Harcèlement moral au Travail : 21 février 2023 Cour d’appel d’Agen RG n° 21/00757

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Harcèlement moral au Travail : 21 février 2023 Cour d’appel d’Agen RG n° 21/00757
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ARRÊT DU

21 FEVRIER 2023

PF/CO*

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N° RG 21/00757 –

N° Portalis DBVO-V-B7F-C5I2

———————–

[C] [Y]

C/

ASSOCIATION LES BIOS DU GERS

[T] [B] Es QUALITÉ DE COMMISSAIRE À L’EXÉCUTION DU PLAN DE L’ASSOCIATION LES BIOS DU GERS

———————–

Grosse délivrée

le :

à

ARRÊT n° 21 /2023

COUR D’APPEL D’AGEN

Chambre Sociale

Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour d’appel d’Agen conformément au second alinéa des articles 450 et 453 du code de procédure civile le vingt et un février deux mille vingt trois par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président de chambre assistée de Chloé ORRIERE, greffier

La COUR d’APPEL D’AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l’affaire

ENTRE :

[C] [Y]

né le 23 décembre 1978 à [Localité 7]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Véronique L’HOTE, avocat inscrit au barreau de TOULOUSE

APPELANT d’un jugement du Conseil de Prud’hommes – formation paritaire d’AUCH en date du 27 mai 2021 dans une affaire enregistrée au rôle sous le n° R.G. F 19/00025

d’une part,

ET :

L’ASSOCIATION LES BIOS DU GERS – GROUPEMENT DES AGRICULTEURS BIOLOGIQUES ET BIODYNAMIQUES DU GERS – prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège :

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Sandrine GERAUD-LINFORT, avocat inscrit au barreau de TOULOUSE

Maître [T] [B] ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de l’association LES BIOS DU GERS ayant son siège :

[Adresse 4]

[Localité 6]

N’ayant pas constitué avocat

INTIMÉS

d’autre part,

L’ASSOCIATION – UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE TOULOUSE prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Hélène GUILHOT, avocat inscrit au barreau d’AGEN

PARTIE INTERVENANTE

A rendu l’arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause a été débattue et plaidée en audience publique le 06 décembre 2022 sans opposition des parties devant Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président de chambre et Pascale FOUQUET, conseiller, assistés de Chrystelle BORIN, greffier. Les magistrats en ont, dans leur délibéré rendu compte à la cour composée, outre eux-mêmes, de Benjamin FAURE, conseiller, en application des dispositions des articles 945-1 et 805 du code de procédure civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l’arrêt serait rendu.

* *

*

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Selon contrat de travail à durée indéterminée du 12 mars 2015 à temps partiel puis à temps complet, M. [C] [Y] a été embauché par l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers (ci-après GABB32), située à [Localité 6] (32) ayant pour objet le développement de l’agriculture biologique et biodynamique sur le territoire, en qualité de coordinateur.’

A compter du 1er septembre 2015, il percevait une rémunération mensuelle de 3 020,90 euros pour un temps complet.

L’association occupe moins de onze salariés.

La convention collective applicable est celle de l’accord de référence des réseaux de la fédération nationale d’agriculture biologique.

M. [C] [Y] a été placé une première fois en arrêt maladie du 24 avril 2017 au 1er mai 2017.

L’association GABB32 lui a notifié un avertissement le 18 juillet 2017 auquel il a répondu par courrier du 4 juillet 2018.

Le salarié a été de nouveau placé en arrêt maladie le 3 octobre 2017, prolongé jusqu’au 3 juillet 2018.

Par courrier du 3 mai 2018, M. [C] [Y] a demandé à son employeur de procéder à une déclaration d’accident du travail à la suite du certificat médical de son médecin traitant du 14 avril 2018 faisant suite à l’arrêt de travail du 2 octobre 2017.

Le 4 juillet 2018, le médecin du travail a rendu un avis d’inaptitude, en’ indiquant que «’l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi’».

Le salarié a été convoqué à un entretien préalable fixé le 23 juillet 2018 auquel il a indiqué ne pas se présenter.

Par courrier du 31 juillet 2018, son employeur lui a notifié son licenciement pour inaptitude avec impossibilité de reclassement en indiquant’:

«’en raison de l’inaptitude physique médicalement constatée par le médecin du travail (inaptitude au poste de travail et état de santé faisant obstacle à tout reclassement dans un emploi) de procéder à votre licenciement.’»

Le 9 août 2018, la MSA a reconnu l’accident du travail du 12 juin 2017. L’association GABB32 a contesté cette reconnaissance auprès de la commission de recours amiable.

Par jugement du 20 septembre 2018, le tribunal de commerce d’Auch a ouvert une procédure de redressement judiciaire de l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers, en désignant M. [T] [B] en qualité de mandataire judiciaire.

Par décision du 1er mars 2019, adressée par courrier du 25 juillet 2019, la MSA a confirmé sa décision de reconnaissance en accident du travail.

L’association GABB32 a saisi le pôle social du tribunal de grande instance d’Agen.’

Par jugement du 6 août 2018, la juridiction saisie a jugé que la matérialité d’un fait accidentel et imprévisible survenu pendant le temps de travail et sur le lieu de travail le 12 juin 2017 n’était pas établie et a écarté la qualification d’accident du travail.

Le 21 mars 2019, M. [C] [Y] a saisi le conseil de prud’hommes d’Auch, afin de contester son licenciement et de voir reconnaître l’origine professionnelle de son inaptitude, le harcélement moral et obtenir différentes indemnités.

L’association GABB32 a porté plainte contre M. [C] [Y] pour avoir détourné la messagerie de l’association et pour avoir accédé à l’ensemble des courriels.

Le tribunal judiciaire d’Auch a condamné le salarié à un rappel à la loi le 21 janvier 2021.

Par jugement du 27 mai 2021, le conseil de prud’hommes d’Auch, section Activités diverses, a’:

– dit que l’inaptitude de M. [C] [Y] n’avait pas d’origine professionnelle,

– dit que l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers n’avait pas commis d’agissements constitutifs de harcèlement moral,

– pris acte du jugement du pôle social écartant la matérialité d’un accident du travail,

– dit que le licenciement de M. [C] [Y] pour inaptitude et impossibilité de reclassement reposait bien sur une cause réelle et sérieuse,

– débouté en conséquence M. [Y] de ses demandes découlant d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– constaté le rappel à la loi pour accès frauduleux dans un système de traitement automatisé de données au préjudice de l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers,

– constaté la mise en redressement judiciaire de l’association Les Bios du Gers groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et en a tiré toutes conséquences de droit sur la situation de M. [C] [Y] et les fixations au passif à intervenir,

– fixé au passif de l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers représentée par M. [B], ès-qualité de commissaire à l’exécution du plan au profit de M. [C] [Y] la somme de’:

– 2 090 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil,

– débouté chacune des parties de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– déclaré opposables les créances ainsi fixées au CGEA,

– dit que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

– laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 19 juillet 2021, M. [C] [Y] a régulièrement déclaré former appel du jugement, en désignant l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et M. [T] [B] ès qualité de commissaire à l’exécution du plan en qualité de parties intimées et l’organisme CGEA Toulouse en qualité de partie intervenante, en indiquant que l’appel porte sur les dispositions du jugement qui ont’:

– dit que l’inaptitude de M. [C] [Y] n’avait pas d’origine professionnelle,

– dit que l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers n’avait pas commis d’agissements constitutifs de harcèlement moral,

– pris acte du jugement du pôle social écartant la matérialité d’un accident du travail,

– dit que le licenciement de M. [C] [Y] pour inaptitude et impossibilité de reclassement reposait bien sur une cause réelle et sérieuse,

– débouté en conséquence M. [Y] de ses demandes découlant d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– débouté les parties de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M° [B] n’ a pas constitué avocat.

M. [Y] lui a signifié ses conclusions le 5 octobre 2022 et l’organisme CGEA de Toulouse le 28 décembre 2021.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 novembre 2022 et l’affaire fixée pour plaider à l’audience du 6 décembre 2022.

‘MOYENS ET PRÉTENTIONS

I. Moyens et prétentions de Monsieur [C] [Y] appelant principal et intimé sur appel incident

Dans ses dernières conclusions, enregistrées au greffe le 5 octobre 2022, expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l’appelant, M. [C] [Y] demande à la cour de’:

A titre principal’:

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il l’a débouté de ses demandes au titre du harcèlement moral,

Statuant à nouveau’:

– juger que son licenciement est nul compte tenu des agissements de harcèlement moral,

– condamner l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et en cas d’évolution de la procédure collective, M. [T] [B], ès-qualités de commissaire de l’exécution du plan, à lui verser la somme de 37 033,68 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

– condamner l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et en cas d’évolution de la procédure collective, M. [T] [B], ès-qualités de commissaire de l’exécution du plan, à lui verser la somme de 15 000 euros au titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité,

A titre subsidiaire’:

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il l’a débouté de ses demandes au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau’:

– condamner l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et en cas d’évolution de la procédure collective, M. [T] [B], ès-qualités de commissaire de l’exécution du plan, à lui verser la somme de 21 602,98 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– condamner l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et en cas d’évolution de la procédure collective, M. [T] [B], ès-qualité de commissaire de l’exécution du plan, à lui verser la somme de 15 000 euros au titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité.

En tout état de cause,

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il a dit que son inaptitude n’a pas une origine professionnelle,

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il l’a débouté de sa demande au titre du préavis égale à 3 mois de salaire conformément aux dispositions de l’accord collectif de la FNAB et de l’indemnité de licenciement,

– condamner l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et en cas d’évolution de la procédure collective, M. [T] [B], ès-qualités de commissaire de l’exécution du plan, à lui verser la somme de 1 955,95 euros au titre du solde de l’indemnité de licenciement,

– condamner l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et en cas d’évolution de la procédure collective, M. [T] [B], ès-qualités de commissaire de l’exécution du plan, à lui verser la somme de 9 258,42 euros au titre de son indemnité de préavis, outre 925,82 euros de congés payés y afférents,

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il condamne l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers sur le fondement de l’article 1240 du code civil, sauf à majorer le quantum des dommages et intérêts,

– condamner l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et en cas d’évolution de la procédure collective, M. [T] [B], ès-qualités de commissaire de l’exécution du plan, à lui verser la somme de 15 000 euros sur le fondement de l’article 1240 du code civil,

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il déboute l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers de sa demande sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile,

– condamner l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers et en cas d’évolution de la procédure collective, M. [T] [B], ès-qualités de commissaire de l’exécution du plan, à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

– débouter l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers de l’intégralité de ses demandes,

– débouter l’AGS-CGEA de l’intégralité de ses demandes,

– dire que l’arrêt à intervenir sera opposable à l’AGS-CGEA et à M. [T] [B] ès-qualités.

Au soutien de ses prétentions, Monsieur [C] [Y] fait valoir’en préliminaire que l’un des conseillers de la formation ne pouvait être impartial car ayant participé à sa procédure de licenciement.

Il soutient que’:

Sur l’origine professionnelle de l’inaptitude

– le droit de la sécurité sociale et le droit du travail sont autonomes

– le conseil de prud’hommes ne peut fonder sa décision sur le jugement du tribunal judiciaire d’Auch pour dire que le licenciement n’a pas d’origine professionnelle

– il appartenait au conseil d’examiner si l’inaptitude avait un lien, même partiel, avec l’accident et si l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement

– il démontre qu’à la date du licenciement, l’association avait connaissance de l’origine professionnelle de son arrêt de travail en raison du certificat médical d’accident du travail établi par médecin traitant en date du 14 avril 2018 et de son courrier du 3 mai 2018 pour déclaration d’accident du travail

– l’association ne peut reprendre en appel ses moyens développés devant le tribunal judiciaire

– le tribunal judiciaire s’est uniquement fondé sur l’absence d’un événement soudain et imprévisible le 12 juin 2017 et non sur des souffrances morales

– son médecin traitant, le docteur [K], atteste ne lui avoir jamais auparavant prescrit de traitement psychotrope

– le médecin du travail lui a remis une demande d’indemnité temporaire d’inaptitude ce qui atteste du lien entre son inaptitude et ses conditions de travail

Sur le harcèlement moral

– il était sous pression permanente due à une surcharge de travail

– le courrier électronique de M. [L], cadre de l’association, du 4 novembre 2016 le démontre

– il a alerté son supérieur hiérarchique, M. [G], le 3 janvier 2017 par courrier électronique de sa surcharge de travail et de sa mise à l’écart par la direction puis les 18 et 25 janvier 2017

– il produit son courriel du 27 avril 2017 à Mme [X] sur le manque de respect de certains salariés à son égard

– seule Mme [V], prestataire extérieure, réagit et alerte sa direction par courrier du 28 mai 2017 produit

– par courriel du 7 juin 2017, il a contacté la médecine du travail pour un rendez-vous et a présenté sa situation de stress et fatigue, les différentes humiliations et pressions régulières qu’il subissait, l’absence de soutien de l’association. Il a expliqué que l’ensemble de ces événements avait «’affecté ma capacité intellectuelle, morale et physique’»

– les trois attestations produites par l’employeur sont de pure complaisance et ne sont pas signées

– il était régulièrement félicité pour son travail comme le démontre les courriels qu’il produit

– contrairement à ce que soutient l’association, il a toujours fait preuve d’adaptation et d’efficacité chez ses autres employeurs comme ces derniers en attestent

– l’avertissement qu’il a reçu était infondé afin de faire pression sur lui et il y a répondu tardivement lorsqu’il a été en capacité d’y procéder

– il n’a reçu aucune remarque avant le mois de mai 2017 sur des manquements professionnels

– sa surcharge de travail était due à une volonté de ne pas procéder aux recrutements nécessaires

– il a été mis à l’écart et n’était plus informé ni consulté en vue de l’écarter définitivement

– c’est dans ce but que le courriel entre M. [E], vice-président et M. [G], président, a été lu en public par M. [E] le 12 juin 2017 insistant pour qu’il ne prenne plus de décision et ne représente plus l’association, propos qui ont été d’une extrême violence et l’ont profondément affecté

– en le dépossédant de ses missions, l’employeur a modifié ses fonctions ce qui est constitutif d’un harcèlement moral

– les attestations produites par l’employeur ne sont pas probantes et deux d’entre elles sont dactylographiées

– son médecin traitant lui a prescrit des antidépresseurs le 14 juin 2017

– le 18 juillet 2017, pendant ses congés, l’employeur lui a notifié un avertissement

– il a été placé en arrêt de travail du 2 octobre 2017 jusqu’au 30 juin 2018 en raison de troubles anxio dépressifs

– l’employeur a annoncé son licenciement au personnel et au réseau professionnel régional par courriel du 18 octobre 2017 avant de lui notifier le 31 juillet 2018

– il est toujours en traitement et suivi par un psychiatre, le docteur [F] [Z], dont l’attestation est produite

– il est reconnu travailleur handicapé avec un taux d’incapacité de 8% jusqu’en avril 2024

– sa situation financière s’est dégradée. Son préjudice financier, sur la base du revenu fiscal de référence des avis d’imposition successifs, s’établit à 15’000 euros en 2018 et 10’000 euros en 2019 et 2020 par rapport à 2017

– il a obtenu un contrat à durée déterminée le 28 septembre 2020

– il produit ses attestations fiscales Pôle emploi 2019 et 2020

– il justifie poursuivre ses recherches d’emploi

– la procédure engagée par l’employeur pour accès frauduleux à un système de données informatiques a donné lieu non à une condamnation pénale mais à un simple rappel à la loi et ne concerne par le présent litige

– le barême de l’article L.1235-3 du code du travail s’applique en cas de licenciement nul contrairement à ce que soutient l’employeur

Subsidiairement, sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse

– l’employeur n’a pas rempli son obligation de sécurité

– l’employeur avait connaissance de sa surcharge de travail et de sa souffrance psychique en raison des nombreux courriels qu’il lui a adressés et qu’il produit, dont l’un émane d’un tiers extérieur à l’association, Mme [V]

– l’employeur, averti, n’a pourtant pris aucune mesure afin de faire cesser sa souffrance

– l’employeur a informé l’ensemble des collaborateurs de son licenciement qui serait effectif le 8 novembre 2017 alors qu’il ignorait lui-même cette décision

Sur la demande de dommages et intérêts au titre de l’article 1240 du code civil

– cette somme est inscrite au plan du redressement judiciaire de l’association

– il demande de majorer la condamnation et de la porter à 15’000 euros

Sur la demande sur le fondement au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile

– l’association prétend qu’il aurait agi en justice de manière abusive, alors qu’il a seulement usé d’une voie de contestation qui lui est offerte par la loi en cas de licenciement. Aucun abus n’est caractérisé.

II. Moyens et prétentions de l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers intimée sur appel principal

Dans ses uniques conclusions enregistrées au greffe le 17 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour une parfaite connaissance des moyens et prétentions, l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers demande à la cour de’:

– débouter M. [C] [Y] de son appel et de l’intégralité de ses demandes,

– accueillir l’appel incident de l’association les Bios du Gers,

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Auch en date du 27 mai 2021 en ce qu’il a débouté M. [C] [Y] de ses demandes

Et donc’:

– prendre acte du jugement du pôle social écartant la matérialité d’un accident du travail,

– dire et juger que l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers n’a commis aucun agissement constitutif de harcèlement moral,

– dire et juger que l’inaptitude de M. [C] [Y] a une origine non-professionnelle,

– dire et juger que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de M. [C] [Y] repose bien sur une cause réelle et sérieuse,

– constater le rappel à la loi pour accès frauduleux dans un système de traitement automatisé de données au préjudice de l’association les Bios du Gers

En conséquence’:

– débouter M. [C] [Y] de l’ensemble de ses demandes,

– l’infirmer en revanche en ce qu’il a’:

– condamné l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers à verser à M. [C] [Y] la somme de 2 090 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil,

– débouté l’association Les Bios du Gers de sa demande au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau sur ces chefs

En conséquence’:

– débouter M. [C] [Y] également de sa demande sur le fondement de l’article 1240 du code civil,

– condamner M. [C] [Y] à payer à l’association Les Bios du Gers la somme de 2 500 euros au titre de son préjudice moral sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile,

– condamner M. [C] [Y] à payer à l’association Les Bios du Gers la somme de 2 500 euros le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– le condamner aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, l’association Les Bios du Gers – groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers fait valoir que’:

Sur la reconnaissance d’un accident de travail

– il a contesté son avertissement un an plus tard

– il a demandé tardivement à la MSA en mai 2018 de reconnaître en accident du travail un événement qui a eu lieu le 12 juin 2017

– le salarié tente de battre monnaie”

– il existe des incohérences’:

– le médecin traitant du salarié n’a procédé qu’à des arrêts maladie simples à compter du 3 octobre 2017

– ce n’est que le 14 avril 2018 que le médecin a établi un certificat accident du travail

– le salarié n’a averti son employeur de la survenance d’un fait accidentel par courrier du 3 mai 2018 pour un événement survenu 2 octobre 2017 alors que le délai d’information est de vingt quatre heures

– le fait accidentel est indiqué par le médecin comme étant survenu le 2 octobre et non le 12 juin 2017

– aucune lésion soudaine n’est apparue après la réunion du 12 juin 2017 ce qui est cohérent avec le certificat médical qui ne mentionne aucune lésion au 12 juin 2017

– les attestations qu’elle produit démontrent d’une part que les salariés n’ont pas souvenance de la lecture de la lettre ni de la réunion et qu’ils l’avaient informée en amont des difficultés rencontrées avec M. [Y]

– après le 12 juin 2017, le salarié a poursuivi son travail sans modifier son comportement et a communiqué le compte rendu de réunion sans commentaire particulier

– les seules déclarations de la victime ne sont pas suffisantes pour établir le caractère professionnel de l’accident

– la MSA s’est basée exclusivement sur ses déclarations et celles de Mme [V] alors qu’elle était absente le 12 juin 2017

Sur l’inaptitude non professionnelle

– le salarié a fait une demande de reconnaissance de travailleur handicapé auprès de la MDPH le 26 mars 2018 et a été reconnu comme tel le 3 mai 2018, soit avant sa demande de reconnaissance d’accident du travail. Cela prouve l’absence de lésion immédiate et de lien de causalité

– il appartient au salarié de démontrer qu’une lésion est apparue soudainement alors qu’il était sous l’autorité et le contrôle de son employeur

– le salarié était instable psychologiquement et prenait un traitement anxiolytique depuis longtemps

– la prescription médicale du 14 juin 2017 le prouve, compte tenu du lourd traitement prescrit qui ne peut l’être que si le patient y est habitué, faute pour lui dans le cas contraire de pouvoir conduire ou travailler le lendemain

– il n’existe aucun lien entre l’arrêt maladie du 3 octobre 2017 et la dépression qui s’est révélée après le 12 juin 2017

Sur l’absence de harcèlement moral

– le salarié était instable professionnellement et à la lecture de son curriculum vitae, ne demeurait jamais plus d’un an dans la même entreprise

– elle a exercé son pouvoir de direction en le licenciant’

– le salarié connaissait le contenu du courriel et savait qu’il serait lu à la réunion du 12 juin 2017 comme il le reconnaît lui-même dans le rapport de contrôle établi par la MSA selon’ les attestations de M. [E] et de M. [L]

– elle produit trois attestations de salariés qui ont alerté le conseil d’administration sur leurs difficultés à travailler avec M. [Y], qui corroborent les déclarations mêmes du salarié contenues dans le rapport et qui confirment les difficultés relationnelles

– le salarié ne rapporte ni la preuve d’un accident du travail ni d’un harcèlement moral ni d’une surcharge de travail

– les demandes indemnitaires seront écartées car surévaluées par rapport au barême de l’article L.1235-3 du code du travail

– le délai de préavis est d’un mois et non de trois

Sur la demande au titre de l’article 1240 du code civil

– le fondement juridique est inapplicable car il vise la responsabilité extra contractuelle

Sur la demande au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile

– le salarié a agi en justice de manière abusive contre l’association. L’abus du droit d’agir en justice est établi par l’attitude toxique du salarié à l’égard de ses collègues, à l’égard de la MSA qu’il a tenté d’instrumentaliser, et à l’égard de l’association ce qui justifie une amende civile.

III. Moyens et prétentions de l’UNEDIC – DELEGATION AGS – CGEA de Toulouse, partie intervenante

Dans ses uniques conclusions enregistrées au greffe le 17 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour une parfaite connaissance des moyens et prétentions, l’UNEDIC – DELEGATION AGS – CGEA de Toulouse demande à la Cour de’:

– débouter M. [C] [Y] de son appel et de l’intégralité de ses demandes,

– accueillir l’appel incident de l’UNEDIC délégation AGS,

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Auch en date du 27 mai 2021 en ce qu’il a débouté M. [C] [Y] de ses demandes,

– l’infirmer en revanche en ce qu’il a’:

– rejeté la demande de mise hors de cause de l’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de Toulouse,

– fixé au passif de l’association Les Bios du Gers – Groupement des agriculteurs biologiques et biodynamiques du Gers la somme de 2 090 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civile,

– et jugé cette créance opposable à l’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de Toulouse,

Et statuant à nouveau de ces chefs,

– mettre purement et simplement hors de cause les AGS,

– débouter M. [C] [Y] également de sa demande sur le fondement de l’article 1240 du code civil,

A titre subsidiaire,

– réduire les sommes réclamées par M. [C] [Y] à de plus justes proportions,

En tout état de cause,

– prendre acte de l’intervention subsidiaire de l’AGS, de ses remarques ainsi que des limites de sa garantie, l’UNEDIC DELEGATION AGS ne pouvant tout au plus avancer le montant des créances constatées qu’entre les mains du liquidateur dans la limite légale de sa garantie, laquelle exclut l’indemnité allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, les dépens et les astreintes.

Au soutien de ses prétentions, l’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de Toulouse fait valoir que’:

Sur mise hors de cause de l’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de Toulouse

– elle a été appelée en intervention forcée car une procédure de redressement judiciaire avait été ouverte à l’encontre de l’association le 20 septembre 2018

– un plan de redressement a été adopté le 17 octobre 2019, ainsi la garantie de l’AGS n’a pas vocation à intervenir et il convient de la mettre hors de cause.

Sur le débouté de l’intégralité des demandes de M. [C] [Y]

– le salarié ne démontre pas un lien entre son inaptitude et ses conditions de travail

– le salarié a été placé en arrêt de travail pour des raisons sans lien avec son activité professionnelle

– ce n’est qu’au mois de mai 2018 qu’il a évoqué un accident du travail le 12 juin 2017

Sur l’absence de harcèlement moral

– le déroulement de la réunion du 12 juin 2017 tel que présenté par le salarié n’est corroboré par aucun autre élément que ses propres affirmations

– si l’employeur a pu émettre des remarques sur la qualité du salarié, c’était dans le cadre de son pouvoir de direction

– cette situation a d’ailleurs abouti à la notification d’un avertissement le 18 juillet 2017 qu’il ne contestera qu’un an après

– il est manifeste que les négligences du salarié ont entraîné des dysfonctionnements et des tensions avec les administrateurs

– le salarié ne rapporte pas d’éléments circonstanciés tenant au harcèlement moral qu’il invoque’

– le manque de trésorerie ne justifie pas ses difficultés pour exercer ses fonctions et rédiger les rapports demandés

– le salarié ne justifie pas d’une surcharge de travail ni d’humiliations de la part de ses collègues

– la surcharge de travail résulte de son manque d’organisation

– le salarié produit ses propres courriers pour établir une prétendue mise à l’écart de la part de la direction et une absence de soutien

– le conseil d’administration lui a demandé de se recentrer sur la finalisation des tâches en 2016 à l’exclusion de toute autre mission ce qui correspond à une mise au point objective et non à une humiliation comme il l’allègue

– l’attestation de Mme [V] ne répond pas non plus aux exigences légales et son objectivité est à relativiser car elle a elle-même vécu une expérience semblable et n’est plus revenue à l’association après avril 2017′; le contrat de travail espéré étudié par M. [Y] ne s’étant pas concrétisé comme elle le souhaitait

– les courriels de satisfaction sont insuffisants

– aucune preuve n’est apportée concernant un quelconque manquement de la part de l’association.

– elle a transmis la déclaration d’accident du travail le 14 septembre 2018 lorsque les informations lui ont été communiquées par le salarié

Sur l’absence d’origine professionnelle de l’inaptitude

– la décision du pôle social conforte l’inexistence d’un accident du travail

– il n’existe par conséquent aucun lien entre l’inaptitude déclarée et un accident du travail qui n’a pas été reconnu

– les jurisprudences qu’il invoque sont inapplicables

– la réalité de l’accident du travail n’est pas corroborée

– son inaptitude n’est pas nécessairement reliée à l’incident du 12 juin 2017

– ce n’est qu’en mai 2018 que le salarié a fait référence, pour la première fois, à ce prétendu accident du travail survenu plusieurs mois auparavant. Les premiers arrêts de travail à compter du 3 octobre 2017 n’ont jamais évoqué un accident du travail. Le médecin du salarié, le 14 avril 2018, s’est rapporté aux allégations de son patient

– le médecin psychiatre est allé au-delà de ses compétences en évoquant un lien entre l’état de santé du patient et son vécu professionnel

– les arrêts de travail délivrés à compter d’avril 2018 par son médecin traitant comme par le médecin psychiatre sont à analyser avec circonspection

– le médecin du travail n’a pas alerté son employeur de la situation’

– la décision de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé permet de confirmer l’état de santé dégradé du salarié mais ne démontre pas son origine professionnelle

Sur le montant des demandes

– la demande d’indemnité de préavis’: cette demande est injustifiée et surévaluée. Le montant ne saurait excéder deux mois de salaire (article L.1234-1 du code du travail)

– les dommages-intérêts sur l’indemnité spécifique réclamée au titre d’un prétendu licenciement nul’: elle est injustifiée et surévaluée. Ils ont pour but de réparer le préjudice subi. Le salarié n’en justifie pas

– les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’: le montant sollicité est disproportionné, car le salarié ne produit pas d’éléments justifiant l’octroi d’une indemnité supérieure au minimum. Il peut tout au plus prétendre à une indemnité comprise entre 0,5 et 3,5 mois de salaire

– les dommages-intérêts au titre de l’article 1240 du code civil’: cet article est inapplicable à la situation, seule la responsabilité contractuelle de l’association pourrait être engagée. Aucune faute de l’association n’est prouvée ni aucun travail dissimulé.

En tout état de cause, sur les limites de garanties de l’AGS

– le salarié ne peut que rechercher l’inscription sur le relevé des créances salariales de ses réclamations, sans qu’aucune condamnation ne puisse intervenir (article L.622-21 et L.625-1 du code de commerce, L. 3253-19 et suivants du code du travail)

– la garantie de l’AGS n’est que subsidiaire et suppose l’absence de fonds disponibles. En l’espèce, compte tenu de la durée du contrat litigieux au jour de l’ouverture de la procédure collective, l’AGS ne peut que garantir, le cas échéant, les créances fixées dans la limite de six fois le plafond mentionné à l’article D. 3253-5 du code du travail

– l’AGS ne peut être tenue de payer aucune somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile ou des dommages-intérêts qui n’ont pas le caractère de créances salariales et s’analysent comme une peine dont seul est responsable le débiteur principal

MOTIVATION

A titre liminaire, il convient de faire droit à la demande de l’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de Toulouse et de la mettre hors de cause en raison du plan de redressement adopté le 17 octobre 2019.

Sur la nullité du licenciement

L’article L.1152-1 du code du travail dispose :

« Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

L’article L.1154-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, prévoit :

« Lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L.1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ».

En l’espèce M. [Y] invoque :

– une surcharge de travail

– des critiques et une mise à l’écart du fait de ses collègues et de sa hiérarchie

– une humiliation lors d’une réunion en présence des collaborateurs le 12 juin 2017

Il produit’:

– le courriel de M. [L], salarié, du 4 novembre 2016 adressé à M. [G] et qu’il a reçu en copie dans lequel il écrit’: «’il me semble qu'[C] est un peu débordé’»

– ses courriers électroniques des 3 janvier 2017 à M. [G] au sujet de sa charge de travail «’j’espère pouvoir tenir’», du 18 janvier 2017, du 25 janvier 2017 et 27 avril 2017

– son courriel du 7 juin 2017 à la médecine du travail par lequel il expose ses difficultés professionnelles et son mal être

– le courrier de Mme [V], assistante de gestion, du 28 mai 2017 adressé à GABB’32 dans lequel elle attire l’attention sur la situation de M. [Y]’: «’j’espère qu'[C] ne va pas craquer et que la confiance va se réinstaller’» et met l’accent sur son implication professionnelle

– le courriel de M. [D] du 18 octobre 2017 adressé aux salariés de l’association’: «’par décision du bureau et après discussion avec le bureau, [C] [Y] a été licencié par les Bios du gers GABB32 pour des raisons internes à l’association. Cette décision sera effective à compter du mercredi 8 novembre 2017’»

– ses certificats médicaux

Ainsi que l’a, à juste titre, relevé le conseil des prud’hommes, ces éléments, pris dans leur ensemble, ne laissent pas présumer l’existence d’un harcèlement moral.

Il suffira de rajouter que si M. [Y] démontre que son état de santé mental était effectivement altéré, il n’amène aucun élément de nature à établir l’existence d’un lien entre cet état et des agissements répétés de harcèlement moral à son encontre.

La décision du conseil des prud’hommes ayant jugé que le harcèlement moral n’était pas fondé et a rejeté la demande en dommages et intérêts sera donc confirmée sur ces points.

Sur le manquement à l’obligation de sécurité

Aux termes de l’article L.4121-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1) des actions de prévention des risques professionnels,

2) des actions d’information et de formation,

3) la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

L’article L.4121-2 du code du travail détermine les principes généraux de prévention sur le fondement desquels ces mesures doivent être mises en ‘uvre.

Il en résulte que constitue une faute contractuelle engageant la responsabilité de l’employeur le fait d’exposer un salarié à un danger sans avoir pris toutes les mesures prévues par les textes susvisés, alors que l’employeur doit assurer l’effectivité de l’obligation de sécurité qui lui incombe en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise.

En l’espèce, il ne ressort pas des éléments produits l’existence d’un harcèlement moral. Par conséquent, aucun manquement de l’employeur à son obligation de sécurité n’est’ caractérisé.

En l’espèce, le salarié ne justifie pas d’un préjudice qui aurait pour origine un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité. En conséquence, la cour déboute M. [Y] de sa demande.

Sur l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement

Il résulte des dispositions des articles L.1232-1 et L.1235-1 du code du travail que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, et qu’en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Il est constant que ne constitue pas en principe un tel motif un fait tiré de la vie personnelle du salarié, sauf si ce fait’ cause un trouble objectif dans le fonctionnement de l’entreprise.

Il convient d’observer que le salarié fonde sa demande subsidiaire sur le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité. Il reproche à son employeur une surcharge de travail et la’dégradation de ses conditions de travail qui ont conduit à son inaptitude. Le salarié n’apporte pas d’éléments supplémentaires à l’appui de son moyen précédemment soulevé dans le cadre du harcèlement moral.

Il ne peut donc être reproché à l’employeur un non-respect de son obligation de sécurité de ce chef.

En conséquence, la cour confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [Y] de ses demandes découlant d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur l’origine de l’inaptitude

Il est constant que les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement. Il est constant que les règles protectrices prévues par les articles L.1226-6 à L.1226-22 du code du travail concernent des salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

S’il n’est pas nécessaire que le salarié ait régulièrement accompli les formalités de déclaration de cet accident du travail ou de cette maladie professionnelle à la caisse primaire d’assurance-maladie, encore convient-il que les éléments de la cause et les pièces produites démontrent l’existence d’un tel événement.

Aux termes de l’article L.1226-14 du code du travail, la rupture du contrat de travail pour inaptitude d’origine professionnelle ouvre droit pour le salarié qui ne peut exécuter son préavis à une indemnité compensatrice d’un montant égal à celui de l’indemnité prévue par l’article L.1234-5 du code du travail ainsi qu’à une indemnité

spécifique de licenciement, qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l’indemnité légale de licenciement.

Le salarié ne peut prétendre à l’indemnité conventionnelle du préavis mais seulement à l’indemnité légale de préavis, qui, ayant un caractère indemnitaire, n’ouvre pas droit dans cette hypothèse à des congés payés afférents.

M. [Y] a été placé en position d’arrêt de travail le 3 octobre 2017 prolongé jusqu’au 3 juillet 2018.

Le 4 juillet 2018, le médecin du travail a émis un avis d’inaptitude précisant que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

En l’espèce, il n’est pas contestable que’:

– selon le certificat médical établi le 14 avril 2018 communiqué à l’employeur le 15 avril, ainsi que les suivants des 4 mai, 27 mai et 29 juin 2018 portent la mention «’accident du travail’», «’date de l’accident’: 02.10.2017’», constatations détaillées’: «’troubles anxio dépressifs consécutifs à un conflit ouvert avec sa direction’»

– M. [Y] a formulé une demande de reconnaissance d’accident du travail le 3 mai 2018

– Il est constant qu’une réunion d’équipe s’est tenue le 12 juin 2017 au cours de laquelle a été lu le courriel de M. [G] lequel indiquait «” en attendant je demande que les actions 2016 soient prioritaires et terminées avant le 30 juin, qu'[C] ne prenne plus aucune décision concernant la structure et ne représente plus les Bios du Gers mais finalise les dossiers 2016. Je note que je ne me sens pas respecté par son attitude et son fonctionnement’»

– le 14 juin 2017, son médecin traitant, le docteur [K], lui prescrivait des antidépresseurs et des anxiolytiques

Au regard de ces éléments, il en ressort que l’inaptitude de M. [Y] a au moins partiellement une origine professionnelle, que les prescriptions médicamenteuses et les certificats médicaux, notamment celui du 14 avril 2018, démontrent l’existence d’un conflit ouvert avec la direction et sont en lien avec le climat professionnel délétère.

Par conséquent, à la réception de l’avis d’inaptitude du 4 juillet 2018, l’employeur ne pouvait ignorer son origine professionnelle et en avait donc connaissance au moment du licenciement le 31 juillet 2018. ‘

La cour fixe au passif de la procédure collective de l’association les Bios du Gers la somme de 1 955,95 euros au titre du solde de l’indemnité de licenciement et celle de 3 020,90 euros au titre de l’indemnité légale de préavis qui, ayant un caractère indemnitaire et forfaitaire, n’ouvre pas droit dans cette hypothèse à des congés payés afférents ni à un calcul par rapport à la durée du préavis prévu dans la convention collective.

La cour confirme le jugement en ce qu’il a débouté M. [Y] de sa demande en congés payés afférents.

Sur la demande fondée sur l’article 1240 du code civil

En l’absence de tout élément produit par le salarié et à la lecture du jugement, il en ressort que la créance de 2090 euros correspond à une somme due au titre d’un travail réalisé par le salarié avant son embauche non contestée par l’employeur.

D’une part, cette créance est inscrite au plan, d’autre part, elle ne concerne pas le contrat de travail objet du litige.

Par conséquent, la cour infirme le jugement entrepris de ce chef et déboute le salarié de sa demande en fixation de créance au passif de la procédure collective de l’association.

Sur la demande au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile

L’association les Bios du Gers sollicite des dommages et intérêts estimant que la procédure initiée par M. [Y] est abusive.

L’exercice d’une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que s’il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi ou s’il s’agit d’une erreur grossière équipollente au dol.

En l’espèce, il ne ressort pas de l’examen du litige que M. [Y] soit de mauvaise foi.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement du conseil des prud’hommes qui a débouté l’association les Bios du Gers de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes annexes

Le jugement de première instance ayant laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens et ayant débouté les parties de leurs demandes formées en application de l’article 700 du code de procédure civile sera confirmé.

M. [Y], qui succombe, sera condamné aux dépens d’appel.

L’équité justifie que soient écartées les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

 

 


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