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23 juin 2023
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
19/08511
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-3
ARRÊT AU FOND
DU 23 JUIN 2023
N° 2023/ 126
RG 19/08511
N° Portalis DBVB-V-B7D-BEKRD
[R] [V]
C/
S.A.S. SAINT TROPEZ PARCS ET JARDINS
Copie exécutoire délivrée le 23 Juin 2023 à :
– Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON
– Me Laetitia LUNARDELLI, avocat au barreau de TOULON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARSEILLE en date du 13 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00410.
APPELANT
Monsieur [R] [V], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON
INTIMEE
S.A.S. SAINT TROPEZ PARCS ET JARDINS, demeurant [Adresse 1] / FRANCE
représentée par Me Laetitia LUNARDELLI de la SARL CABINET IMBERT REBOUL, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant
Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Juin 2023, délibéré prorogé en raison de la survenance d’une difficulté dans la mise en oeuvre de la décision au 23 Juin 2023.
ARRÊT
CONTRADICTOIRE,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Juin 2023
Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
M. [R] [V] a été engagé selon contrat à durée indéterminée à compter du 1er avril 1999 par la société Saint Tropez Parcs et Jardins, en qualité d’ouvrier paysagiste.
La convention collective nationale applicable était celle des entreprises paysagistes et de reboisement.
Au dernier état de la relation contractuelle, la rémunération mensuelle brute du salarié était de 2 739 euros.
M. [V] était convoqué le 29 mars 2016 à un entretien préalable à une mesure de licenciement fixé au 8 avril 2016 avec mise à pied conservatoire. Il était licencié pour faute grave par courrier du 14 avril 2016.
Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre, M. [V] saisissait le 26 février 2018 conseil de prud’hommes de Marseille en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement d’indemnités diverses.
Par jugement du 13 décembre 2018 le conseil de prud’hommes a statué comme suit :
« Condamne la SA Saint Tropez Parcs et Jardins à payer à Monsieur [R] [V], les sommes suivantes:
– 5 478 € (cinq mille quatre cent soixante dix huit euros) au titre de l’indemnité de préavis ;
– 548 € (cinq cent quarante huit euros) au titre de l’indemnité de licenciement ;
– 1 000 € (mille euros) au titre de1’article 700 du Code de Procédure Civile.
Déboute Monsieur [V] [R] du surplus de ses demandes.
Déboute la SA Saint Tropez Parcs et Jardins de sa demande reconventionnelle.
Condamne la SA Saint Tropez Parcs et Jardins aux entiers dépens».
Par acte du 24 mai 2019, le conseil du salarié a interjeté appel de cette décision.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 17 février 2023, M. [V] demande à la cour de :
« Infirmer le jugement dont appel dans toutes ses dispositions à l’exception de celle prononçant condamnation de la société Saint Tropez Parcs et Jardins à payer à M [V] [R] l’indemnité compensatrice de préavis et une somme de 1000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile de 1ère instance.
Juger illicite le dispositif de géolocalisation mis en place par la société Saint Tropez Parcs et Jardins.
Ecarter des débats la pièce 9 adverse.
Juger que le licenciement de M [V] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Condamner la société Saint Tropez Parcs et Jardins à payer à M [V] [R] les sommes suivantes:
– 7330.82 € au titre du rappel de salaires sur les heures supplémentaires réalisées
– 733.08 € au titre des congés payés sur rappel de salaires sur les heures supplémentaires réalisées
– 16434 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l’article L8223-1 du code du travail
– 1369.50 € au titre du rappel de salaires sur mise à pied conservatoire du 29 mars au 14 avril 2016
– 136.95 € au titre des congés payés sur mise à pied conservatoire
– 547.8 € au titre des congés payés sur préavis
– 11863 € au titre de l’indemnité de licenciement
– 54 780 € au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Ordonner la remise des documents rectifiés sous astreinte de 100 € par jour de retard soit :
– Bulletins de salaires
– Attestation Pôle Emploi
Condamner la société Saint Tropez Parcs et Jardins au paiement de la somme de 4 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens ».
Dans ses dernières écritures communiquées au greffe par voie électronique le 28 octobre 2019, la société demande à la cour de :
« Débouter Monsieur [V] de son appel et le dire et juger comme particulièrement mal fondé,
Recevoir la société Saint Tropez Parcs et Jardins en son appel incident,
En conséquence,
Réformer le jugement du Conseil des Prud’hommes de Marseille en date du 13 décembre 2018 en ce qu’il n’a pas retenu la faute grave de Monsieur [V] et condamne la société à lui verser les sommes de 5478 euros au titre de l’indemnité de préavis et 548 euros au titre de l’indemnité de licenciement,
Confirmer le jugement du Conseil des Prud’hommes de Marseille en date du 13 décembre 2018 en ce qu’il a retenu à minima une cause réelle et sérieuse au licenciement de Monsieur [V] et déboute le salarie de ses demandes à titre de dommages et intérêts.
En conséquence,
Juger que le dispositif de géolocalisation des véhicules de la société mis en place par la société Saint Tropez Parcs et Jardins est parfaitement licite,
Juger que le licenciement de Monsieur [V] repose bien sur une faute grave,
Juger que Monsieur [V] a été rempli de ses droits en matière d’heures supplémentaires
En Conséquence
Débouter Monsieur [V] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
Le condamner à la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ».
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs écritures susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le licenciement
1- sur le bien fondé du licenciement
En vertu des dispositions de l’article L.1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur ; la motivation de cette lettre fixe les limites du litige.
En l’espèce, la lettre de licenciement était libellée dans les termes suivants :
« Je vous notifie par la présente votre licenciement pour faute grave, pour les motifs qui vous ont été exposés au cours de cet entretien et qui vous sont rappelés ci-dessous.
Vous êtes embauché au sein de la société ST Tropez PARCS ET JARDINS depuis le 1er avril 1999 et occupez le poste d’ouvrier paysagiste hautement qualifié.
Comme vous le savez, les chefs de chantier remplissent chaque jour des fiches sur lesquelles ils notent les heures auxquelles ils se sont rendus sur les chantiers, ainsi que leurs observations.
Au regard de ces fiches, j’ai pu constater que vous ne respectiez pas vos heures de travail, puisque:
– Le 5 février 2016, Monsieur [A] [L], chef de chantier, s’est rendu à 8 heures sur le chantier SUBILIA sur lequel vous étiez affecté, et a noté que vous étiez absent alors même que votre journée de travail débute à 8 heures,
– Le 9 février 2016, Monsieur [A] [L] a de nouveau noté votre absence sur le chantier SUBILIA pendant toute la durée de sa présence, soit de 8h à 8h30,
– Le 17 février 2016, Monsieur [O] [Z], a quant à lui noté votre absence à son arrivée à 15h sur le chantier, et jusqu’à son départ à l5h30.
Par ailleurs, j’ai également fait le constat de vos retards répétitifs et absences sur les chantiers via les relevés du système de géolocalisation dont est équipé votre véhicule de service.
Vous bénéficiez, en effet, dans le cadre de l’exercice de vos fonctions, d’un véhicule de service (immatriculé 155-ATX-83) dont l’utilisation est strictement réservée à des fins professionnelles.
Tel que vous en avez été informé, et dans un souci d’amélioration des conditions de travail des salariés et de développement de l’entreprise, les véhicules de service sont dotés d’un système de géolocalisation, qui a fait l’objet d’une déclaration préalable a la CNIL et dont les finalités sont les suivantes :
– Permettre à l’entreprise de savoir ou se trouvent les véhicules de la société en temps réel afin d’optimiser le planning et de respecter la sectorisation,
– Diminuer les kilomètres parcourus pour faire des économies de carburant, réduire l’empreinte carbone et réduire l’entretien des véhicules,
– Superviser la conduite des chauffeurs pour les aider à diminuer leur consommation de carburant,
– Orienter le véhicule le plus proche lors d’une demande d’intervention urgente,
– Informer les clients et leur confirmer, lorsqu’ils en font la demande, l’heure d’arrivée du salarié missionné sans avoir à contacter ce dernier,
– Réorganiser les interventions en cas de modification de planning,
– Justifier de l’empreinte carbone, par trajet et par client, comme cela est imposé par l’arrêté du 10 avril 2012,
– Améliorer le suivi des marchandises,
– Lutter contre le vol des véhicules,
– Améliorer le suivi de l’activité des salariés itinérants en permettant d’établir leur temps
de travail.
Le système de géolocalisation a donc pour finalité, notamment, le suivi du temps de travail des salariés.
Les relevés de géolocalisation de votre véhicule ont confirmé le fait que vous ne respectiez pas vos horaires de travail, puisqu’il en ressort les faits suivants :
– Le 24 février 2016, vous êtes arrivé sur le chantier à 10h au lieu de 8h,
– Le 26 février 2016, vous êtes arrivé à 9hl8 au lieu de 8h, et êtes parti à 15h24 au lieu de 16h,
– Le 01 mars 2016, vous avez quitté votre lieu de travail à 16h11 au lieu de 17h,
– Le 09 mars 2016, vous avez quitté votre lieu de travail à l6h06 au lieu de 17h,
– Le 17 mars 2016, vous êtes parti à 15h56 au lieu de 17h,
– Le l8 mars 2016, vous êtes parti à l6h24 au lieu de 17h.
Ces faits sont d’ailleurs corroborés par les fiches remplies par les chefs de chantier de la société
– Le 24 février 2016, Monsieur [A] [L] s’est rendu sur le chantier sur lequel vous étiez affecté, le chantier SUBILIA, et a constaté votre absence à son arrivée à 8 heures et jusqu’à son départ à 9 heures,
Le 1 mars 2016, Monsieur [O] [Z] s’est rendu sur votre chantier à 16h30 et a constaté que vous étiez déjà parti.
Ainsi, vous vous êtes permis d’arriver en retard et de quitter votre lieu de travail avant la fin de vos heures de travail, et ce à de nombreuses reprises et parfois plusieurs fois dans la même semaine, sans aucune autorisation, ni même sans en avertir la Direction, ce qui caractérise un comportement déloyal et malveillant voire malhonnête puisque vous êtes rémunéré pour travailler un certain nombre d’heures mensuelles et non pour vaquer a vos occupations personnelles.
Ces faits sont totalement inadmissibles.
De surcroît, alors que vous êtes tenu de prendre votre déjeuner sur votre lieu de travail, vous avez quitté le chantier le 9 mars 2016 pendant toute la pause déjeuner, sans aucune autorisation. En effet, Monsieur [O] [Z] a noté sur sa fiche que vous étiez absent pendant toute la durée de sa présence sur le chantier de 13h à 13h30. En outre, les relevés de géolocalisation de votre véhicule de service, font apparaître que vous avez quitté le chantier à l1h48 et n’êtes revenu qu’à l3h57.
De tels agissements, qui plus est répétés, constituent un grave manquement à vos obligations professionnelles et entraînent, an surplus, une désorganisation du service, puisque votre absence ralentit inéluctablement l’avancement des chantiers.
En outre, ces faits reflètent un grave manque de sérieux et de professionnalisme de votre part que je ne saurai tolérer au sein de l’entreprise.
Par ailleurs, j’ai récemment appris que vous utilisiez votre véhicule de service à titre privé, alors même que cela est strictement interdit.
Au cours de l’entretien préalable, vous avez reconnu ces faits et vous êtes contenté d’indiquer que vous aviez plusieurs domiciles, ce qui justifie selon vous vos déplacements en dehors de vos heures de travail et à des fins personnelles.
Or, peu importe que vous ayez plusieurs domiciles, ce dont vous ne m’avez d’ailleurs jamais informée, vous n’avez pas à faire un usage privé de votre véhicule de service. Celui-ci ne peut être utilisé que dans le cadre de vos fonctions.
En agissant de la sorte, vous avez, une nouvelle fois, manqué à vos obligations professionnelles. Les faits fautifs ainsi exposés sont d’une gravité telle qu’ils rendent impossible votre maintien au sein de l’entreprise. En conséquence, je suis contrainte de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave ».
Le salarié conteste les griefs et estime qu’il ne pouvait être à 8 h sur le chantier puisqu’il s’agissait de l’heure de départ du siège de l’entreprise. Il prétend qu’il pointait à 7h30 au siège comme tous les autres salariés et soutient que les fiches de contrôle de chantier mentionnent une amplitude horaire sur chantier de 8 h à 17 h avec un temps de travail de travail effectif de 7h, de sorte qu’une absence entre 16 et 17 heures ne peut lui être reprochée.
Il indique que les feuillets manuscrits n’ont pas de force probante et explique que les absences temporaires sur chantier étaient justifiées par les nécessités d’approvisionnement et qu’il ne peut lui être reproché une absence entre 13 h et 13h30 alors que pendant la pause déjeuner le salarié n’est pas tenu de rester à disposition.
Il fait valoir le caractère illicite du contrôle de travail au moyen d’un système de géolocalisation et soutient que le suivi du temps de travail n’était nullement déclaré en tant que tel par l’employeur et que le contrôle du temps de travail ne pouvait permettre à l’employeur de justifier la mise en place de la mesure puisque le contrôle était possible au moyen d’un pointage.
Il relève que la consultation des instances représentatives du personnel antérieurement à la mise en place du système n’a pas été effectuée et que la durée de conservation des données ne figure pas dans la correspondance. Enfin, il soulève la défaillance du système de géolocalisation et le fait qu’il a toujours bénéficié de l’usage de véhicules de l’entreprise.
La société reproche au salarié un non-respect des horaires de travail, des retards et des absences répétitives avec une prise de poste tardive et des départs prématurés des chantiers constatés par les chefs de chantier et par un système de géolocalisation mis en place au sein de la société.
Elle indique que le dispositif de géolocalisation est parfaitement licite, que retards tardives et les départs anticipés se sont en nombre et que le chantier visé dans la lettre de licenciement finissait à 17 h et non à 16 h. Elle souligne que le chantier était totalement approvisionné par d’autres employés et que le salarié a largement abusé de la confiance de son employeur.
La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis.
L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.
Le système de géolocalisation
Le procédé de géolocalisation des véhicules mis en place par la société a fait l’objet d’une déclaration simplifiée le 7 mars 2011 auprès de la CNIL conformément aux règles de la référence ‘NS 051-géolocalisation des véhicules des employés’qui prévoit« d’assurer le respect d’une obligation légale ou réglementaire, le suivi et la facturation d’une prestation de transport de personnes ou de marchandises ou d’une prestation de services, la sécurité de l’employé, des marchandises ou véhicule, une meilleure allocation de moyens et accessoirement le suivi du temps de travail. La durée de conservation étant de 2 mois »..
La personne à contacter avec ses coordonnées est bien mentionnée sur la déclaration.
Une note de service a informé l’ensemble des salariés que les véhicules étaient équipés d’une puce pour la géolocalisation à compter du 5 mars 2011, note qui figurait sur le panneau d’affichage dans la salle commune de la société ainsi qu’il en résulte des témoignages de M.[X] et M. [I] (pièce intimée 2, 3,12 et 13).
La consultation des instances du personnel n’a pas été réalisée faute de présentation de liste ou candidature au vu des procès-verbaux de carence des élections produits par la société pour les années 2010 à 2017 (pièce intimée 24), de sorte que le moyen invoqué par le salarié est inopérant.
Par ailleurs, le salarié a été informé individuellement par remise en main propre d’un courrier le 23 février 2016 de l’utilisation de ce système de géolocalisation et des finalités précises ayant amené la société à le mettre en place, en particulier pour lutter contre le vol des véhicules mais également pour permettre à l’entreprise de savoir où se trouvent les véhicules en temps réel afin d’optimiser le planning, diminuer les kilomètres parcourus, superviser la conduite des chauffeurs, orienter le véhicule le plus proche lors d’une demande d’intervention urgente, informer les clients, améliorer le suivi des marchandises et le suivi de l’activité des collaborateurs salariés itinérants pour établir les temps de travail (…) avec la conservation des données relatives aux déplacements conformément à la loi.
Le système de géolocalisation a donc été utilisé à titre principal pour retrouver les véhicules volés ainsi qu’il résulte du procès-verbal du 21 octobre 2016 « le véhicule de chantier a été retrouvé suite à sa géolocalisation sur un chantier abandonné » (pièce 20) mais également afin d’assurer le suivi des véhicules des employés pour les motifs évoqués dans le courrier du 23 février 2016.
En conséquence, même s’il existe un autre moyen de contrôle du temps de travail, ce procédé est régulier et licite et la demande en vue d’écarter la pièce intimée 9 retraçant l’historique des données de déplacement du véhicule du salarié doit être rejetée.
Enfin, la fiabilité de ce système ne saurait être mise en cause sur la seule observation faite par le salarié concernant le jeudi 25 février , le système ayant pu être ponctuellement désactivé.
Le moyen soulevé par le salarié doit être écarté.
Les horaires de travail
L’article 63 de la convention collective nationale des entreprises paysagistes et de reboisement prévoit que «la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ». Les dispositions de l’article 64 indiquent que le temps nécessaire à l’habillage et au déshabillage n’est pas considéré comme travail effectif.
Les horaires de travail du salarié sont indiqués par l’employeur comme étant de 8h à 12h et de 13h à 16h ou à 17 h pendant la pleine saison..
S’agissant de l’heure d’embauche, les employés attestent se rendre tous les matins au siège, à 8h dans la salle d’embauche pour le pointage et la prise de mission (pièces intimée 12 et 13). Mme [T], employée de la société, confirmant également « que les départs sur les chantiers en véhicule d’entreprise ne se font pas avant 8h ».
Le salarié devait donc être pour 8h au siège de la société et/ou à partir de 8h en partance pour le chantier, et le fait qu’il se présente ponctuellement plus tôt sur son lieu de travail ne permet pas de considérer que l’embauche se faisait à 7h30 du matin, alors même que le témoignage de M. [D], chargé de faire l’appel et le pointage des salariés, démontre qu’il était régulièrement absent à l’embauche à 8h (pièce 17).
Les fiches de contrôle des chefs de chantier M. [A] et de M. [O] mentionnent l’absence du salarié sur le chantier Subilia le 5 février 2016 de 8h à 9 h, le 9 février 2016 de 8h à 8h30, le 17 février 2016 de 15hà 15h30, le 24 février de 8h à 9 h, le 1er mars de 16h30 à 17h et pour le chantier Nalyae de 13h à 13h 30, ce dernier horaire correspondant à la reprise du travail et non à l’heure du déjeuner, contrairement à ce qui est allégué par le salarié (pièce 8).
L’historique des déplacements du véhicule du salarié confirme les retards le matin notamment de 18 minutes le 23 février 2016, de 2h le 24 février 2016 et d’1h18 le 26 février 2016 ainsi que le retard l’après-midi d’1h (de 13 heures à 14 heures) le 9 mars 2016.
Par ailleurs, M. [M] et [G], employés de la société, attestent avoir eux-mêmes réalisés les approvisionnements de terre de compost et de plantes sur le chantier (pièces 15 et 19), de sorte que l’argument pour expliquer les absences en cours de journée opposé par le salarié doit être rejeté.
S’agissant de l’heure de depart du chantier, si le temps de travail du salarié est bien de 7 h par jour sur la semaine avec un départ à 16h, il est prévu au contrat de travail du salarié la possibilité d’heures supplémentaires en fonction des nécessités de l’entreprise. Il a été demandé au salarié de rester jusqu’à 17 h certain jours pour le chantier Subilia.
Le salarié est néanmoins parti du chantier à 15h30 le 26 février 2016 et 16h11 au lieu de 17 h le 1er mars 2016 et le 9 mars 2016 ainsi que 2 autres jours, le salarié pour ces deux jours ayant obtenu l’accord de la société pour des rendez-vous de kinésithérapeute. Ces départs anticipés sont établis par l’historique des déplacements du salarié (pièce intimée 9).
Dès lors, la matérialité des arrivées tardives, des départs anticipés et des absences est établie par l’employeur.
Le véhicule de société
Un véhicule de société ne peut être utilisé que dans le cadre de déplacement professionnel et le salarié ne peut s’en servir pour des déplacements privés en dehors des heures de travail.
En l’espèce, le salarié ne justifie pas avoir obtenu l’accord de son employeur pour un usage privé et n’établit pas l’usage invoqué.
L’employeur démontre que ce véhicule a été utilisé à plusieurs reprises pour des déplacements à usage privé en dehors des horaires de travail et pendant le week-end, comme notamment le samedi 5 mars 2016 ou le mercredi 9 mars 2016 (pièce intimée 9).
Ce grief doit être retenu.
En conséquence, la cour constate la matérialité des faits reprochés rendant impossible le maintien du contrat de travail. Toutefois en raison de l’ancienneté du salarié et du fait de l’absence d’avertissement antérieur aux faits, la cour approuve les premiers juges qui ont requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse.
La cour confirme la décision déférée de ce chef.
2- sur les conséquences financières de la rupture
Le licenciement n’étant pas fondé sur une faute grave et l’inexécution du préavis étant imputable à l’employeur, il est octroyé au salarié les sommes suivantes, calculées sur la base du salaire brut mensuel moyen de 2 739 euros :
– rappel de salaire pour mise à pied à titre conservatoire du 29 mars au 14 avril 2016: 1369,50 euros,
– congés payés y afférents : 136,95 euros,
– congés payés afférents à l’indemnité de préavis : 547, 80euros.
– indemnité de licenciement : au regard des dispositions de l’article R. 1234-2 du code du travail applicable au litige, l’indemnité de licenciement ne pouvant être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d’ancienneté et compte tenu de l’ancienneté du salarié de 16 ans : 10 956 €.
(1/5x 2 739 x16) + (2/15x 2 739 x 6)
Sur les heures supplémentaires
Il résulte de l’article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail accomplies n’incombe spécialement à aucune des parties. En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de fournir des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre utilement, à charge pour ce dernier de justifier les heures de travail effectivement réalisées.
Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l’accord au moins implicite de l’employeur, soit s’il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.
Les dispositions de l’article 54 de la convention collective nationale prévoient que « les heures supplémentaires sont celles effectuées au-delà de la durée légale du travail effectif soit à ce jour 35 heures par semaine. À défaut d’accord d’entreprise ou d’établissement chacune des huit premières heures supplémentaires donne lieu à une majoration ou un repos compensateur équivalent calculé conformément aux dispositions légales en vigueur à ce jour de 25 % et les heures suivantes de 50 % ».
Les dispositions de l’article 53 prévoient que « les heures perdues par suite d’une interruption collective de travail résultant de causes accidentelles, d’intempéries ou en cas de force majeure peuvent être récupérées dans les 12 mois ou suivant l’événement justifiant la récupération et que les heures récupérées ne rentrent pas dans le calcul hebdomadaire ou annuel des heures supplémentaires ».
Les dispositions de l’article 55 précisent « le paiement des heures supplémentaires peut être remplacé pour tout ou partie par un repos payé 1h et 15 mns (1,25h pour chacun des huit premières heures supplémentaires et 1h30 (1,5h) pour chacune des heures supplémentaires suivantes. (…)Le droit au repos compensateur est réputé ouvert dès lors que la durée de ce repos atteint sept heures (…) en l’absence d’accord le repos compensateur de remplacement pour notamment être pris plusieurs jours d’affilée pourra être accolé à d’autres congés après accord de l’employeur (..) ».
En l’espèce, M. [V] réclame selon le décompte produit dans ses conclusions soit :
– le paiement d’heures supplémentaires et non rémunérées pendant la période allant du 1er juin 2014 au 1er septembre 2015 et du 1er janvier au mois à la fin mars 2016 correspondant à la demi-heure de présence au siège le matin avant le départ sur le chantier, 10 h82 par mois x18 mois: 194h85.
– une heure supplémentaire par jours : (21h65 par mois x 3 ) x2 :129h90
Au total 324h75 au taux horaire de 18.059€ majoré à 22,57€
Le salarié produit les bulletins de paie de janvier 2014 à avril 2016 (pièce 3 et 4).
Les éléments apportés par le salarié permettent à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.
La société indique que lorsque le salarié effectuait des heures supplémentaires, ces dernières étaient compensées par des repos compensateurs ou des heures d’intempéries ainsi que des récupérations.
La société produit des éléments de contrôle de la durée du travail notamment les feuilles de présence du salarié avec les heures supplémentaires pour l’année 2014, 2015 et 2016 en pièce 22 comportant la mention des heures supplémentaires, des absences personnelles ou pour intempéries ainsi que les récupérations.
La société explique que sur la période de juillet 2014 à février 2015 le salarié a totalisé 57h50 heures d’absence, soit personnelles soient pour intempéries en même temps qu’il totalisait 62 heures supplémentaires, que suite à la compensation il lui a été réglé des heures supplémentaires.
La société produit également des factures de l’agence d’intérim Proman (pièce 21).
La cour relève à titre liminaire que les arrivées tardives, les départs anticipés et des absences sont avérées et ne sauraient donner droit au paiement d’heures supplémentaires comme le revendique le salarié et qu’en raison de l’heure d’embauche à 8 h du matin, la demi-heure de présence au siège le matin avant le départ sur le chantier ne peut être comptabilisée.
Au vu des fiches de contrôle, le salarié a réalisé des heures qui ont été récupérées au titre de la récupération des jours d’intempéries et des heures de journée solidaire. Les heures supplémentaires ont été compensées par les absences du salarié ou repos compensateur.
Ainsi, au mois de juin 2014, le salarié a effectué 14 heures supplémentaires réglées sur le bulletin de salaire du mois de juin 2014 pour un montant de 316,03 euros bruts.
En juillet 2014 il a effectué 1h50 heures supplémentaire compensée par son absence de 1h50 le 3 juillet 2019.
Du mois d’août 2014 au mois de septembre 2015, le salarié n’a pas effectué d’heures supplémentaires.
Le salarié a été absent pour intempéries : le mardi 14 octobre 2014, 7 heures ; le 3 novembre et le 26 novembre 2014, 14 heures ainsi que le 16 février 2015, 7heures, soit un total de 28 h devant être récupérées et ne rentrant pas dans le calcul hebdomadaire ou annuel des heures supplémentaires.
Le salarié a été absent pour motif personnel le 10 novembre 2014,7 h et le 5 février 2015, 7h soit au total 14 heures.
Le salarié a donc totalisé 57 h d’absence pour intempéries et personnelles.
Il a effectué au mois d’avril 2015 un total de 14 h supplémentaires positionnées en récupération et au mois de mai 2015, 16 h supplémentaires positionnées en récupération.
Au mois de juin 2015 le salarié a effectué 12 h supplémentaires positionnées en récupération ainsi que 7h de la journée solidarité.
En mars 2016 il a effectué 14 h supplémentaires avec 8 positionnées en récupération et 6h réglées sur le salaire du mois de mars 2014.
Ainsi, le salarié a totalisé à compter 56 h supplémentaires dont 6 h supplémentaires réglées, soit 50 h supplémentaires + 7 heures de récupération de la journée au total 57 heures compensées par les 57 h d’absence pour intempéries et personnelles.
Dès lors, confrontant les éléments produits de part et d’autre, la cour a la conviction que le salarié n’a pas accompli d’autres heures supplémentaires qui ne lui auraient pas été rémunérées ou qui n’auraient pas été compensées.
La cour confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté le salarié de cette réclamation et de sa demande connexe du chef de travail dissimulé.
Sur les autres demandes
M. [V] qui succombe au principal doit s’acquitter des dépens, être débouté de sa demande faite en application de l’article 700 du code de procédure civile et condamné à payer à la société la somme de 1000€ sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, en matière prud’homale,
Confirme le jugement déféré SAUF s’agissant du rappel de salaire pour mise à pied à titre conservatoire et des congés payés y afférents, des congés payés afférents à l’indemnité de préavis et de l’indemnité de licenciement ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne la société Saint Tropez Parcs et Jardins à payer à M. [R] [V] les sommes suivantes:
– 1369,50 euros au titre du rappel de salaire pour mise à pied à titre conservatoire du 29 mars au 14 avril 2016
– 136,95 euros au titre congés payés y afférents ,
– 547, 80 euros au titre des congés payés afférents à l’indemnité de préavis,
– 10 956 €au titre de l’indemnité de licenciement.
Dit que les sommes allouées de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2018 et les créances indemnitaires à compter du présent arrêt ;
Condamne M. [R] [V] à payer à la société Saint Tropez Parcs et Jardins la somme de 1000€ au titre au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne M. [R] [V] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT