Your cart is currently empty!
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
6e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 11 MAI 2023
N° RG 21/00042 –
N° Portalis DBV3-V-B7F-UHVX
AFFAIRE :
[Z] [H] épouse [J]
C/
Association HOPITAL [3] DE [Adresse 5]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Décembre 2020 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE
N° Section : E
N° RG : F 18/01374
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Mélina PEDROLETTI
Me Frédéric ZUNZ
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE ONZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, devant initialement être rendu le 06 avril 2023 et prorogé au 11 mai 2023, les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :
Madame [Z] [H] épouse [J]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 et Me Juliette SAINT-LEGER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0327
APPELANTE
****************
Association HOPITAL [3] DE [Adresse 5]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Frédéric ZUNZ de la SELEURL MONTECRISTO, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J153
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 09 février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,
Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,
Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,
Greffier en pré-affectation lors des débats : Domitille GOSSELIN,
Rappel des faits constants
L’association Hôpital [3] de [Adresse 5], dont le siège social est situé à [Localité 4] dans les Hauts-de-Seine, exploite un établissement hospitalier. Elle emploie environ 900 salariés et applique la convention collective nationale des établissements privés d’hospitalisation, des soins, de cure et de garde à but lucratif du 31 octobre 1951.
Mme [Z] [H] épouse [J], née le 26 juin 1962, a été engagée par cette association, selon contrat de travail à durée indéterminée du 4 juillet 2007, en qualité de responsable comptabilité, position cadre, moyennant un salaire initial mensuel de 5 833,33 euros brut, outre une prime sur objectifs pouvant atteindre 5 000 euros à objectifs atteints.
Le contrat de travail de Mme [J] contenait une convention de forfait en jours de 200 jours par an.
En dernier lieu, Mme [J] occupait le même poste, moyennant une rémunération mensuelle moyenne de 6 601,13 euros brut, calculée sur la base des douze derniers mois.
Par courrier en date du 26 septembre 2016, Mme [J] a démissionné de ses fonctions dans les termes suivants :
« Par cette lettre, je vous informe de ma décision de quitter le poste de responsable comptable que j’occupe depuis le 2 mai 2007, à l’Hôpital [3] de [Adresse 5].
Comme l’indique la convention collective de la Fehap, applicable à notre entreprise, je respecterai un préavis de départ d’une durée de deux mois. La fin de mon contrat sera donc effective le 25 novembre 2016 ».
Mme [J] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre en requalification de sa démission par requête reçue au greffe le 7 juin 2018.
La décision contestée
Par jugement contradictoire rendu le 2 décembre 2020, la section encadrement du conseil de prud’hommes de Nanterre a :
– dit que la démission de Mme [Z] [J] n’avait pas l’effet d’une prise d’acte de la rupture de son contrat de travail au sein de l’association Hôpital [3] de [Adresse 5],
– condamné l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à payer à Mme [Z] [J] les sommes de :
. 4 125 euros brut au titre de la prime sur objectifs 2016,
. 412,50 euros brut au titre des congés afférents,
– condamné l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à fournir à Mme [Z] [J] les documents de fin de contrat à jour (bulletin de paie, attestation Pôle emploi),
– condamné l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à payer à Mme [Z] [J] la somme de l 200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté Mme [Z] [J] de ses autres demandes,
– dit qu’il n’y avait pas lieu à exécution provisoire pour les chefs de demande qui ne sont pas de droit,
– débouté l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] de sa demande au titre des frais irrépétibles,
– condamné l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] aux éventuels dépens.
Mme [J] avait formulé les demandes suivantes :
– juger sa démission équivoque et devant produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, compte tenu des manquements de l’employeur,
– indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en net : 37 510,80 euros,
– indemnité légale de licenciement en net : 12 542,15 euros,
– complément d’indemnité compensatrice de préavis en brut : 12 503,60 euros,
– complément d’indemnité de congés payés sur préavis en brut : 1 400,40 euros,
– juger qu’elle est fondée à réclamer à l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] un complément d’indemnité de congés payés,
– condamner en conséquence l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser à titre de complément d’indemnité de congés payés pris sur les années 2014 à 2016 inclus, en brut : 194,49 euros,
– juger que c’est abusivement que l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] s’est opposée, entre 2013 et 2016, à ses demandes de régularisation quant à ses indemnités de congés payés,
– condamner en conséquence l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive une somme en net de 4 000 euros,
– juger que la convention forfait en jours conclue avec l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] lui est inopposable,
– condamner en conséquence l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser à titre de rappel d’heures supplémentaires, une somme de 88 149,14 euros en brut outre, au titre des congés payés afférents en brut, 9 872,70 euros,
– juger qu’elle était fondée à percevoir une prime sur objectifs pour l’année 2016,
– condamner en conséquence 1’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser à titre de rappel de prime sur objectifs 2016 en brut la somme de 4 416,67 euros,
– congés payés afférents : 494,68 euros,
– juger qu’en versant à d’autres salariés une prime en lien avec le déploiement Web100T et en s’abstenant de lui verser la même prime malgré son implication dans ce déploiement, l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] a violé le principe ‘à travail égal, salaire égal”,
– condamner en conséquence l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser à titre de rappel de prime d’un montant en brut de 10 000 euros outre des congés payés afférents, en brut de 1 120 euros,
– remise des documents suivants corrigés sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document :
. bulletins de salaire,
. attestation Pôle emploi,
. certificat de travail,
– assortir les condamnations prononcées des intérêts légaux (à compter du jour de la saisine pour les rappels de salaire ainsi que l’indemnité de licenciement et à compter du jugement pour les autres demandes) et juger que les intérêts se capitaliseront pour produire eux-mêmes des intérêts,
– ordonner l’exécution provisoire du jugement,
– article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros,
– entiers dépens.
L’association Hôpital [3] de [Adresse 5] avait conclu au débouté de la salariée et avait sollicité la condamnation de celle-ci à lui verser une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La procédure d’appel
Mme [J] a interjeté appel du jugement par déclaration du 5 janvier 2021 enregistrée sous le numéro de procédure 21/00042.
Par ordonnance rendue le 11 janvier 2023, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 9 février 2023.
Prétentions de Mme [J], appelante
Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 19 décembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Mme [J] demande à la cour d’appel de :
– juger que sa démission était équivoque et qu’elle équivaut en conséquence à une prise d’acte de rupture,
– juger que compte tenu des manquements commis par l’employeur à l’origine de cette rupture, elle équivaut à un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– réformer en conséquence le jugement rendu sur ces points et condamner l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser les sommes suivantes :
. indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 37 510,80 euros net,
. indemnité légale de licenciement : 12 542,15 euros net,
. indemnité compensatrice de préavis (complément) : 12 503,60 euros brut,
. indemnité de congés payés sur préavis (complément) : 1 400,40 euros brut,
– juger que c’est abusivement que l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] s’est opposée, entre 2013 et 2016, à ses demandes de régularisation quant à ses indemnités de congés payés,
– réformer en conséquence le jugement rendu entre les parties et condamner l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser une somme de 4 000 euros net à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
– juger que la convention de forfait en jours conclue avec l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] lui est inopposable,
– réformer le jugement rendu entre les parties sur ce point et condamner en conséquence l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser les sommes suivantes :
. 88 149,14 euros brut à titre de rappel d’heures supplémentaires,
. 9 872,70 euros brut au titre des congés payés afférents,
. 40 291,76 euros brut à titre d’indemnité compensant les contreparties obligatoires en repos non accordées,
– confirmer le jugement rendu en ce qu’il a considéré qu’elle était fondée à percevoir une prime sur objectifs pour l’année 2016,
– le réformer en ce qu’il a limité le montant de rappel de prime correspondant à hauteur de 4 125 euros brut et l’indemnité de congés payés afférente à hauteur de 412,50 euros bruts,
– condamner l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser une somme de 4 416,67 euros brut à titre de rappel de prime sur objectifs 2016, outre 494,68 euros au titre des congés payés afférents,
– juger qu’en versant à d’autres salariés une prime en lien avec le déploiement Web100T et en s’abstenant de lui verser la même prime, malgré son implication dans ce déploiement, l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] a violé le principe « à travail égal, salaire égal »,
– réformer en conséquence le jugement rendu entre les parties et condamner l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser un rappel de prime d’un montant de 10 000 euros brut, outre 1 120 euros brut au titre des congés payés afférents,
– réparer l’omission matérielle commise par les premiers juges s’agissant du complément d’indemnité de congés payés réclamé et condamner l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser une somme de 194,49 euros brut à titre de complément d’indemnité de congés payés pour les années 2014 à 2016,
– confirmer le jugement rendu pour le surplus,
– débouter l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– condamner l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui remettre les documents suivants, sous astreinte de 100 euros par document et par jour de retard :
. bulletins de salaire,
. attestation Pôle emploi,
. certificat de travail,
– assortir les condamnations prononcées des intérêts légaux (à compter du jour de la saisine du conseil de prud’hommes pour les rappels de salaire ainsi que l’indemnité de licenciement et à compter de l’arrêt à intervenir pour les autres demandes) et juger que les intérêts se capitaliseront pour produire eux-mêmes des intérêts,
– condamner l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– la condamner en outre aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par Me Mélina Pedroletti, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Prétentions de l’Hôpital [3] de [Adresse 5], intimée
Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 24 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, l’Hôpital [3] de [Adresse 5] demande à la cour d’appel de :
– confirmer le jugement rendu en ce qu’il a :
. débouté Mme [J] de sa demande pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. débouté Mme [J] de sa demande d’indemnité légale de licenciement,
. débouté Mme [J] de sa demande de complément d’indemnité compensatrice de préavis,
. débouté Mme [J] de sa demande de complément de congés payés sur préavis,
. débouté Mme [J] de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,
. débouté Mme [J] de sa demande de rappels d’heures supplémentaires,
. débouté Mme [J] de sa demande de congés payés sur rappel d’heures supplémentaires,
. débouté Mme [J] de sa demande de rappel de salaire au titre de la prime Web100T,
– infirmer le jugement en ce qu’il :
. l’a condamnée à payer à Mme [J] les sommes de :
. 4 125 euros brut au titre de prime sur objectifs 2016,
. 412,50 euros brut au titre des congés payés afférents à la prime sur objectifs 2016,
. l’a condamnée à fournir à Mme [J] les documents de fin de contrat à jour (bulletins de paie, attestation Pôle emploi),
. l’a condamnée à payer à Mme [J] la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
. l’a condamnée aux éventuels dépens,
et statuant de nouveau,
– débouter Mme [J] de sa demande d’indemnité compensant les contreparties obligatoires en repos non accordées,
– débouter Mme [J] de sa demande de rappel de prime sur objectifs 2016,
– débouter Mme [J] de sa demande de congés payés sur prime sur objectifs 2016,
– condamner Mme [J] à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [J] aux entiers dépens.
MOTIFS DE L’ARRÊT
Sur la démission
Mme [J] soutient que sa démission est équivoque en ce qu’elle a dénoncé, concomitamment, un différend avec son employeur portant sur le calcul des congés payés, qu’elle constitue de ce fait une prise d’acte de la rupture et que cette prise d’acte repose sur des faits suffisamment graves pour lui faire produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] objecte que la salariée ne fait pas état du différend sur le calcul des congés payés dans sa lettre de démission, qu’au contraire, Mme [J] est partie en bons termes, souhaitant évoluer et ayant trouvé un autre emploi et que le différend sur les indemnités de congés payés a été instrumentalisé pour les besoins de la cause, qu’il n’est qu’un prétexte pour légitimer la demande de requalification de la rupture en prise d’acte.
Il est rappelé que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, le juge doit, s’il résulte des circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou, dans le cas contraire, d’une démission.
A l’appui de ses demandes, Mme [J] fait état d’un différend avec son employeur au sujet des modalités de calcul de ses congés payés, qui, selon elle, est la véritable cause de sa démission, tandis que l’employeur oppose l’absence de différend concomitant à la démission et au contraire une rupture en bons termes, la salariée ayant bénéficier d’une opportunité professionnelle.
Concernant la divergence relative au calcul des congés payés
Il convient, en premier lieu, d’examiner la question technique du calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés pour savoir si la revendication de la salariée était fondée ou non, mais également dans un deuxième temps, le traitement de ce différend par les parties, dans la mesure où, s’il ne peut être reproché à l’employeur d’avoir commis une erreur, il peut lui être reproché en revanche de ne pas avoir apporté de réponse à la revendication de la salariée.
Le calcul des congés payés
Le calcul du salaire correspondant aux congés payés s’effectue selon deux modalités, la plus favorable au salarié devant être retenue. Soit il y a lieu à maintien du salaire pendant la prise de congés, soit est appliquée la règle du dixième.
Cette règle du dixième consiste à diviser le salaire annuel par dix et à diviser le résultat obtenu par le nombre de jours de congés annuels légaux pour obtenir ensuite le salaire correspondant à chaque jour de congés.
L’article L. 3141-3 du code du travail dispose que « le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La durée totale du congé exigible ne peut excéder trente jours ouvrables ».
Selon l’article L. 3141-24 du même code, « I.-Le congé annuel prévu à l’article L. 3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.
Pour la détermination de la rémunération brute totale, il est tenu compte :
1° De l’indemnité de congé de l’année précédente ;
2° Des indemnités afférentes à la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévues aux articles L. 3121-30, L. 3121-33 et L. 3121-38 ;
3° Des périodes assimilées à un temps de travail par les articles L. 3141-4 et L. 3141-5 qui sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération en fonction de l’horaire de travail de l’établissement.
Lorsque la durée du congé est différente de celle prévue à l’article L. 3141-3, l’indemnité est calculée selon les règles fixées au présent I et proportionnellement à la durée du congé effectivement dû.
II.-Toutefois, l’indemnité prévue au I du présent article ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler.
Cette rémunération, sous réserve du respect des dispositions légales, est calculée en fonction :
1° Du salaire gagné dû pour la période précédant le congé ;
2° De la durée du travail effectif de l’établissement.
III.-Un arrêté du ministre chargé du travail détermine les modalités d’application du présent article dans les professions mentionnées à l’article L. 3141-32. »
Mme [J] soutient qu’en application combinée de ces textes, lorsque le congé annuel du salarié excède les 20 jours ouvrés ou 25 jours ouvrables prévus par la loi, le calcul de l’indemnité de congés payés selon la méthode du 10ème doit être rapportée au nombre de congés effectivement dus au salarié, selon le calcul suivant : (rémunération du salarié/10) X (nombre de jours de congés conventionnels/25) et qu’à défaut d’appliquer cette formule, le salarié percevrait, durant ses congés, une rémunération diminuée, ce qui n’est pas acceptable.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] applique, dans ses relations avec ses salariés, les dispositions de l’article 09.02.1 de la convention collective des établissements privés d’hospitalisation, qui accorde aux cadres des jours de congés supplémentaires à hauteur de trois jours ouvrés par an, dans les termes suivants : « Les salariés bénéficient chaque année d’un congé payé dont la durée est déterminée à raison de 2 jours et demi ouvrables par mois de travail sans que la durée totale du congé exigible puisse excéder 30 jours ouvrables. Il est possible de convertir le décompte des congés payés en jours ouvrés.
Cependant, la durée des congés payés dont les cadres bénéficient peut être portée à 33 jours ouvrables pour tenir compte des sujétions particulières.
Les salariés à temps partiel bénéficient des congés payés dans les mêmes conditions que les salariés à temps complet.
Hormis dans les cas prévus à l’article 09.02.2 de la présente convention, la durée du congé est – en cas de suspension du contrat de travail – réduite prorata temporis. »
Mme [J] allègue qu’elle bénéficiait de 28 jours de congés payés par an, ce qui n’est pas discuté par l’employeur et était effectivement appliqué ainsi que cela résulte des bulletins de salaire.
Mme [J] fait valoir qu’en ne tenant pas compte, pour le calcul des indemnités correspondantes, du nombre de jours accordés conventionnellement, son employeur lui versait en réalité une rémunération minorée pendant ses congés, qu’en effet, en disposant de 28 jours de congés payés par an, elle recevait une indemnité de congés payés moindre, par jour de congé considéré, que si elle avait bénéficié de 25 jours de congés payés.
Il est constant que tout jour de congé supplémentaire, d’origine conventionnelle par exemple, est indemnisé sur la base d’une indemnité journalière du congé principal. Son montant est égal à celui de l’indemnité afférente au congé principal, divisée par le nombre de jours ouvrables compris dans ce congé principal.
Dès lors que les dispositions légales qui déterminent le mode de calcul de l’indemnité de congés payés sont d’ordre public, elles s’appliquent également aux congés supplémentaires d’origine conventionnelle.
Cette indemnité journalière ne peut en outre être inférieure à la rémunération que le salarié aurait perçue s’il avait travaillé le jour où il a pris ce congé supplémentaire, en application de la règle du salaire théorique. Par suite, les salariés peuvent demander que les congés annuels supplémentaires conventionnels soient calculés selon la règle du dixième, en l’espèce plus favorable.
Pour adapter la règle du dixième au calcul d’un nombre de jours de congés supérieur au congé légal, il faut procéder à une proratisation. En effet, selon l’article L. 3141-24 du code du travail, lorsque la durée du congé est supérieure, « l’indemnité est calculée (‘) proportionnellement à la durée du congé effectivement dû ».
L’ensemble de ces considérations conduit à retenir que la position défendue par Mme [J] était donc légitime, ce qui implique de faire droit à sa demande spécifique de rappel d’indemnité compensatrice de congés payés pour un montant de 194,49 euros correspondant au complément d’indemnité de congés payés du pour les années 2014 à 2016, selon un calcul que la cour adopte (sa pièce 15).
Mme [J] demande encore à ce titre l’allocation d’une somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive de l’association en ce qu’elle n’a pas respecté ses obligations en la matière, qu’elle a reconnu son erreur en lui versant à son départ une indemnité de 3 000 euros à ce titre et qu’elle a attendu trois ans avant de ne faire droit que partiellement à sa demande. Elle ajoute que si l’hôpital n’avait pas tant tardé avant de lui octroyer son dû, elle aurait bénéficié bien plus longtemps d’une rémunération exacte de ses congés. Elle fait encore valoir que cette résistance abusive lui a causé un préjudice moral qui doit être pris en compte.
Les circonstances développées ci-devant mais également après, notamment la tardiveté de la réponse de l’employeur, conduisent à évaluer le préjudice subi de ce fait à la somme de 500 euros.
Les démarches de la salariée auprès de son employeur et la réponse de celui-ci
Mme [J] allègue avoir alerté son employeur sur cette difficulté en mai 2013.
Pour justifier de ses réclamations, elle produit un échange de courriels avec Mme [P], directrice financière, et Mme [O], responsable administration et paie, duquel il résulte que Mme [J] a, le 16 octobre 2014, interpellé Mme [O] sur la difficulté et que le 20 mars 2015, Mme [P] a appuyé la démarche de Mme [J] auprès de Mme [O] en ces termes : « Le problème soulevé par [Z] [J] sur la valorisation de ses congés payés date de quasiment deux ans maintenant sans que nous ayons obtenu, malgré plusieurs relances de sa part et de la mienne, de réponse satisfaisante. Ceci me pose un problème managérial qui doit être résolu maintenant très rapidement car elle a fait preuve de beaucoup de patience. » (pièce 6 de la salariée).
Elle produit également un courriel qu’elle a adressé le 26 septembre 2016 à plusieurs personnes de l’hôpital, sans que les qualités de ces personnes puissent être déterminées, dont Mme [P], en ces termes : « Je fais suite à notre entretien du mercredi 7 septembre à 14h, je ne comprends pas très bien la position du service des ressources humaines, j’ai alerté en mai 2013 [X] [O] concernant le calcul de mes congés payés et lui ai remis mon document en main propre avec le bon mode de calcul depuis mon arrivée à l’hôpital, en effet le calcul pratiqué sur la prise de congés payés est erroné. Sans aucune explication en septembre 2013, elle me dit que mon calcul était faux puisque nous avions 28 jours de CP et que par conséquent, il fallait diviser par 28 jours, ce qui est erroné (‘). N’ayant toujours eu à ce jour aucune réponse de votre part, et je pense avoir été très patiente depuis mai 2013, et maintenant, je demande que cette régularisation d’un montant de 6 980,66 euros soit faite avec à chaque fois le recalcul des charges sociales de chaque année. Je suis fatiguée de toujours me battre pour avoir gain de cause pour moi et mon équipe. » (pièce 7 de la salariée).
L’association Hôpital [3] de [Adresse 5] ne produit pas la réponse qu’elle a apportée à la salariée mais Mme [J] reconnaît elle-même l’existence d’une telle réponse, même si elle l’a considérée comme n’étant pas satisfaisante. Elle écrit en effet, page 12 de ses conclusions : « Finalement, son employeur, lors d’un entretien du 7 septembre 2016, lui opposait un refus clair ». Au regard de cet élément, il y a d’ailleurs lieu de comprendre que, dans son courriel du 26 septembre 2016, elle déplore en réalité de ne pas avoir eu gain de cause et non de ne pas avoir eu de réponse de son employeur.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] indique que néanmoins, dans la mesure où il était en bons termes avec la salariée au moment de son départ, il lui a versé la somme de 3 000 euros qui correspondait en réalité à la quasi-totalité de ce qu’elle sollicitait à ce moment-là.
Le reçu pour solde de tout compte fait état d’une indemnité compensatrice de congés payés d’un montant total de 13 119,96 euros, correspondant à 5 967,63 euros de congés payés acquis, 4 152,33 euros de congés payés en cours d’acquisition et à une somme de 3 000 euros en plus, sans qu’il ne puisse se déduire de ce seul versement, sans aucune explication, la reconnaissance par l’employeur du bien-fondé de la revendication de Mme [J] (pièce 10 de l’employeur).
Concernant les autres circonstances entourant la démission
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] souligne à juste titre que Mme [J] n’a pas fait mention de ce différend dans sa lettre de démission.
Il ajoute que lors de son pot de départ, tout le monde savait qu’elle avait retrouvé un emploi dans un autre hôpital, ce qui résulte clairement des courriels échangés à cette occasion (pièce 2 de l’employeur). Le responsable de la comptabilité générale a écrit le 14 novembre 2016 : « Bonjour à toutes et à tous, Comme vous le savez, [Z] [J] nous quitte, et après dix années passées à l’hôpital, elle part vers de nouveaux horizons. Nous prévoyons de lui faire un cadeau(…) ». Mme [J] a écrit le 25 novembre 2016 : « Bonjour à toutes et à tous, L’aventure AHP se termine ce soir pour moi. Avant de partir, je tenais à vous remercier sincèrement d’être venus à mon pot jeudi soir et d’avoir participé à mon cadeau de départ. Un dernier remerciement pour tous ces moments passés ensemble. Ces dix années sont passées très vite et ce fut un plaisir de travailler avec vous. Je vous souhaite à toutes et tous une excellente continuation ! A très bientôt, [Z] ».
Mme [J] a également, dans un courrier du 15 mai 2017, indiqué ce qui suit : « J’ai quitté l’AHP le 25 novembre 2016 en très bons termes après dix ans d’ancienneté en tant que responsable comptable. Je sais que [B] [P] n’a pas apprécié que je sois partie à la concurrence quand elle a appris, mais c’est encore Mme [P] qui me parlait à mon entretien annuel que si je voulais de l’évolution, je devais voir ailleurs, ce que j’ai mis en application quand l’opportunité s’est présentée. » (pièce 11 de la salariée).
Il résulte de l’entretien « d’évolution » de la salariée, pour l’année 2013-2014, que celle-ci souhaitait évoluer vers un poste d’adjointe au DAF, ainsi qu’elle l’a elle-même mentionné au titre de ses observations, ajoutant « très bon entretien » (pièce 11 de l’employeur). Elle indique même dans le cadre de son entretien fin 2016, « Qu’en est-il des perspectives d’évolution ‘ » (pièce 5 de la salariée).
Il résulte de ces circonstances contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci n’était pas équivoque et que le différend concernant le calcul des congés payés, qui avait été tranché, de façon certes défavorable à la salariée, ne motivait pas la décision de la salariée.
Dès lors, Mme [J] sera déboutée de ses demandes tendant à voir dire que sa démission était équivoque, qu’elle équivalait en conséquence à une prise d’acte de rupture et de dire que compte tenu des manquements commis par l’employeur à l’origine de cette rupture, elle devait produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que de toutes les demandes financières subséquentes.
Le jugement sera confirmé de ces chefs.
Sur la convention de forfait
Mme [J] soutient qu’aucun suivi réel de sa charge de travail n’était effectué en violation des dispositions de l’accord d’entreprise relatives au forfait jour, qui prévoyaient notamment un suivi à l’occasion des entretiens annuels et sollicite que sa convention lui soit dite inopposable.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] objecte que la charge de travail était, conformément à ce qui était prévu par l’accord d’aménagement du temps de travail, évoquée lors des entretiens annuels d’évaluation et que la salariée avait la possibilité de faire part de ses commentaires.
Il est rappelé que pour que la convention de forfait en jours soit valablement conclue, il faut que la convention ou l’accord sur lequel elle se fonde contiennent des garanties destinées à protéger la santé et la sécurité du salarié et si l’employeur ne respecte pas les clauses destinées à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au régime du forfait en jours, la convention individuelle est privée d’effet.
En l’espèce, si la convention collective ne contient pas de telles dispositions, l’accord d’entreprise relatif à la durée du travail en vigueur fait référence à une comptabilisation des journées et demi-journées travaillées ainsi qu’à un suivi annuel de la charge de travail lors des entretiens annuels, en ces termes : « 8.2 Modalités de suivi de l’organisation du travail, de l’amplitude des journées d’activité et de la charge de travail.
L’autonomie donnée dans la prise des jours de repos au choix des salariés permet à ces derniers d’organiser leur repos tout en tenant compte de la répartition de leur charge de travail et des caractéristiques de leur activité (périodes de disponibilité nécessaire à l’activité, respect d’échéances diverses notamment).
L’organisation du travail, l’amplitude des journées d’activités et la charge de travail seront, après la mise en place de l’avenant, des questions examinées prioritairement, au cas par cas, lors des entretiens individuels annuels dans le cadre de la commission de suivi » (pièce 19 du salarié).
On peut s’interroger sur la suffisance de ce dispositif censé organiser un suivi régulier et un contrôle permettant à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable de travail.
Mais, quoi qu’il en soit, aucun des compte-rendus d’entretien annuel « d’évolution » produits, à savoir ceux de 2013-2014, 2014-2015 et 2015-2016, ne fait état d’observations, ni même d’un questionnement à ce sujet, de sorte qu’il ne peut en être déduit que le sujet a été abordé lors de l’entretien, et l’employeur ne produit aucun autre document utile de nature à rapporter la preuve qu’il a rempli son obligation.
Il sera en conséquence retenu que la convention est privée d’effet sur ces années.
Il est rappelé que le salarié dont la convention de forfait est privée d’effet est fondé à réclamer le paiement d’heures supplémentaires sur la base d’une durée hebdomadaire de travail de 35 heures.
Sur les heures supplémentaires
Mme [J] sollicite l’allocation d’une somme de 88 149,14 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires, outre les congés payés afférents et une indemnité compensant les contreparties obligatoires en repos.
Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2 et suivants du code du travail qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Mme [J] expose qu’elle arrivait à son travail le matin avant 8 heures, parfois avant 7 heures, qu’elle partait fréquemment après 18 heures et s’abstenait très souvent de déjeuner, ou n’y consacrait qu’une très brève pause. Elle ajoute qu’elle travaillait également fréquemment pendant ses congés et ses RTT.
Elle explique que sa charge de travail était importante, l’effectif du service ayant diminué de deux personnes en 2008, alors que le chiffre d’affaires de l’hôpital avait augmenté et que les fiches d’immobilisation connaissaient une augmentation significative.
Elle produit deux tableaux détaillés reprenant pour chaque jour travaillé, l’heure d’arrivée, l’heure de départ, le nombre d’heures effectuées et le rappel de salaire correspondant (pièces 16 et 16bis de la salariée).
Ce faisant, il sera retenu qu’elle présente, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] ne produit aucun élément en réponse. Il se limite à faire valoir que le travail au forfait implique une large autonomie dans l’organisation du temps de travail des salariés, qu’il ne vérifie donc pas si la salariée effectuait de longues pauses dans sa journée de travail ni si elle préférait commencer sa journée de travail tôt ou la terminer plus tard, celle-ci s’organisant comme elle le souhaitait.
Au vu des éléments en présence, il sera retenu l’existence d’heures supplémentaires.
Les heures supplémentaires réalisées seront évaluées au regard de la charge de travail induite par le poste occupé par Mme [J], au regard de la durée de travail de référence (35 heures), du salaire perçu par la salariée et des majorations applicables aux sommes suivantes :
– 1 113,40 euros au titre des mois de novembre et décembre 2013,
– 7 237,10 euros au titre de l’année 2014,
– 8 350,50 euros au titre de l’année 2015,
– 7 793,80 euros au titre de l’année 2016 jusqu’au mois de novembre inclus.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] sera en conséquence condamné à verser à Mme [J] la somme totale de 23 494,80 euros au titre des heures supplémentaires, outre une indemnité de congés payés afférente, ressortant, selon les règles précédemment définies, à la somme de 2 631,42 euros.
Le contingent annuel d’heures supplémentaires fixé à 220 heures n’ayant pas été atteint au cours des quatre années concernées par la réclamation, Mme [J] sera déboutée de sa demande d’indemnité compensant les contreparties obligatoires en repos non accordées, par confirmation du jugement entrepris.
Sur la rémunération variable 2016
Mme [J] réclame paiement de la somme de 4 416,67 euros outre les congés payés afférents au titre de sa rémunération variable 2016.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] s’oppose à ce paiement, motifs pris qu’un des objectifs était collectif et n’aurait pas été atteint et que des négligences graves auraient été découvertes.
Le contrat de travail de Mme [J] prévoyait une prime sur objectifs dans les termes suivants : « A compter de janvier 2008, vous percevrez également une prime annuelle pouvant atteindre 5 000 euros suivant la réalisation des objectifs fixés. Cette prime sera versée au mois de mars 2009. » (pièce 5 de la salariée).
Quatre objectifs avaient été fixés à la salariée au titre de cet exercice :
1. Projet Web100T pour 50 %
2. Rapprochement [W] pour 20 %
3. Comptabilité fournisseur pour 10 %
4. Résultat opérationnel supérieur à 12 millions d’euros pour 20 % .
Concernant le projet Web100T, l’employeur reconnaît que les « scorecards » (éléments d’appréciation dont Mme [J] ne remet pas en cause la pertinence et dont elle se prévaut elle-même) de septembre 2016 font apparaître que l’objectif était atteint.
Concernant le rapprochement [W], l’employeur reconnaît également que l’objectif était atteint.
Concernant la comptabilité fournisseur, l’employeur indique, sans être contredit, que cet objectif était indiqué comme non réalisé, avec la mention suivante : « le CDG est obligé de prendre le relais sur le pointage des comptes ce qui n’est pas normal ».
Concernant le dernier objectif, l’hôpital fait justement observer qu’il s’agit d’un objectif collectif et qu’il n’a pas été réalisé, comme cela résulte du procès-verbal de réunion ordinaire du comité d’entreprise du 21 février 2017 (pièce 12 de l’employeur). L’argumentation de la salariée à ce titre, qui soutient que l’objectif était en cours d’acquisition en septembre 2017 et que l’hôpital aurait dû lui attribuer la rémunération variable afférente en la proratisant compte tenu de sa présence sur l’année sera écartée, l’atteinte de l’objectif ne pouvant être constatée qu’en fin d’exercice.
Ainsi, selon l’employeur, Mme [J] pouvait prétendre au maximum au regard des scorecards à 70 % de sa rémunération variable cible, soit 3 500 euros.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] fait cependant état, pour s’opposer à tout versement au titre de cette rémunération variable, de négligences graves de la part de Mme [J] mises en évidence en juin 2017.
Il explique que Mme [P] a informé le service RH de problèmes découverts au démarrage de Web100T et dans d’autres domaines, comme par exemple les états de rapprochements bancaires et du pointage des comptes liés aux flux financiers. Il reproche à Mme [J] d’avoir manqué de vigilance au regard de la situation inadmissible d’absence de remises bancaires par Mme [U] au service comptabilité d’honoraires médicaux, ce dont Mme [J] avait été alertée dès novembre 2015.
Ces éléments, contestés par la salariée, ne sont en tout état de cause pas de nature à influer sur la rémunération variable puisqu’ils n’ont aucun rapport avec les objectifs fixés.
L’ensemble de ces considérations conduit à retenir que l’Hôpital [3] de [Adresse 5] est redevable envers Mme [J] d’une somme de 3 500 euros au titre de sa rémunération variable 2016, outre les congés payés afférents à hauteur de 392 euros.
Sur la prime de projet Web100T
Mme [J] sollicite le versement d’une somme de 10 000 euros à ce titre outre les congés payés afférents.
A l’appui de sa demande, elle indique qu’elle a appris que ses collègues avaient perçu une prime spécifique en lien avec la réalisation du projet Web100T, logiciel permettant le codage des soins dans les établissements hospitaliers. Elle fait valoir qu’elle n’a pas bénéficié d’une telle prime alors que sa participation dans le déploiement de ce logiciel a été primordiale, puisqu’elle a permis la facturation des clients. Elle fonde sa demande sur le principe d’égalité de traitement.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5] reconnaît l’existence d’une telle prime mais soutient que Mme [J] ne justifie pas d’un tel engagement à son égard. Il explique que si, au terme du projet, il a décidé de verser quelques primes à des collaborateurs, ces primes n’avaient rien de contractuel et ont été versées à des salariés présents dans l’entreprise, ce qui n’était plus le cas de Mme [J], de façon discrétionnaire, comme c’est son droit dans le cadre de son pouvoir d’organisation et de direction.
Il ajoute qu’il a versé cette primes à quatre personnes seulement ([G], [T], [L] et [D]) et pas à Mmes [F] et [R] comme soutenu à tort par Mme [J], que ces personnes portaient le projet et ne venaient pas simplement en support et que les primes sollicitées s’élevaient entre 1 500 et 3 500 euros, même si en définitive il s’est montré plus généreux en accordant des primes entre 3 700 et 5 800 euros en janvier 2017, conformément aux bulletins de salaire produits.
Il précise encore qu’une ressource externe, M. [N], a assuré la direction du projet, en qualité de chef de projet informatique, et que Mme [J], en tant que responsable du service de comptabilité, l’a accompagné pour la partie comptable du projet.
Il est rappelé que quand le salarié qui se prétend désavantagé apporte des éléments faisant ressortir que la comparaison avec d’autres salariés de l’entreprise qui ont exécuté ou exécutent une prestation de travail égale ou d’égale valeur révèle qu’il est moins rémunéré qu’eux, c’est à l’employeur de rapporter la preuve que la différence de traitement est fondée sur une justification objective.
En l’espèce toutefois, Mme [J], à qui incombe cette charge, ne produit aucun élément en ce sens, celle-ci ne pouvant utilement se comparer à Mme [P] ou à M. [A], qui sont les seuls salariés dont elle fait état dans ses écritures, ces derniers faisant notamment partie du Comex ou du Codir, ce qui n’était pas son cas.
Elle sera déboutée de cette demande, par confirmation du jugement entrepris.
Sur les intérêts moratoires et leur capitalisation
Le créancier peut prétendre aux intérêts de retard calculés au taux légal, en réparation du préjudice subi en raison du retard de paiement de sa créance par le débiteur. Les condamnations prononcées produisent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation devant le Bureau de Conciliation et d’Orientation pour les créances contractuelles et à compter de l’arrêt, qui en fixe le principe et le montant, pour la créance indemnitaire.
En application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil, il y a lieu de préciser que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt.
Sur la remise des documents de fin de contrat de travail conformes au présent arrêt
Au regard des modifications apportées au montant des indemnités de congés payés, Mme [J] est bien fondée à solliciter la remise par l’Hôpital [3] de [Adresse 5] d’un certificat de travail, d’une attestation destinée à Pôle emploi et d’un bulletin de paie récapitulatif, l’ensemble de ces documents devant être conformes au présent arrêt.
Il n’y a pas lieu, en l’état des informations fournies par les parties, d’assortir cette obligation d’une astreinte comminatoire. Il n’est en effet pas démontré qu’il existe des risques que l’Hôpital [3] de [Adresse 5] puisse se soustraire à ses obligations.
Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure
Compte tenu de la teneur de la décision, le jugement de première instance sera confirmé en ses dispositions concernant les dépens et les frais irrépétibles.
L’Hôpital [3] de [Adresse 5], tenu à paiement, supportera les dépens d’appel, dont distraction au profit de Me Mélina Pedroletti, avocat, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Il sera en outre condamné à payer à Mme [J] une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, que l’équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 1 500 euros et sera débouté de sa propre demande présentée sur le même fondement.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre le 2 décembre 2020, excepté en ce que Mme [Z] [J] a été déboutée de ses demandes relatives à la convention de forfait en jours, aux heures supplémentaires et en ce que la somme due au titre de la rémunération variable 2016 a été fixée à 4 125 euros et les congés payés afférents à 412,50 euros,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
CONDAMNE l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à payer à Mme [Z] [J] les sommes suivantes :
194,49 euros à titre de rappel d’indemnité compensatrice de congés payés pour les années 2014 à 2016,
500 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
DIT privée d’effet la convention de forfait en jours conclue entre les parties au titre des années 2014 à 2016,
CONDAMNE l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à payer à Mme [Z] [J] les sommes suivantes :
23 494,80 euros au titre des heures supplémentaires,
2 631,42 euros au titre des congés payés afférents,
CONDAMNE l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à payer à Mme [Z] [J] les sommes suivantes :
3 500 euros au titre de la rémunération variable due pour l’année 2016,
392 euros au titre des congés payés afférents,
CONDAMNE l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à payer à Mme [Z] [J] les intérêts de retard au taux légal à compter de la date de réception par l’employeur de sa convocation devant le Bureau de Conciliation et d’Orientation sur les créances contractuelles et à compter de l’arrêt sur la créance indemnitaire,
DIT que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt,
ENJOINT à l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] de remettre à Mme [Z] [J] un certificat de travail, une attestation destinée à Pôle emploi et un bulletin de paie récapitulatif conformes au présent arrêt,
DÉBOUTE Mme [Z] [J] de sa demande d’astreinte,
CONDAMNE l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] au paiement des dépens d’appel, dont distraction au profit de Me Mélina Pedroletti, avocat,
CONDAMNE l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] à payer à Mme [Z] [J] une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE l’association Hôpital [3] de [Adresse 5] de sa demande présentée sur le même fondement.
Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, président, et par Mme Domitille Gosselin, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,