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C 2
N° RG 21/02320
N° Portalis DBVM-V-B7F-K4OC
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
la SARL DEPLANTES & CAMERINO AVOCATES ASSOCIEES
la SCP MAISONOBE – OLLIVIER
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section B
ARRÊT DU JEUDI 23 FEVRIER 2023
Appel d’une décision (N° RG 19/00540)
rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRENOBLE
en date du 03 mai 2021
suivant déclaration d’appel du 21 mai 2021
APPELANTE :
Fondation FONDATION PARTAGE & VIE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège, prise en son établissement « les Quatre Jardins » située [Localité 4]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Sofia CAMERINO de la SARL DEPLANTES & CAMERINO AVOCATES ASSOCIEES, avocat postulant au barreau de GRENOBLE,
et par Me Cécile PESSON de la SARL OCTOJURIS – MIFSUD – PESSON – AVOCATS, avocat plaidant au barreau de LYON
INTIMEE :
Madame [K] [Y]
née le 27 Décembre 1960 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Elise OLLIVIER de la SCP MAISONOBE – OLLIVIER, avocat au barreau de GRENOBLE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 2021/008770 du 11/08/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,
M. Frédéric BLANC, Conseiller,
Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,
Assistés lors des débats de Mme Carole COLAS, Greffière
DÉBATS :
A l’audience publique du 14 décembre 2022,
Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère, a été chargée du rapport, et les avocats ont été entendus en leurs observations et conclusions.
Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.
EXPOSE DU LITIGE’:
Mme [K] [Y], née le 7 décembre 1960, a été embauchée le 28 septembre 2009 par contrat de travail à durée indéterminée par la’Fondation Caisses d’Epargne pour la Solidarité, devenue la Fondation Partage et Vie, en qualité d’infirmière, coefficient 477, statut non cadre, de la convention collective nationale des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951.
Le domaine principal d’intervention de la Fondation Partage et Vie est la conception et la gestion de la prise en charge de personne en situation de perte d’autonomie, à domicile ou en établissement, liée à l’âge, la maladie ou un handicap physique, sensoriel ou mental.
Mme [K] [Y] a été affectée à la résidence « Les Quatre Jardins », établissement médico-social qui accueille des adultes handicapés par une épilepsie, situé à [Localité 7].
A compter de 2015, Mme [K] [Y] était affectée à un poste de nuit et travaillait à 80% en équipe restreinte, en binôme avec une aide-soignante.
Dans la nuit du 20 au 21 septembre 2018, un incident a eu lieu au sein de l’établissement, un résident s’étant introduit dans la chambre d’une autre pensionnaire. Mme [K] [Y] a rendu compte de son intervention par une transmission de 6h31. A 9h30, l’équipe de jour a retrouvé cette pensionnaire souillée de matières fécales sur le haut du corps.
Par courrier en date du 24 septembre 2018, Mme [K] [Y] a été convoquée par la Fondation Partage et Vie à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire fixé au’4’octobre’2018.
Par courrier du 3 octobre 2018, Mme [K] [Y] a exposé le déroulement des faits de la nuit du 20 au 21 septembre 2018.
Par courrier du 17 octobre 2018, la Fondation Partage et Vie a notifié à Mme [K] [Y] une mise à pied disciplinaire de 3 jours, pour motif de maltraitance envers une patiente.
Par courrier en date du 25 octobre 2018, Mme [K] [Y] a contesté la sanction disciplinaire.
La mise à pied a été imputée sur les 5, 9 et 19 novembre 2018.
Mme [K] [Y] a été placée en arrêt de travail pour maladie du 22 octobre 2018 au’4’novembre 2018, puis du 28 novembre 2018 au 9 janvier 2020.
Parallèlement, une enquête préliminaire a été engagée et Mme'[K]'[Y] a été entendue comme témoin le 1er mai 2019, et le directeur de l’établissement de la Fondation Partage et Vie a été entendu le 27 mai 2019.
Par requête en date du 20 juin 2019, Mme [K] [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de Grenoble afin de faire prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur.
Le 10 janvier 2020, à l’issue d’une visite médicale de reprise organisée pour Mme [K] [Y], le médecin du travail a rendu un avis d’inaptitude assorti d’une dispense de l’obligation de reclassement.
Le 27 janvier 2020, l’employeur a consulté les membres du comité social et économique au sujet du reclassement de Mme [K] [Y] et, par courrier en date du 31 janvier 2020, la Fondation Partage et Vie a informé Mme [K] [Y] de l’impossibilité de la reclasser.
Par courrier en date du 3 février 2020, Mme [K] [Y] a été convoquée par la Fondation Partage et Vie à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 13 février 2020.
Par courrier en date du 18 février 2020, la Fondation Partage et Vie a notifié à Mme'[K]'[Y] son licenciement pour inaptitude d’origine non-professionnelle et impossibilité de reclassement.
Mme [K] [Y] a alors contesté ce licenciement et sa mise à pied disciplinaire dans le cadre de la procédure engagée aux fins de résiliation du contrat de travail aux torts de l’employeur.
La Fondation Partage et Vie s’est opposée aux prétentions adverses.
Par jugement en date du 3 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Grenoble a’:
– annulé la mise à pied disciplinaire notifiée le 17 octobre 2018 à Mme [K] [Y],
– prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [K] [Y] aux torts de la Fondation Partage et Vie,
– dit que cette résiliation judiciaire s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 18 février 2020,
– condamné la Fondation Partage et Vie à payer à Mme [K] [Y] les sommes suivantes
– 5.460,00 € au titre de l’indemnité de préavis,
– 546 00 € au titre des congés payés afférents,
– 492,74 € à titre de rappel de salaire pendant la période de mise à pied,
lesdites sommes avec intérêts de droit à la date du 26 juin 2019,
– 22.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1200,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
lesdites sommes avec intérêts de droit à la date du présent jugement,
– débouté la Fondation Partage et Vie de ses autres demandes,
– rappelé que les sommes à caractère salarial sont assorties de l’exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution, en application de l’article R. 1454-28 du code du travail, dans la limite de neuf mois de salaire, la moyenne des trois derniers mois de salaire étant de’2.730,00’€ brut,
– débouté la Fondation Partage et Vie de sa demande reconventionnelle,
– condamné la Fondation Partage et Vie aux dépens.
La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 12 mai 2021 pour Mme [K] [Y] et le 14 mai 2021 pour la Fondation Partage et Vie.
Par déclarations en date des 21 et 25 mai 2021, la Fondation partage et Vie a interjeté appel à l’encontre dudit jugement.
Suivant ordonnance en date du 17 juin 2021, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des instances n° RG 21/2359 et n° RG 21/2320 sous ce dernier numéro.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 25 janvier 2022, la Fondation Partage et Vie sollicite de la cour de’:
Infirmer le jugement rendu le 3 mai 2021 par le conseil de prud’hommes de Grenoble en ce qu’il a :
– annulé la mise à pied disciplinaire notifiée le 17 octobre 2018 à Mme [K] [Y],
– prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [K] [Y] aux torts de la’Fondation Partage et Vie,
– dit que cette résiliation judiciaire s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 18 février 2020,
– condamné la Fondation Partage et Vie à payer à Mme [K] [Y] les sommes suivantes :
– 5 460 € au titre de l’indemnité de préavis,
– 546 € au titre des congés payés afférents,
– 492,74 € à titre de rappel de salaire pendant la période de mise à pied, lesdites sommes avec intérêts de droit à la date du 26 juin 2029,
– 22 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1 200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile lesdites sommes avec intérêts de droit à la date du présent jugement,
– débouté la Fondation Partage et Vie de ses autres demandes
Ce faisant, en réformation,
– Constater le caractère proportionné et justifié de la sanction disciplinaire,
– Débouter Mme [K] [Y] de l’intégralité de ses demandes au titre de la sanction disciplinaire,
– Dire et juger que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [K] [Y] est infondée,
– Constater l’absence de violation d’une obligation de sécurité,
– Dire et juger que la contestation de la sanction disciplinaire et son éventuelle annulation ne saurait dans tous les cas justifier la demande de résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’employeur,
– Dire et juger que les demandes de Mme [K] [Y] sont injustifiées tant dans leur principe que dans leur quantum,
– Débouter en conséquence devant la Cour, Mme [K] [Y] de ses demandes au titre du préavis et des congés payés y afférents,
Au titre de l’appel incident’:
– Rejeter l’appel incident de Mme [K] [Y] au titre de son licenciement pour inaptitude comme étant infondé,
Ce faisant,
– Dire et juger que le licenciement pour inaptitude est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
– Rejeter l’intégralité des prétentions de Mme [K] [Y] comme étant infondées dans leur principe et dans leur quantum,
Confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a :
– débouté Mme [K] [Y] de sa demande de dommages et intérêts au titre d’un préjudice moral,
– débouté Mme [K] [Y] de ses demandes au titre des indemnités complémentaires maladie.
Y ajoutant,
Condamner Mme [K] [Y] à verser à l’établissement la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 29 octobre 2021, Mme'[K] [Y] sollicite de la cour de’:
Vu la Convention Collective Nationale 51 (FEHAP).
Vu l’article L. 4121-1 du code du travail
Vu l’article 10 de la Convention 158 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) :
Vu l’article 8 de la Convention 158 de l’OIT stipule par ailleurs que :
Vu l’article 4 de la Convention 158 de l’OIT stipule lui que :
Vu l’article 24 de la Charte Sociale Européenne de Turin du 18 octobre 1961 révisée,
Vu l’article 1240 du code civil,
Vu les articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail,
Vu l’article L. 323-1 1° du code de la sécurité sociale
Vu l’article L324-1 du code de la sécurité sociale
Confirmer la décision rendue le 3 mai 2021 par le conseil de prud’hommes, section activités diverses, sous le numéro RG n°19/00540 en ce qu’elle a :
– prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [K] [Y] aux torts de la Fondation Partage et Vie,
– condamné la Fondation Partage et Vie à verser à Mme [K] [Y] 5.460 € au titre du préavis, outre 546 € à titre de congés payés afférents.
– annulé la mise à pied disciplinaire notifiée le 17 octobre 2018 et condamné en conséquence la Fondation Partage et Vie à régler le salaire retenu pendant cette période à hauteur de 492,74 €,
A titre subsidiaire, sur la rupture du contrat de travail,
Infirmer la décision et Juger que le licenciement pour inaptitude, notifié le 18 février 2020 est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Infirmer la décision rendue le 3 mai 2021 par le conseil de prud’hommes, section activités diverses, sous le numéro RG n°19/00540 pour le surplus et statuant à nouveau :
– Condamner la Fondation Partage et Vie au titre des indemnités de rupture à verser à Mme'[K]'[Y] la somme de 34.000 € au titre de l’indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– Condamner la Fondation Partage et Vie à indemniser Mme [K] [Y] au titre de son préjudice moral à hauteur de 20.000 €,
– Condamner la Fondation Partage et Vie à verser à Mme [K] [Y] la somme de 4.765 € au titre des indemnités complémentaires de maladie,
– Condamner la Fondation Partage et Vie à verser à Mme [K] [Y] la somme de 2.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner la Fondation Partage et Vie aux entiers dépens de l’instance,
Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l’article’455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 24 novembre 2022.
L’affaire, fixée pour être plaidée à l’audience du 14 décembre 2022, a été mise en délibérée au’23 février 2023.
MOTIFS DE L’ARRÊT
1 ‘ Sur la demande d’annulation de la mise à pied disciplinaire
L’article L. 1331-1 du code du travail énonce’:
« Constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération’».
L’article L. 1333-1 du code du travail dispose qu’en cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.
L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction.
Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le conseil de prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
L’article L. 1333-2 du même code précise que le conseil de prud’hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
En l’espèce, il ressort du courrier de sanction disciplinaire en date du 17 octobre 2018 que la Fondation Partage et Vie vise les faits survenus dans la nuit du 20 au 21 septembre 2018 et reproche à la salariée d’avoir sciemment laissé Mme N. dans les selles de [G] sans la nettoyer ni lui porter de soins en considérant qu’elle était consentante.
Ainsi le courrier relate d’abord que la salariée avait «’découvert M. G couché sur Mme N. dans son lit’» et «’fait cesser cette action immédiatement en renvoyant M. G dans sa chambre’».
Puis il indique que «’suivant les transmissions dans netsoins vous avez changé l’oreiller de Mme N., et avez estimé qu’elle était consentante’».
Après avoir visé les directives du Conseil de l’Europe sur la maltraitance,le courrier mentionne encore «’Au matin, l’aide-soignante de la maison a pris ses fonctions avec l’information d’un incident, rien de plus. A 9h30 selon les habitudes, la soignante en poste est allée prendre en charge Mme N.’afin de l’aider pour la toilette et l’habillement. Elle a découvert à ce moment-là Mme N. recouverte d’excrément sur tout le haut du corps’: pyjama, cheveux, visage et bouche’».
En premier lieu, il ressort de la transmission enregistrée par Mme [K] [Y] le’21’septembre’2018 à 6h31 «’A minuit je trouve [R] nu, en train de chevaucher [E] N. L’oreiller présente des traces de selles. Je renvoie [R] dans sa chambre. Il refuse de s’allonger et s’endormira vers 4h du matin’» sans qu’aucun élément versé aux débats ne permette de constater que la salariée aurait considéré que Mme N. était consentante, tel que visé dans le courrier de sanction disciplinaire.
Cet élément ne ressort que d’un courrier d’explication de la salariée en date du 3 octobre 2018, l’intéressée se limitant à s’interroger dans les termes suivants’: «’A sept heures du matin le 21septembre 2018, lors des transmissions orales, j’ai expliqué la situation et demandé à ma collègue si elle pouvait questionner madame [T] car je me demandais si elle était ou non consentante’».
Cette seule interrogation ne démontre nullement que la salariée aurait agi ou se serait abstenue d’agir ou de prodiguer des soins au motif que la patiente aurait été consentante.
Il ressort d’ailleurs des attestations de témoin produites par l’employeur que lors de la transmission des informations à l’équipe de jour à 7 heures, la salariée n’avait nullement évoqué des actes consentis mais avait rendu compte de l’événement en signalant l’intrusion de M.’G. dans la chambre et les salissures de l’oreiller de Mme N.
Ainsi, Mme [V] [F], infirmière, atteste que sa collègue a alors «’évoqué une intrusion de M.’G. dans le lit de Mme N.. Il nous a été transmis le fait que [G] avait été renvoyé dans sa chambre et le fait qu’un oreiller souillé de selles avait été retrouvé au sol dans la chambre de Mme N. et retiré. Les faits relatés laissés apparaître une situation réglée, qui ne nécessité aucune prise en charge urgente d’un résident’».
Et Mme [M] [C], aide-médico psychologique, qui atteste avoir assisté à la transmission du matin en salle de réunion, indique «’L’infirmière [K] [Y] a relaté un événement survenu dans la nuit entre [G] et Mme N., les faits relatés par Mme [Y] laissaient paraître une situation réglé ne nécessitant pas de prise en charge urgente de l’un des deux résidents’».
En second lieu, il n’est pas justifié des manquements de la salarié lors de son intervention à minuit.
Il est certes établi par la fiche de signalement des événements indésirables dressée le 21 septembre 2018 par Mme [F], infirmière, et Mme [J], aide-soignante, qu’ont été constaté, à 9h30, une «’insuffisance quantitative ou qualitative de toilettes’», des «’nuisances olfactives’» et une «’atteinte au respect de la dignité / maltraitance volontaire’» avec la description suivante «’Lors du levé de Mme N., nous la retrouvons dans son lit, avec une odeur nauséabonde (de selles) son haut de pyjama souillé de selles, ainsi que les draps, son visage, ses cheveux jusqu’à dans la bouche. Lorsque ma collègue lève les draps elle retrouve le caleçon de M. G.’».
Or, il ressort des attestations de témoin produites qu’aucun professionnel n’est intervenu dans la chambre de la victime entre la fin du service de Mme [Y] à 7 heures et ces constatations.
Ainsi, Mme [N] [J], aide-soignante, atteste « lors de ma prise de poste à 7h en maison Les Cascades, j’ai constaté en entrant dans la chambre de Mme N. une odeur nauséabonde de selles, ce qui était assez fréquent étant donné que cette dame portait des protections anatomiques. Au vu de l’organisation en maison ce jour-là j’ai pris en charge Mme’N. pour les soins d’hygiène vers 9h, comme nous le faisions régulièrement puisqu’elle avait pour habitude de dormir tard le matin. Lors de mon accompagnement j’ai pu constater que Mme N. avait des selles séchées sur le haut de son pyjama, mais aussi sur le visage, dans les cheveux, ainsi que dans la bouche d’ailleurs d’après mon expérience, ces selles étaient présentes depuis de nombreuses heures’».
Mme [V] [F] confirme cette intervention vers 9h en indiquant’: «’Aux alentours de 9h20 ma collègue aide-soignante Mme [J] [N], m’appelle pour m’informer que Mme’N. vient d’être retrouvé dans son lit, souillée de selles séchées’: sur son pyjama amis aussi son visage, ses cheveux et dans la bouche. Elle m’informe aussi qu’un caleçon appartenant à [G] et souillé de selles séchées se trouvait dans les draps de Mme N.’».
L’attestation rédigée par Mme [M] [C] ne présente pas de caractère probant quant aux faits constatés «’aux alentours de 9h’» dès lors que ni les précédents témoignages, ni la fiche de signalement, ne font état de sa présence lors de la prise en charge de Mme N.
La cour relève qu’il n’est produit aucun élément quant aux éventuelles constatations de l’aide-soignante qui travaillait en binôme avec Mme [K] [Y] ni quant aux circonstances précises de l’intervention de Mme [K] [Y] au cours de la nuit.
Finalement la seule circonstance que ces souillures ont été constatées sur la patiente dans la matinée suivant l’incident constaté dans la nuit, ne permet pas d’établir que Mme N. se trouvait dans le même état lors de l’intervention de Mme [Y] à minuit, ni que celle-ci, qui signalait au demeurant avoir changé un oreiller souillé de selles, aurait délibérément manqué d’apporter des soins à Mme N.
De surcroît, le temps écoulé entre les deux interventions auprès de Mme N. laisse naître un doute sérieux quant aux événements qui ont pu survenir pendant ce délai, d’autant que Mme'[Y] produit des relevés de transmissions enregistrés entre janvier 2015 et novembre’2018, concernant le comportement de [G] et faisant apparaître plusieurs incidents se rapportant à sa présence dans la chambre d’autres résidents, ainsi que des actes physiques agressifs et des situations d’énurésies ou d’encoprésie.
La Fondation Partage et Vie, qui s’interroge sur les conditions dans lesquelles la salariée a obtenu ces rapports en lui reprochant une violation du secret médical, ne demande pas à voir écarter ces pièces des débats, ni ne conteste les informations enregistrées.
Enfin, l’employeur allègue de la mauvaise foi opportuniste de la salariée sans qu’un tel comportement ne puisse se déduire ni des courriers d’alerte adressés par la salariée aux services du parquet et à l’agence régionale de santé, ni du fait qu’elle n’a sollicité l’annulation de sa mise à pied qu’en cours de procédure judiciaire.
Il en résulte que la Fondation Partage et Vie échoue à faire la preuve d’une omission volontaire ou de négligences fautives de Mme [K] [Y] dans la prise en charge de Mme N. dans la nuit du 20 au 21 septembre 2018, de sorte que la sanction disciplinaire prononcée est injustifiée.
Confirmant le jugement déféré, la mise à pied disciplinaire notifiée le 17 octobre 2018 est annulée et la Fondation Partage et Vie est condamnée à payer à Mme [K] [Y] la somme de 492,74 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied, sauf à préciser qu’il s’agit d’un montant brut, ladite somme produisant intérêts de droit à la date du 26 juin 2019, date de notification de la convocation de la Fondation Partage et Vie devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes.
2 ‘ Sur les prétentions relatives à la rupture du contrat de travail
Conformément aux dispositions de l’article 1184 du code civil, devenu l’article 1224 du code civil, la condition résolutoire étant toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement, la partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté peut demander au juge la résolution du contrat.
Les dispositions combinées des articles L.1231-1 du code du travail et 1224 du code civil permettent au salarié de demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur en cas de manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations contractuelles.
Il appartient au salarié d’établir la réalité des manquements reprochés à l’employeur et de démontrer que ceux-ci sont d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation contractuelle. La résiliation prononcée produit les mêmes effets qu’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le juge, saisi d’une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, doit examiner l’ensemble des griefs invoqués au soutien de celle-ci, quelle que soit leur ancienneté.
En cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d’effet de la résiliation ne peut être fixée qu’au jour de la décision qui la prononce, sauf si le salarié a été licencié dans l’intervalle de sorte qu’elle produit alors ses effets à la date de l’envoi de la lettre de licenciement.
En l’espèce, la salariée invoque un manquement grave de l’employeur à ses obligations de sécurité et de prévention rendant impossible la poursuite des relations contractuelles.
L’employeur a une obligation s’agissant de la sécurité et de la santé des salariés dont il ne peut le cas échéant s’exonérer que s’il établit qu’il a pris toutes les mesures nécessaires et adaptées énoncées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ou en cas de faute exclusive de la victime ou encore de force majeure.
L’article L. 4121-1 du code du travail dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2017-1389 du’22 septembre 2017 prévoit que :
L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;
2° Des actions d’information et de formation ;
3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.
A compter du 1er octobre 2017, la référence à la pénibilité a été remplacée par un renvoi à l’article L. 4161-1 du code du travail.
L’article L. 4121-2 du code du travail prévoit que :
L’employeur met en ‘uvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :
1° Eviter les risques ;
2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;
3° Combattre les risques à la source ;
4° Adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;
5° Tenir compte de l’état d’évolution de la technique ;
6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;
7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu’ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 ;
8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;
9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.
En l’espèce, Mme [K] [Y] soutient qu’en dépit des transmissions signalant le comportement de [G] envers certains résidents se rapportant à des actes de violences et d’agressions sexuelles, l’employeur n’a pris aucune mesure pour préserver les résidents de l’établissement ainsi que l’équipe soignante et éducative et que cette abstention s’est révélée source de tensions obérant ses conditions de travail.
D’une première part la Fondation Partage et Vie, fait valoir que le cas de [G], présentant «’une épilepsie pharmaco-résistante très active, une déficience mentale importante’» avec des encoprésies fréquentes, n’est pas un cas isolé dans l’établissement, pour en déduire que les équipes sont confrontées au quotidien à des conditions de travail difficiles, inhérentes à l’exécution de leurs fonctions.
Aussi, elle justifie de la mise en ‘uvre d’un logiciel dénommé Netvie, destiné à assurer un suivi précis de chacun des résidents et une communication entre les équipes, chaque professionnel étant autorisé à enregistrer un signalement faisant l’objet d’un examen en équipe pluridisciplinaire.
L’employeur précise encore que chaque professionnel peut établir, en cas de besoin, une fiche de signalement des événements indésirables, telle que celle dressée le’21 septembre 2018 pour Mme N.
Il en déduit que les différents événements enregistrés retraçant une réitération de comportements inadaptés et agressifs de [G] ont donné lieu à un examen en équipe pluridisciplinaire. La cour constate que le relevé des événements enregistrés mentionne ainsi quelques mesures au titre de la prise en charge du handicap de [G] telles que «’rappel de l’interdit’», «’discussion’», «’réassurance’», «’recadrage’», «’comité de vigilance’».
Pour autant, les outils ainsi mis à la disposition des professionnels pour assurer le suivi des résidents ne suffisent pas à établir la mise en ‘uvre effective de mesures destinées à prévenir les risques d’atteinte à la santé des autres résidents et des salariés exposés.
Or, la Fondation Partage et Vie n’explicite aucune mesure d’évaluation de ces risques. Elle ne justifie d’aucune action de prévention ou d’information destinées à prévenir les risques de souffrance morale des professionnels confrontés, au quotidien, au potentiel agressif des résidents et aux tensions que ce contexte génère.
Ni la spécificité de l’établissement, ni les qualifications particulières du personnel soignant recruté au vu de la spécificité des handicaps, ni l’expérience de Mme [K] [Y] exerçant dans son établissement depuis neuf années, ne dispensait l’employeur de ses obligations de prévention et de sécurité.
D’une seconde part, il n’incombe pas à la salariée de faire la preuve d’une situation qui aurait excédé la gestion habituelle de [G] ou d’une violation d’une règle spécifique dans l’organisation de la prise en charge des résidents.
Dans son courrier de contestation de la mise à pied disciplinaire en date du’25’octobre’2018 Mme [K] [Y] dénonce «’un dysfonctionnement institutionnel’» en décrivant «’nous n’avons pas le droit de fermer à clé une chambre si son occupant n’est pas en mesure de la déverrouiller lui-même. Or madame N. a besoin d’aide pour tous ses déplacements. La nuit nous sommes deux professionnels à veiller sur 40 résidents répartis dans 4 maisons. Plusieurs de ses résidents demandant une attention soutenue’; nous ne pouvons donc pas surveiller monsieur G. continuellement. Par conséquent, les agressions à caractère sexuel de monsieur’G. vont selon toute probabilité continuer sur les personnes vulnérables qui seront logées dans sa maison’».
La Fondation Partage et Vie se limite à soutenir que ni l’agence régionale de santé ni les services du parquet n’auraient donné suite aux faits signalés le 21 septembre 2018, sans justifier pour autant des réponses des autorités, ni s’expliquer sur les mesures prises pour protéger la santé physique et mentale du personnel confronté à une charge mentale importante à l’occasion de la prise en charge des besoins spécifiques des résidents, d’autant plus intense qu’elle était conjuguée à un sentiment d’insécurité dans le contexte des violences signalées.
Encore, c’est par un moyen inopérant que l’employeur objecte qu’aucune alerte n’a été émise auprès des représentants du personnel.
Enfin, la Fondation Partage et Vie justifie d’un rapport d’évaluation externe réalisé par un cabinet privé, sur la base d’éléments postérieurs à la rupture du contrat de travail de Mme'[K]'[Y] pour avoir visité l’établissement en septembre et octobre 2020.
Par conséquent, faute de preuve des mesures prises pour prévenir les risques de souffrance morale des professionnels, préserver la santé physique et mentale du personnel, et prévenir les risques psychosociaux, la Fondation Partage et Vie manque de démontrer qu’elle a respecté les obligations de prévention et de sécurité mises à sa charge.
Par ailleurs, il est établi que Mme [K] [Y] a été placée en arrêt de travail pour maladie du’22 octobre 2018 au’4’novembre 2018, puis du 28 novembre 2018 au 9 janvier 2020 jusqu’à la déclaration d’inaptitude par le médecin du travail, le 10 janvier 2020, portant dispense de l’obligation de reclassement au motif que l’état de santé de la salariée «’fait obstacle à tout reclassement dans un emploi’».
La salariée justifie d’un premier certificat médical établi par le docteur [L] [B], psychiatre psychothérapeute, en date du 27 novembre 2019, qui indique avoir constaté, à la consultation du’17 janvier 2019, qu’elle «’était atteinte par un syndrome anxieux dépressif en relation à un épuisement professionnel (burnout) » et qui précise que son état a «’nécessité une longue période de travail psychologique pour arriver à admettre cet état dépressif’».
Aux termes d’un second certificat médical établi le 9 janvier 2020, le docteur [L] [B] ajoute «’je considère que son état de santé ne pourra pas s’améliorer au point de reprendre une activité professionnelle sur le même poste et dans le même établissement’».
Aussi, il ressort du courrier du docteur [W] [H], médecin en santé au travail, en date du’4’juillet 2019 que celle-ci avait constaté, lors des entretiens des 6 novembre 2018 et’11’décembre 2018, que la salariée présentait «’un état d’anxiété, émotionnel important’» ainsi qu’une «’forme d’épuisement et de dépression sévère’» et que son état n’était pas consolidé le’2’juillet 2019.
Ces constatations médicales, qui ne reposent pas exclusivement sur les seules déclarations de la salariée, attestent d’une dégradation de l’état de santé de la salariée.
Nonobstant l’absence de demande en reconnaissance du caractère professionnel des arrêts de travail, il ressort de ces derniers éléments que la salariée a présenté un état de souffrance en lien, au moins partiellement, non pas avec le seul fait d’être confrontée à des personnes atteintes de déficiences importantes mais avec les manquements de l’employeur à ses obligations de prévention et de sécurité précédemment constatés.
En conséquence, il y a lieu de condamner la Fondation Partage et Vie à réparer le préjudice moral subi par Mme [K] [Y] du fait de ces manquements.
Infirmant le jugement dont appel, la cour évalue que ce préjudice moral sera intégralement réparé par l’octroi d’une somme de 6 000 euros nets à titre de dommages et intérêts, la salariée étant déboutée du surplus de sa demande.
Il s’évince de ce qui précède que Mme [K] [Y] démontre que les manquements de l’employeur à ses obligations de sécurité et de prévention présentent une gravité ayant rendu impossible le maintien de la relation contractuelle au regard des risques et des conséquences sur l’état de santé de la salariée.
La salariée est ainsi bien-fondée à obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur, à la date du 18 février 2020, date à laquelle son licenciement pour inaptitude lui a été notifié. La décision déférée est donc confirmée de ce chef.
En conséquence de cette résiliation judiciaire, qui s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, il y a lieu de condamner la Fondation Partage et Vie à payer à Mme [K] [Y], qui avait plus de deux années d’ancienneté à la date de la rupture, une indemnité compensatrice de préavis égale à deux mois de salaire sur le fondement des articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail, soit la somme de 5 460 euros, outre la somme de 546 euros au titre des congés payés afférents.
Le jugement entrepris est donc confirmé de ces chefs, sauf à préciser qu’il s’agit de montants en bruts, lesdites sommes produisant intérêts de droit à la date du 26 juin 2019.
Par ailleurs, l’article L.1235-3 du code du travail dispose que si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ; et, si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux que cet article prévoit.
Mme [K] [Y] disposait d’une ancienneté, au service du même employeur, de neuf années entières et peut donc prétendre, par application des dispositions précitées, à une indemnisation du préjudice né de la perte injustifiée de son emploi comprise entre trois et neuf mois de salaire, le calcul de l’ancienneté ne faisant l’objet d’aucune critique utile par l’employeur.
Elle réclame l’équivalent de douze mois et demi de salaire au motif que le plafond instauré par l’article L. 1235-3 du code du travail est contraire à l’article 10 de la convention OIT n°158 et n’est pas de nature à indemniser le préjudice qu’elle a subi à raison de la perte injustifiée de son emploi.
Âgée de 59 ans à la date de la rupture, elle justifie d’une rémunération mensuelle brute moyenne de 2’730 euros correspondant au tiers de trois derniers mois travaillés.
Elle produit un bulletin de paiement d’une pension de retraite en date de mai 2019 correspondant à la date de suspension du versement des indemnités journalières dont elle a fait l’objet du 30 mai 2019 au 9 janvier 2020, avant d’obtenir la régularisation du paiement des indemnités journalières sur cette période. Elle produit également son avis d’imposition sur les revenus de 2019 attestant d’une baisse significative de ses ressources mensuelles avant même la notification de son licenciement.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, procédant à une appréciation souveraine des éléments de fait soumis au titre du préjudice subi, le moyen tiré de l’inconventionnalité des barèmes se révèle inopérant dès lors qu’une réparation adéquate n’excède pas la limite maximale fixée par la loi.
Infirmant le jugement déféré quant au quantum, il convient de condamner la Fondation Partage et Vie à verser à Mme [K] [Y] la somme de 24’500,00 euros bruts à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, la salariée étant déboutée du surplus de sa demande.
3 ‘ Sur les demandes de rappel de salaire au titre des indemnités complémentaires de maladie
Les dispositions de la convention collective nationale’des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951’prévoient le bénéficie d’indemnités complémentaires de maladie dans les conditions suivantes’:
«’Article 13.01.2.1 – Principe
En cas d’arrêt de travail dû à la maladie reconnue comme telle par la sécurité sociale ou à une affection de longue durée, c’est-à-dire à une des affections énumérées dans le’code de la sécurité sociale, les salariés comptant au moins 12 mois de travail effectif continu ou non dans l’établissement reçoivent des indemnités complémentaires.
Celles-ci, dont le montant est déterminé à l’article 13.01.2.4 ci-dessous, leur sont versées dans les conditions précisées aux articles 13.01.2.2 et 13.01.2.3 ci-après.
Article 13.01.2.2 – Arrêt de travail dû à la maladie
a) Cas général
Les indemnités complémentaires ne sont servies que lorsque l’arrêt de travail ouvre droit, pour le salarié en cause, aux indemnités journalières prévues à l’article’L. 323-1 (2°)’du code de la sécurité sociale mais, en cas d’hospitalisation (intervenue en début ou en cours d’arrêt de travail), elles sont versées dès le premier jour qui suit le point de départ de l’incapacité de travail. Cette condition de perception des indemnités journalières est supprimée pour le salarié, invalide de 1re catégorie ayant repris une activité à temps partiel dans l’établissement, lorsque le bénéfice des indemnités journalières lui est refusé au motif que son état est stabilisé ; à cet effet, le salarié fournira à l’employeur ou à son représentant un certificat notifiant la décision de l’organisme d’assurance maladie.
Elles cessent d’être servies :
– soit lorsque le salarié en cause a épuisé ses droits aux indemnités journalières prévues à l’article L. 323-1 (2°) du code de la sécurité sociale ;
– soit lorsque le salarié non cadre a été absent pour maladie plus de 180 jours pendant une période quelconque de 12 mois consécutifs ;
– soit lorsque le salarié cadre a été absent pour maladie pendant plus de 12 mois.
Quand les indemnités complémentaires cessent d’être servies pour ces raisons, le salarié en cause recouvre ses droits lorsque, à partir de la reprise du travail suivant la déchéance de ceux-ci, il a accompli au moins 6 mois de services effectifs continus ou non dans l’établissement et à condition qu’il ait droit alors aux indemnités journalières prévues à l’article L. 323-1 (2°) du code de la sécurité sociale.
La durée de reprise de travail rouvrant droit à indemnisation complémentaire est fixée à 12 mois pour les cadres.
b) Cas particulier de la femme enceinte
Les indemnités complémentaires ne sont servies que lorsque l’arrêt de travail ouvre droit, pour la salariée en cause, aux indemnités journalières prévues à l’article L. 323-1 (2°) du code de la sécurité sociale mais, en cas d’hospitalisation, elles sont versées dès le premier jour qui suit le point de départ de l’incapacité de travail.
Par ailleurs, le bénéfice des dispositions ci-dessus ne peut avoir pour effet de retarder le départ en congé de maternité de la salariée en cause et donc de faire jouer les dispositions de l’article 12.01.1.1 de la convention.
Article 13.01.2.3 – Arrêt de travail dû une affection de longue durée
Les indemnités complémentaires ne sont servies que lorsque l’arrêt de travail ouvre droit, pour le salarié en cause, aux indemnités journalières prévues à l’article’L. 323-1 (1°)’du code de la sécurité sociale mais elles sont servies, pour chaque arrêt de travail, dès le premier jour qui suit le point de départ de l’incapacité de travail.
Elles cessent d’être servies lorsque le salarié en cause a épuisé ses droits aux indemnités journalières que lui verse la caisse d’assurance maladie dont il dépend.’».
Il ressort de ces dernières dispositions que des indemnités complémentaires sont servies lorsque l’arrêt de travail ouvre droit, pour le salarié en cause, aux indemnités journalières prévues à l’article’L. 323-1’du code de la sécurité sociale qui dispose’:
« L’indemnité journalière prévue à l’article L. 321-1 est accordée à l’expiration d’un délai déterminé suivant le point de départ de l’incapacité de travail et est due pour chaque jour ouvrable ou non. Elle peut être servie pendant une période d’une durée maximale, et calculée dans les conditions ci-après :
1°) pour les affections donnant lieu à l’application de la procédure prévue à l’article L. 324-1, la période pendant laquelle l’indemnité journalière peut être servie est calculée de date à date pour chaque affection. Dans le cas d’interruption suivie de reprise de travail, le délai ci-dessus court à nouveau dès l’instant où la reprise du travail a été au moins d’une durée minimale;
2°) pour les affections non mentionnées à l’article L. 324-1, l’assuré ne peut recevoir, au titre d’une ou plusieurs maladies, pour une période quelconque d’une durée fixée comme il a été dit ci-dessus, un nombre d’indemnités journalières supérieur à un chiffre déterminé.’».
Et il résulte des dispositions de l’article L. 324-1 du code de la sécurité sociale que l’assuré atteint d’une affection de longue durée doit répondre à certaines’conditions’pour bénéficier d’un statut spécifique dont le fait d’avoir fait l’objet d’une interruption de travail ou de soins continus pendant une durée fixée réglementairement à plus de six mois.
Mme [K] [Y] se fonde sur ces dernières dispositions pour revendiquer le bénéfice du maintien de son salaire en faisant valoir que son arrêt de travail s’est étendu en continu pendant plus de six mois pour une même affection.
Cependant, même si elle a fait l’objet d’un arrêt de travail de plus de six mois, Mme'[K]'[Y], qui ne présentait pas une affection de longue durée, ne relevait pas de la procédure de l’article L. 324-1 expressément réservé aux assurés atteints d’une telle affection, les conditions définies étant cumulatives.
Par ailleurs, elle a fait l’objet d’un arrêt de travail continu pendant plus de 180 jours de sorte que l’employeur a régulièrement cessé le versement des indemnités complémentaires réglementaires par application de l’article 13.01.2.2 de la convention collective précité.
Par infirmation de la décision entreprise dont le dispositif omet de statuer sur cette demande, Mme [K] [Y] doit être déboutée de ce chef.
4 ‘ Sur les demandes accessoires
Au visa de l’article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, il convient de dire que la Fondation Partage et Vie est tenue des dépens de première instance et d’appel.
Il serait par ailleurs inéquitable, au regard des circonstances de l’espèce comme des situations économiques des parties, de laisser à la charge de Mme [K] [Y] l’intégralité des sommes qu’elle a été contrainte d’exposer en justice pour la défense de ses intérêts, de sorte qu’il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné la Fondation Partage et Vie à lui payer la somme de 1’200’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et, y ajoutant, de la condamner à lui verser une indemnité complémentaire de 1 600’euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.
En conséquence, la demande indemnitaire de la société au titre des frais irrépétibles qu’elle a engagés est rejetée.