des frais professionnels dus ;

*débouté M. [D] de ses demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Et, statuant à nouveau, condamner Dimplex Solutions Thermodynamiques à verser à M. [D] la somme de 6.840 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

-débouter Dimplex Solutions Thermodynamiques de l’ensemble de ses demandes.

-condamner Dimplex Solutions Thermodynamiques aux entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d’exécution forcée du jugement ;

En tout état de cause’, il est demandé à cour d’appel de’:

– débouter Dimplex Solutions Thermodynamiques de l’ensemble de ses demandes’;

– condamner Dimplex Solutions Thermodynamiques aux entiers dépens, et ce compris les éventuels frais d’exécution forcée du jugement.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 24 janvier 2023, la société Dimplex demande à la cour de’:

Sur l’appel principal de M. [D]’:

– déclarer l’appel principal de M. [D] irrecevable, et en tous les cas, intégralement mal fondé ;

– confirmer le jugement entrepris du 3 février 2020 du conseil de prud’hommes de Villeneuve-St-Georges ce qu’il a débouté M. [D] de sa demande au titre de l’inconventionnalité de l’article L 1235-3 du code du travail, de sa demande au titre des jours de RTT non rémunérés, de sa demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail, de sa demande relative au paiement d’heures supplémentaires et de congés payés y afférents, de sa demande de paiement de part de rémunération variable et de congés payés y afférents, et de sa demande de remboursement de frais professionnels ;

En tout état de cause ;

– rejeter les demandes de M. [D] s’agissant de sa demande indemnitaire au titre du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, de sa demande au titre des jours de RTT non rémunérés, de sa demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail, de sa demande relative au paiement d’heures supplémentaires et de congés payés y afférents, de sa demande de paiement de part de rémunération variable et de congés payés y afférents, de sa demande de remboursement de frais professionnels, et de sa demande au titre de l’article 700 du CPC ;

– condamner M. [D] en tous les dépens, ainsi qu’à un montant de 5.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ;

Sur l’appel incident de la société Dimplex Solutions Thermodynamiques’:

– déclarer l’appel incident de la société Dimplex Solutions Thermodynamiques recevable et bien fondée ;

En conséquence ;

– infirmer le jugement du 3 février 2020 du conseil de prud’hommes de Villeneuve-St-Georges en ce qu’il a considéré le licenciement de M. [D] comme étant dénué de toute cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a alloué à M. [D] à ce titre :

17.764,26 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

15.227 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

1.522 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés

7.401 euros au titre de l’indemnité de licenciement

2.192 euros au titre de rappel de salaires sur la mise à pied conservatoire

219,20 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés y afférents

1.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du CPC

– déclarer que le licenciement du 13 février 2018 repose sur une faute grave

– débouter M. [D] de l’intégralité de ses demandes à ce titre,

– confirmer le jugement entrepris du 3 février 2020 du conseil de prud’hommes de Villeneuve-St-Georges en ce qu’il a rejeté l’intégralité du surplus des demandes de M. [D] ;

A titre subsidiaire ;

– confirmer le jugement entrepris du 3 février 2020 du conseil de prud’hommes de Villeneuve-St-Georges en ce qu’il a limité l’allocation indemnitaire de M. [D] à hauteur de 17.764,26 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– confirmer M. [D] à payer à la société Dimplex Solutions Thermodynamiques une somme de 4.603,20 euros à titre de remboursement des jours de RTT accordés en exécution de la convention de forfait jours, sur le fondement de la répétition de l’indu ;

– ordonner le cas échéant, la compensation des créances respectives des parties.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 janvier 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 14 mars 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la convention de forfait jours et les heures supplémentaires

Pour infirmation de la décision entreprise, M. [D] soutient que la société n’a jamais effectué de suivi de son travail, de sorte que la convention de forfait-jour encourt la nullité ; qu’en conséquence, il est bien fondé à solliciter le paiement des heures supplémentaires.

A titre subsidiaire, le salarié demande le paiement des jours dépassant le forfait jours contractuel, à savoir 3 jours supplémentaires en 2015, 4 en 2016 et 8 en 2017.

La société Dimplex réplique, d’une part, que l’article 6 du contrat de travail du salarié est particulièrement explicite sur l’organisation et l’autonomie dont il dispose, d’autre part, que les documents sur lesquels il s’appuie ne démontrent pas la charge de travail inconséquente. Elle conteste la prise en compte des temps de déplacement comme temps de travail effectif et fait valoir que les pièces versées au débat par l’appelant démontrent, au contraire, qu’il quittait son domicile entre 8H et 9H et qu’il rentrait entre 17H et 18H.

Sur la demande subsidiaire, la société répond que, disposant encore de congés payés en 2016-2017 et de 16,51 jours en 2017-2018, l’appelant ne peut soutenir qu’il aurait travaillé des jours au déjà du forfait sans être rémunéré.

En application des articles L.3121-38 et suivants du code du travail dans leur rédaction issue de la loi n°2008-780 du 20 août 2008, et des articles L.31121-53 et suivants du code du travail dans leur version issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, la conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l’année est prévue par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Cet accord collectif préalable détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi, et fixe les caractéristiques principales de ces conventions. La conclusion d’une convention individuelle de forfait requiert l’accord du salarié. La convention est établie par écrit. Peuvent conclure une convention de forfait en jours sur l’année, dans la limite de la durée annuelle de travail fixée par l’accord collectif prévu à l’article L. 3121-39, d’une part les cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du service ou de l’équipe auquel ils sont intégrés et d’autre part, les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice des responsabilités qui leur sont confiées. Un entretien annuel individuel est organisé par l’employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l’année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié.

La loi n° 2008-789 du 20 août 2008 précise que les accords conclus en application des articles L. 3121-40 à L. 3121-51 du code du travail dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi restent en vigueur.

Vu la convention collective nationale de commerces de gros applicable et l’article 2.3.2 de l’accord du 14 décembre 2001 relatif à l’ARTT.

Le contrat de travail stipule en son article 6 sur la durée de travail que les fonctions de responsable régional des ventes exercées par M. [D] exigent de ce dernier une grande autonomie dans l’organisation de son temps de travail ; qu’il relève pour cette raison du régime du forfait jours à hauteur de 215 jours de travail. Il est précisé que le salarié établira et communiquera un relevé mensuel indiquant le nombre et la date de ses journées ou demi-journées de travail, le nombre et la date des journées non travaillées en précisant leur nature ; qu’un suivi régulier de l’organisation du travail et de la charge du travail du salarié sera assuré par son supérieur hiérarchique qui veillera à ce que son amplitude et sa charge de travail restent raisonnables ainsi qu’à la bonne répartition dans le temps du travail de M. [D] ; qu’un contrôle portant sur l’organisation et la charge de travail du salarié ainsi que sur l’amplitude des journées de travail sera réalisé à l’occasion d’un entretien individuel en fin d’année de référence.

La société Dimplex ne justifie pas d’un quelconque suivi régulier de l’organisation du travail et de la charge du travail de M. [D]. Au demeurant elle ne soutient pas avoir organisé un entretien individuel en fin d’année à cet effet.

En conséquence, la convention de forfait en jours est inopposable au salarié qui est donc en droit de solliciter le paiement des heures supplémentaires sous réserve qu’elles soient établies.

L’article L.3121-27 du code du travail dispose que la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à 35 heures par semaine.

L’article L.3121-28 du même code précise que toute heure accomplie au delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.

En application de l’article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce, à l’appui de sa demande, M. [D] présente les éléments suivants :

– des tableaux récapitulatifs des frais professionnels sur lesquels sont mentionnés les horaires de travail et les lieux de déplacements avec le calcul des heures de travail quotidiennes (pièce 26) ;

– des tableaux ‘heures de travail’ pour chaque année avec un calcul hebdomadaire des heures supplémentaires (pièces 46, 47, 48) ;

– des courriels envoyés à un horaire tardif.

M. [D] présente ainsi des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il dit avoir réalisées, permettant ainsi à la société Dimplex qui assure le contrôle des heures effectuées d’y répondre utilement.

A cet effet, la société fait valoir que les temps de trajet inclus par le salarié dans ses heures de travail entre l’heure de départ de son domicile et son retour ne sont pas des éléments à prendre en considération au titre du temps effectif de travail ; que Mme [O], assistante de direction atteste que M. [D] s’arrangeait toujours pour rester au bureau a minima deux jours par semaine, ‘élément que vous pouvez constater sur ses comptes rendus’; qu’en tout état de cause, la société est fondée à réclamer le paiement des jours de RTT accordés au salarié en exécution de la convention de forfaits jours, soit 21 jours pour un montant de 4.603,20 euros.

Il est de droit que le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif et que le temps de trajet dépassant le temps normal entre le domicile et le lieu de travail habituel doit faire l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière, non sollicitée au demeurant par le salarié en l’espèce. En outre, comme le soutient à juste titre l’employeur, il convient de déduire le paiement des jours RTT accordés au salarié en exécution de la convention de forfaits jours, soit la somme de 4.603,20 euros.

En conséquence, eu égard aux éléments présentés par le salarié et aux éléments de réponse utiles et pertinents apportés par l’employeur, la cour a la conviction que le salarié a exécuté des heures supplémentaires qui n’ont pas été rémunérées et après analyse des pièces produites, par infirmation du jugement déféré, condamne la société Dimplex à verser à M. [D] la somme 40.755,20 euros à ce titre pour la période courant de 2015 à 2017, déduction faite des jours RTT, outre la somme de 4.075,52 euros de congés payés afférents.

Sur le rappel de salaire au titre des primes individuelles

Pour infirmation de la décision sur ce point, M. [D] fait valoir que, pour l’année 2015-2016, aucun avenant n’est venu fixer le montant de sa rémunération variable annuelle contractuelle et qu’il a perçu une rémunération variable égale à 40% sans explication. Si pour 2016-2017, un avenant lui a été soumis, il estime devoir bénéficier de la prime totale motifs pris que l’objectif fixé a été unilatéralement modifié et augmenté et que la société ne lui a pas donné les moyens nécessaires pour atteindre ses objectifs.

Enfin, pour 2017-2018, il soutient qu’un avenant a été signé mais qu’il n’a pas perçu de prime alors qu’il a atteint ses objectifs dès la fin du mois de janvier 2018.

La société Dimplex rétorque qu’un avenant a modifié les modalités de fixation de la rémunération variable le 30 juin 2016 et que le salarié n’apporte pas la preuve de la réalisation des objectifs contractuels. En tout état de cause, la société affirme que les objectifs n’étaient pas atteints au moment du licenciement.

Aux termes de l’article 1315, devenu 1353, du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

L’article 7.1.2.2 du contrat de travail prévoit que M. [D] pourra bénéficier, à compter du 1er avril 2014, en sus de la rémunération brute d’une rémunération variable annuelle dont le montant sera conditionné par l’atteinte d’objectifs ; que les objectifs ainsi que les modalités de calcul de la rémunération variable seront fixés et précisés d’un commun accord avec M. [D] par avenant au contrat de travail ; que le montant de la rémunération variable due au titre d’une période de référence ( 1er avril de l’année N et le 31mars de l’année N+1) sera plafonné à 20 % de la rémunération fixe brute versée au salarié au cours de la même période.

Le contrat prévoit en outre que le montant de la rémunération variable sera réparti comme suit:

– 60% en fonction de l’atteinte d’objectifs globaux de chiffre d’affaires par Dimplex,

– 30% en fonction de l’atteinte d’objectif personnel de chiffre d’affaires,

– 10% en fonction de l’atteinte par le salarié d’autres objectifs personnels.

Il est acquis que M. [D] a perçu au titre de l’exercice 2015/2016 ‘une rémunération variable à hauteur de 40 % de la rémunération variable maximale indiquée dans [le] contrat de travail, soit 12.350 euros x 40% = 4.940 euros arrondis à 4.950 euros’.

Selon l’avenant en date du 30 juin 2016, l’objectif de chiffre d’affaires à réaliser par la société au cours de l’exercice 2016/2017 a été fixé à 4.194.000 euros et l’objectif personnel de chiffre d’affaires à 690.000 euros.

Comme le soutient à juste titre le salarié, c’est à l’employeur de rapporter la preuve que les objectifs n’ont pas été atteints et qu’ils étaient réalisables.

A cet effet, l’attestation de Mme [O] assistante de direction et l’email de M. [H] responsable région Est versés aux débats par la société ne sauraient établir que l’objectif de chiffres d’affaire ‘collectif ou individuel’ n’a pas été atteint par le salarié ni qu’il était réalisable.

En conséquence, par infirmation de la décision déférée, il convient de condamner la société Dimplex et selon les modalités présentées par le salarié non utilement contestées, les sommes suivantes :

– Au titre de la rémunération variable 2015- 2016 : 7.425 euros et 742,50 euros au titre des congés payés afférents ;

– Au titre de la rémunération variable 2016- 2017 : 7.425 euros et 742,50 euros au titre des congés payés afférents ;

– Au titre de la rémunération variable 2017- 2018 : 7.920 euros et 792 euros au titre des congés payés afférents.

Sur le remboursement des frais professionnels

Pour infirmation de la décision critiquée, M. [D] indique qu’une partie de ses frais professionnels du mois d’avril 2017 ne lui a jamais été remboursée, de même que les frais professionnels du mois de février 2018 pour se rendre à l’entretien préalable.

En réponse, la société affirme que les frais sollicités ont été remboursés en date du 15 mars 2018, par un virement de 1.762,03euros correspondant aux frais d’avril 2017, décembre 2017, janvier et février 2018.

Vu l’article 1315, devenu 1353, du code civil.

Il est acquis que l’employeur doit rembourser les frais de déplacement que le salarié a dû exposer pour se rendre à l’entretien préalable au licenciement. Il résulte des tableaux produits par M. [D] et non contredits par l’employeur qu’il aurait dû percevoir la somme de 1.898,38 euros au titre des frais professionnels. Il est constant qu’il a perçu la somme de 1.762,03 euros de telle sorte que la société Dimplex reste lui devoir la somme de 127,35 euros qu’elle devra lui verser par infirmation de la décision entreprise.

Sur l’exécution déloyale du contrat de travail

M. [D] fait valoir qu’au printemps 2017, il a dénoncé par courrier l’absence de suivi de son temps de travail ; que le chiffre d’affaires du secteur Bretagne devait lui être attribué ; que l’objectif fixé était irréaliste compte tenu de la baisse de moyens fournis ; que ses conditions de travail se sont détériorées à la suite des échanges restés sans réponse, avec la société.

La société Dimplex répond qu’elle a clairement pris position dans son courrier du 21 avril 2017 en indiquant au salarié qu’il disposait d’une autonomie dans l’organisation de son planning, que le suivi de son temps de travail était assuré par le relevé mensuel qu’il devait communiquer, que le chiffre d’affaires du secteur Bretagne était intégré dans l’appréciation du chiffre d’affaires global de la société, qu’enfin, il effectuait une visite clientèle par jour de sorte que la non atteinte des objectifs commerciaux s’expliquait facilement.

La cour a retenu ci-avant que le forfait jour était inopposable à M. [D] qui n’avait pas bénéficié d’entretien individuel annuel sur sa charge de travail, que l’employeur ne justifiait pas avoir fixé des objectifs réalisables et en adéquation avec les moyens mis à disposition. Il s’en déduit que la société a manqué à l’exécution loyale de ses obligations, ce qui a causé un préjudice au salarié eu égard aux échanges de courriers produits au dossier qui traduisent une dégradation de ses conditions de travail. En réparation du préjudice subi, la société Dimplex devra verser à M. [D] la somme de 2.000 euros de dommages-intérêts.

Sur la rupture du contrat de travail

Pour infirmation de la décision entreprise, la société Dimplex soutient en substance que les griefs dénoncés dans la lettre de licenciement sont établis et constituent une faute grave empêchant la poursuite du contrat de travail.

Pour confirmation du jugement en ce qu’il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour réformation de l’indemnité allouée à ce titre, M. [D] conteste les griefs et fait valoir que son poste a été supprimé, qu’il s’agit d’un licenciement économique. Il fait valoir l’inconventionnalité de l’article L. 1235-3 du code du travail.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis.

L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Il est constant que le juge a le pouvoir de requalifier la gravité de la faute reprochée au salarié en restituant aux faits leur exacte qualification juridique conformément à l’article’12 du code de procédure civile ; qu’en conséquence, si le juge ne peut ajouter d’autres faits à ceux invoqués par l’employeur dans la lettre de licenciement, lorsque celui-ci intervient pour motif disciplinaire, il doit rechercher si ces faits, à défaut de caractériser une faute grave, comme le prétend l’employeur, ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement.

En l’espèce, la lettre de licenciement qui circonscrit les limites du litige est ainsi rédigée :

‘…Nous faisons suite à notre entretien en date du 9 février 2018. Nous vous rappelons que nous vous avions régulièrement convoqué à cet entretien par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 29 janvier 2018.

Vous étiez assisté de Monsieur [C] [L], un qualité de Conseiller salarié CFTC.

Après mûre réflexion, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.

Au préalable, nous vous rappelons que vous avez été embauché le 14 février 2013 en qualité de Responsable Régional des Ventes, statut cadre, niveau VIII, échelon 3, coefficient 350 selon la classification prévue par la convention collective des Commerces de Gros.

Ace titre, vous étiez tenu d’exécuter les obligations professionnelles découlant de votre contrat de travail, à savoir notamment d’exécuter votre contrat de travail de bonne foi et de faire preuve de loyauté à l’égard de notre société.

Nous vous rappelons également qu’une carte de télépéage vous avait été remise dans le cadre de vos fonctions.

L’utilisation de cette carte de télépéage était encadrée par les règles suivantes :

* conformément à l’article 9 de votre contrat de travail : ‘les équipements professionnels mis à la disposition de Monsieur [R] [D] pour les besoins de son activité professionnelle sont réservés à un strict usage professionnel ».

* conformément à l’article 6 de la réglementation interne sur les frais professionnels établie le 17 août 2015 (document qui vous a été remis contre récépissé le 7 octobre 2015) : ce badge de télépéage est réservé à un strict usage professionnel’.

Pour rappel, le document susvisé vous informait du fait que tout manquement aux règles fixées était ‘susceptible d’entraîner une procédure disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement’.

Or, dans le cadre de la vérification de la facture de télépéage concernant le mois de décembre 2017, nous avons avec stupeur constaté que vous aviez à plusieurs reprises fait usage de la carte de télépéage mis à votre disposition par la société dans le cadre de déplacements privés.

En effet, la facture susvisée fait apparaître les opérations suivantes :

* utilisation de la carte de télépéage pour un parking de la gare d'[5] le 10 décembre 2017 (un dimanche !) ;

* plusieurs utilisations de la carte de télépéage (5 au total) sur l’autoroute le 15 décembre 2017 (vous étiez en RTT !) ;

* une utilisation de la carte de télépéage sur l’autoroute le 24 décembre 2017 (un dimanche !);

* une utilisation de la carte de télépéage sur l’autoroute le 26 décembre 2017 (un jour férié au sein de l’entreprise) ;

* une utilisation de la carte de télépéage sur l’autoroute le 29 décembre 2017 (vous étiez en RTT !) ;

* une utilisation de la carte de télépéage sur l’autoroute le 31 décembre 2017 (un dimanche !);

Nous avons constaté que la facture de télépéage du mois de janvier 2018 comporte des incohérences similaires :

* une utilisation de la carte de télépéage sur l’autoroute le 3 janvier 2018 (vous étiez en RTT!);

* une utilisation de la carte de télépéage pour un parking de la gare d'[5] le 21 janvier 2018 (un dimanche !) ;

* une utilisation de la carte de télépéage sur l’autoroute le 8 janvier 2018 (un dimanche !);

Dans la mesure où les dates susvisées correspondant à des journées non travaillées, nous pouvons fort logiquement en déduire que ces utilisations de la carte de télépéage n’ont manifestement aucun lien avec votre activité professionnelle et sont intervenues dans le cadre de déplacements privés.

Nous avons hélas découvert qu’il ne s’agissait pas d’incidents isolés mais d’une pratique régulière et habituelle de votre part : En effet. les incohérences relevées sur les factures de décembre 2017 et de janvier 2018 ayant suscité de fortes suspicions, nous avons procédé à une vérification des factures de télépéage depuis février 2016. Dans le cadre de cette vérification, nous avons identifié au total 5 utilisations de la carte de télépéage depuis février 2016 coïncidant avec des jours non travaillés (RTT, week-ends, congés payés ) !

Le montant total correspondant à votre utilisation continue et répétée de la carte de télépéage à des fins privées s’élève à 437,30 eurost TTC sur la période vérifiée (février 2016 – janvier 2018). Le préjudice financier pour la société est donc loin d’être négligeable!

Vous ne vous êtes à aucun moment manifesté auprès de la Direction pour faire part de ces incidents et pour régulariser la situation.

En outre, lors de notre entretien en date du 9 février 2018, vous avez reconnu avoir utilisé votre carte de télépéage à des fins privées depuis votre embauche !

Vous avez ainsi enfreint de manière évidente les dispositions susvisées de votre contrat de travail et de la réglementation interne sur les frais professionnels.

Ces agissements répétés constituent des manquements graves à votre obligation de loyauté à notre égard.

Il convient également de rappeler que vous étiez tenu, au titre de votre contrat de travail, de fournir votre prestation de travail !

De plus, nous précisons que :

* l’article 6 de votre contrat de travail prévoit que ‘les journées de repos seront prises en accord avec la Société’ ;

* selon les règles internes en vigueur dans l’entreprise, la prise de toute journée de repos suppose un accord préalable du supérieur hiérarchique via la validation d’un formulaire de demande établi par le salarié et soumis au responsable hiérarchique avant la journée de repos considérée.

Pour rappel, vous étiez sensé être en RTT du 28 décembre 2017 au 3 janvier 2018, votre reprise du travail étant fixée au 4 janvier 2018.

Or les 4 et 5 janvier 2018, vous n’avez pas repris vos fonctions, ce sans en informer la Direction (et encore moins en demandant son accord préalable) !

Vous vous êtes contenté d’adresser un mail à notre assistante, Madame [O], le 28 décembre 2017, en vous bornant à transmettre un tableau comportant la mention suivante:

‘annule et remplace les 3 RTT de décembre, en effet le 26 décembre est férié et les 27 et 28 j’ai dû travailler, je ne prends que le 29. J’ai complété ma demande de janvier pour les 4 et 5 janvier’.

[Il est à titre accessoire précisé que vous n’aviez pas présenté de demande de RTT pour le 27 décembre 2017]

Ainsi vous n’avez pas accompli votre prestation de travail les 4 et 5 janvier 2018, ce sans recueillir l’accord préalable de la Direction et sans aucune justification sérieuse. Vous nous avez mis ‘devant le fait accompli’, en vous manifestant au dernier moment alors même que Madame [O] et moi-même étions tous deux en congé et n’étions pas en mesure de traiter votre demande !

Quand bien même vous bénéficiez, de part la nature de vos fonctions, d’une autonomie dans le cadre de l’organisation de votre temps de travail, cette autotomie ne vous autorise pas à imposer vos journées de repos sans vous concerter au préalable avec la Direction !

Vous avez ainsi de votre propre autorité, estimé pouvoir différer de deux jours votre reprise du travail, sans vous concerter avec votre supérieur hiérarchique et sans vous interroger sur les perturbations que votre absence imprévue pourrait engendrer.

Ce comportement constitue un acte d’insubordination manifeste et traduit votre sérieux manque de professionnalisme.

Vous comprendrez aisément que l’ensemble des faits relatés ci-dessus représentent des fautes professionnelles extrêmement graves d’autant plus que les relations de travail au sein de notre entreprise se fondent notamment sur le professionnalisme, le sérieux , la loyauté et la confiance mutuelle.

Nous ne pouvons tolérer vos agissements et votre comportement professionnel qui constituent une violation grave de vos obligations contractuelles et ce, au mépris des intérêts de votre entreprise.

Votre comportement professionnel a incontestablement perturbé le bon fonctionnement de notre société. Votre attitude a également engendré un préjudice moral et financier particulièrement sérieux.

Nous ne pouvons tolérer un tel comportement professionnel totalement contraire aux intérêts de notre entreprise. C’est pourquoi, nous considérons que les faits précités constituent une faute grave et rendent impossible votre maintien, même temporaire, au sein de notre entreprise. Votre licenciement est donc immédiat, sans préavis ni indemnité de licenciement…’

Il est donc reproché à M. [D] des absences injustifiées les 4 et 5 janvier 2018 ainsi que l’utilisation à titre personnel de la carte télépéage.

Sur les absences des 4 et 5 janvier 2018, il résulte des éléments versés aux débats que les salariés avaient pour consigne de soumettre leur demande de congés deux jours avant leur date ; que le 28 décembre 2017, M. [D] a avisé Mme [O] qu’il a remplacé les trois jours de RTT posés en décembre par les 29 décembre 2017, 4 et 5 janvier 2018 ; que ce faisant, il a respecté les consignes sans que la société ne puisse soutenir qu’il n’a pas informé la direction de son absence préalablement à celle-ci et sans que celle-ci ne démontre, contrairement à ce qu’elle soutient dans la lettre de licenciement, que son absence a engendré une quelconque perturbation et ce d’autant plus qu’elle ne manque pas de se prévaloir de l’autonomie de son salarié dans l’organisation de son travail. Ce grief n’est donc ni sérieux ni réel.

Sur l’utilisation de la carte de télépéage, le contrat de travail précise que le salarié disposera pour ses déplacements professionnels d’un véhicule de fonction ; que les conditions d’utilisation de ce véhicule seront régies par une convention séparée ; qu’il s’engage ‘à respecter la réglementation interne sur les véhicules de fonction en vigueur dans l’entreprise dont un exemplaire lui est remis ce jour’.

La société Dimplex justifie de la remise à M. [D] le 7 octobre 2015 de cette réglementation interne aux termes de laquelle ‘la société prendra en charge les frais de péage liés aux déplacements professionnels des collaborateurs disposant d’un véhicule de fonction via la mise à disposition d’une carte de télépéage ; il est rappelé que ce badge de télépéage est réservé à un usage strictement professionnel’. Le salarié ne peut soutenir que cette réglementation n’était pas claire comme étant en contradiction avec les mentions relatives aux frais de carburant selon lesquelles ‘la carte carburant est exclusivement réservée au règlement des frais de carburant exposés lors de l’utilisation par le collaborateur du véhicule de fonction fourni par la société dans le cadre de ses déplacements privés sur le territoire français ainsi que tous ses déplacements professionnels’. Cependant, si l’utilisation de la carte télépéage non conforme à la réglementation interne est établie, il appert, selon l’attestation de M. [L] qui a assisté le salarié lors de l’entretien préalable, et sans être contredit par l’employeur, que M. [D] a proposé de rembourser la somme visée dans la lettre de licenciement. En outre, alors qu’il est reproché une utilisation non conforme de février 2016 à janvier 2018, force est de constater que la société Dimplex n’a pas cru devoir rappeller les consignes à son salarié. Il s’ensuit que si les faits sont fautifs, la sanction par la mise en oeuvre d’une procédure de licenciement est disproportionnée de telle sorte que ce licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La décision critiquée sera confirmée de ce chef.

Sur les conséquences financières

Au vu des bulletins de salaire produits et de l’ancienneté du salarié, c’est à juste titre que les premiers juges ont condamné la société Dimplex à verser à M. [D] les sommes de :

– 15.227 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

– 1.522 euros au titre des congés payés afférents

– 7.401 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

– 2.192 euros au titre de la mise à pied conservatoire,

– 219,20 euros au titre des congés payés afférents.

La décision sera confirmée de ces chefs.

Sur la demande d’indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié conteste l’application du barème prévu par l’article L.1235.3 du code du travail motifs pris que seule la juridiction prud’homale est à même de juger d’une indemnisation appropriée conforme à l’article 24 de la Charte des droits sociaux et à l’article 10 de la convention de l’OIT.

Aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse.

Les stipulations de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail, qui créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir à l’encontre d’autres particuliers et qui, eu égard à l’intention exprimée des parties et à l’économie générale de la convention, ainsi qu’à son contenu et à ses termes, n’ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l’intervention d’aucun acte complémentaire, sont d’effet direct en droit interne.

Les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail, dans leur rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qui permettent raisonnablement l’indemnisation de la perte injustifiée de l’emploi et assurent le caractère

dissuasif des sommes mises à la charge de l’employeur, sont de nature à permettre le versement d’une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail.

Il en résulte que les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention précitée.

Sous réserve des cas où est en cause un traité international pour lequel la Cour de justice de l’Union européenne dispose d’une compétence exclusive pour déterminer s’il est d’effet direct, les stipulations d’un traité international, régulièrement introduit dans l’ordre juridique interne conformément à l’article 55 de la Constitution, sont d’effet direct dès lors qu’elles créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir et que, eu égard à l’intention exprimée des parties et à l’économie générale du traité invoqué, ainsi qu’à son contenu et à ses termes, elles n’ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l’intervention d’aucun acte complémentaire pour produire des effets à l’égard des particuliers.

Les dispositions de la Charte sociale européenne selon lesquelles les Etats contractants ont entendu reconnaître des principes et des objectifs poursuivis par tous les moyens utiles, dont la mise en ‘uvre nécessite qu’ils prennent des actes complémentaires d’application et dont ils ont réservé le contrôle au seul système spécifique visé par la partie IV, ne sont pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers.

L’invocation de son article 24 ne peut dès lors pas conduire à écarter l’application des

dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans leur rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.

En application de l’article L.1235-3 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2018-217 du 29 mars 2018, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant, eu égard à l’ancienneté du salarié, est compris entre 3 mois et 5 mois de salaire.

A la date du licenciement, M. [D] était âgé de 54 ans et bénéficiait de 5 ans d’ancienneté. Il justifie avoir bénéficié des indemnités de chômage et de nombreuses démarches pour retrouver un emploi. Il a été embauché en mai 2018 comme délégué régional des ventes pour un salaire brut de 4.076,92 euros.

Eu égard à ses éléments et au fait que M. [D] fonde sa demande sur un salaire de référence de 5.921,44 euros, il convient de condamner la société Dimplex à lui verser la somme de 24.000 euros par infirmation de la décision déférée.

Sur les indemnités chômage

En application de l’article L.1235-4 du code du travail, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

En l’espèce, il convient d’ordonner le remboursement par la société Dimplex des indemnités de chômage versées à M. [D] dans la limite de 6 mois. La décision sera infirmée de ce chef.

Sur les frais irrépétibles

La société Dimplex sera condamnée aux entiers dépens. La décision des premiers juges qui ont condamné la société Dimplex à verser 1.000 euros à M. [D] sera confirmée. La société sera en outre condamnée à verser au salarié la somme de 2.500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a dit le licenciement de M. [R] [D] dépourvu de cause réel et sérieuse et condamné la SAS Dimplex Solutions Thermodynamiques à lui verser les sommes de :

– 15.227 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

– 1.522 euros au titre des congés payés afférents

– 7.401 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

– 2.192euros au titre de la mise à pied conservatoire,

– 219,20 euros au titre des congés payés afférents,

– 1.000 en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

INFIRME le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la SAS Dimplex Solutions Thermodynamiques à verser à M. [R] [D] les sommes suivantes :

– 40.755,20 euros au titre des heures supplémentaires pour les années 2015 à 2017 ;

– 4.075,52 euros de congés payés afférents ;

– 7.425 euros au titre de la rémunération variable 2015- 2016 ;

– 742,50 euros au titre des congés payés afférents ;

– 7.425 euros au titre de la rémunération variable 2016- 2017 ;

– 742,50 euros au titre des congés payés afférents ;

– 7.920 euros au titre de la rémunération variable 2017- 2018 ;

– 792 euros au titre des congés payés afférents ;

– 127,35 euros au titre des frais professionnels ;

– 2.000 euros de dommages-intérêts au titre de l’exécution du contrat de travail ;

– 24.000 euros d’indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil des prud’hommes, les autres sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de la décision qui les alloue ;

CONDAMNE la SAS Dimplex Solutions Thermodynamiques à rembourser à Pôle Emploi les indemnités chômage perçues par M. [R] [D] du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé dans la limite de 6 mois ;

CONDAMNE la SAS Dimplex Solutions Thermodynamiques aux entiers dépens ;

CONDAMNE la SAS Dimplex Solutions Thermodynamiques à verser à M. [R] [D] la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente.

 


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