Harcèlement moral au Travail : 21 février 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 20/00562

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Harcèlement moral au Travail : 21 février 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 20/00562
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ARRÊT N°

N° RG 20/00562 – N° Portalis DBVH-V-B7E-HUWF

CRL/DO

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE D’AVIGNON

15 janvier 2020

RG :18/00164

[T]

C/

S.A.R.L. MELINE

Grosse délivrée le 21 février 2023 à :

– Me MOURET

– Me ALLIAUME

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 21 FEVRIER 2023

APPELANTE :

Madame [C] [T]

née le 05 Janvier 1980 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Philippe MOURET, avocat au barreau D’AVIGNON

INTIMÉE :

S.A.R.L. MELINE

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Denis ALLIAUME de la SCP BAGLIO-ROIG-ALLIAUME-BLANCO, avocat au barreau D’AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 15 Novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier lors du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l’audience publique du 29 Novembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 07 Février 2023, puis prorogée au 21 février 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Février 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Mme [C] [T] a été engagée par la S.A.R.L. Meline pour la période du 23 mars 2015 au 26 septembre 2015, suivant contrat à durée déterminée, à temps partiel à raison de 24 heures hebdomadaires, pour accroissement d’activité, en qualité de réceptionniste niveau 1 échelon 1, de la convention collective Hôtels, cafés restaurants, lequel s’est poursuivi à compter du 26 septembre 2015, par un contrat à durée indéterminée à temps partiel de 104 heures mensuelles.

Par avenant en date du 24 octobre 2016, le planning de Mme [C] [T] était fixé à compter du 1er novembre 2016 aux ‘mercredis, jeudis et vendredis de 6h à 14h, pause de 20 minutes rémunérée comprise’.

Le 8 juin 2017, Mme [C] [T] a été victime d’un accident, malaise sur le lieu de travail, pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels et déclaré guéri au 7 juillet 2017.

Le 4 juillet 2017, lors de la visite de pré-reprise, puis le 10 juillet 2017, le médecin de travail déclarait Mme [C] [T] inapte en une seule visite ‘ après contact avec l’employeur en date du 06/07/17, étude du poste et des conditions de travail en date du 06/07/17, actualisation de la fiche entreprise en date du 15/02/16, notification d’inaptitude en un seul temps ce jour. Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ( art. R 4624-42 du décret n°2016-1908)’.

Mme [C] [T] a été convoquée à un entretien préalable, fixé au 24 juillet 2017, auquel elle ne se présentait pas.

Par courrier du 27 juillet 2017, Mme [C] [T] a été licenciée pour inaptitude par la S.A.R.L. Meline.

Par requête en date du 9 avril 2018, Mme [C] [T] a saisi le conseil de prud’hommes d’Avignon aux fins de voir dire et juger que son licenciement est abusif, de voir requalifier son contrat à durée indéterminée en contrat à durée déterminée, et de temps partiel en temps plein ainsi qu’à la condamnation de la S.A.R.L. Meline au paiement de diverses sommes indemnitaires.

Par jugement en date du 15 janvier 2020, le conseil de prud’hommes d’Avignon a :

– dit que le licenciement de Mme [C] [T] en date du 27 juillet 2017 est intervenu pour une cause réelle et sérieuse constitutive d’une inaptitude médicale,

En conséquence,

– débouté Mme [C] [T] de l’ensemble de ses demandes,

– mis les dépens de l’instance ainsi que les éventuels frais d’exécution à la charge de Mme [C] [T] ,

– débouté la S.A.R.L. Meline de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 13 février 2020, Mme [C] [T] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 29 août 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 15 novembre 2022 à 16 heures et fixé l’examen de l’affaire à l’audience du 29 novembre 2022 à 14 heures.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 2 mai 2022, Mme [C] [T] demande à la cour de :

– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Avignon en date du 15 janvier 2020,

Statuant à nouveau,

– requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein entre le 23 mars 2015 et le 1er novembre 2016,

– condamner la S.A.R.L. Meline prise en la personne de son représentant légal en exercice, d’avoir à lui payer à titre de :

– rappel de salaires, brut : 8.737, 00 euros,

– congés payés afférents, bruts : 873, 00 euros,

– annuler l’avertissement notifié le 29 mars 2017,

Sur la rupture du contrat de travail :

A titre principal,

– dire que l’inaptitude prononcée pour danger immédiat du maintien de la salariée dans l’entreprise résulte du harcèlement moral souffert par elle consécutif au comportement fautif de l’employeur (article L 1152-1 et L1154-1 du code du travail),

– condamner la S.A.R.L. Meline prise en la personne de son représentant légal en exercice, d’avoir à lui payer au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul : 35.564, 00 euros,

A titre subsidiaire,

– dire que l’employeur n’a pas satisfait à son obligation de reclassement de la salariée,

– dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause,

– condamner la S.A.R.L. Meline prise en la personne de son représentant légal en exercice d’avoir à lui payer à titre de :

– indemnité compensatrice de préavis : 2.963, 64 euros,

– congés payés sur préavis : 296, 36 euros,

– indemnité spéciale de licenciement : 856, 76 euros,

– dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 30. 000,00 euros,

– condamner la S.A.R.L. Meline prise en la personne de son représentant légal en exercice, d’avoir à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour frais irrépétibles en cause d’appel,

– condamner la S.A.R.L. Meline à tous les dépens.

Mme [C] [T] soutient que :

– ni le contrat de travail à durée déterminée, ni le contrat de travail à durée indéterminée ne mentionnent ses horaires de travail, seul l’avenant du 1er novembre 2016 les mentionnera,

– les fiches de pointage pour la période du 23 mars 2015 au 31 décembre 2016 qu’elle verse aux débats démontrent que la durée de travail prévue au contrat a été régulièrement dépassée,

– l’inspecteur du travail a clairement rappelé les manquements de l’employeur au titre de la durée du temps de travail,

– en plus de la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein, elle est fondée à demander la somme de 1.481,82 euros au titre des heures complémentaires, outre le paiement du rappel de salaire à temps plein sur la période de mars 2015 à octobre 2016,

– l’avertissement dont elle a fait l’objet le 29 mars 2017 est totalement injustifié, et repose sur un motif fallacieux qui avait pour but de la déstabiliser,

– le retard dans la transmission des documents relatifs à l’indemnisation de son accident du travail avait également pour but de lui porter préjudice, lequel doit être indemnisé par un mois de salaire,

– son inaptitude est due au comportement fautif de son employeur qui lui a fait subir un harcèlement et des pressions en ne respectant pas la réglementation,

– son employeur n’a pas exécuté loyalement le contrat de travail en ne respectant pas la réglementation sur le temps de travail, en ayant recours à un contrat de travail à durée déterminée pour remplacer le départ d’une salariée,

– le comportement de son employeur a changé lorsqu’elle a pris l’initiative de venir remplacer une collègue enceinte,

– la compagne du gérant, salariée au même titre qu’elle, s’est imposée comme sa supérieure hiérarchique,

– le gérant lui a demandé de présenter sa démission, ce qu’elle a refusé, et la pression ainsi exercée lui a provoqué une crise de tétanie, sans que le gérant ne lui porte secours,

– des responsabilités lui ont été retirées, des congés refusés après avoir été accordés, un comportement délétère s’est installé pour la pousser à partir, comportement constaté et dénoncé par certains des ses collègues à l’inspection du travail,

– elle a été arrêtée à plusieurs reprises en raison des pressions subies à son travail avant le dernier fait ayant été qualifié d’accident du travail, qui donnera lieu ensuite à la déclaration d’inaptitude,

– la société ne justifie pas de ses recherches de reclassement, notamment au sein du groupe Inter Hôtel auquel elle appartient.

En l’état de ses dernières écritures en date du 8 novembre 2022, la S.A.R.L. Meline a demandé de :

– confirmer en tous points le jugement du conseil de prud’hommes d’Avignon du 15 janvier 2020,

– dire que les relations s’inscrivent bien dans le cadre d’un contrat à temps partiel à hauteur de 104 heures par mois,

– constater la validité de l’avertissement du 29 mars 2017,

– relever l’absence d’un quelconque harcèlement moral,

– dire que le licenciement pour inaptitude est conforme aux dispositions légales et légitimes,

– dire la demande nouvelle d’indemnité spéciale de licenciement irrecevable,

En conséquence,

– débouter Mme [C] [T] de l’ensemble de ses demandes,

– condamner Mme [C] [T] à la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile.

La S.A.R.L. Meline fait valoir que :

– le décompte du temps de travail doit se faire au mois et non à la semaine, et le raisonnement de Mme [C] [T] se fait non sur l’ensemble de la période mais sur une semaine prise isolément,

– elle a toujours communiqué les plannings hebdomadaires qui respectaient le temps prévu au contrat,

– Mme [C] [T] a délibérément décidé de ne pas respecter les consignes relatives au petit-déjeuner, rappelées par une note de service du 22 mars 2017, ce comportement étant à l’origine de l’avertissement qui lui a été notifié le 29 mars 2017,

– contrairement à ce que soutient Mme [C] [T], les documents nécessaires à la prise en charge de l’accident du travail dont elle a été victime ont été transmis dans les temps par son expert comptable,

– les éléments produits par Mme [C] [T] ne permettent pas de caractériser un harcèlement moral, la plainte pénale pour ces faits a été classée sans suite car insuffisamment caractérisée,

– l’inaptitude dans les termes posés par le médecin du travail la dispensait de toute recherche de reclassement,

– subsidiairement, contrairement à ce que soutient Mme [C] [T], elle ne compte que moins de 11 salariés et ne fait partie d’aucun groupe, l’enseigne Inter-Hôtel est une centrale de réservation et de collaboration commerciale, qui ne permet aucune permutation de personnel,

– la demande présentée au titre de l’indemnité spéciale de licenciement présentée pour la première fois à hauteur d’appel doit être déclarée irrecevable.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l’audience.

MOTIFS

Demandes relatives à l’exécution du contrat de travail

– requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein pour la période du 23 mars 2015 au 1er novembre 2016,

* en raison d’un contrat de travail non conforme :

Selon l’article L3123-14 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date de signature du contrat, devenu L 3123-6 à compter de la loi 2006-1088 du 8 août 2016, le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne :

1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et (…) la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;

2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;

3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d’aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;

4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.

L’avenant au contrat de travail prévu à l’article L. 3123-25 mentionne les modalités selon lesquelles des compléments d’heures peuvent être accomplis au-delà de la durée fixée par le contrat.

En présence d’un contrat de travail écrit, conforme aux dispositions de l’article L 3123-14 du code du travail, il appartient au salarié qui soutient que le contrat de travail est à temps complet de démontrer qu’il n’avait pas eu préalablement connaissance de ses horaires de travail et qu’il devait ainsi se tenir en permanence à la disposition de l’employeur. A défaut, le contrat de travail n’est pas automatiquement requalifié mais est simplement présumé être à temps plein.

Ainsi, en cas d’insuffisance des mentions figurant au contrat, au regard des exigences légales, l’employeur peut renverser cette présomption simple de l’existence d’un contrat de travail à temps plein s’il établit que le salarié travaille effectivement à temps partiel et qu’il peut connaître ses rythmes de travail et n’est pas tenu d’être en permanence à la disposition de l’employeur.

La charge de la preuve qui incombe à l’employeur porte sur deux points distincts cumulatifs, à savoir, d’une part, la durée exacte, hebdomadaire ou mensuelle, de travail convenue, d’autre part, le fait que le salarié n’était pas dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il ne devait pas se tenir constamment à la disposition de l’employeur. La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine civile.

En l’espèce, la lecture du contrat de travail initial et de l’avenant en date du 26 septembre 2015 conclus entre Mme [C] [T] et la S.A.R.L. Meline fait apparaître que :

– la durée hebdomadaire du travail est fixée à 24 heures par semaine dans le cadre du contrat initial, ‘ effectuées selon l’horaire et en vigueur dans l’entreprise et suivant le planning hebdomadaire’,

– l’avenant du 26 septembre 2015 mentionne ‘ la durée mensuelle du travail de Mme [C] [T] sera de 104 heures effectuées selon l’horaire en vigueur dans l’entreprise et suivant le planning hebdomadaire’

– ‘toute modification apportée à la répartition du temps de travail de Mme [C] [T] lui sera notifiée au moins 7 jours avant son entrée en vigueur’.

De fait, aucune indication de la répartition du temps de travail n’est mentionnée et durant le contrat de travail à durée déterminée Mme [C] [T] n’était pas en capacité de connaître les jours de la semaine où elle devait travailler pour effectuer ses 24 heures hebdomadaires, et à compter du passage en contrat de travail à durée indéterminée, elle ne connaissait pas la répartition des 104 heures mensuelles sur le mois correspondant.

L’avenant au contrat de travail en date du 24 octobre 2016 mentionne qu’à compter du 1er novembre 2016 le planning de Mme [C] [T] est fixé aux ‘mercredis, jeudis et vendredis de 6h à 14h, pause de 20 minutes rémunérée comprise’

Il en résulte qu’il existe une présomption de contrat de travail à temps plein pour la période antérieure au 1er novembre 2016.

Pour combattre cette présomption, la S.A.R.L. Meline renvoie sans être utilement contredite par Mme [C] [T] aux plannings joints à chaque fiche de salaire, qui établissent que Mme [C] [T] était informée de ses horaires de travail selon un planning mensuel.

Ainsi, Mme [C] [T] était informée mensuellement de ses horaires de travail et ne se tenait pas en permanence à la disposition de son employeur.

Par suite c’est à juste titre que les premiers juges ont débouté Mme [C] [T] de sa demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en temps plein pour ce motif et leur décision sera confirmée.

– en raison de l’exécution d’un grand nombre d’heures complémentaires

L’article L 3123-17 dans sa rédaction applicable issue de la loi n°2013-504 du14 juin 2013, prévoit que le nombre d’heures complémentaires accomplies par un salarié à temps partiel au cours d’une même semaine ou d’un même mois ou sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l’article L. 3122-2 ne peut être supérieur au dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue dans son contrat calculée, le cas échéant, sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l’article L. 3122-2. Les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail accomplie par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement. Chacune des heures complémentaires accomplies dans la limite fixée au premier alinéa du présent article donne lieu à une majoration de 10%.

En conséquence de ces dispositions, la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est encourue, dès lors que les heures complémentaires ont pour effet de porter la durée du travail accomplie par un salarié au niveau de la durée légale ou conventionnelle du travail, et ce à compter de la première irrégularité, même sur une période limitée.

Par application des dispositions de l’article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

En l’espèce, Mme [C] [T] expose qu’elle a été amenée à accomplir 44,45heures de travail la semaine du 30 mars au 5 avril alors qu’elle était embauchée pour en accomplir 24 heures, et que son temps de travail a dépassé la durée légale du temps de travail à temps complet notamment en juillet et août 2015, allant jusqu’à 55 heures par semaine. .

Au soutien de ses demandes, elle produit ses bulletins de salaire, plannings et fiches de pointage des mois correspondant et sollicite la somme de 8.737 euros à titre de rappel de salaire, sur la base d’un taux horaire brut de 9,63 euros, outre les congés payés y afférents.

Pour contester cette demande, la S.A.R.L. Meline observe que le décompte des heures de travail tel que prévu au contrat est mensuel, et non hebdomadaire et que par suite son décompte est erroné. Elle soutient par ailleurs qu’avait été convenu de bonne foi entre les parties de privilégier la récupération des heures complémentaires plutôt que leur paiement.

Pour la période du 23 mars 2015 au 26 septembre 2015, le contrat de travail prévoit un emploi à temps partiel à raison de 24 heures hebdomadaires, et non pas comme le soutient la S.A.R.L. Meline un décompte mensuel, lequel ne sera introduit qu’à compter de la signature du contrat de travail à durée indéterminée qui mentionne un temps de travail mensuel de 104 heures applicable à compter du 27 septembre 2015

La convention collective des hôtels, cafés et restaurants fixe en son article 21 la durée légale du travail à 43 heures hebdomadaires.

L’examen des fiches horaires non contestées par la S.A.R.L. Meline qui les a jointes aux bulletins de salaire de l’année 2015 fait apparaître :

– du lundi 23 mars au dimanche 29 mars : 28 heures

– du lundi 30 mars au dimanche 5 avril : 44 heures 45

-du lundi 6 avril au dimanche 12 avril : 28 heures

– du lundi 13 avril au dimanche 19 avril : 18 heures

– du lundi 20 avril au dimanche 26 avril : 15 heures

– du lundi 27 avril au dimanche 3 mai : 33 heures

– du lundi 4 mai au dimanche 10 mai : 27 heures

– du lundi 11 mai au dimanche 17 mai : 28 heures

– du lundi 18 mai au dimanche 24 mai : 14 heures

– du lundi 25 mai au dimanche 31 mai : 23 heures

– du lundi 1er juin au dimanche 7 juin : 21 heures

– du lundi 8 juin au dimanche 14 juin : 30 heures

– du lundi 15 juin au dimanche 21 juin : 24 heures 30

– du lundi 22 juin au dimanche 28 juin : 39 heures

– du lundi 29 juin au dimanche 5 juillet : 24 heures

– du lundi 6 juillet au dimanche 12 juillet : 28 heures

– du lundi 13 juillet au dimanche 19 juillet : 18 heures 30

– du lundi 20 juillet au dimanche 26 juillet : 46 heures

– du lundi 27 juillet au dimanche 2 août : 29 heures

– du lundi 3 août au dimanche 9 août : 35 heures

– du lundi 10 août au dimanche 16 août : 24 heures

– du lundi 17 août au dimanche 23 août : 32 heures

– du lundi 24 août au dimanche 30 août : 22 heures

– du lundi 31 août au dimanche 6 septembre : 24 heures

– du lundi 7 septembre au dimanche 13 septembre: 11 heures

– du lundi 14 septembre au dimanche 20 septembre: 24 heures

– du lundi 21 septembre au dimanche 27 septembre: 17 heures

– octobre 2015 : 102 heures

– pas de fiche horaire pour novembre 2015

– décembre 2015 : 77 heures

– janvier 2016 : 94 heures 30

– février 2016 : arrêt de travail du 8 au 20 février

– mars 2016 : 83 heures

– avril 2016 : arrêt de travail à compter du 4 avril

– arrêt maladie du 1er mai au 31 août 2016

– septembre 2016 : 112 heures + congés payés

– octobre 2016 : 80 heures + congés payés

– novembre 2016 : 72 heurs + congés payés

Ainsi, à deux reprises, Mme [C] [T] a travaillé au-delà des 24 heures prévues au contrat et au-delà des 43 heures hebdomadaires prévues par la convention collective, soit du lundi 30 mars au dimanche 5 avril :44 heures 45 et du lundi 20 juillet au dimanche 26 juillet :46 heures, ce qui a eu pour effet, de porter la durée du travail accomplie par un salarié au niveau de la durée légale ou conventionnelle du travail.

Par suite de ces deux irrégularités, le contrat de travail à durée déterminée à temps partiel doit être requalifié en contrat de travail à durée déterminée à temps plein. En revanche, aucun dépassement n’est établi à compter de la signature du contrat de travail à durée indéterminée, et Mme [C] [T] sera déboutée de sa demande pour la période postérieure au 26 septembre 2015.

Ensuite de cette requalification, il convient d’allouer à Mme [C] [T] à titre de rappel de salaire :

[151, 57 heures ( temps plein ) – 104 heures ( temps partiel rémunéré ) ] = 37,57 heures non réunérées pour les mois de avril à août 2015,

soit un total de 187,85 heures au taux horaire de 8,63 euros,

soit la somme de 1.621,14 euros bruts outre 162,11 euros de congés payés y afférents.

La décision déférée sera infirmée en ce sens.

– harcèlement moral

Aux termes de l’article L. 1152-1 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. En vertu de l’article L. 1154-1 du Code du travail, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du Code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d’exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et si l’employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

Au soutien de sa demande, Mme [C] [T] invoque des pressions, une exécution déloyale du contrat de travail, le non respect de la promesse d’embauche initiale, le défaut de transmission de l’attestation de salaire pendant son arrêt de travail.

Elle verse aux débats les éléments suivants :

– le courrier adressé à la S.A.R.L. Meline daté du 6 février 2016 dans lequel elle indique vouloir informer son employeur de son ‘ très grand mécontentement de la façon dont Melle [F] salariée dans l’entreprise en qualité de femme de chambre m’a humilié,insuté et menacé de licenciement lors de la réunion demandée par moi-même ce jour le 06/02/16 à 13h en votre présence (…) J’ai demandé dans l’urgence cette réunion car je ne pouvait plus supporter les harcèlements,les critiques, les injures, les ordres e contre ordres abusifs que Melle [F] en tant que subordonnée me fait subir régulièrement et souhaitait tout simplement vous demander qui est mon supérieur hiérarchique – M. [N] ou Melle [F] qui se fait appeler ‘Mme [B]’ dont la fonction dans l’entreprise est ‘femme de chambre’. En votre présence et celle de mon responsable, M. [N], Melle [F] m’a humilié et dégradé moralement, elle m’a insulté et m’a demandé de démissionner car elle ne pouvait pas me ‘blairer’ et qu’elle avait tous les pouvoirs et les moyens de le faire du fait que c’était elle la gérante. (…) Vous n’êtes pas intervenu avec votre autorité pour la faire cesser, vous m’avez simplement informé que du fait que Melle [F] est votre compagne vous ne pouvez malheureusement pas la contredire (…)’,

– ses échanges avec l’inspection du travail dans lesquels elle dénonce la menace de licenciement dont elle fait l’objet et le rapport de l’inspecteur du travail en date du 6 février 2017 qui conclut: – à la nécessité d’appliquer le salaire minimum conventionnel publié au journal officiel du 30 juillet 2016 dès le mois d’août 2016, alors qu’ils ne l’ont perçu qu’à compter de septembre 2016,

– au défaut de mention de la répartition des horaires de travail dans les contrats à temps partiel,

– à la nécessité de procéder au paiement des heures complémentaires mensuellement et non pas en pratiquant le report des heures sur le mois suivant,

– le compte-rendu, établi par M. [N], directeur adjoint, de la réunion visée dans le courrier du 6 février 2017 dans lequel est repris le contexte de la réunion, soit le fait que Mme [C] [T], alors qu’elle était en repos, a remplacé sa collègue enceinte qui est tombée malade à partir de 6h30 mais a signalé à 9h30 qu’elle devait s’absenter pour motif personnel, Madame [F] considérant que Melle [T] lui avait parlé de manière ‘irrévérencieuse et blessante’ pour l’en informer et exigeant une ‘réparation tant morale que verbale’, ainsi que les échanges entre les différents protagonistes, notamment ‘ Madame [F] demandé que Mademoiselle [T] quitte sans l’entreprise et n’y remette plus les pieds, arguant en outre que sa tenue autant vestimentaire que corporelle ne correspondait pas à l’éthique de l’entreprise’ ‘ Monsieur [B] ne concevant aucune issue favorable au dit entretien du fait de l’impossibilité flagrante de Madame [F] à observer une certaine sérénité dans les propos échangés avec Mademoiselle [T] a suggéré une séparation à l’amiable en proposant une rupture conventionnelle à Mademoiselle [T]. Mademoiselle [T] a rappelé que employeur ne peut légitimement imposer une rupture conventionnel a son salarié, et que cette procédure reste très encadrée. Madame [F] ayant alors estimé qu’il n’y avait plus d’issue favorable au maintien de Mademoiselle [T] au sein de l’entreprise du fait d’une réelle incompatibilité d’humeur et qu’elle souhaitait son départ a alors demandé à son compagnon de prendre une décision en conséquence, outrepassant selon les termes de Mademoiselle [T] les pouvoirs qui sont les siens’,

– le courrier adressé à M. [B] le 9 février 2016, dénonçant le fait que la veille, 8 février 2016, qu’il lui a demandé la veille de signer sa démission, insistant pour qu’elle la signe avant l’arrivée de son responsable, M. [N], ‘ je vous ai demandé à plusieurs reprises de cesser les pressions car je me sentais affaiblie et commençais à paniquer mais vous avez insisté et quand mon état était le plus bas vous êtes parti sans vous soucier. Ensuite, la gouvernante [A] [G] est descendue, m’a réconforté, rassuré et protégé’,

– les arrêts de travail, bulletins de situation, certificat médical initial visant une ‘agression verbale’ et prescriptions médicales correspondant à son arrêt de travail à compter du 8 février 2016,

– son procès-verbal d’audition par les services de gendarmerie le 12 juin 2017, dans le cadre de son dépôt de plainte pour harcèlement,

– le courrier d’alerte au titre des risques psycho-sociaux du médecin du travail en date du 9 février 2016 adressé à la S.A.R.L. Meline lui rappelant son obligation d’assurer la sécurité mentale et physique de ses salariés et le risque en cas de manquement de faute inexcusable,

– son courrier du 4 mars 2016 constatant l’omission de lui compter 4,5 heures de travail en février 2016,

– les échanges de courriels et courriers concernant des reports de congés acceptés et la régularisation du complément employeur pendant son arrêt de travail,

– la contestation du refus de l’employeur de lui accorder un temps plein en date du 31 octobre 2016, alors que sur la même période il a transformé le contrat de travail à durée déterminée à temps partiel de son neveu arrivé à échéance en contrat de travail à durée indéterminée,

– les arrêts de travail et prescriptions médicales suite à son arrêt de travail au titre de l’assurance maladie à compter du 4 avril 2016 et l’avis d’aptitude en date 1er septembre 2016,

– le certificat médical établi le 23 septembre 2016 par le médecin généraliste pour lui permettre d’obtenir un tabouret pendant ses 8 heures de travail,

– le retrait de la fonction de responsable mariage,

– la proposition de 15.000 euros de son employeur en échange de son départ sans préavis et sans transaction officielle,

– son courriel en date du 2 juin 2017 où elle dénonce un manque d’hygiène général,

– des courriers manuscrits attribués à des clients de l’hôtel, accompagnés de pièces d’identité qui déplorent des tensions entre certains salariés et la direction, ‘ petit à petit j’ai pu constater un mal être de [C] et des autres employés’, ou d’insultes envers la réceptionniste de la part de Mme [F] en date du 5 avril 2017, et d’autres relatifs à des plaintes de clients en raison de l’état de leur appartement préalablement occupé par le neveu du gérant,

– une attestation écrite de Mme [Z] [W] qui indique avoir travaillé à compter de fin mai 2017 pour la S.A.R.L. Meline et avoir été contrainte d’écrire sous la dictée de M. Et Mme [B] ‘sur un papier contre [C] [T], ils m’ont dit que c’était obligé pour tous les employés (…) Je n’est jamais autorisé qu’ils se serve de mes papiers d’identité que j’avais donner pour mon contrat d’embauche; Elle m’avait interdit de parler au employé surtout avec [C]’,

– les éléments médicaux et des éléments du dossier de la Caisse Primaire d’assurance maladie relatif à la déclaration d’accident du travail du 8 juin 2017, dans lequel elle explique qu’elle a été prise de panique en découvrant à sa prise de poste à 5h45 que la porte de la réception était ouverte, et qu’elle a demandé l’intervention du gérant pour vérifier qu’il n’y avait pas de danger mais qu’il n’a pas réagi, et que prise d’angoisse elle a fini par faire un malaise.

– des documents médicaux relatifs à l’apparition et au développement de pathologie anxiodépressive suite à ces deux accidents du travail.

Ces éléments pris dans leur ensemble établissent une présomption de harcèlement moral.

L’employeur rétorque que :

– les éléments produits par Mme [C] [T] démontrent un désaccord profond entre elle et M. [N] d’une part et les dirigeants de la S.A.R.L. Meline d’autre part, sans que cela soit constitutif de harcèlement moral,

– le retrait du tabouret abîmé dans l’attente de la livraison d’un nouveau n’est pas constitutif de harcèlement,

– la plainte déposée par Mme [C] [T] a été classée sans suite car insuffisamment caractérisée,

– Mme [C] [T] s’est opposée avec agressivité à l’intervention d’un médiateur,

– les photographies produites de l’entrée et de l’accueil révèlent que la prétendue crainte liée au fait qu’une porte intérieure n’était pas fermée à clé ne résiste pas.

En revanche, force est de constater que la S.A.R.L. Meline n’apporte aucune explication sur :

-les problèmes de décompte de temps de travail ou de changements de jours de congés,

– les insultes et propos outranciers mentionnés dans les différents témoignages et l’absence de réaction suite à leur dénonciation,

– l’absence de réaction au courrier d’alerte du médecin du travail,

– la nécessité de recourir à l’attestation du médecin pour que Mme [C] [T] puisse obtenir un tabouret à son poste de travail,

– les différentes pressions pour que la salariée présente sa démission et les menaces de licenciement.

Il en résulte que l’employeur n’établit pas que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un harcèlement moral et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le fait qu’il n’y ait pas eu de poursuites pénales diligentées contre la S.A.R.L. Meline ou des personnes physiques suite à la plainte de Mme [C] [T] n’interdit pas dans le cadre de l’instance prud’homale de retenir que les faits dénoncés sont caractérisés.

En conséquence, la décision déférée sera infirmée en ce sens.

– annulation de l’avertissement du 29 mars 2017

L’article L1333-1 du code du travail, en cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le conseil de prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

En application de l’article L.1333-2 du code du travail, le conseil de prud’hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

Le conseil de prud’hommes, juge du contrat de travail, saisi de la contestation sur le bien-fondé d’une sanction disciplinaire, peut l’annuler si elle apparaît irrégulière dans la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise

En l’espèce, l’avertissement du 29 mars 2017 est ainsi formulé :

‘ Madame,

La gamme de produits proposés pour le petit-déjeuner ayant augmenté, une nouvelle implantation est devenue nécessaire.

A plusieurs reprises, je vous ai demandé de la respecter en vain.

Une note de service a été rédigée le 22 mars en ce sens.

Je vous ai demandé ce jour si vous l’aviez vu, vous m’avez répondu que oui.

Devant ma compagne et moi-même vous avez une nouvelle fois déplacé des produits qui étaient positionnés dans le cadre de cette nouvelle implantation.

Cet acte s’est pleinement soustrait à votre devoir de respecter les directives que je mets en place dans le cadre de mon entreprise, mesures pour lesquelles j’estime qu’elles concourent à la qualité que l’on souhaite pour nos clients.

Je me vois malheureusement dans l’obligation de vous notifier cet avertissement dont nous vous prions de prendre note pour la suite de nos relations contractuelles.

Je ne peux que constater de surcroit la profération de menaces verbales à l’encontre de mon épouse et moi-même.

Enfin, lors de votre fin de service, j’ai observé que vous restez sur votre position en ne respectant pas l’implantation originale.

Je vous serez donc gré par conséquent à l’instar de vos collègues de mettre en oeuvre les directives que nous vous confions, dans le respect le plus strict des dispositions que nous vous imposons.

Nous souhaitons que vous prendrez en considération afin de permettre une poursuite pérenne et sereine de notre collaboration’

Pour démontrer le bien fondé de cet avertissement, la S.A.R.L. Meline soutient que par provocation Mme [C] [T] a décidé de ne pas respecter les consignes qui lui avaient été notifiées le 22 mars 2017.

Mme [C] [T] conteste l’avertissement au motif qu’il a été établi à la demande de Mme [F] dans le but de lui nuire et de dénigrer son travail devant la clientèle.

Ceci étant, Mme [C] [T] ne conteste pas la matérialité du grief formulé dans l’avertissement, soit le non respect d’une consigne de son employeur, ni du comportement déplacé de Mme [F] à cette occasion.

En conséquence, la décision des premiers juges ayant débouté Mme [C] [T] de sa demande d’annulation de l’avertissement du 27 mars 2017 sera confirmée.

– retard dans la transmission de l’attestation de salaire à la Caisse Primaire d’assurance maladie

C’est par des motifs pertinents auxquels il convient de se référer que les premiers juges ont débouté Mme [C] [T] de la demande présentée de ce chef.

Leur décision sera confirmée sur ce point.

Demandes relatives à la rupture du contrat de travail

Mme [C] [T] a été licenciée pour inaptitude par courrier en date du 27/07/2017 rédigé dans les termes suivants:

‘Madame,

Nous faisons suite à l’entretien préalable qui devait se dérouler le 24 juillet 2017 au sein de nos locaux, auquel vous n’avez pas assisté.

Nous vous notifions par la présente votre licenciement pour les motifs qui vous auraient été exposés lors de cet entretien, à savoir :

– votre inaptitude définitive au poste de réceptionniste constatée par le médecin du travail lors de son avis du 10 juillet 2017,

– et de l’impossibilité de reclassement en raison :

* du fait de nos recherches qui n’ont abouties à aucune possibilité, comme nous vous l’indiquions dans notre courrier du 12/07/17

* de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail qui ‘ tout maintient du salarié dans un emploi serait préjudiciable à sa santé’.

Nous vous notifions donc votre licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Votre contrat de travail est rompu à la date d’envoi de la présente.

Vous trouverez ci-joint le document relatif à la portabilité des régimes de prévoyance et de complémentaire santé.

Nous vous adresserons par pli séparé votre certificat de travail, votre solde de tout compte et attestation Pôle emploi.

Dès réception de la présente, nous vous demanderons de bien vouloir nous retourner les clés de l’établissement par tout moyen à votre convenance.

Veuillez agréer, Madame, l’expression de mes plus cordiales salutations.’

– nullité du licenciement pour harcèlement moral

Par application des dispositions de l’article L 1152-3 du code du travail toute rupture du contrat de travail qui résulte d’un harcèlement moral est nulle de plein droit.

En conséquence de la caractérisation de faits de harcèlement moral commis par la S.A.R.L. Meline au préjudice de Mme [C] [T], le licenciement pour inaptitude prononcé à son encontre le 27 juillet 2017 est entaché de nullité.

La décision déférée sera infirmée sur ce point.

– sur les demandes indemnitaires subséquentes

* indemnité pour licenciement nul :

Le salarié dont le licenciement est nul, et qui ne demande pas sa réintégration, a droit, en toute hypothèse, outre les indemnités de rupture, à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaires.

Il ressort des fiches de paie produites par les parties que Mme [C] [T] bénéficiait d’un salaire mensuel brut de 1.016,08 euros pour 104 heures de travail.

Mme [C] [T] sollicite la somme de 35.564 euros de dommages et intérêts pour nullité de son licenciement. Elle fait valoir les éléments de situation personnelle et rappelle qu’elle subit les conséquences d’une dépression profonde.

Elle était âgée de 37 ans à la date de son licenciement et justifie avoir bénéficié d’une indemnité temporaire d’inaptitude avant de retrouver un emploi en contrat de travail à durée déterminée fin 2017, puis dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée en novembre 2019.

Elle sera en conséquence justement indemnisée du préjudice résultant de la nullité de son licenciement par une somme de 15.000 euros.

* indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents

L’article 30.2 de la convention collective prévoit pour les employés présentant plus de deux ans d’ancienneté, en cas de rupture du contrat de travail par licenciement, un préavis de deux mois.

Par suite, Mme [C] [T] peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis de 1.016,08 euros x 2 mois, soit la somme de 2.032,16 euros outre 203,21 euros de congés payés y afférents.

* indemnité de licenciement

La demande présentée par Mme [C] [T] étant en lien avec l’indemnisation de son licenciement elle est recevable.

Le solde de tout compte mentionne une indemnité de licenciement d’un montant de 856,76 euros dont Mme [C] [T] ne justifie pas qu’elle ne lui aurait pas été versée par la S.A.R.L. Meline.

En conséquence, elle sera déboutée de la demande présentée de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement rendu le 15 janvier 2020 par le conseil de prud’hommes d’Avignon sauf en ce qu’il a débouté Mme [C] [T] de sa demande d’annulation de l’avertissement du 27 mars 2017 et de sa demande de dommages et intérêts pour transmission tardive de l’attestation de salaire à la Caisse Primaire d’assurance maladie,

Et statuant à nouveau sur les éléments infirmés,

Requalifie le contrat de travail à durée déterminée à temps partiel du 23 mars 2015 au 26 septembre 2015 en contrat de travail à durée déterminée à temps plein,

Condamne la S.A.R.L. Meline à verser à Mme [C] [T] à titre de rappel de salaire suite à cette requalification la somme de 1.621,14 euros bruts outre 162,11 euros de congés payés y afférents,

Juge que le licenciement prononcé par la S.A.R.L. Meline à l’encontre de Mme [C] [T] est entaché de nullité en raison des faits de harcèlement moral à l’origine de l’inaptitude de la salariée,

Condamne en conséquence la S.A.R.L. Meline à verser à Mme [C] [T] les sommes de :

– 15.000 euros d’indemnité pour licenciement nul,

– 2.032,16 euros d’indemnité compensatrice de préavis, outre 203,21 euros de congés payés y afférents,

Déboute Mme [C] [T] de sa demande d’indemnité de licenciement,

Condamne la S.A.R.L. Meline à verser à Mme [C] [T] la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la S.A.R.L. Meline aux dépens de la procédure d’appel.

Arrêt signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, et par Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 

 


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