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30 juin 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
22/00096
ARRÊT DU
30 Juin 2023
N° 939/23
N° RG 22/00096 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UCHI
MLBR/VM
AJ
Jugement du
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BÉTHUNE
en date du
27 Octobre 2021
(RG F 19/00255 -section 2)
GROSSE :
aux avocats
le 30 Juin 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
– Prud’Hommes-
APPELANT :
M. [E] [J]
[Adresse 6]
[Localité 4]
représenté par Me Elodie HANNOIR, avocat au barreau de BÉTHUNE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 591780022021012996 du 23/12/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de DOUAI)
INTIMÉS :
S.E.L.A.R.L [S]-ARRAS ET ASSOCIES
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Brigitte INGELAERE, avocat au barreau de BÉTHUNE
CGEA D'[Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Adeline HERMARY, avocat au barreau de BÉTHUNE
DÉBATS : à l’audience publique du 02 Mai 2023
Tenue par Marie LE BRAS
magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Séverine STIEVENARD
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Marie LE BRAS
: PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Alain MOUYSSET
: CONSEILLER
Patrick SENDRAL
: CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Juin 2023,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Valérie DOIZE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 11 avril 2023
EXPOSÉ DU LITIGE’:
M. [E] [J] a été embauché par la SARL Casa Résine International dans le cadre d’un contrat à durée déterminée conclu du 14 avril au 31 juillet 2017 en qualité d’agent de service AS1 B. À compter du 31 juillet 2017, la relation de travail s’est poursuivie dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée.
Le 27 novembre 2017, M. [J] a fait l’objet d’un avertissement en raison d’une absence injustifiée que ce dernier a contesté.
Le 16 avril 2018, le salarié a fait l’objet d’un second avertissement pour abandon de poste, sans autorisation préalable, sanction également contestée par le salarié.
M. [J] a été placé en arrêt maladie du 13 avril au 14 mai 2018, puis à compter du 16 mai 2018.
Lors de la visite médicale de reprise en date du 18 septembre 2018, le médecin du travail a déclaré le salarié inapte à la reprise de son ancien poste de travail mais apte à un travail ‘sans manutention de charges supérieures à 20 kg, sans position statique prolongée (éviter les trajets routiers >1 heure), sans travail nécessitant une flexion antérieure du tronc, ni la position accroupie ou à genoux prolongés’. Il a précisé que l’état de santé est compatible avec la poursuite d’une formation respectant les préconisations qu’il a émises.
Le 21 septembre 2018, la société Casa Résine International a indiqué au salarié ne pas être en mesure de procéder à son reclassement. Par lettre recommandée du 9 octobre 2018, M. [J] a été licencié pour inaptitude avec impossibilité de reclassement.
Par requête du 9 août 2019, M. [J] a saisi le conseil de prud’hommes de Béthune afin de contester les sanctions disciplinaires dont il a fait l’objet ainsi que son licenciement et d’obtenir diverses indemnités liées à l’exécution et à la rupture du contrat.
La société Casa Résine International a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d’Arras rendu le 27 novembre 2020, la SELARL [S] Aras et Associés ayant été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.
Par jugement contradictoire du 27 octobre 2021, le conseil de prud’hommes de Béthune a’:
– jugé les avertissements justifiés,
– jugé la rupture du contrat de travail non abusive,
– débouté M. [J] de l’ensemble de ses demandes,
– débouté la partie défenderesse de ses demandes reconventionnelles,
– laissé les dépens à la charge de M. [J].
Par déclaration reçue au greffe le 21 janvier 2022, M. [J] a interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté la partie défenderesse de ses demandes reconventionnelles.
Dans ses dernières conclusions déposées le 7 avril 2023 auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, M. [J] demande à la cour de :
– infirmer le jugement en ses dispositions critiquées et statuant à nouveau,
– juger nul et de nul effet les avertissements en date des 27 novembre 2017 et 16 avril 2018,
– juger abusive la rupture du contrat de travail,
– fixer sa créance dans la liquidation judiciaire de la société Casa Résine International aux sommes suivantes’:
*1 000 euros nets à titre de dommages-intérêts au titre des avertissements,
*5 817,81 euros bruts à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, outre 581,78 euros bruts au titre des congés payés y afférents,
*2 001,29 euros nets à titre d’indemnité compensatrice des repos compensateurs,
*110,28 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de repos hebdomadaire,
*800 euros nets à titre de dommages-intérêts pour non-respect du repos hebdomadaire,
*2 103,08 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 210,31 euros bruts au titre des congés payés y afférents,
*135,23 euros nets à titre de rappel d’indemnité de licenciement,
*4 206,16 euros nets à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,
*1 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité de résultat,
– condamner Me [S] ès-qualités à remettre une attestation pôle emploi, un certificat de travail et un bulletin de paie conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour et par document à compter du 1er jour du mois suivant la notification de la décision à intervenir, et dire que «’le conseil’» se réserve le droit de liquider l’astreinte ainsi fixée,
– condamner Me [S] aux dépens,
– ordonner que le jugement à intervenir soit opposable au CGEA d'[Localité 5],
– débouter les intimés de l’ensemble de leurs demandes.
Dans ses dernières conclusions déposées le 9 juin 2022 auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, reprises entièrement dans ses conclusions du 28 avril 2023 postérieures à la clôture, Me [S], ès-qualités demande à la cour de confirmer le jugement sauf en ce qui concerne la demande reconventionnelle relative aux dommages-intérêts pour procédure abusive, outre l’article 700 du code de procédure civile, et y ajoutant’:
– débouter M. [J] de l’ensemble de ses demandes,
– condamner reconventionnellement M. [J] à lui payer en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Casa Résine International la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, outre la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de le condamner aux dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées le 10 juin 2022 auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, le CGEA d'[Localité 5] demande à la cour de confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions, de débouter M. [J] de l’ensemble de ses demandes, et subsidiairement de’:
– déclarer la décision opposable au CGEA AGS d'[Localité 5] en qualité de gestionnaire de l’AGS dans les limites prévues aux articles L. 3253-1 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
En tout état de cause et si l’opposabilité à l’AGS est prononcée,
-dire et juger que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire et justifications par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,
– condamner M. [J] aux entiers frais et dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 avril 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION’:
– sur les 2 avertissements :
M. [J] sollicite l’annulation des avertissements prononcés à son encontre les 27 novembre 2017 et 16 avril 2018 en faisant valoir d’une part qu’il n’est pas justifié par l’employeur que cette sanction est prévue par le règlement intérieur de l’entreprise, et d’autre part, que les griefs ne sont pas fondés.
En réponse, les intimés font en substance valoir que M. [J] n’a jamais transmis à l’employeur de justificatif concernant son absence sur le chantier le dimanche 26 novembre 2017 et son départ en cours de matinée sans autorisation préalable le 12 avril 2018, et qu’il ne justifie d’aucun préjudice résultant des 2 sanctions litigieuses.
Sur ce,
M. [J] fait justement remarquer que la société Casa Resine International ayant déclaré dans l’attestation Pôle Emploi avoir un effectif de 21 salariés, elle était tenue d’établir un règlement intérieur conformément aux dispositions de l’article L. 1311-2 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du 22 mai 2019 et ne pouvait donc prononcer à son encontre qu’une des sanctions disciplinaires, à l’exception du licenciement, prévues audit règlement.
Or, en réponse au moyen adverse, Maître [S], ès qualités, ni ne prétend, ni ne justifie de l’existence d’un règlement intérieur au sein de la société Casa Resine International d’une part, et des sanctions disciplinaires qui y figurent, notamment l’avertissement, d’autre part.
Pour ce seul motif et sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la faute était caractérisée, il convient, par voie d’infirmation, d’annuler les avertissements prononcés le 27 novembre 2017 et 16 avril 2018 à l’encontre de M. [J].
Le prononcé de ces deux sanctions irrégulières étant susceptible d’avoir une incidence sur son avenir professionnel, il en est nécessairement résulté pour le salarié un préjudice moral dont la réparation sera fixée à une somme globale de 600 euros.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
– sur les demandes au titre de la durée du travail et des repos :
En vertu de l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande de rappel de salaire, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires.
* sur les heures supplémentaires :
Faisant valoir qu’il travaillait 10 à 11 heures par jour, sans repos hebdomadaire régulier, M. [J] prétend qu’il n’a pas été entièrement rémunéré pour les heures supplémentaires effectuées et sollicite à ce titre au titre de l’année 2017 un rappel de salaire de 5 817,81 euros, outre les congés payés y afférents, dont il détaille le calcul par un décompte produit en sa pièce 14 sur lequel il fait mention de 493 heures supplémentaires non payées exécutées entre le 24 avril 2017 et le 29 décembre 2017.
Il produit également en sa pièce 13 établie par ses soins, le détail de ses jours de travail au cours de cette même période, avec l’indication des heures de début et fin de travail, y compris certains samedis et dimanches .
Il aurait ainsi très régulièrement travaillé plus de 50 heures chaque semaine, parfois même 70 heures.
Ces éléments sont suffisamment détaillés et précis pour permettre au liquidateur judiciaire de la société Casa Resine International d’y répondre.
Pour soutenir que M. [J] a été rémunéré pour l’ensemble des heures supplémentaires réalisées, le liquidateur judiciaire produit, outre les bulletins de salaire du salarié, les fiches ‘de pointage’ ainsi que les rapports de géolocalisation du véhicule utilisé par le salarié, en faisant valoir que les heures indiquées dans les pièces adverses ne correspondent pas à celles relevées dans ces différents documents.
Il résulte des bulletins de salaire que M. [J] n’a pas été rémunéré au titre d’heures supplémentaires excédant la 39 ème heure hebdomadaire.
Si l’appelant fait observer à raison qu’en l’absence d’indication des débuts et fins des journées de travail et de la durée journalière accomplie sur les fiches de ‘pointage’, ces documents sont insuffisants à contredire entièrement le décompte des heures supplémentaires alléguées, il résulte cependant de leur analyse et de celle des plannings des mois de mai et juin 2017 que certains jours en ce compris certains dimanches n’ont pas été travaillés comme il le prétend, tels que notamment le 25 juin 2017, le 6 août 2017, le week-end du 2/3 septembre 2017, le 10 novembre 2017 ou encore du 23 au 29 décembre 2017 pendant laquelle il a été déclaré en arrêt maladie (mention cohérente sur bulletin de salaire).
Même s’ils en ressort pour certains jours des heures de retour à l’entreprise plus tôt que celles alléguées par M. [J], sont toutefois inopérants à écarter totalement l’exécution d’heures supplémentaires, les rapports de géolocalisation du véhicule de l’entreprise dans la mesure où ils portent uniquement sur les mois d’avril à juin 2017.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, il sera retenu que M. [J] a exécuté des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées.
Après déduction des jours non travaillés tels que recensés dans les fiches produites par l’employeur, il convient de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Casa Resine International, la créance de M. [J] à ce titre à la somme de 4 137,83 euros, outre 413,78 euros de congés payés y afférents.
* sur le non-respect du repos hebdomadaire :
M. [J] dénonce le non-respect par son employeur de la durée minimale de repos hebdomadaire, estimant n’avoir bénéficié que de 7 jours de repos.
L’intimée conteste ce manquement mais ne produit aucune pièce en dehors des fiches de pointage évoquées plus haut, pour justifier, la charge de la preuve lui incombant, que l’employeur a strictement respecté la législation et la convention collective en la matière.
Il ressort au contraire des fiches susvisées qu’à 6 reprises, M. [J] n’a jamais bénéficié d’un minimum de 32 heures de repos hebdomadaire comme prévu par la convention collective, travaillant alors également le samedi et le dimanche sans autre jour de repos dans la semaine précédente.
Ce manquement répété a nécessairement causé au salarié un préjudice qui sera réparé à hauteur d’une somme de 800 euros de dommages et intérêts.
Par ailleurs, il ne résulte ni des bulletins de salaire, ni du reçu du solde de tout compte que la société Casa Resine International a versé à M. [J] l’indemnité de repos prévue à l’article 6.4.4 de la convention collective lorsque le temps de repos n’atteint pas 35 heures consécutives.
Sachant que l’intéressé n’a pas bénéficié de repos hebdomadaire à 6 reprises sur l’ensemble de la période de travail, sa créance au titre de l’indemnité conventionnelle de repos sera fixée à la somme de 85,93 euros, outre les congés payés y afférents.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
* sur les repos compensateurs obligatoires :
M. [J] prétend avoir exécuté au cours de la relation de travail 545,69 heures supplémentaires, soit un nombre excédant largement le contingent annuel fixé par la convention collective à 190 heures par an.
Il résulte de l’analyse faite précédemment des fiches de travail et des bulletins de salaire produites par l’intimée qu’au cours de la relation de travail, M. [J] a effectué un nombre d’heures supplémentaires qui excèdent le contingent annuel de 190 heures mais dans un proportion moindre que celle alléguée, compte tenu des motifs retenus plus haut.
Sa créance au titre des repos compensateurs sera fixée au passif de la procédure collective à la somme de 1 365,49 euros. Le jugement sera infirmé en ce sens.
– sur l’obligation de reclassement :
M. [J] fait grief au jugement de ne pas avoir retenu que son employeur avait manqué à son obligation de reclassement à la suite de l’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail alors pourtant que le liquidateur judiciaire ne produit aucun pièce pour justifier des recherches faites par la société Casa Resine International.
Il dénonce également l’absence de consultation des représentants du personnel.
Maître [S] explique en réponse que l’effectif de l’entreprise se composant principalement de postes d’agents de service et chef d’équipe (18 salariés sur 23) qui ne répondaient pas aux préconisations du médecin du travail en raison des contraintes physiques qu’ils impliquent, la société Casa Resine International ne pouvait que constater l’impossibilité de reclasser M. [J] au sein de l’entreprise.
Sur ce,
Selon l’article L. 1226-2 du code du travail, lorsque que le salarié victime d’une maladie ou d’accident non professionnel, est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient, et ce, en prenant en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise. L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.
Aux termes de l’article L. 1226-2-1 du même code, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions susvisées, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
En l’espèce, le médecin du travail a rendu un avis d’inaptitude en émettant cependant des préconisations en vue du reclassement de M. [J], indiquant que ‘l’état de santé constaté permet la réalisation d’un travail sans manutention de charge supérieure à 20 kg, sans position statique prolongée (éviter les trajets routiers supérieurs à 1 heure), pas de travail nécessitant une flexion antérieure du tronc, ni la position accroupie ou à genoux prolongée. L’état de santé est compatible avec la poursuite d’une formation respectant les préconisations émises.’
Ainsi, la société Casa Resine International était tenue d’effectuer une recherche de reclassement en interne, sauf à justifier de l’absence de poste à proposer à M. [J].
Or, l’intimé ne produit aucune pièce en ce sens, notamment le détail des postes au sein de l’entreprise et le registre du personnel, la déclaration de la société Casa Resine International dans le courrier adressé à M. [J] pour l’informer de l’impossibilité de le reclasser en interne n’ayant à elle seule aucune valeur probante.
Dès lors que Maître [S] ne rapporte pas la preuve de l’impossibilité de reclasser M. [J] au jour de son licenciement, celui-ci est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur la base d’un salaire moyen de 2 103,08 euros tenant compte du rappel de salaire pour ses heures supplémentaires, M. [J] sollicite la fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société Casa Resine International des sommes suivantes :
– 2 103,08 euros d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, en application de la convention collective,
– un reliquat d’indemnité de licenciement de 135,23 euros,
– 4 206,16 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du caractère abusif de son licenciement, en faisant valoir qu’il a eu une longue période de chômage avant de retrouver des emplois précaires et qu’il a été reconnu travailleur handicapé.
Au vu du salaire moyen sur les 12 mois entiers d’activité antérieurs à son arrêt maladie, moindre que celui allégué malgré la prise en compte des différentes créances salariales qui lui ont été accordées, il convient de limiter à un montant de 1908,79 euros l’indemnité compensatrice de préavis à laquelle il a droit en raison de l’absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, outre 190,87 euros de congés payés y afférents.
Au vu du montant de l’indemnité de licenciement déjà perçue, M. [J] est également en droit de percevoir un reliquat de 86,65 euros
En application de l’article L. 1235-3 du code du travail, il convient par ailleurs, au vu de la faible ancienneté du salarié (moins de 2 ans) et de son âge (37 ans) mais également de ses difficultés à retrouver un emploi stable, illustrées par les nombreuses et courtes missions d’interim qu’il a effectuées après son licenciement et sa période de chômage de fixer le montant de la réparation du préjudice que la perte injustifiée de son emploi lui a causé, à un montant de 2 864 euros.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
– sur le manquement à l’obligation de sécurité :
M. [J] dénonce le manquement de son employeur à son obligation de sécurité en faisant valoir qu’il n’a reçu aucune formation adéquate à l’utilisation de certains produits toxiques et n’a pas bénéficié d’équipements de protection individuelle en dépit de ses demandes réitérées, ni de visite médicale d’embauche. Il allègue d’un préjudice financier et moral qu’il évalue à 1000 euros.
A supposer même que la société Casa Resine International ait manqué à son obligation de sécurité, notamment en ne proposant pas de formation adaptée à M. [J], ni visite médicale d’embauche, des salariés ayant en revanche attesté qu’ils bénéficiaient tous d’équipement de protection individuelle, force est de constater que M. [J] ne produit aucune pièce pour établir la réalité du préjudice qui en serait résulté, évoquant ses demandes réitérées concernant les équipements de protection, sans élément pour étayer ses dires.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté de sa demande indemnitaire de ce chef.
– sur les demandes accessoires :
Au vu de ce qui a été précédemment statué, il est enjoint à Maître [S], ès qualités, de remettre à M. [J] dans un délai d’un mois à compter de la signification de l’arrêt, un bulletin de salaire récapitulatif, une attestation pôle emploi et un certificat de travail rectifiés conformément aux dispositions du présent arrêt. Il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte.
Le présent arrêt sera par ailleurs opposable à l’UNEDIC AGS CGEA d'[Localité 5] dans la limite de la garantie légale et des plafonds applicables selon les dispositions des articles L.3253-6 et suivants et de l’article D. 3253-5 du code du travail.
Au vu de ce qui précède, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté Me [S] de sa demande sur le fondements de l’article 32-1 du code de procédure civile, M. [J] ayant été accueilli en ses principales demandes, ainsi qu’en ses dispositions sur les frais irrépétibles.
Le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens de première instance que Maître [S], ès qualités, devra supporter. Il en sera de même des dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant par arrêt contradictoire,
INFIRME le jugement entrepris en date du 27 octobre 2021 en ses dispositions critiquées sauf en celles relatives aux frais irrépétibles de première instance et en celles déboutant M. [E] [J] de sa demande au titre du manquement à l’obligation de sécurité ;
statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
ANNULE les avertissements des 27 novembre 2017 et 16 avril 2018 prononcés à l’encontre de M. [E] [J] ;
FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la société Casa Resine International, les créances de M. [E] [J] à hauteur des sommes suivantes :
– 600 euros de dommages et intérêts pour les avertissements injustifiés,
– 4 083,83 euros au titre des heures supplémentaires, outre 4 08,38 euros de congés payés y afférents,
– 800 euros de dommages et intérêts pour le non-respect de son droit au repos hebdomadaire,
– 85,93 euros euros au titre de l’indemnité conventionnelle de repos, outre 8,59 euros de congés payés y afférents,
– 1 365,49 euros à titre d’indemnité de repos compensateur,
– 1908,79 euros d’indemnité compensatrice de préavis, outre 190,87 euros de congés payés y afférents,
– 86,65 euros de reliquat d’indemnité de licenciement,
– 2 864 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
DÉCLARE l’arrêt opposable l’Unedic Délégation AGS CGEA d'[Localité 5] dans la limite de la garantie légale et des plafonds applicables selon les dispositions des articles L.3253-6 et suivants et l’article D. 3253-5 du code du travail ;
ORDONNE à Maître [S] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Casa Resine International, de transmettre à M. [E] [J] dans un délai d’un mois à compter de la signification de l’arrêt, un bulletin de salaire récapitulatif, une attestation pôle emploi et un certificat de travail rectifiés conformément aux présentes dispositions ;
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;
DIT que Maître [S] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Casa Resine International supportera les dépens d’appel.
LE GREFFIER
Valérie DOIZE
LE PRÉSIDENT
Marie LE BRAS