Heures supplémentaires : 16 mai 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/00748

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Heures supplémentaires : 16 mai 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/00748
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/00748 – N° Portalis DBVH-V-B7F-H6Q2

MS/EB

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES

29 janvier 2021

RG :18/00444

[G]

C/

S.A.S. AVIS LOCATION VOITURES

Grosse délivrée le 16 MAI 2023 à :

– Me

– Me

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 16 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NIMES en date du 29 Janvier 2021, N°18/00444

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Michel SORIANO, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

M. Michel SORIANO, Conseiller

Madame Leila REMILI, Conseillère

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 Mai 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 16 Mai 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

Madame [E] [B] [G]

née le 03 Juillet 1968 à [Localité 6] (33)

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Barbara MICHEL, avocat au barreau de NIMES substituée par Me Mathilde BENAMARA, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Bruno DAMOY, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

S.A.S. AVIS LOCATION VOITURES

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Audrey TOMASZEWSKI de la SCP EVERSHEDS-SUTHERLAND PARIS LLP, avocat au barreau de PARIS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 02 Février 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 16 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Mme [E] [G] a été engagée à compter du 1er octobre 1991, suivant contrat à durée indéterminée, en qualité d’agent d’opération par la SAS Avis location de voitures (la société Avis).

Au dernier état de la relation contractuelle, Mme [E] [G] occupait le poste de chef d’agence, statut cadre.

A compter du 4 août 2017, Mme [G] a été placée en arrêt maladie.

Le 12 mars 2018, lors de la visite de reprise, le médecin du travail a rendu un avis d’inaptitude pour tout poste dans l’entreprise et a dispensé l’employeur de son obligation de reclassement.

Par courrier du 9 avril 2018, Mme [G] a été convoquée à un entretien préalable, fixé au 23 avril 2018.

Par courrier du 14 mai 2018, la salariée a été licenciée pour inaptitude professionnelle et impossibilité de reclassement.

Par requête du 3 août 2018, Mme [G] a saisi le conseil de prud’hommes de Nîmes aux fins de dire et juger nulle et sans effet la convention de forfait jours, que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de voir de condamner la SAS Avis location de voitures au paiement de diverses sommes indemnitaires.

Par jugement du 29 janvier 2021, le conseil de prud’hommes de Nîmes a :

– débouté Mme [E] [G] de l’ensemble de ses demandes,

– condamné Mme [E] [G] à verser à la SAS Avis location de voitures la somme de 700 euros au titre de l’application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [E] [G] aux entiers dépens.

Par acte du 22 février 2021, Mme [E] [B] [G] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 27 avril 2021, Mme [G] demande à la cour de :

– infirmer en tous points le jugement du conseil de prud’hommes de Nîmes du 29 janvier 2021 en ce qu’il a débouté Mme [E] [G] de l’ensemble de ses demandes,

Et statuant à nouveau,

– dire et juger nulle et de nul effet la convention de forfait jours imposée à Mme [E] [G],

– dire et juger encore le licenciement dont Mme [E] [G] a fait l’objet comme ne reposant sur aucune cause réelle ni sérieuse,

– condamner la société Avis location de voitures à payer à Mme [E] [G] les sommes de :

– 209.783 euros au titre des heures supplémentaires sur la période de janvier 2016 à mai 2018 inclus,

– 20.978 euros au titre des congés payés y afférents,

– 90.780 euros au titre de l’indemnité forfaitaire prévue à l’article L8223-1 du code du travail,

– 110.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

– 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile,

– condamner encore la société Avis location de voitures à remettre à Mme [E] [G] un certificat de travail, une attestation Pole Emploi dûment rectifié s’agissant de la date d’embauche au 1er octobre 1991,

– condamner la société Avis aux entiers dépens comme aux frais et honoraires éventuels de l’exécution.

Mme [E] [G] soutient que :

– sur la convention de forfait jours

– la société Avis n’a jamais institué de mesures propres à garantir la santé et la sécurité des salariés, pas davantage de mesures permettant le suivi régulier de la charge de travail du salarié ou les modalités selon lesquelles ce dernier pouvait valablement exercer son droit à la déconnexion,

– les entretiens individuels organisés au sein de la société n’ont jamais porté spécifiquement sur l’organisation du travail, le fait pour le salarié de pouvoir concilier sa vie professionnelle avec sa vie privée et la charge de travail,

– elle a toujours été dans l’obligation de répondre à ses obligations professionnelles, même à l’occasion des week-ends, jours de congés, et même à l’occasion de certaines absences pour cause de maladie,

– il n’a jamais été mis en place d’entretien mensuel ou de documents véritablement efficaces de contrôles permettant de s’assurer de l’amplitude journalière, hebdomadaire ou mensuelle de travail,

– elle peut dès lors prétendre au paiement des nombreuses heures supplémentaires effectuées,

– elle produit des décomptes démontrant qu’elle était amenée à travailler 70 heures par semaine,

– sur le licenciement

– à la lumière des éléments donnés par la médecine du travail, son inaptitude procède des conditions de travail imposées l’ayant placée en situation de danger,

– elle a été la victime de mesures vexatoires comme de mesures de pression engageant sa hiérarchie,

– le but de l’employeur était de supprimer son poste, elle n’a d’ailleurs pas été remplacée.

En l’état de ses dernières écritures en date du 8 juillet 2021contenant appel incident, la SAS Avis location de voitures demande à la cour de :

– confirmer le jugement de conseil de prud’hommes de Nîmes du 29 janvier 2021 en ce qu’il a débouté Mme [E] [G] de l’intégralité de ses demandes,

Et plus précisément en ce qu’il a débouté Mme [E] [G] des demandes suivantes :

– 209.783 euros au titre des heures supplémentaires sur la période de janvier 2016 à mai 2018 inclus,

– 20.978 euros au titre des congés payés y afférents,

– 90.780 euros au titre de l’indemnité forfaitaire prévue à l’article L8223-1 du code du travail,

– 110.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

– 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– et les entiers dépens et remettre à Mme [E] [G] un certificat de travail, une attestation Pole Emploi dûment rectifié s’agissant de la date d’embauche au 1er octobre 1991,

– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné Mme [E] [G] à la somme de

700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné Mme [E] [G] aux entiers dépens,

Y ajouter,

– débouter Mme [E] [G] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus

amples ou contraires,

– condamner Mme [E] [G] à verser à la société 1.000 euros au titre de

l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel.

La SAS avis de location de voitures fait valoir que :

– sur la convention de forfait

– la convention collective nationale des services de l’automobile prévoit la possibilité de recourir à une convention de forfait en jours,

– elle a conclu un accord d’entreprise portant sur l’aménagement et la réduction du temps de travail, prévoyant la possibilité de recourir au forfait en jours,

– dans le cadre de ses nouvelles fonctions et compte tenu de son niveau de responsabilité et de son degré d’autonomie dans l’organisation de son travail, Mme [G] bénéficiait d’un temps de travail réparti « au maximum de 212 jours de travail par année civile » à compter du 15 février 2003,

– depuis, Mme [G] a d’ailleurs régulièrement bénéficié de ses jours de récupération,

– le seul fait d’invoquer que Mme [G] avait à sa disposition un ordinateur portable et un téléphone Blackberry ne saurait suffire à établir une surcharge de travail ,

– elle avait bien mis en place un dispositif afin de suivre la charge de travail de salariés en forfait jours.

Mme [G] a bénéficié d’entretiens dans lesquels il a été question de sa charge de travail,

– subsidiairement, sur les heures supplémentaires :

– les tableaux transmis par Mme [G] ont été effectués pour les simples besoins de la cause,

– les tableaux ne sont pas précis, les heures d’arrivée et de départ au sein de la société ne sont pas mentionnées,

– les pages de l’agenda versées au débat sont illisibles et elles ne permettent en aucun cas de justifier de l’accomplissement d’heures supplémentaires,

– sur l’origine de l’inaptitude

– Mme [G] a refusé d’échanger avec la société sur ses éventuelles difficultés,

– il lui était donc impossible de déterminer d’éventuelles mesures à prendre,

– l’appelante ne justifie pas de difficultés dans l’exécution de son travail et ne démontre pas l’avoir alertée sur une surcharge de travail,

– Mme [G] ne démontre pas plus un quelconque comportement méprisant et irrespectueux de sa supérieure hiérarchique.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 28 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 2 février 2023 à 16 heures et fixé l’examen de l’affaire à l’audience du 16 février 2023.

MOTIFS

Sur la nullité de la convention de forfait jours

Mme [G] a été soumise à une convention de forfait en jours à compter du 15 février 2003, conformément à l’accord sur la réduction et l’aménagement du temps de travail du 26 janvier 2000, sur la base d’un nombre maximum de 212 jours de travail par année civile.

Il résulte des dispostions de l’article L212-15-3 du code du travail applicables au litige, que ‘la convention ou l’accord collectif prévoyant la conclusion de conventions de forfait en jours ne doit pas avoir fait l’objet d’une opposition en application de l’article L. 132-26. Cette convention ou cet accord doit fixer le nombre de jours travaillés. Ce nombre ne peut dépasser le plafond de deux cent dix-sept jours. La convention ou l’accord définit, au regard de leur autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps, les catégories de cadres concernés. La convention ou l’accord précise en outre les modalités de décompte des journées et des demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos. Il détermine les conditions de contrôle de son application et prévoit des modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés concernés, de l’amplitude de leurs journées d’activité et de la charge de travail qui en résulte. L’accord peut en outre prévoir que des jours de repos peuvent être affectés sur un compte épargne-temps dans les conditions définies par l’article L. 227-1.’

Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail, des repos journaliers et hebdomadaires dont le suivi effectif par l’employeur permet de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable.

Pour être valable, ce dispositif doit prévoir des modalités de contrôle sur la charge de travail et des moyens d’assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, notamment sous la forme de la tenue d’un entretien annuel portant précisément sur la charge de travail, l’organisation et l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale ainsi que sur la rémunération du salarié.

A défaut de telles précisions dans le contrat de travail ou la convention individuelle de forfait subséquente, le forfait annuel en jours est nul et en conséquence inopposable au salarié.

L’employeur s’appuie sur la convention collective nationale des services de l’automobile contenant à l’article 1.09 f, dans sa version applicable à l’espèce, des stipulations relatives au forfait en jour (salariés visés, nombre de jours de travail, régime juridique, rémunération). Il était aussi prévu dans ladite convention collective, à l’article 4.06, la mise en oeuvre d’un système déclaratif des salariés soumis à un forfait annuel en jours, lesdits salariés devant renseigner un document de suivi du forfait.

Or, les dispositions susvisées de la convention collective ne prévoient qu’un système déclaratif mis à la charge des salariés et de ce fait ne sont pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié.

En effet, ces dispositions font reposer sur le seul salarié, via le système déclaratif, la garantie du respect de sa santé et de sa sécurité.

L’article 4.06 de la convention collective prévoit en outre que ‘chaque année, au cours d’un entretien individuel, un point sera fait avec le salarié sur sa charge de travail, son organisation du travail, l’amplitude de ses journées de travail, l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale. L’objectif est de vérifier l’adéquation de la charge de travail au nombre de jours prévu par la convention de forfait et de mettre en ‘uvre les actions correctives en cas d’inadéquation avérée. Dans un tel cas, l’employeur adressera des propositions d’actions correctives au salarié, puis les parties donneront leur appréciation sur l’efficacité des actions correctives mises en ‘uvre lors d’un second entretien, qui devra se tenir dans les 3 mois qui suivent le premier.’

L’employeur soutient avoir organisé les entretiens susvisés mais ne vise dans ses écritures aucune pièce pour le démontrer.

Dès lors, la convention de forfait de Mme [G] est nulle.

La salariée peut par conséquent prétendre au paiement d’heures supplémentaires dont il convient de vérifier l’existence et le nombre.

Aux termes de l’article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.

À défaut d’éléments probants fournis par l’employeur, les juges se détermineront au vu des seules pièces fournies par le salarié

Après analyses des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce, Mme [G] produit les éléments suivants :

– des décomptes journaliers des heures prétendument réalisées, avec un total hebdomadaire, pour les années 2015 à 2017,

– des copies d’agendas 2016 et 2017.

La salariée produit ainsi des éléments suffisamment précis permettant à l’employeur d’y répondre utilement.

En défense, l’employeur conteste la demande de la salariée aux motifs que :

– les tableaux transmis par la salariée ont été effectués pour les simples besoins de la cause,

– les tableaux ne sont pas précis, les heures d’arrivée et de départ ne sont pas mentionnées,

– les pages de son agenda versées au débat sont illisibles et ne permettent en aucun cas de justifier de l’accomplissement d’heures supplémentaires.

L’employeur produit le relevé des jours travaillés établi par la salariée mais sans procéder à une comparaison avec les agendas produits par cette dernière, ni émettre une quelconque contestation ou différence entre les deux documents.

De plus, ces relevés ne détaillent que les jours de présence et aucunement les heures de travail.

La société Avis, qui conteste ainsi le caractère précis des éléments apportés par la salariée, n’apporte pour sa part pas d’élément sur le temps de travail de celle-ci.

Or, il lui appartient, en sa qualité d’employeur, d’assurer le contrôle des heures de travail effectuées par ses salariés.

La cour a ainsi la conviction que Mme [G] a réalisé des heures supplémentaires mais dans une proportion moins élevée que celles réclamées, Mme [G] soutenant avoir effectué 70 heures hebdomadaires alors qu’elle n’a atteint ce quota d’heures qu’à une seule reprise ainsi qu’il résulte de ses décomptes.

Infirmant le jugement, il convient en conséquence de condamner la société Avis location de voitures à payer à Mme [G] la somme de137.216 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre 13.721,60 euros bruts au titre des congés payés afférents.

Sur l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

Il résulte de l’article L8223-1 du code du travail que le salarié dont le travail a été dissimulé par l’employeur a droit en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié est notamment caractérisé par le fait pour l’employeur de mentionner intentionnellement sur les bulletins de paie, un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Toutefois, le caractère intentionnel ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

Le seul fait d’avoir soumis à tort un salarié à une convention de forfait privée d’effet ne suffit pas, en soi, à caractériser le caractère intentionnel d’une dissimulation d’emploi salarié.

En l’espèce, si l’employeur a pu se méprendre sur la portée réelle de ses obligations en matière de suivi de la charge de travail, la salariée appelante n’apporte aucun élément susceptible de démontrer un tel élément intentionnel dans l’établissement des bulletins de paie ne mentionnant pas les heures supplémentaires, et ce alors que l’employeur la croyait valablement soumise à une convention individuelle de forfait en jour.

La décision déférée sera donc confirmée sur ce point.

Sur le licenciement

La salariée considère que son licenciement procède des conditions de travail imposéespar l’employeur et l’ayant placée en situation de danger.

Le licenciement pour inaptitude d’un salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsqu’il est démontré que l’ inaptitude est consécutive à un manquement préalable de l’employeur qui l’a provoquée.

Il incombe au salarié de démontrer que le manquement de l’employeur est à l’origine de son inaptitude .

En l’espèce, Mme [G] soutient que le comportement fautif de la société Avis réside dans le fait de lui avoir fait réaliser un nombre d’heures de travail totalement anormal, ‘sans possibilité aucune de déconnexion, même à l’occasion de ses périodes de congé et d’absence pour cause de maladie.’

La cour a retenu supra l’accomplissement par la salariée de nombreuses heures supplémentaires, eu égard à la nullité de la convention de forfait existante.

Il résulte également à suffisance des attestations de collègues de travail et notamment de Mme [J], assistante city manager de l’appelante, que les conditions de travail se sont dégradées au cours de l’année 2017, cette dégradation entraînant un stress important sur Mme [G], tenant ses fonctions de city manager, et entraînant corrélativement un arrêt maladie à compter du 4 août 2017 pour un syndrome anxio dépressif.

Les témoignages et les courriels de Mme [X] démontrent également un management autoritaire voire agressif de cette dernière sur l’ensemble du personnel du site d'[Localité 5] Gare TGV.

Mme [G] justifie en outre avoir suivi un traitement anti dépresseur à compter de son arrêt de travail, jusqu’à l’avis d’inaptitude définitif de la médecine du travail du 12 mars 2018, dont les conclusions sont les suivantes :

‘Inapte à tous les postes du groupe’

l’employeur étant dispensé de recherche de reclassement en ces termes :

‘tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé’.

La cour relève encore que Mme [G] n’avait aucun problème de santé auparavant.

Il résulte des éléments retenus supra que l’inaptitude de l’appelante est consécutive aux manquements de l’employeur, le licenciement devant dans ces circonstances être déclaré sans cause réelle et sérieuse.

En application de l’article L 1235-3 du code du travail, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse et de non réintégration du salarié dans l’entreprise, le juge octroie au salarié une indemnité comprise entre un minimum et un maximum, à savoir en l’espèce compte tenu de l’ancienneté de Mme [G], entre 3 et 18,5 mois de salaire brut, avec la précision que seules comptent les années complètes d’ancienneté.

Ce faisant, et tenant l’absence de tout élément sur la situation professionnelle et financière de l’appelante depuis la rupture du contrat de travail, il lui sera alloué une indemnité de 15.632,40 euros.

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d’ordonner le remboursement par la société aux organismes concernés, parties au litige par l’effet de la loi, des indemnités de chômage qu’ils ont versées le cas échéant à Mme [G] à compter du jour de son licenciement, jusqu’au jour du présent arrêt et ce à concurrence de six mois.

Sur les demandes accessoires

L’employeur sera condamné à remettre à la salariée dans le délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt les documents de fin de contrat rectifiés et comportant une date d’embauche au 1er octobre 1991.

Le jugement querellé sera réformé en ce qu’il a condamné Mme [G] à une somme au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux dépens.

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’appelante et de mettre les dépens de première instance et d’appel à la charge de la SAS Avis location de voitures.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

Réforme le jugement rendu le 29 janvier 2021 par le conseil de prud’hommes de Nîmes en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Dit le forfait jours inopposable à Mme [E] [G],

Condamne la SAS Avis location de voitures à payer à Mme [E] [G] la somme brute de 137.216 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires, ainsi que celle de 13.721,60 euros bruts pour les congés payés afférents,

Dit le licenciement de Mme [E] [G] par la SAS Avis location de voitures sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la SAS Avis location de voitures à payer à Mme [E] [G] la somme de 15632,40 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne le remboursement par l’employeur aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage payées à la salariée licenciée du jour de son licenciement au jour du prononcé de la présente décision, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage,

Ordonne la délivrance par l’employeur à Mme [E] [G] d’un certificat de travail et d’une attestation Pôle emploi faisant état d’une date d’embauche au 1er octobre 1991, dans le délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt,

Condamne la SAS Avis location de voitures à payer à Mme [E] [G] la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SAS Avis location de voitures aux dépens de première instance et d’appel,

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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