Harcèlement moral au Travail : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 janvier 2023, 20-16.018 21-16.800, Inédit

·

·

Harcèlement moral au Travail : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 janvier 2023, 20-16.018 21-16.800, Inédit
Ce point juridique est utile ?

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 janvier 2023

Rejet (Pourvoi n°Z 20-16.018) Irrecevabilité (Pourvoi n°V21-16.800)

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 2 F-D

Pourvois n°
Z 20-16.018
V 21-16.800 JONCTION

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. [O] dans le pourvoi
Z 20-16.018.
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 19 janvier 2021.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 JANVIER 2023

I. La société Régie autonome des transports parisiens (RATP), établissement à caractère industriel et commercial, dont le siège est [Adresse 3] a formé le pourvoi n° Z 20-16.018 contre l’arrêt rendu le 19 février 2020 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 10), dans le litige l’opposant respectivement :

1°/ à M. [S] [O], domicilié [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

II. M. [S] [O] a formé le pourvoi n° V 21-16.800 contre le même arrêt rendu par la même cour d’appel, dans le litige l’opposant à la Régie autonome des transports parisiens défendeur à la cassation.

La demanderesse au pourvoi n° Z 20-16.018 invoque, à l’appui de son recours, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le demandeur au pourvoi n° V 21-16.800 invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Régie autonome des transports parisiens, de Me Occhipinti, avocat de M. [O], après débats en l’audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Barincou, conseiller rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° Z 20-16.018 et V 21-16.800 sont joints.

Désistement partiel

2. Il est donné acte à la Régie autonome des transports parisiens du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre Pôle emploi.

Faits et procédure

3. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 19 février 2020), M. [O], engagé par la Régie autonome des transports parisiens (la RATP) à compter du 17 juin 2005 en qualité de receveur machiniste, a été révoqué le 2 juin 2016.

4. Contestant le bien-fondé de cette révocation, il a saisi la juridiction prud’homale.

Recevabilité du pourvoi n° V 21-16.800 contestée par la défense

Vu l’article 621, alinéa 3, du code de procédure civile :

5. Le défendeur qui n’a pas formé de pourvoi incident ou provoqué contre le jugement attaqué dans les délais impartis par l’article 1010 du code de procédure civile n’est plus recevable à se pourvoir à titre principal contre ce jugement.

6. M. [O] a formé, le 18 mai 2021, un pourvoi en cassation contre un arrêt de la cour d’appel de Paris du 19 février 2020 ayant statué dans un litige l’opposant à son ancien employeur, la RATP.

7. Cependant, il résulte des pièces de la procédure que cet arrêt avait été auparavant frappé de pourvoi par la RATP et que, sur ce pourvoi, M. [O] s’était borné à déposer un mémoire en défense sans former de pourvoi incident avant l’expiration du délai imparti par l’article 982 du même code pour la remise de ce mémoire.

8. En conséquence, le pourvoi n’est pas recevable.

Examen des moyens du pourvoi n° Z 20-16.018

Sur les premier, deuxième et quatrième moyens, ci-après annexés

9. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

10. L’employeur fait grief à l’arrêt de le condamner à verser au salarié diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, non-respect de l’obligation de sécurité et exécution déloyale du contrat de travail, alors :

« 1° / que le harcèlement moral suppose la caractérisation de faits constitutifs d’agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié, d’altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; que l’exercice normal par l’employeur de son pouvoir de direction et de gestion, dans l’intérêt de l’entreprise, ne permet pas de caractériser de tels agissements ; qu’il en résulte que le fait pour un employeur, interrogé dans le cadre d’une enquête diligentée par un organisme de sécurité sociale, d’émettre des réserves quant aux circonstances d’un accident du travail invoqué par son salarié, ne saurait être, sauf abus de droit, constitutif d’un harcèlement moral ; qu’en l’espèce, pour se prétendre victime d’un harcèlement moral, le salarié prétendait que Mme [W], responsable des ressources humaines du centre bus, aurait menti dans le cadre de l’enquête diligentée par la CCAS de la RATP, au terme de laquelle celle-ci a refusé de prendre en charge l’accident déclaré par le salarié au titre de la législation sur les risques professionnels ; que pour retenir l’existence d’un harcèlement moral et condamner la RATP à ce titre, la cour d’appel s’est bornée à faire mention des « réponses de Mme [W] », selon lesquelles « l’agent n’arrivait pas a priori à déclencher l’alarme discrète, il stipule même ne pas savoir faire une AD, (?) c’est une équipe GPSR qui intervient sur place et qui déclenche l’AD » et que « le fait que le MR n’ait pas de lui-même fait une AD nous laisse perplexes sur le déroulement des événements » ; qu’en s’abstenant de rechercher en quoi ces réponses auraient été erronées, fautives ou auraient excédé l’exercice normal par l’employeur de son pouvoir de direction et de gestion, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé l’existence d’un fait constitutif de harcèlement moral, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

2° / que pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, le juge doit s’expliquer sur l’ensemble des circonstances objectives étrangères à tout harcèlement moral invoquées par l’employeur ; que pour contester les allégations du salarié, la RATP faisait valoir, d’une part, qu’elle était en droit de formuler des réserves sur le caractère professionnel de l’accident invoqué par le salarié conformément à l’article R. 441-11 du code de la sécurité sociale et, d’autre part, que les éléments de réponse apportés par Mme [W] à la CCAS reposaient sur le rapport « alarme 393 », dont il ressortait que le salarié n’avait pas actionné l’alarme discrète et que l’écoute discrète n’était pas exploitable, de sorte que le déroulé exact des faits n’était pas établi ; qu’en se bornant néanmoins à énoncer que la « RATP ne justifie pas spécialement que les réponses de Madame [W] [?] reposent par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement » pour retenir l’existence d’un harcèlement moral, la cour d’appel, qui n’a pas examiné les éléments justificatifs apportés par la RATP pour démontrer que les agissements invoqués par le salarié étaient étrangers à tout harcèlement, a violé l’article L. 1154-1 du code du travail ;

3° / que le harcèlement moral suppose la caractérisation de faits constitutifs d’agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié, d’altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; que l’employeur est en droit d’interdire l’accès à ses locaux à toute personne étrangère à l’entreprise ; qu’il en résulte que l’interdiction faite à un ancien salarié de pénétrer dans les locaux de l’entreprise, postérieurement à son licenciement, ne saurait être confondue avec un fait de harcèlement moral ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que le contrat de travail du salarié avait été rompu le 2 juin 2016, ce dont il résultait qu’il n’était plus salarié de l’entreprise à compter de cette date et que la RATP était en droit de s’opposer à sa présence dans ses locaux ; qu’en retenant néanmoins l’existence d’un harcèlement moral au motif quel’employeur avait interdit au salarié de pénétrer dans les locaux de l’entreprise le 7 juin 2016, soit postérieurement à sa révocation, alors que celui-ci entendait assister à la conférence qui y était donnée par [L] [H], la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé l’existence d’un fait constitutif de harcèlement moral, a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

4° / que la cour d’appel s’est exclusivement fondée sur l’existence d’un harcèlement moral à l’encontre du salarié pour condamner la RATP à lui payer une somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l’obligation de sécurité ; qu’en application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le chef de l’arrêt ayant retenu l’existence d’un harcèlement moral entraînera nécessairement, par voie de conséquence, la cassation de l’arrêt en ce qu’il a jugé que la RATP avait manqué à son obligation de sécurité et l’a condamnée à verser au salarié une somme de 1 000 euros à ce titre ;

5° / que la cour d’appel a encore reproché à la RATP de ne pas avoir « pris des mesures efficientes pour empêcher le harcèlement » du salarié pour la condamner à lui payer une somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ; qu’en application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le chef de l’arrêt ayant retenu l’existence d’un harcèlement moral entraînera nécessairement, par voie de conséquence, la cassation de l’arrêt en ce qu’il a condamné la RATP à verser au salarié une somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, au regard du lien de dépendance nécessaire qui existe entre ces deux aspects du litige. »

Réponse de la Cour

11. Sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale et de violation de la loi, le moyen, en ses trois premières branches, ne tend qu’à contester l’appréciation souveraine par la cour d’appel des éléments de preuve et de fait dont elle a, sans méconnaître les règles spécifiques de preuve et exerçant les pouvoirs qu’elle tient de l’article L. 1154-1 du code du travail, déduit tant l’existence de faits précis permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral que l’absence de justification par l’employeur d’éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

12. Le rejet des trois premières branches rend sans objet les deux dernières.

13. Le moyen n’est donc pas fondé.

Sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

14. L’employeur fait grief à l’arrêt de le condamner à verser au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour éviction brutale, alors « que l’interdiction faite à un ancien salarié, postérieurement à son licenciement, de pénétrer dans les locaux de l’entreprise ne caractérise pas une faute dans les circonstances de la rupture du contrat de travail, de nature à justifier l’allocation d’une indemnité distincte des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que le contrat de travail avait été rompu le 2 juin 2016, ce dont il résultait qu’il n’était plus salarié de l’entreprise à compter de cette date et que la RATP était en droit de lui refuser l’accès à ses locaux ; que néanmoins, la cour d’appel a octroyé au salarié des dommages-intérêts pour éviction brutale au motif qu’il s’était vu refuser l’accès au centre bus pour assister à une conférence le 7 juin 2016 et que la RRH de l’établissement l’avait alors menacé d’appeler les services de police ; qu’en statuant comme elle l’a fait, cependant qu’il résultait de ses propres constatations que la RATP n’avait commis aucune faute dans les circonstances de la rupture du contrat de travail, de nature à justifier l’allocation d’une indemnité distincte des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d’appel a violé l’article 1231-1 du code civil. »

Réponse de la Cour

15. C’est par une appréciation souveraine des éléments qui lui étaient soumis que la cour d’appel a constaté le caractère vexatoire de la rupture et l’existence d’une faute.

16. Le moyen n’est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DECLARE irrecevable le pourvoi n° V 21-16.800 ;

REJETTE le pourvoi n° Z 20-16.018 ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille vingt-trois.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la Régie autonome des transports parisiens, demanderesse au pourvoi n° Z 20-16.018

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la RATP à payer à M. [O] les sommes de 4.712,14 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents 6.125,78 euros au titre de l’indemnité de licenciement, d’AVOIR condamné la RATP à verser à M. [O] une somme de 18.000 € pour révocation sans cause réelle et sérieuse et d’AVOIR ordonné le remboursement par la RATP aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à M. [O] dans la limite de deux mois ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la procédure disciplinaire ; Sur la prescription Selon l’article 149 du statut aucune mesure disciplinaire ne peut être prononcé à raison d’un manquement à la discipline survenue plus de 2 mois avant l’engagement de la procédure disciplinaire, sa notamment, si ce fait est inconnu de la régie. Selon L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de 2 mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait n’ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales. Il résulte des circonstances propres à l’espèce qu’un incident est survenu le 21 octobre 2015 alors que Monsieur [O] conduisait un bus, lequel incident mettait en cause le comportement d’une voyageuse. Monsieur [O] a porté plainte contre l’usager pour les violences qu’il a indiqué avoir subies et signalées au CCAS l’accident de travail survenu sur le temps et dans le cadre de l’exercice de sa mission. Le rapport de police faisant état du classement sans suite de la plainte formée par Monsieur [O] à l’encontre de la voyageuse a été transmis à la direction du centre bus de [Localité 4] le 16 février 2016, à la demande de la responsable RH. Il est par ailleurs avéré que l’EPIC RATP a émis une réserve sur le formulaire de déclaration d’accident du travail, que le 31 décembre 2015, le CCAS de la RATP a notifié à Monsieur [O] son refus de prendre l’incident en charge au titre des accidents du travail. La caisse de coordination aux assurances sociales de la RATP gère l’assurance maladie pour les agents en activité et leurs ayants droit, les retraités et leurs ayants droit. Si elle dispose d’une comptabilité distincte, elle est, en fait, un service de l’entreprise, qui ne dispose ni de la personnalité juridique, ni de l’autonomie financière. Dans le cas d’espèce, l’EPIC RATP représentant ladite caisse a notifié au salarié une décision de refus de prise en charge de son accident du travail et, comme comparant devant le tribunal des affaires de la sécurité sociale de Bobigny, a soutenu que l’enquête diligentée par la CCAS entre le 21 octobre 2015 et le 30 décembre 2015 avait permis d’établir que Monsieur [O] serait à l’origine de ses traumatismes, « après avoir agressé la voyageuse dans son bus ». Il s’en déduit que l’employeur avait eu connaissance des circonstances de l’incident et du rôle de Monsieur [O] dans l’altercation avec la voyageuse avant le 31 décembre 2015, soit plus de deux mois avant l’engagement de la procédure. Le moyen tiré de la prescription est donc opérant » ;

ET AUX MOTIFS QUE : « Il découle de ce qui précède que le jugement sera réformé, la révocation ne reposant pas sur une cause réelle et sérieuse. Sur les conséquences de la révocation sans cause réelle et sérieuse ; Le jugement sera confirmé en ce qu’il a alloué à Monsieur [O] une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, l’indemnité de licenciement. Compte tenu de l’effectif de l’entreprise, du montant de la rémunération versée au salarié, (2356,07 euros), de son âge, de son ancienneté, (11 années), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu’ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour est en mesure d’allouer à Monsieur [O] une somme de 18 000 euros à titre de dommages et intérêts pour révocation sans cause réelle et sérieuse » ;

1. ALORS QUE le délai de deux mois prévu par l’article L. 1332-4 du code du travail ne court qu’à compter du moment où l’employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié ; que si la Caisse de coordination aux assurances sociales (CCAS) est juridiquement rattachée à la RATP dans le cadre d’un régime spécial de sécurité sociale, elle n’en demeure pas moins un organisme autonome de sécurité sociale et ne dispose d’aucun pouvoir de direction à l’encontre des agents de l’entreprise ; qu’elle ne saurait donc être assimilée à l’employeur s’agissant de l’exercice du pouvoir disciplinaire ; qu’au cas présent, la RATP faisait valoir qu’elle n’avait pas pu avoir une connaissance exacte des faits commis par M. [O] le 21 octobre 2015 avant d’avoir obtenu le rapport de police le 16 février 2016 ; que pour juger néanmoins que « l’employeur avait eu connaissance des circonstances de l’incident et du rôle de Monsieur [O] dans l’altercation avec la voyageuse avant le 31 décembre 2015 », de sorte que les faits étaient prescrits, la cour d’appel a relevé que la CCAS, « en fait, un service de l’entreprise, qui ne dispose ni de la personnalité juridique, ni de l’autonomie financière », a notifié à M. [O] « son refus de prendre l’incident en charge au titre des accidents du travail le 31 décembre 2015 » après avoir diligenté une enquête qui lui « avait permis d’établir que Monsieur [O] serait à l’origine de ses traumatismes, après avoir agressé la voyageuse dans son bus » ; qu’en statuant ainsi, cependant que les informations recueillies par la CCAS lors d’une enquête contradictoire ne sont pas portées à la connaissance de l’employeur RATP, la cour d’appel a statué par des motifs impropres à caractériser la connaissance exacte et complète par l’employeur des faits reprochés au salarié et a violé les articles L. 1332-4 du code du travail, l’article L. 211-1 du code de la sécurité sociale, les articles 76 et 78 du Statut règlementaire du personnel de la RATP, ensemble le décret n° 2004-174 du 23 février 2004 et le règlement intérieur de la CCAS ;

2. ALORS QUE les réserves apportées par l’employeur à la déclaration d’accident du travail consistent précisément à émettre un doute sur la matérialité de l’accident invoqué par le salarié ; qu’il en résulte que l’émission de telles réserves ne peut être assimilée à la connaissance des faits par l’employeur, au sens de l’article L. 1332-4 du code du travail ; qu’en relevant qu’ « il est par ailleurs avéré que l’EPIC RATP a émis une réserve sur le formulaire d’accident du travail » pour en déduire que la RATP avait eu connaissance des faits commis par M. [O] avant le 31 décembre 2015, la cour d’appel a statué par un motif inopérant et a violé l’article L. 1332-4 du code du travail et l’article R. 441-11 du code de la sécurité sociale.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la RATP à verser à M. [O] une somme de 13 450,68 € pour écrêtement des congés payés ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de dommages-intérêts pour écrêtement des congés payés ; Si des dispositions ou pratiques nationales peuvent limiter le cumul des droits au congé annuel payé d’un travailleur en incapacité de travail pendant plusieurs périodes de référence consécutives au moyen d’une période de report à l’expiration de laquelle le droit au congé annuel payé s’éteint, dès lors que cette période de report dépasse substantiellement la durée de la période de référence, la directive 2003/88/CE ne fait pas obligation aux États membres de prévoir une telle limitation ; qu’après avoir retenu que les articles 58 et 71, alinéa 3, du statut du personnel relatifs à l’écrêtement des congés payés et aux reports en cas de maladie de l’agent étaient contraires aux dispositions claires et inconditionnelles de l’article 7 de la directive 2003/88/CE, la cour d’appel, qui a ordonné à l’employeur de régulariser la situation de l’ensemble des salariés concernés a, sans méconnaître son office, fait l’exacte application de la loi. Eu égard à la finalité qu’assigne aux congés payés annuels la directive 2003/88/CE du Parlement européen concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, lorsque le salarié s’est trouvé dans l’impossibilité de prendre ses congés payés annuels au cours de l’année prévue par le code du travail ou une convention collective en raison d’absences liées à une maladie, un accident du travail ou une maladie professionnelle, les congés payés acquis doivent être reportés après la date de reprise du travail ou, en cas de rupture, être indemnisés au titre de l’article L. 3141-26 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable. L’article 7 de la directive 2003/88/CE ayant repris à l’identique les termes de l’article 7 de la directive 93/104/CE, dont le délai de transposition expirait le 23 novembre 1996, la situation des salariés concernés doit être régularisée à compter du 4 novembre 2003. Il s’en déduit qu’en cas de rupture du contrat de travail, comme dans le cas d’espèce, le salarié doit être indemnisé » ;

1. ALORS QUE l’article L. 3245-1 du code du travail fixe une prescription triennale en matière de paiement du salaire et prévoit, dans l’hypothèse où le contrat de travail a été rompu, que la demande ne peut porter que sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat de travail ; que l’article D. 3141-7 du même code précise que ces règles s’appliquent aux actions intentées en paiement des indemnités dues au titre des congés payés ; qu’il en résulte que le salarié, dont le contrat de travail a été rompu, ne peut former une demande en paiement de congés payés qu’au titre des trois années précédant la rupture de son contrat ; qu’en l’espèce, M. [O] sollicitait la condamnation de la RATP à lui verser une somme de 13.450,68 € en paiement de 122,77 jours de congés payés qui lui auraient prétendument été écrêtés entre 2005 et 2016 (arrêt, p. 2, al. 17) ; que la RATP faisait valoir que cette demande était prescrite pour la période antérieure au mois de juin 2013, dès lors que le contrat de travail du salarié avait été rompu le 2 juin 2016 (conclusions, pp. 32-33) ; qu’en faisant intégralement droit à la demande de M. [O], cependant que celle-ci était partiellement prescrite et ne pouvait porter que sur la période de trois ans précédant la rupture du contrat de travail, la cour d’appel a violé les articles L. 3245-1et D. 3141-7 du code du travail ;

2. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la cour d’appel a éludé la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de M. [O] pour la période antérieure au mois de juin 2013 (conclusions RATP, pp. 32-33) ; qu’en s’abstenant ainsi de répondre à ce moyen déterminant, la cour d’appel a entaché sa décision d’un défaut de réponse à conclusions et a violé l’article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la RATP à verser à M. [O] les sommes de 1.500 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l’obligation de sécurité et 2.500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE « Sur le harcèlement et la discrimination ; (?) ; Comme faits de nature à laisser présumer l’existence d’un harcèlement, Monsieur [O] fait état de deux mensonges de la part de Madame [U] [D] en réponse à la demande de Madame [B], caractérisant des manoeuvres visant à obtenir de la CCAS le rejet de la prise en charge de l’incident au titre de l’accident du travail ainsi que l’apposition d’une affichette, dont une copie est communiquée au débat, pour lui interdire l’accès au centre bus. M. [X] atteste avoir constaté la présence d’une telle note affichée, au vu et au su des machinistes, alors qu’il accompagnait Monsieur [O] le 7 juin 2016 au centre bus pour participer à une conférence de M. [H]. S’agissant des réponses de Madame [U], il y a lieu de relever qu’à la question « veuillez me préciser si le salarié a déclenché l’alarme discrète ? », elle a répondu : « l’agent n’arrivait pas a priori à déclencher l’alarme discrète, il stipule même ne pas savoir faire une AD, (…)c’est une équipe GPSR qui intervient sur place et qui déclenche l’AD ». À la question numéro 2 ; « estimez-vous devoir apporter des informations complémentaires sur ce dossier ? » Madame [U] a observé : « le fait que le MR n’ait pas de lui-même fait une AD nous laisse perplexes sur le déroulement des événements ». Pour établir le caractère sciemment erroné des réponses de Madame [U], Monsieur [O] communique divers éléments et, notamment, le compte rendu de l’alarme déclenchée à 22 heures 05. S’agissant de la discrimination, Monsieur[O] soutient qu’une politique dite « vision 2010 » a été mise en oeuvre avec pour objectif de rompre les contrats de travail des agents au faible taux de présence. Comme faits de nature à laisser supposer une discrimination directe ou indirecte en lien avec son état de santé, Monsieur [O] expose, après avoir rappelé qu’il avait subi quatre accidents du travail à l’origine de nombreuses et longues absences, avoir bénéficié d’un seul entretien d’évaluation en près de 11 années d’ancienneté et avoir été révoqué en raison de son état de santé. L’employeur conteste tout harcèlement et toute discrimination en lien avec la santé. Il fait état du fait que l’absence d’entretien résulte objectivement des longues absences de Monsieur [O], soit 480 jours à la suite de l’accident de travail du 18 août 2006, 136 jours à la suite de l’accident du travail du 29 janvier 2010, 494 jours à la suite de l’accident du travail du 26 octobre 2010, 1027 jours à la suite de l’accident du travail du 10 octobre 2013. Il précise que les managers ont, à chaque fois, souhaité laisser le salarié reprendre son activité avant de programmer un entretien mais qu’une nouvelle absence débutait avant qu’ils ne puissent l’organiser. Il observe que Monsieur [O] était absent au moment des épreuves du concours métro et qu’il a suivi des formations entre 2012 et 2015 et particulièrement, les formations obligatoires permettant le renouvellement de la carte de qualification de conducteur. S’agissant de la révocation, il soutient qu’elle était consécutive au comportement fautif du salarié et non en lien avec une discrimination ou un harcèlement. Le seul fait que la révocation soit dépourvue de cause réelle et sérieuse ne suffit pas à établir qu’elle était constitutive d’un acte de harcèlement et/ou d’une discrimination en lien avec l’état de santé du salarié même si l’altercation de Monsieur [O] et d’une passagère a été à l’origine d’un arrêt de travail pour le salarié. Les éléments communiqués et spécialement le rapport de police établi à la suite de la plainte de Monsieur [O] montrent que la passagère, que celui-ci a accusé de lui avoir porté des coups à l’origine de ses blessures et des répercussions psychologiques invoquées, n’a fait l’objet d’aucune poursuite de la part du procureur de la République en raison du rôle actif du plaignant dans l’altercation l’ayant opposé à ladite passagère. Il se déduit de l’ensemble des éléments que si la révocation n’était pas en elle-même un acte constitutif d’un harcèlement et/ou d’une discrimination directe ou indirecte compte tenu du rôle actif du salarié dans la survenance de l’incident dénoncé et des conséquences en résultant pour son intégrité physique et psychologique, nonobstant le fait que la révocation ait été déclarée sans cause réelle et sérieuse du fait de la prescription, l’Epic RATP ne justifie pas spécialement que les réponses de Madame [U] et l’affichage de l’interdiction faite à Monsieur [O] d’accéder au centre bus reposent par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, ni que la réalisation d’un seul entretien au cours de 11 années de collaboration était étrangère à toute discrimination en lien avec l’état de santé du salarié, puisque de son aveu même, l’absence d’entretien était consécutive aux absences du salarié placé en arrêt de travail. Le salarié a subi des préjudices moraux résultant des faits de harcèlement et de discrimination en lien avec son état de santé que la cour évalue respectivement à 1500 euros pour chacun des deux préjudices. En revanche, dès lors que la révocation ellemême n’est pas un acte constitutif d’un harcèlement ou d’une discrimination, le moyen tiré de la nullité de la rupture pour ce motif est inopérant » ;

ET AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de dommages-intérêts pour nonrespect par l’employeur de son obligation de sécurité ; La cour a retenu la réalité d’un harcèlement. Il s’en déduit qu’en dépit de dispositif d’accompagnement mis en place, les mesures pour prévenir toute situation de harcèlement sont, soit insuffisantes, soit inefficientes. Le non-respect de son obligation à cet égard est à l’origine d’un préjudice que la cour arrête à la somme de 1000 euros » ;

ET AUX MOTIFS QUE : « Le fait que l’EPIC n’ait pas pris des mesures efficientes pour empêcher le harcèlement et la discrimination subie caractérise une exécution fautive du contrat de travail par l’employeur que la cour évalue à la somme de 2500 euros ».

1. ALORS QUE le harcèlement moral suppose la caractérisation de faits constitutifs d’agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié, d’altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; que l’exercice normal par l’employeur de son pouvoir de direction et de gestion, dans l’intérêt de l’entreprise, ne permet pas de caractériser de tels agissements ; qu’il en résulte que le fait pour un employeur, interrogé dans le cadre d’une enquête diligentée par un organisme de sécurité sociale, d’émettre des réserves quant aux circonstances d’un accident du travail invoqué par son salarié, ne saurait être, sauf abus de droit, constitutif d’un harcèlement moral ; qu’en l’espèce, pour se prétendre victime d’un harcèlement moral, M. [O] prétendait que Mme [U], responsable des ressources humaines du centre bus, aurait menti dans le cadre de l’enquête diligentée par la CCAS de la RATP, au terme de laquelle celle-ci a refusé de prendre en charge l’accident déclaré par le salarié au titre de la législation sur les risques professionnels ; que pour retenir l’existence d’un harcèlement moral et condamner la RATP à ce titre, la cour d’appel s’est bornée à faire mention des « réponses de Mme [U] », selon lesquelles « l’agent n’arrivait pas a priori à déclencher l’alarme discrète, il stipule même ne pas savoir faire une AD, (?) c’est une équipe GPSR qui intervient sur place et qui déclenche l’AD » et que « le fait que le MR n’ait pas de lui-même fait une AD nous laisse perplexes sur le déroulement des événements » ; qu’en s’abstenant de rechercher en quoi ces réponses auraient été erronées, fautives ou auraient excédé l’exercice normal par l’employeur de son pouvoir de direction et de gestion, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé l’existence d’un fait constitutif de harcèlement moral, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

2. ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, le juge doit s’expliquer sur l’ensemble des circonstances objectives étrangères à tout harcèlement moral invoquées par l’employeur ; que pour contester les allégations de M. [O], la RATP faisait valoir, d’une part, qu’elle était en droit de formuler des réserves sur le caractère professionnel de l’accident invoqué par le salarié conformément à l’article R. 441-11 du code de la sécurité sociale et, d’autre part, que les éléments de réponse apportés par Mme [U] à la CCAS reposaient sur le rapport « alarme 393 », dont il ressortait que M. [O] n’avait pas actionné l’alarme discrète et que l’écoute discrète n’était pas exploitable, de sorte que le déroulé exact des faits n’était pas établi (conclusions de la RATP, p. 27-29, pièce n° 40 et pièce adverse n° 19) ; qu’en se bornant néanmoins à énoncer que « l’Epic RATP ne justifie pas spécialement que les réponses de Madame [U] [?] reposent par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement » pour retenir l’existence d’un harcèlement moral, la cour d’appel, qui n’a pas examiné les éléments justificatifs apportés par la RATP pour démontrer que les agissements invoqués par M. [O] étaient étrangers à tout harcèlement, a violé l’article L. 1154-1 du code du travail ;

3. ALORS QUE le harcèlement moral suppose la caractérisation de faits constitutifs d’agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié, d’altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; que l’employeur est en droit d’interdire l’accès à ses locaux à toute personne étrangère à l’entreprise ; qu’il en résulte que l’interdiction faite à un ancien salarié de pénétrer dans les locaux de l’entreprise, postérieurement à son licenciement, ne saurait être confondue avec un fait de harcèlement moral ;
qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que le contrat de travail de M. [O] avait été rompu le 2 juin 2016 (arrêt, p. 2, al. 5), ce dont il résultait qu’il n’était plus salarié de l’entreprise à compter de cette date et que la RATP était en droit de s’opposer à sa présence dans ses locaux ; qu’en retenant néanmoins l’existence d’un harcèlement moral au motif que la RATP avait interdit à M. [O] de pénétrer dans les locaux de l’entreprise le 7 juin 2016, soit postérieurement à sa révocation, alors que celui-ci entendait assister à la conférence qui y était donnée par [L] [H], la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé l’existence d’un fait constitutif de harcèlement moral, a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

4. ALORS QUE la cour d’appel s’est exclusivement fondée sur l’existence d’un harcèlement moral à l’encontre de M. [O] pour condamner la RATP à lui payer une somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l’obligation de sécurité ; qu’en application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le chef de l’arrêt ayant retenu l’existence d’un harcèlement moral entraînera nécessairement, par voie de conséquence, la cassation de l’arrêt en ce qu’il a jugé que la RATP avait manqué à son obligation de sécurité et l’a condamnée à verser à M. [O] une somme de 1.000 € à ce titre ;

5. ALORS QUE la cour d’appel a encore reproché à la RATP de ne pas avoir « pris des mesures efficientes pour empêcher le harcèlement » de M. [O] pour la condamner à lui payer une somme de 2.500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ; qu’en application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le chef de l’arrêt ayant retenu l’existence d’un harcèlement moral entraînera nécessairement, par voie de conséquence, la cassation de l’arrêt en ce qu’il a condamné la RATP à verser à M. [O] une somme de 2.500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, au regard du lien de dépendance nécessaire qui existe entre ces deux aspects du litige.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la RATP à verser à M. [O] les sommes de 1.500 € à titre de dommages-intérêts pour discrimination en lien avec l’état de santé et 2.500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

AUX MEMES MOTIFS QUE ceux évoqués dans le troisième moyen de cassation ;

1. ALORS QUE lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la finalité de l’entretien annuel d’évaluation est précisément d’évaluer les compétences et la qualité du travail effectué par un salarié ; que l’employeur ne peut pas évaluer le travail d’un salarié ayant été absent pour arrêt de travail durant de longues périodes et dont le contrat de travail a été régulièrement suspendu ; qu’il en résulte que les absences importantes et répétées d’un salarié, dont le contrat est régulièrement suspendu, peuvent constituer un élément objectif, étranger à toute discrimination, justifiant de ce que l’employeur n’ait pas été en mesure d’organiser un entretien annuel d’évaluation, faute de pouvoir utilement évaluer le travail fourni par le salarié ; qu’au cas présent, la RATP faisait valoir, avec offre de preuves, que l’insuffisance d’entretien d’évaluation résultait objectivement des longues absences de M. [O], dont le contrat de travail avait été suspendu durant un total de 2.137 jours, car celui-ci débutait systématiquement un nouvel arrêt de travail avant que les managers n’aient pu utilement organiser un entretien destiné à évaluer sa prestation de travail (conclusions, p. 26) ; que la cour d’appel a néanmoins retenu l’existence d’une discrimination au seul motif que « l’Epic RATP ne justifie pas spécialement [?] que la réalisation d’un seul entretien au cours de 11 années de collaboration était étrangère à toute discrimination en lien avec l’état de santé du salarié, puisque de son aveu même, l’absence d’entretien était consécutive aux absences du salarié placé en arrêt de travail » ; qu’en statuant ainsi, cependant que les longues absences de M. [O], placé en arrêts de travail répétés, expliquaient objectivement qu’un seul entretien d’évaluation n’ait pu être organisé par la RATP, la cour d’appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail, ensemble l’article L. 1226-7 du code du travail ;

2. ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE pour se prononcer sur l’existence d’une discrimination, le juge doit s’expliquer sur l’ensemble des circonstances objectives étrangères à toute discrimination invoquées par l’employeur ; qu’en l’espèce, la RATP faisait valoir, avec offre de preuves, que l’insuffisance d’entretien d’évaluation résultait objectivement des longues absences de Monsieur [O], dont le contrat de travail avait été suspendu durant un total de 2 137 jours, car celui-ci débutait systématiquement un nouvel arrêt de travail avant que les managers n’aient pu utilement organiser un entretien d’évaluation (conclusions, p. 26) ; que néanmoins, la cour d’appel s’est bornée à relever que « de son aveu même, l’absence d’entretien était consécutive aux absences du salarié placé en arrêt de travail » pour retenir l’existence d’une discrimination, sans rechercher comme elle y était pourtant invitée, si, en l’espèce, les longues absences de M. [O] n’avaient pas, par leur ampleur, fait obstacle à ce que la RATP puisse utilement organiser un entretien d’évaluation du travail fourni par le salarié ; qu’en refusant ainsi d’examiner les éléments justificatifs apportés par l’exposante pour démontrer que les agissements invoqués par M. [O] étaient étrangers à toute discrimination, la cour d’appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail ;

3. ALORS QUE la cour d’appel s’est fondée sur l’existence d’une discrimination pour caractériser « une exécution fautive du contrat de travail par l’employeur » et condamner la RATP à payer à M. [O] une somme de 2.500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ; qu’en application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le chef de l’arrêt ayant retenu l’existence d’une discrimination entraînera nécessairement, par voie de conséquence, la cassation de l’arrêt en ce qu’il a condamné la RATP à verser à M. [O] une somme de 2.500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, au regard du lien de dépendance nécessaire qui existe entre ces aspects du litige ;

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la RATP à verser à M. [O] une somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour éviction brutale ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de dommages-intérêts pour rupture brutale et vexatoire de la révocation ; Monsieur [O] a subi une éviction vexatoire en ce qu’il s’est vu refuser l’accès au centre bus pour assister à une conférence ainsi que cela ressort du témoignage de Monsieur [V] déjà évoqué qui atteste aussi de la réaction vive de Madame [U] qui a menacé d’appeler les services de police. Ce préjudice distinct de celui qui résulte de la perte de l’emploi sera évalué à la somme de 1.500 euros » ;

ET AUX MOTIFS QUE « comme faits de nature à laisser présumer l’existence d’un harcèlement, Monsieur [O] fait état de deux mensonges de la part de Madame [U] [D] en réponse à la demande de Madame [B], caractérisant des manoeuvres visant à obtenir de la CCAS le rejet de la prise en charge de l’incident au titre de l’accident du travail ainsi que l’apposition d’une affichette, dont une copie est communiquée au débat, pour lui interdire l’accès au centre bus. M. [X] atteste avoir constaté la présence d’une telle note affichée, au vu et au su des machinistes, alors qu’il accompagnait Monsieur [O] le 7 juin 2016 au centre bus pour participer à une conférence de M. [H] » ;

ALORS QUE l’interdiction faite à un ancien salarié, postérieurement à son licenciement, de pénétrer dans les locaux de l’entreprise ne caractérise pas une faute dans les circonstances de la rupture du contrat de travail, de nature à justifier l’allocation d’une indemnité distincte des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que le contrat de travail de M. [O] avait été rompu le 2 juin 2016 (arrêt, p. 2, al. 5), ce dont il résultait qu’il n’était plus salarié de l’entreprise à compter de cette date et que la RATP était en droit de lui refuser l’accès à ses locaux ; que néanmoins, la cour d’appel a octroyé à M. [O] des dommages-intérêts pour éviction brutale au motif qu’il s’était vu refuser l’accès au centre bus pour assister à une conférence de M. [L] [H] le 7 juin 2016 et que la RRH de l’établissement l’avait alors menacé d’appeler les services de police ; qu’en statuant comme elle l’a fait, cependant qu’il résultait de ses propres constatations que la RATP n’avait commis aucune faute dans les circonstances de la rupture du contrat de travail, de nature à justifier l’allocation d’une indemnité distincte des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d’appel a violé l’article 1231-1 du code civil.ECLI:FR:CCASS:2023:SO00002


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x