Your cart is currently empty!
17/02/2023
ARRÊT N°103/2023
N° RG 21/02652 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OHF3
AB/AR
Décision déférée du 18 Mai 2021 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Toulouse ( F19/01510)
COSTA F
S.A.R.L. SAMASSUR
C/
[U] [B]
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le 17 02 2017
à Me Lucile BOURLAND
Me Marianne DESSENA
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 2
***
ARRÊT DU DIX SEPT FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANTE
S.A.R.L. SAMASSUR
devenue MCA MEILLEURS COURTIERS EN ASSURANCE prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès qualités audit siège sis [Adresse 3]
Représentée par Me Maria GRAAFLAND de la SELARL PACTA JURIS, avocat au barreau de MARSEILLE (plaidant) et par Me Lucile BOURLAND, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant)
INTIME
Monsieur [U] [B]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Marianne DESSENA, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C.Brisset, présidente et A.Pierre-Blanchard, conseillère, chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C.Brisset, présidente
A.Pierre-Blanchard, conseillère
F. Croisille-Cabrol, conseillère
Greffier, lors des débats : A. Ravéane
ARRET :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. Brisset, présidente, et par A. Ravéane, greffière de chambre
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. [U] [B] a été embauché suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps plein, à compter du 19 janvier 2015, par la SARL Samassur, en qualité de conseiller commercial.
La convention collective des entreprises de courtage d’assurances et/ou de réassurances est applicable.
Le 26 juillet 2019, invoquant un effondrement des résultats de M. [B], l’employeur lui a demandé de contacter Mme [M] [E], responsable des plannings commerciaux, à l’issue de chacune de ses visites.
Le 31 juillet 2019, un avertissement a été notifié à M. [B] pour refus de suivre les nouvelles instructions.
Par lettre du 27 août 2019, M. [A] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé le 6 septembre 2019, cette convocation étant assortie d’une mise à pied conservatoire.
Par lettre du 10 septembre 2019, M. [B] a été licencié pour faute grave.
Par requête en date du 26 septembre 2019, M. [B] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse aux fins de contester son licenciement.
Par jugement du 18 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Toulouse a :
– jugé que M. [U] [B] a été victime de harcèlement moral,
– déclaré nul le licenciement notifié le 10 septembre 2019 à M. [B],
– prononcé la nullité de l’avertissement notifié le 31 juillet 2019.
En conséquence :
– condamné la SARL Samassur prise en la personne de son représentant légal ès qualités, à payer à M. [B] les sommes suivantes :
– 2 500 euros au titre du manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur et du préjudice moral subi,
– 14 838 euros à titre de dommages et intérêts suite à la nullité du licenciement,
– 500 euros à titre de dommages et intérêts suite à l’annulation de l’avertissement du 31 juillet 2019,
-1 089,15 euros au titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire,
– 108 euros au titre des congés payés sur mise à pied,
– 4 946 euros à titre du rappel de salaire sur préavis,
– 494,60 euros au titre des congés payés sur préavis,
– 3 476 euros à titre d’indemnité de licenciement,
– 1 500 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l’obligation de formation,
– 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– fixé le salaire moyen de M. [B] à 2 473 euros,
– ordonné le remboursement par la société Samassur aux organismes intéressés de la partie des indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour de jugement, dans la limite de trois mois d’indemnités de chômage,
– débouté M. [B] du surplus de ses demandes,
– débouté la société Samassur de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– rappelé que les créances salariales (soit pour la somme de 10 113,75 euros), produisent intérêts légaux à la date de réception de la convocation en bureau de conciliation, et que les créances indemnitaires (soit la somme de 19 338 euros) produisent intérêts légaux à compter du prononcé du jugement,
– condamné la société Samassur aux dépens de l’instance,
– dit qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application des dispositions de l’article 10 du décret 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par la partie défenderesse en sus de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Samassur a relevé appel de ce jugement le 15 juin 2021, dans des conditions de forme et de délai non discutées, en énonçant dans sa déclaration d’appel les chefs critiqués.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 4 janvier 2023, auxquelles il est expressément fait référence, la société MCA (Meilleurs Courtiers en Assurance), venant aux droits de la société Samassur, demande à la cour de :
– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 18 mai 2021 en ce qu’il a :
* jugé que M. [U] [B] a été victime de harcèlement moral,
* déclaré nul le licenciement notifié le 10 septembre 2019 à M. [B],
* prononcé la nullité de l’avertissement notifié le 31 juillet 2019.
En conséquence :
* condamné la SARL Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance), prise en la personne de son représentant légal ès qualité, à payer à M. [B] les sommes suivantes :
* 2 500 euros au titre du manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur et du préjudice moral subi,
* 14 838 euros à titre de dommages et intérêts suite à la nullité du licenciement,
* 500 euros à titre de dommages et intérêts suit à l’annulation de l’avertissement du 31 juillet 2019,
* 1 089,15 euros au titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire,
* 108 euros au titre des congés payés sur mise à pied,
* 4 946 euros à titre du rappel de salaire sur préavis,
* 494,60 euros au titre des congés payés sur préavis,
* 3 476 euros à titre d’indemnité de licenciement,
* 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
* ordonné le remboursement par la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance), aux organismes intéressés de la partie des indemnités chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour de jugement, dans la milite de trois mois d’indemnité de chômage,
* condamné la société Samassur aux dépens de l’instance,
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 18 mai 2021 en ce qu’il a débouté M. [B] du surplus de ses demandes,
En conséquence :
– déclarer M. [B] mal fondé en toutes ses demandes et appel incident et l’en débouter,
– condamner M. [B] à payer la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [B] aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 4 janvier 2023, auxquelles il est expressément fait référence, M. [B] demande à la cour de :
A titre principal :
– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulouse le 18 mai 2021 en ce qu’il a :
* jugé que M. [B] a été victime de harcèlement moral,
* jugé nul le licenciement notifié le 10 septembre 2019,
* prononcé la nullité de l’avertissement du 10 septembre 2019,
* jugé que la SARL Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance), a manqué à ses obligations de sécurité et de formation,
* fixé le salaire brut à la somme de 2 473 euros,
* condamné la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance), à régler à M. [B] la somme de 3 476 euros au titre de l’indemnité de licenciement,
* condamné la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance), à régler à M. [B] la somme de 1 089,15 euros bruts à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire outre la somme de 108 euros à titre d’indemnité de congés payés afférent,
* condamné la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance), à régler à M. [B] la somme de 4 946 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 494,60 euros au titre de l’indemnité de congés payés y afférents,
* condamné la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance), à régler à M. [B] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance,
– le réformer sur le quantum des condamnations allouées au titre de la nullité du licenciement, du manquement à l’obligation de sécurité, de la nullité de l’avertissement, du non-respect de l’obligation de formation,
En conséquence :
– condamner la société MCA (Meilleurs Courtiers en Assurance), à verser à M. [B] les sommes suivantes :
* 19 794 euros au titre de la nullité du licenciement,
* 7 419 euros pour violation de l’obligation de sécurité,
* 7 419 euros en réparation du préjudice subi du fait de la nullité de l’avertissement,
* 7 419 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect du contrat, de l’obligation de formation et d’entretiens individuels annuels,
– l’infirmer en ce qu’il a débouté M. [B] de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral du fait du harcèlement moral,
Et, statuant à nouveau :
– condamner la société MCA (Meilleurs Courtiers en Assurance) à verser à M. [B] une somme de 7 419 euros en réparation du préjudice moral du fait du harcèlement moral,
A titre subsidiaire, dans l’hypothèse d’une réformation du jugement au titre de la nullité du licenciement pour harcèlement moral :
– juger que le licenciement du 10 septembre 2019 est sans cause réelle et sérieuse,
– condamner la société MCA (Meilleurs Courtiers en Assurance) à verser à M. [B], la somme de 12 365 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– confirmer pour le surplus le jugement en ce qu’il a :
*prononcé la nullité de l’avertissement du 10 septembre 2019,
*jugé que la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance) a manqué à ses obligations de sécurité et de formation,
*fixé le salaire brut à la somme de 2 473 euros,
*condamné la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance) à régler à M. [B] la somme de 3 476 euros au titre de l’indemnité de licenciement,
*condamné la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance) à régler à M. [B] la somme de 1 089, 15 euros bruts à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire outre la somme de 108 euros à titre d’indemnité de congés payés afférent,
* condamné la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance) à régler à M. [B] la somme de 4 946 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 494, 60 euros au titre de l’indemnité de congés payés y afférents,
* condamné la société Samassur (nouvellement dénommée la société MCA, Meilleurs Courtiers en Assurance) à régler à M. [B] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance,
– le réformer sur le quantum des condamnation alloués au titre du manquement à l’obligation de sécurité, de la nullité de l’avertissement, du non-respect de l’obligation de formation.
En conséquence :
– condamner la société MCA (Meilleurs Courtiers en Assurance) à verser à M. [B] les sommes suivantes :
* 7 419 euros pour violation de l’obligation de sécurité,
* 7 419 euros en réparation du préjudice subi du fait de la nullité de l’avertissement,
* 7 419 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect du contrat, de l’obligation de formation et d’entretiens individuels annuels,
En toute hypothèse :
– infirmer pour le surplus le jugement,
– juger que M. [B] relève de l’échelon conventionnel B,
– condamner la société MCA (Meilleurs Courtiers en Assurance) à verser à M. [B] un rappel de salaire de :
*à titre principal : 20 957,81 euros à titre de rappel de salaire en application du principe à travail égal salaire égal outre l’indemnité de congés payés y afférents de 2 095,78 euros,
*à titre subsidiaire de 779, 67 euros outre l’indemnité de congés payés y afférents de 77,96 euros,
– condamner la société MCA (Meilleurs Courtiers en Assurance) à verser à M. [B] la somme de 7 419 euros à titre de dommages-intérêts pour occupation du domicile,
– condamner la société MCA (Meilleurs Courtiers en Assurance) à verser à M. [B] la somme de 230 euros à titre de remboursement des frais de réparation d’une tablette tactile,
– condamner la société MCA (Meilleurs Courtiers en Assurance) à verser à M. [B] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
MOTIFS :
Sur la demande de reclassification conventionnelle et l’application du principe d’égalité de traitement :
En application de la règle ‘à travail égal, salaire égal’, l’employeur est tenu d’assurer l’égalité de rémunération entre tous les salariés de l’un ou l’autre sexe, pour autant que les salariés en cause soient placés dans une situation identique.
Il résulte de l’article L3221-4 du code du travail que sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l’expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.
Il incombe au salarié qui se prétend victime de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération directe ou indirecte. Il appartient alors à l’employeur de prouver que la situation critiquée est justifiée par des raisons objectives, pertinentes et matériellement vérifiables. Si cette preuve n’est pas rapportée, l’employeur doit verser un rappel de salaire pour compenser la différence invoquée.
Il est constant que M. [B] a été recruté au poste de conseiller commercial, niveau A de la convention collective des entreprises de courtage d’assurances et/ou de réassurance.
L’article 21 de cette convention collective prévoit 7 niveaux de classification, de A à G.
La classe A à laquelle M. [B] a été recruté, se définit ainsi :
‘ Classe A :
Cette classe regroupe des emplois qui consistent en des traitements de tâches simples dans le cadre d’instructions précises à partir de méthodes et techniques préétablies ne nécessitant pas de connaissances techniques particulières. Le personnel occupant ces emplois est responsable de l’accomplissement des tâches confiées qu’il réalise et qui sont, à ce niveau, immédiatement contrôlables et/ou répétitives. Ces emplois nécessitent des échanges d’informations élémentaires que ce soit avec le personnel de l’entreprise ou avec des tiers.
Le niveau d’étude de référence est le CAP, BEP et/ou une expérience professionnelle équivalente.’
M. [B] revendique l’application à son profit du niveau B (en 1ère instance il demandait le niveau E), indiquant avoir occupé dès janvier 2016 le poste d’animateur des ventes et de chef d’équipe sans qu’un avenant soit régularisé malgré ses demandes.
Le niveau B se définit ainsi :
‘Classe B :
A ce niveau, les emplois exercés nécessitent des connaissances techniques adaptées au poste, permettant le traitement et la résolution de problèmes simples et variés à partir de méthodes préétablies, dans le cadre de consignes générales. Le personnel occupant des emplois pouvant être classés à ce niveau est responsable de la réalisation des travaux et du traitement des tâches diversifiées qui lui sont confiées. Ils peuvent nécessiter le plus souvent un travail en coopération au sein d’une équipe.
Le niveau d’étude de référence est le bac, BT, BP et/ou une expérience professionnelle équivalente.’
Pour démontrer la réalité des fonctions occupées, relevant selon lui du niveau B, M. [B] produit un certain nombre de mails échangés entre les parties et effectue dans ses écritures un rappel chronologique sur l’organisation de l’équipe commerciale dont il faisait partie. Cette chronologie concorde avec celle évoquée par l’employeur, même si chaque partie en tire des conclusions différentes sur la classification de M. [B].
Ainsi, en 2015, le service commercial était composé d’environ 5 commerciaux dont M. [B], placés sous la responsabilité de M. [S], exerçant les fonctions d’animateur commercial.
Le service commercial se développant pour atteindre environ 15 conseillers, la société Samassur a confié à deux conseillers commerciaux, Messieurs [W] et [N], une mission de chef d’équipe accessoire à leurs fonctions commerciales, afin de faire le relais entre les conseillers et M. [S], ce dernier étant classé au niveau B, alors que Messieurs [W] et [N] étaient classés au niveau A.
M. [B] a remplacé M. [W] sur cette mission de chef d’équipe, au départ de ce dernier en décembre 2016.
Le fait que M. [W] n’était classé qu’au niveau A, tout en étant chef d’équipe, n’interdit pas à M. [B] de revendiquer le niveau B pour ce même poste : en effet il convient de s’attacher à la qualification du poste au regard de la définition conventionnelle du niveau B, M. [W] ayant pu être sous-classé malgré les fonctions occupées.
Pour maintenir M. [B] au niveau A, l’employeur indique que M. [B] n’avait alors aucun pouvoir hiérarchique sur ses collègues, et qu’il ‘faisait simplement le lien’ entre ses collègues et M. [S].
A ce stade la cour observe que le niveau B revendiqué par le salarié n’exige pas l’exercice d’un pouvoir hiérarchique sur d’autres salariés mais implique la réalisation de tâches ou travaux qui ‘peuvent nécessiter le plus souvent un travail en coopération au sein d’une équipe’.
Or, tel était le cas de M. [B] au sein de l’équipe commerciale pour laquelle l’employeur lui reconnaissait le rôle de ‘chef d’équipe’ : il ressort des mails produits que M. [B] adressait aux commerciaux des ‘messages d’animation’, qu’il gérait l’organisation commerciale et la rupture des contrats, qu’il recevait comme M. [N] les instructions directes du gérant M. [P] pour gérer commercialement son équipe.
M. [B] verse aux débats plusieurs attestations de collègues indiquant avoir travaillé avec lui alors qu’il était animateur des ventes et qu’il gérait sa propre équipe de commerciaux (MM. [Y], [C], [L], Mme [T]).
Ainsi, la cour considère que les fonctions occupées par M. [B] ne sauraient relever du niveau A dont il est rappelé qu’il est le niveau le plus bas réservé à des tâches simples effectuées sans autonomie ni initiative, et qu’elles relèvent effectivement du niveau B.
M. [B] formule une demande de rappel de salaire fondée non pas sur le minimum conventionnel du niveau B, mais sur le salaire de M. [N] auquel il se compare, en invoquant une rupture d’égalité de traitement.
Or, sur la majeure partie de la période durant laquelle il se compare à M. [N], ce dernier était classé au niveau A (il n’a été classé au niveau B qu’en juin 2019), de sorte que M. [B] est mal fondé à solliciter le salaire calculé sur le niveau B de M. [N] (obtenu par lui en juin 2019) pour la période de décembre 2016 à mai 2019, puisqu’il n’est établi aucune rupture d’égalité entre eux à cette époque, M. [B] ne versant aux débats aucun élément de comparaison entre ses collègues et lui pour cette période.
S’agissant de la rémunération minimale conventionnelle à laquelle M. [B] peut prétendre à raison du niveau B sur cette période, M. [B] ne formule aucune demande à ce titre dans la mesure où sa rémunération perçue pour le niveau A excédait, dans les faits, la rémunération minimale conventionnelle du niveau B.
En revanche, il existe bien une différence de rémunération entre les deux salariés de juin 2019 à août 2019, la cour ayant reconnu à M. [B] le niveau B et M. [N] étant également classé au niveau B sur cette période.
Le salaire de base de M. [B] était en effet de 2145,35 € bruts et celui de M. [N] s’élevait à 2405,24 € bruts.
Ceci laisse supposer une rupture d’égalité de traitement au détriment de M. [B].
Néanmoins, la société MCA objective cette différence de traitement par le fait que les deux salariés n’avaient alors plus les mêmes tâches.
En effet, lorsque M. [S] a quitté l’entreprise le 30 juin 2019, le réseau commercial s’était réduit et comptait moins de 10 conseillers. La société Samassur a alors réorganisé le service en confiant au seul M. [N] les fonctions d’animateur, les missions de chef d’équipe étant supprimées, et M. [B] a alors retrouvé uniquement ses fonctions antérieures de conseiller commercial.
Sans analyser à ce stade la légitimité de la modification des fonctions de M. [B], il n’en demeure pas moins que, factuellement, les deux salariés ne se trouvaient pas dans la une situation comparable, de sorte que l’inégalité de traitement sur le plan salarial ne peut être retenue.
Et sur cette période de juin à août 2019, il n’est pas allégué que la rémunération de M. [B] était inférieure à la rémunération conventionnelle minimale pour le niveau B.
Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes principales et subsidiaires de rappel de salaire formulées par M. [B], ainsi que les demandes de congés payés y afférentes.
Sur l’occupation du domicile personnel :
M. [B] soutient avoir dû travailler à son domicile en l’absence de local professionnel pour se consacrer aux tâches administratives, et produit des mails relatifs à son reporting.
Toutefois il n’est pas contesté que M. [B], qui devait assurer une prospection commerciale, était équipé d’outils numériques (tablette tactile avec clé 3G et smartphone) de sorte qu’il pouvait faire son reporting de manière itinérante.
M. [B] ne justifie pas avoir été contraint de réserver une partie de son domicile pour y procéder ; il ne produit aucun élément sur l’occupation de son domicile à des fins professionnelles, de sorte qu’il sera débouté de sa demande indemnitaire par confirmation du jugement déféré.
Sur l’obligation de formation et d’entretien individuel :
M. [B] demande des dommages-intérêts pour déloyauté de la société employeur, aux motifs :
– qu’il n’a jamais bénéficié de la formation de 300h minimum prescrite par le code des assurances, et que l’employeur a tenté de lui faire signer une attestation de formation antidatée en mars 2019,
-qu’il ne lui a jamais été remis de carte professionnelle malgré ses demandes, alors que l’article 20 de la convention collective l’impose,
-qu’il n’a jamais bénéficié d’entretien individuel alors que l’article 1 de la convention collective prévoit des entretiens individuels de carrière au minimum tous les deux ans.
S’agissant de la formation professionnelle, l’employeur justifie du fait que la formation de l’article R512-9 du code des assurances invoquée par M. [B] ne lui est pas applicable car il n’est ni responsable de bureau ni animateur d’un réseau ; en effet seul l’article R512-10 lui est applicable, de sorte que M. [B] devait être titulaire du niveau de capacité professionnelle II ‘ IAS qui peut être justifié par 3 voies :
-la possession d’un livret de stage de niveau II (150 heures minimum au sein d’une entreprise d’assurance, d’un organisme de formation ou d’un intermédiaire);
-une expérience professionnelle d’un an comme cadre ou deux ans comme salarié ou non salarié sur des fonctions de production ou de gestion de contrats d’assurance ou de capitalisation dans une entreprise d’assurance ou auprès d’un intermédiaire,
-la possession d’un diplôme, titre ou certificat mentionné sur une liste fixée par les articles A. 512-6 et A. 512-7 du Code des assurances.
Monsieur [B] avait acquis le niveau de capacité professionnelle II par son expérience professionnelle dès le 19 janvier 2017, peu importe que M. [S] lui ait présenté par erreur à la signature les livrets de niveau II et I.
Le grief tiré de l’absence de formation professionnelle obligatoire n’est donc pas fondé.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a indemnisé le salarié pour défaut de formation.
En revanche, il n’est pas contesté que M. [B] n’a jamais bénéficié d’entretien de carrière comme prévu par la convention collective, ni de délivrance de carte professionnelle ; l’employeur ne saurait se retrancher derrière l’absence de demande en ce sens du salarié alors que ces obligations lui incombent.
Privé d’entretien de carrière, M. [B] a subi un préjudice dans la mesure où il n’a pu faire valoir ses revendications en matière de classification notamment, ni en termes d’évolution. Ce préjudice sera réparé par l’allocation de la somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts, étant observé que M. [B] n’objective aucun préjudice concret à raison de la non délivrance de carte professionnelle.
Sur les frais professionnels :
M. [B] demande le remboursement de frais de réparation de 230 € afférents à la tablette tactile professionnelle, qu’il a restituée.
La société ne conteste pas la matérialité de la réparation ni le caractère professionnel de ces frais, mais estime qu’il fallait demander une autorisation préalable, ce que n’a pas fait M. [B].
Or, l’employeur ne justifie pas avoir porté à la connaissance du salarié cette prétendue pratique en vigueur dans l’entreprise, dont il a fait état dans un mail le 26 août 2019, alors que M. [B] avait demandé le remboursement des frais en juillet 2019.
Par conséquent, la société MCA sera condamnée, par infirmation du jugement déféré, à rembourser à M. [B] la somme de 230 € au titre des frais professionnels.
Sur l’avertissement du 31 juillet 2019 :
M. [B] s’est vu notifier un avertissement disciplinaire le 31 juillet 2019, pour avoir, le 29 juillet 2019, refusé d’appeler un interlocuteur dédié, Mme [E], salariée d’un centre d’appel marocain, après chaque prospection physique comme il lui avait été demandé par l’employeur le 26 juillet 2019, pour une mise en place effective le 29 juillet 2019.
M. [B] estime que l’employeur a exercé sur lui un contrôle exacerbé dont il a vainement demandé les explications, alors qu’il a expliqué à l’employeur par plusieurs mails dès le 29 juillet que Mme [E] l’appelait dix fois par jour et qu’il adressait tous les soirs son reporting ; il soutient que la société MCA a fait preuve de précipitation en lui adressant un avertissement dès le 31 juillet.
En effet, la cour constate à la lecture des échanges de mails entre les parties que la situation s’est tendue après le refus par M. [B] de signer un livret de formation comportant des mentions inexactes, en mai 2019, et que la société MCA a entendu exercer un contrôle exacerbé des tâches accomplies par M. [B], sans justifier du prétendu ‘effondrement de résultats’ qu’elle lui imputait pour changer ses méthodes de contrôle.
Ainsi, il apparaissait disproportionné de sanctionner le salarié pour avoir refusé d’appeler un interlocuteur, non salarié de la société MCA mais d’un centre d’appel, après chaque prospection ou visite pour lui décrire ses tâches, ce qui impliquait de nombreux appels par jour alors qu’il était astreint à un reporting écrit en parallèle, et qu’aucune mesure de ce genre ne lui avait été imposée en quatre ans de relations professionnelles.
Il n’est pas discuté que de telles mesures n’ont jamais été imposées à d’autres salariés de l’entreprise.
Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a prononcé l’annulation de l’avertissement et indemnisé M. [B] à hauteur de 500 €, cette somme étant de nature à réparer le préjudice subi.
Sur le harcèlement moral :
En application de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
lorsque survient un litige relatif à des faits de harcèlement au sens de l’article L 1152 – 1 du code du travail, le salarié présente, conformément à l’article L 1154 – 1 du code du travail, des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement ;
au vu de ces éléments, il appartient à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
En l’espèce, M. [B] soutient que la relation de travail s’est dégradée à partir de mars 2019, le jour où il a refusé de signer deux attestations de formations niveau I et II, de 150 heures chacune, au motif qu’il ne les avait pas réalisées dans leur intégralité.
Il soutient avoir été victime d’un harcèlement moral au sein de la société Samassur et invoque les faits suivants :
1) le retrait des responsabilités d’animateur des ventes en juin 2019, suite à son refus de signer le livret de formation antidaté, avec la demande de l’employeur qu’il présente sa démission :
la cour a reconnu à M. [B] l’exercice de fonctions de niveau B comme chef d’équipe et animateur des ventes ; ce retrait est effectivement concomitant au refus de signature d’un livret de formation présenté au salarié par M. [S], mais également au départ de celui-ci en juin 2019. A cette date, il est constant que l’équipe commerciale a été réorganisée, en confiant davantage de responsabilités à M. [N], mais en retirant certaines responsabilités à M. [B] en dehors de tout cadre contractuel. Les bulletins de salaire produits montrent en effet que M. [B] a toujours perçu des commissions sur ses objectifs jusqu’en juin 2019.
M. [B] produit de nombreux mails par lesquels il s’indignait vainement du retrait de ses fonctions d’animation.
En revanche, il ne ressort pas des éléments produits, autres que les propres mails de M. [B], que l’employeur lui ait ‘demandé de présenter sa démission’ ; en effet il ressort d’un échange du 6 juillet 2019 que M. [B] a évoqué une rupture conventionnelle, que l’employeur a refusé cette perspective et a répondu ‘je me suis permis de vous répondre que je ne souhaitais pas entrer dans une procédure de ce type mais que si vous vouliez vraiment partir je ne pouvais pas vous empêcher de démissionner’, ce qui montre que l’initiative ne vient pas de la société MCA.
2) le contrôle personnel et arbitraire de son activité : M. [B] se plaint de l’obligation pour la première fois d’établir des comptes-rendus critiquables de son activité incluant nom, code postal des prospects, heures de visite, kilométrage effectué, avec reporting journalier et synthèse hebdomadaire, augmentation exponentielle des demandes ; la cour constate en effet que de très nombreux mails ont été adressés chaque jour à M. [B] à compter du 3 juillet, avec des demandes de plus en plus insistantes et précises sur les faits et gestes du salarié durant son activité de prospection ;
3) le reproche de résultats insuffisants, sans jamais produire aucun chiffre à l’appui de cette affirmation, et l’absence de versement de primes à compter de juillet 2019 alors que M. [B] atteignait ses objectifs : ces faits sont établis dans la mesure où la société MCA ne produit aucune pièce de nature à établir qu’elle justifiait auprès de son salarié du chiffre d’affaires réalisé, et ce malgré ses demandes répétées par mails, l’absence de versement de toute prime à compter de juillet 2019 est également établi au regard des bulletins de paie produits ;
4) diverses entraves destinées à empêcher le salarié d’atteindre ses objectifs : absence de fourniture des fichiers de prospects, ou de numéros de prospects sur liste bloquée, modification des horaires et plannings du salarié y compris le samedi, absence d’indication des rendez-vous à effectuer dans la journée, suppression le 15 juillet 2019 de l’accès à l’intégralité des fonctions de son agenda électronique, suspension au mois d’août de l’accès à son compte, absence d’information des rendez-vous annulés, ajout en cours de journée de rendez-vous prévus, toutes les 30 mn, suppression de toute communication avec ses collègues, avec le comptable, et avec Mme [E], annulation de rendez-vous une heure avant, mesures de rétorsion comme le déblocage de contacts à prospecter en contrepartie d’un appel du salarié pour rendre compte, menaces et brimades, propos intimidants :
les mails produits montrent que, parmi cette liste de griefs, sont établies les modifications et annulations intempestives de rendez-vous, la suppression le 15 juillet 2019 de l’accès aux fonctions de son agenda électronique (onglets cotisation, calendrier vendeur), l’employeur répondant que cela était ‘normal’ et qu’une mise à jour des outils avait été faite, sans autre explication. M. [B] produit une photo de son écran d’ordinateur mentionnant à la page calendrier ‘votre compte est suspendu’ ; l’ajout en cours de journée de rendez-vous sur l’agenda électronique sans prévenir le salarié est également établi, pour les journées du 26 juillet et 26 août 2019 en particulier.
5) le refus de lui accorder des congés en juillet : ceci est établi par la réponse de l’employeur demandant au salarié de poser ses congés en août,
6) l’absence de communication de ses résultats malgré ses demandes, l’absence de validation de ses frais professionnels, les injonctions d’adresser ses notes de frais non plus par mail mais par courrier, tantôt à M. [N], tantôt au gérant : ces faits sont établis par les échanges de mails produits ;
7) l’absence de tout défraiement pour utilisation de son téléphone portable personnel et l’absence de remboursement des frais de réparation de la tablette professionnelle : ces faits ne sont pas contestés de l’employeur, et la cour a fait droit à la demande de remboursement des frais de réparation de la tablette du salarié ;
8) l’absence de délivrance des bulletins de paie depuis avril 2019 : M. [B] produit son mail de réclamation du 13 septembre 2019 ;
9) un avertissement injustifié le 31 juillet 2019 : la cour a effectivement annulé cet avertissement injustifié ;
10) l’altération de l’état de santé du salarié : ce fait est établi par la production des documents relatifs aux consultations médicales des 15 juillet et 25 septembre 2019.
La cour estime que les faits établis, parmi ceux examinés ci-dessus, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral à l’encontre de M. [B].
Il appartient donc à la société MCA de justifier que ces faits s’expliquent par des considérations objectives, étrangères à tout harcèlement.
Or, la cour estime que la société MCA ne satisfait pas à cette charge probatoire au regard des éléments produits.
En effet, elle affirme que le salarié a mal vécu le fait que l’employeur supprime les fonctions de chef d’équipe lors de la réorganisation du service commercial et donne une promotion à M. [N] comme animateur commercial, or au delà d’un ressenti subjectif, il est objectivement établi que M. [B] a été déclassé par le retrait de certaines responsabilités et le refus de lui reconnaître le niveau B alors qu’aucun motif légitime, tel une insuffisance par exemple, n’est établi par la société MCA.
La société MCA soutient encore que M. [B] n’a jamais été animateur des ventes or la cour a jugé l’inverse ; que le salarié n’a posé aucun problème durant 4 ans, mais qu’à la suite du conflit ayant opposé les parties en raison de la restructuration du service commercial, M. [B] s’est désinvesti et n’a plus honoré certains rendez-vous, de sorte qu’un contrôle a été mis en place face à la chute des résultats, or aucune pièce probante ne vient étayer cette baisse de résultats et ce désinvestissement.
L’employeur explique que le refus d’une demande de congés payés présentée le 2 juillet pour le 22 juillet n’est pas abusif, ce qui est exact compte tenu des délais exposés.
Il ajoute que le salarié a été convié à une réunion le 2 août 2019 pour lui présenter ses résultats, et qu’il a refusé d’y venir, or il ressort des échanges de mails qu’il est proposé le 25 juillet à M. [B] de se déplacer à [Localité 4] le 2 août, et donc de faire 600 km aller-retour (étant précisé qu’il n’était pas remboursé de ses frais des mois précédents), alors qu’il sollicitait la transmission de ses résultats par mail et que les parties échangeaient également par téléphone, de sorte que le refus réitéré de l’employeur d’adresser ses résultats au salarié alors qu’il les sollicitait depuis des mois est abusif.
En définitive, il résulte des éléments qui précèdent que les faits de harcèlement moral sont établis à l’encontre de M. [B], ainsi que l’ont retenu les premiers juges.
Il sera alloué à M. [B], par infirmation du jugement n’ayant pas indemnisé le salarié à ce titre, la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral.
Sur le manquement à l’obligation de sécurité :
M. [B] soutient que la société MCA a manqué à son obligation de sécurité à son égard car :
-la société n’a mis en place aucune enquête ni mesure alors qu’il se plaignait d’un harcèlement moral,
-il n’a jamais passé de visite médicale.
Il résulte en effet clairement des échanges de mails produits que M. [B] s’est plaint à compter du mois de juin 2019 du traitement qui lui était infligé et de ses conditions de travail dégradant son état de santé ; la société MCA n’a effectivement pris aucune mesure, autre qu’un mode de réponse incisif et un renforcement de son contrôle sur le salarié, jusqu’à ce qu’il consulte son médecin mi-juillet 2019 puis le 25 septembre 2019 pour état anxio-dépressif avec troubles du sommeil.
La cour estime toutefois que le préjudice issu de ce manquement est déjà réparé par l’allocation des dommages-intérêts pour harcèlement moral.
S’agissant de l’absence de visite médicale, l’employeur affirme péremptoirement ‘avoir fait les démarches lors de l’embauche’ de M. [B], sans justifier d’une quelconque visite ni du suivi médical de son salarié.
Cependant, le salarié qui ne justifie pas d’arrêts de travail ni de pathologies autres que celle prise en compte dans le cadre du harcèlement moral, ne fait pas la démonstration d’un préjudice distinct né de cette absence de visite médicale.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a indemnisé le salarié à ce titre.
Sur le licenciement pour faute grave :
Il appartient à la société Samassur qui a procédé au licenciement pour faute grave de M. [B] de rapporter la preuve de la faute grave qu’elle a invoquée à l’encontre de son salarié, étant rappelé que la faute grave se définit comme un manquement ou un ensemble de manquements qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; la cour examinera les motifs du licenciement énoncés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.
M. [B] a été licencié pour faute grave par courrier du 10 septembre 2019 motivé ainsi:
« Vous avez été embauché par la société Samassur Distribution le 19 janvier 2015 en qualité de conseiller commercial puis transféré auprès de la société Samassur le 1er janvier 2016, sans modification de vos fonctions.
En cette qualité, votre mission consiste à assurer la prospection commerciale dans votre secteur d’activité, en fonction de rendez-vous à domicile préalablement pris par des téléprospecteurs complétés par vos propres démarches de prospection sur la zone.
Depuis quelques mois, nous avons observé une baisse significative de vos résultats de prospection, ce qui nous a conduit à nous interroger sur leur organisation et leur efficacité.
Le 26 juillet dernier, nous vous avons donc demandé de contacter un interlocuteur dédié à l’issue de chaque prospection physique.
Vous avez toutefois refusé de suivre les instructions ce qui a justifié la notification d’un premier avertissement le 30 juillet 2019.
Malgré cette première sanction, votre comportement ne s ‘est nullement amélioré, bien au contraire, puisque nous avons à déplorer les manquements suivants :
malgré nos demandes et instructions, vous n’avez fourni aucune information quant aux visites du jeudi 8 août 2019 ce qui vient établir l’absence de toute prospection et activité durant cette journée, vous avez fourni des informations mensongères à plusieurs reprises :
-vous avez ainsi affirmé que vous auriez effectué des visites de prospection le 1er août auprès de Mme [D] à 12 heures, Mme [K] à 12h30 et Mme [H] à 13 heures, alors que ces personnes ont indiqué n’avoir reçu aucun commercial de l’entreprise,
-vous nous avez indiqué que Mme [R] aurait décalé son rendez vous du 1er au 6 août avant de l’annuler et ce alors qu’en réalité vous avez vous-même reporté le premier rendez-vous au dernier moment pour ne pas vous présenter au second sans en avertir au préalable la prospecte. Cette dernière, qui s’était rendue disponible pour ces deux dates, a manifesté son vif mécontentement,
-vous avez affirmé vous être présenté chez M. [V] le 5 août à 14 heures et que le prospect aurait refusé de vous rencontrer et ce alors
que ce dernier nous a affirmé qu’il n’était pas à son domicile à cette date.
Ainsi, il apparaît encore que vous avez délibérément menti afin de tenter de masquer l’absence de réalisation de démarches de prospection.
En outre, vous avez adopté un comportement particulièrement déplacé à l’égard de nos collaborateurs travaillant au sein de notre succursale marocaine. Vous avez ainsi demandé à Mesdames [M] [E] (responsable des plannings commerciaux) et [X] [O] (chargée des plannings commerciaux) de rédiger un mail comportant de fausses affirmations.
Face à leur refus, vous n’avez pas hésité à les insulter, traitant Mme [E] de «clocharde » et « blédarde » et à les dénigrer, en faisant état auprès de Mme [E] de son salaire à 300 € et accusant Madame [O] de corruption.
Enfin, vous avez également colporté auprès d’autres salariés de l’entreprise, des informations malveillantes erronées afin de les inciter à quitter leurs fonctions. Vous avez indiqué à Messieurs [J] et [G] que l’entreprise était sur le point de faire faillite à la suite de sanctions de l’ACPR ce qui est parfaitement inexact.
Votre comportement et vos manquements mettent en cause la bonne marche de l’entreprise’.
Ainsi, la société Samassur reproche à M. [B] une aggravation de son comportement dans le courant du mois d’août, un refus de faire un retour de ses activités, le fait de fournir des informations mensongères et d’avoir un comportement inapproprié à l’égard de ses collègues, allant jusqu’à les insulter ou à les inciter à quitter l’entreprise.
Toutefois, il a été vu précédemment que les reproches formulés à l’encontre de M. [B] dans la lettre de licenciement, et que celui-ci conteste, s’inscrivent dans un contexte de harcèlement moral à l’encontre du salarié, auquel il était imposé de manière soudaine et pressante une obligation de rendre compte de son activité heure par heure, rendez-vous par rendez-vous à Mme [E] qui l’appelait des dizaines de fois par jour, et ce sans répondre à ses questions légitimes relatives à ses résultats, à sa rémunération variable en chute, à son retrait de responsabilités et à sa classification conventionnelle.
Dès lors, la cour juge, comme le conseil de prud’hommes, que le licenciement de M. [B] est nul.
M. [B] était âgé de 31 ans et avait acquis 4 ans d’ancienneté lors de son licenciement, il percevait un salaire moyen (moyenne des trois derniers mois complets travaillés) de 2473 € bruts, et justifie d’une inscription à Pôle emploi jusqu’au 14 juillet 2020.
C’est par une juste appréciation des éléments de la cause que le conseil de prud’hommes a alloué à M. [B] la somme de 14 838 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul.
Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a alloué à M. [B] les sommes suivantes, dont le calcul n’est pas remis en cause par la société MCA :
-1 089,15 € bruts au titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire,
– 108 € bruts au titre des congés payés sur mise à pied,
– 4 946 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 494,60 € bruts au titre des congés payés sur préavis,
– 3 476 € à titre d’indemnité de licenciement, ladite indemnité étant calculée sur la moyenne des 12 derniers mois de salaire, plus favorable que la moyenne des 3 derniers mois.
Il sera fait application d’office des dispositions de l’article L1235-4 du code du travail à l’égard de l’employeur, dans la limite de trois mois d’indemnités chômage, par confirmation du jugement déféré.
Sur le surplus des demandes :
La société MCA, succombante, sera condamnée aux dépens de première instance par confirmation du jugement déféré, ainsi qu’aux dépens d’appel et à payer à M. [B] la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en appel, cette somme s’ajoutant à celle allouée à M. [B] en première instance sur le même fondement.