Géolocalisation : 20 octobre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 22/01976

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Géolocalisation : 20 octobre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 22/01976
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20 octobre 2023
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
22/01976

20/10/2023

ARRÊT N°2023/394

N° RG 22/01976 – N° Portalis DBVI-V-B7G-OZYW

NB/CD

Décision déférée du 19 Avril 2022 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( F20/00565)

C. FARRE

Section Comerce Chambre 1

[D] [I]

C/

S.A.S. SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION COM)

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le 20/10/23

à Me DARRIBERE, Me FRANCOU

Le 20/10/23

à Pôle Emploi

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

Madame [D] [I]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Agnès DARRIBERE de la SCP CABINET DARRIBERE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIM”E

S.A.S. SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Isabelle FRANCOU de l’AARPI FRANCOU ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant N.BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

S. BLUM”, présidente

M. DARIES, conseillère

N.BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par S. BLUM”, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre

FAITS – PROCÉDURE – PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [D] [I] a été embauchée à compter du 5 mars 2018 par la société commerciale de télécommunication (ci après désignée la ‘SCT Télécom’) en qualité d’attachée commerciale suivant contrat de travail à durée indéterminée régi par la convention collective nationale des télécommunications.

Par avenant du 2 mai 2019, Mme [I] a été promue au poste de directrice d’agence, statut cadre, groupe E, avec une période probatoire de trois mois renouvelable une fois.

Dans le dernier état de la relation contractuelle, son salaire mensuel s’élevait à la somme de 2 587,46 euros brut, commissions non incluses.

Par lettre remise en main propre le 15 juillet 2019, la société SCT a informé la salariée du renouvellement de sa période probatoire.

Par courrier recommandé du 15 novembre 2019, la société SCT a informé la salariée de sa décision de ne pas valider et rompre la période probatoire, Mme [I] devant réintégrer à compter de ce jour son poste d’attachée commerciale, dans les conditions de son contrat de travail initial. A réception de cette lettre, la salariée s’est trouvée en arrêt maladie.

Par courrier recommandé du 29 novembre 2019, la SCT Télécom a convoqué Mme [I] à un entretien préalable au licenciement, envisagé pour un motif disciplinaire et fixé au 12 décembre 2019 ; le même courrier lui notifiait sa mise à pied à titre conservatoire, dans l’attente de la décision à intervenir sur le licenciement.

Son licenciement a été notifié à la salariée par lettre recommandée du 6 janvier 2020 pour faute grave. La lettre de licenciement est ainsi motivée : ‘Vous avez été promue directrice d’agence de [Localité 4] le 2 mai 2019.

Ces missions et les responsabilités qui vous ont été confiées étaient importantes pour l’entreprise et relevaient d’un niveau stratégique.

Vous aviez notamment pour tâches contractuelles d’organiser et développer l’activité commerciale, de produire les reportings nécessaires au pilotage de l’activité commerciale, de fixer les objectifs aux commerciaux, de suivre leur réalisation et d’assurer un accompagnement ‘terrain’ de votre équipe.

Or, vous avez manqué à pratiquement toutes ces missions, expliquant la rupture de votre période probatoire.

M. [S] [R], Directeur Général Délégué et moi-même, avons pris le soin de vous appeler, en date du 15 novembre 2019, afin de vous faire part de cette décision.

Nous avons alors ont été surpris de la familiarité de vos propos tenus et de leur caractère tout à fait déplacés et outranciers.

En effet, vous vous êtes montrée très agressive, n’ayant que très peu de respect à notre égard.

Vous n’avez cessé de nous couper la parole en « hurlant » au téléphone.

Afin de conduire cette conversation à trois, nous avions placé la communication en mode « haut parleur ». Plusieurs salariés travaillant à proximité du bureau ont été choqués d’entendre vos hurlements et vos propos très familiers.

Vous avez ajouté ‘Il n’en est pas question’, ‘je suis faite pour être manager’, ‘je refuse de prendre un poste de commerciale’ .

Cela n’était pas pourtant la première fois que nous constations ce genre de comportement déplacé de votre part. Nous vous avions d’ailleurs déjà avertie oralement lors de votre point avec la nouvelle direction le 7 mai 2019, où vous vous étiez déjà montrée particulièrement revendicatrice et agressive à l’égard de notre société et de M. [S] [R].

Nous ne souhaitions pas nous arrêter à ce premier entretien téléphonique, au cours duquel vous n’aviez pas su ‘vous vendre’, et vous avions invité à nous rencontrer au siège pour évoquer de façon plus pragmatique votre avenir dans l’entreprise, le 14 mai suivant.

Nous vous avions alors laissé l’opportunité d’évoluer, tout en vous alertant sur le fait que nous n’accepterions plus de nouveau comportement inapproprié, ce dont vous aviez d’ailleurs tenu à vous excuser.

Force est de constater que vous n’avez pas pris en considération ces injonctions puisqu’à chaque désaccord rencontré, vous vous montrez agressive et irrespectueuse avec vos collègues et votre direction.

A ce titre, plusieurs de vos collègues ont tenu à nous faire part de vos écarts de comportement.

C’est le cas de [G] [U], chargée de recrutement, qui a été particulièrement choquée par votre comportement lors de son appel du 15 novembre 2019.

En effet, [F] [U] vous a contacté pour faire un point sur la période d’essai et l’activité commerciale de vos nouveaux collaborateurs.

Vous avez été fortement agacée par son appel et vous vous êtes montrée très désagréable et agressive à son égard.

[F] [U] a tenu à nous en attester, tant elle a été choquée par votre changement d’attitude, elle qui s’était déplacée à [Localité 4] pour une session de recrutement à vos côtés.

Elle nous a notamment fait part d’un échange agressif, d’une toute autre [D], d’un échange de manière désagréable.

[X] [E], chef de projet, a également souhaité témoigner et attester de votre attitude irrespectueuse à son égard.

En effet, vous vous êtes permise d’insinuer, par écrit, qu’elle ne faisait pas son travail et de demander de prendre en considération vos remarques.

Le 8 novembre 2019, vous avez envoyé un mail à sa direction afin de faire part de problématiques rencontrées sur le contrat électronique, sujet important pour l’entreprise, et devant faciliter l’acte de vente en clientèle pour nos commerciaux.

Cet échange aurait du être constructif car le retour terrain est important dans le lancement d’un tout nouvel outil. Malheureusement, vous vous êtes contentée de pointer du doigt les incompétences du siège alors que vous n’aviez, vous même, pas respecté les process exposés.

A titre d’exemple, quand vous évoquez une impossibilité de se connecter avec le VPN, il apparaît en réalité que nous n’avions pas trace de votre demande, ni de votre collaborateur ni de vous : pas de ticket à l’informatique, pas de mail, pas d’appel. Sans le respect de nos procédures internes, nous ne pouvions malheureusement pas analyser l’éventuel dysfonctionnement et donc pas apporter de solution.

De même, lorsque vous évoquiez un problème avec la saisie distante et que personne n’aurait répondu à votre demande, la réalité était encore une fois bien différente puisque [X] [E] a été contactée par votre collaborateur et y a immédiatement répondu.

Il en était de même lorsque vous évoquiez sans fondement un problème de signature des conditions générales de vente. Après enquête, il semblerait que le modèle CGV n’ait pas été correctement appliqué.

Cette attitude négative constante dénote un manque flagrant de professionnalisme et de respect vis à vis de votre hiérarchie ou de vos collègues.

Plus grave encore, plusieurs membres de votre ancienne équipe de l’agence de [Localité 4] ont ainsi tenu à nous faire part du malaise installé au sein de l’agence de votre fait.

Alors que vous aviez été promue Directrice d’Agence, il vous appartenait de placer vos collaborateurs dans des conditions de travail satisfaisantes pour leurs droits ou leur dignité, qui ne doivent en aucun cas être altérées.

Malgré cela, votre mode de management a été décrit comme étant un ‘management oppressant’, n’hésitant à envoyer des messages le week-end et à demander à vos collaborateurs de venir dès 8h en agence, alors que vous vous permettiez d’arriver à10h le matin.

Nous nous devons aujourd’hui de réagir face à vos attitudes négatives et menaçantes répétées à l’égard des collaborateurs de notre société d’autant plus que vous n’avez pas changé de comportement après toutes nos mises en garde précédentes.

Et malgré une mise à pied conservatoire suite à ces agissements répréhensibles, vous persistez à ne pas respecter vos engagements contractuels puisque vous prenez la liberté d’utiliser votre véhicule de service à votre guise, à des fins personnelles, en violation avec vos obligations contractuelles.

Pour rappel, votre rétrogradation en date du 15 novembre 2019 a eu pour effet une réintégration à votre poste initial, soit, celui d’Attachée Commerciale, dans les conditions définies par le contrat de travail du 5 mars 2018.

A ce jour, et depuis cette date nous avons relevé plus de 900 kilomètres parcourus et ce, sans avoir recueilli la moindre autorisation préalable de notre part.

Ce comportement contrevient à l’article 9 de votre contrat de travail – lequel prévoit que ‘Pour ses déplacements professionnels, la Société mettra à la disposition du Salarié, un véhicule. Ce véhicule ne peut être utilisé que pour usage professionnel. La société n’autorise pas le salarié à se déplacer pour raisons professionnelles dans un autre véhicule que celui qu’elle lui a attribué.

Sauf autorisation expresse de la direction, le salarié n’est pas autorisé à utiliser le véhicule de société en semaine de 21h à 6h30 et le week-end du vendredi 21h30 au lundi matin 6h30 mais également pour des déplacements sortant du cadre professionnel ou pendant toute suspension du contrat de travail.

Nous vous rappelons que l’insubordination, le refus réitéré de se soumettre aux instructions de sa direction et le comportement déplacé et agressif d’un salarié justifie son licenciement pour faute grave.’

Mme [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse le 15 mai 2020 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes.

Par jugement du 19 avril 2022, le conseil de prud’hommes de Toulouse, section commerce chambre 1, a :

– dit que le licenciement de Mme [I] n’est pas motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse,

– condamné la SCT Télécom à verser à Mme [I] les sommes suivantes:

*7 139 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

*713,90 euros au titre des congés payés y afférents,

* 2 351 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

* 3 570 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et séreuse,

* 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– débouté Mme [I] du surplus de ses demandes,

– débouté la SCT Télécom de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– mis les dépens à la charge de la SCT Télécom.

***

Par déclaration du 24 mai 2022, Mme [I] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 4 mai 2022, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.

***

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 21 février 2023, Mme [D] [I] demande à la cour de :

– réformer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande au titre des heures supplémentaires et de l’indemnité pour travail dissimulé,

– condamner la SCT Télécom à lui payer :

* 4 718,56 euros au titre des heures supplémentaires,

* 471,85 euros au titre des congés payés y afférents,

* 21 417 euros au titre de l’indemnité pour travail dissimulé.

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a jugé son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,

– condamner la SCT Télécom au paiement des sommes suivantes :

* 7 139 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 713,90 euros de congés payés y afférents,

* 2 351 euros au titre de l’indemnité de licenciement (3% du salaire annuel brut par année d’ancienneté en vertu de la convention collective nationale)

– réformer le jugement en ce qu’il a fixé à la somme de 3 570 euros les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– condamner la SCT Télécom à lui payer à titre de dommages et intérêts la somme de 10 708 euros,

– condamner la SCT Télécom aux entiers dépens ainsi qu’au paiement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [D] [I] conteste, point par point, les griefs qui lui sont adressés dans la lettre de licenciement et fait valoir qu’au contraire, elle a fait, en quelques mois, accéder l’agence de [Localité 4] à la première place ; qu’elle a occupé les fonctions de directrice de l’agence de [Localité 4] pendant plus de six mois, sans qu’aucun reproche ne lui soit adressé ; qu’elle pouvait légitimement utiliser son véhicule de fonction pendant son arrêt de travail après le 15 novembre 2019, son bulletin de salaire de novembre faisant état dans son montant intégral de l’avantage en nature que constituait le véhicule de fonction ; que dès le mois de mai 2019, elle a effectué de très nombreuses heures supplémentaires pour lesquelles elle n’a pas été rémunérée, alors que l’avenant à son contrat de travail ne prévoyait pas de clause de forfait ; que le relevé de géolocalisation de son véhicule de fonction témoigne de l’amplitude de ses heures de travail ; que la somme allouée par le conseil de prud’hommes à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, équivalente à un mois de salaire, est manifestement insuffisante au regard du préjudice subi.

***

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 16 août 2023, la Sas Société commerciale de télécommunication, qui forme appel incident, demande à la cour de :

– la juger recevable et bien fondée en son appel incident,

.- confirmer les dispositions du jugement déféré en ce qu’il a débouté Mme [I] du surplus de ses demandes.

En conséquence,

– infirmer les dispositions du jugement en ce qu’il:

* a dit que le licenciement de Mme [I] n’est pas motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse,

* l’a condamnée à verser à Mme [I] les sommes suivantes :

7 139 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

713,90 euros brut au titre des congés payés y afférents,

2 351 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

3 570 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

* l’a déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* mis les dépens à sa charge.

Statuant à nouveau :

– juger que le licenciement de Mme [I] est fondé et justifié par une faute grave,

– juger qu’elle n’a commis aucun manquement à l’égard de Mme [I] en matière de durée du travail.

En conséquence,

– débouter Mme [I] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– condamner Mme [I] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [I] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

La société SCT Télécom soutient que le licenciement est justifié par les graves manquements commis par Mme [I], dont elle rapporte la preuve par les pièces qu’elle verse aux débats ; que la rupture de sa période probatoire en qualité de directrice d’agence est parfaitement légitime ; que la salariée ne présente, à l’appui de sa demande en paiement d’heures supplémentaires, aucun élément précis quant aux heures de travail qu’elle prétend avoir effectuées.

***

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date du 8 septembre 2023.

***

Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

***

MOTIFS DE LA DECISION :

– Sur les heures supplémentaires:

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions réglementaires et légales précitées.

Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il les évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

L’avenant au contrat de travail de Mme [I] ne modifie pas les dispositions du contrat initial qui fixe sa durée de travail à la durée légale. Ses bulletins de salaire font état de 151,67 heures par mois et ne font pas mention de règlement d’heures supplémentaires.

Mme [I] verse aux débats un tableau récapitulatif des heures supplémentaires effectuées entre le 26 août 2019 et le 15 novembre 2019 (pièce n° 24), établi à partir des relevés de géolocalisation de son véhicule de fonction (pièce n° 16) ; cet élément est insuffisant pour présumer l’existence d’heures supplémentaires et il n’est conforté par aucun autre élement factuel.

Il convient en conséquence de débouter la salariée de sa demande au titre des heures supplémentaires, et par voie de conséquence, de sa demande au titre du travail dissimulé, par confirmation sur ce point du jugement déféré.

– Sur le licenciement :

Mme [I] a été licenciée pour faute grave.

La faute grave se définit comme un fait ou un ensemble de faits, personnellement imputables au salarié, constituant une violation d’une obligation contractuelle ou un manquement à la discipline de l’entreprise, d’une gravité telle qu’elle rend impossible son maintien dans l’entreprise.

Lorsque l’employeur retient la qualification de faute grave dans la lettre de licenciement, il lui incombe de rapporter la preuve matérielle des faits reprochés à son salarié. Le contrôle de la matérialité des faits reprochés auquel le juge doit procéder implique une appréciation de leur imputabilité au salarié, de leur caractère objectivement fautif et sérieux justifiant la rupture du contrat de travail, ainsi que de leur gravité rendant impossible le maintien dans l’entreprise.

La lettre de licenciement du 6 janvier 2020 qui fixe les limites du litige vise trois séries de griefs: une attitude agressive et déplacée de la salariée envers sa hiérarchie et ses collègues, un comportement managérial inadapté et l’utilisation du véhicule professionnel à des fins personnelles sans autorisation de l’employeur.

* l’attitude déplacée et agressive de la salariée vis à vis de sa hiérarchie et de ses collègues, et son management inadapté :

A l’appui de ses allégations, la société SCT Télécom verse aux débats :

– un mail de M. [H] [N] adressé le 19 décembre 2019 à a directrice des ressources humaines, qui indique que lors de son passage à [Localité 4], les commerciaux ont remonté une forte pression malsaine (sms le dimanche…) à [J] notamment (pièce n° 7),

– un mail adressé le 26 novembre 2019 par Mme [G] [U] à M. [S] [R] lui indiquant : ‘ Lors de mon échange avec [D], au son de sa voix, j’ai constaté de l’agacement, un échange agressif, une toute autre [D]…

L’objet de mon appel était pour prendre connaissance de l’activité des nouveaux collaborateurs, mais celle-ci m’annonce qu’elle est en arrêt, une information dont je n’avais pas connaissance et en apprenant cette information, j’ai souhaité mettre fin pour ne pas la déranger.

Néanmoins, elle a souhaité tout de même échanger de manière désagréable en me faisant part de son étonnement sur le fait que je ne sois pas au courant de son absence et de la décision prise par la direction vis à vis de son poste…'(pièce n° 5),

– un mail adressé par Mme [I] à Mme [K] (DRH) le 3 juillet 2019 lui indiquant qu’elle ne veut plus travailler avec ‘[W]’, laquelle aurait souhaité formaliser une demande de rupture conventionnelle (pièce n° 10),

– une attestation de Mme [X] [E], chef de projet, qui indique ‘avoir été directement visée par un mail envoyé par [D] [I], mail mensonger et que j’ai jugé particulièrement fourbe, à la direction générale (je n’étais pas en copie).

Cet écrit avait pour objet la dénonciation de la non disponibilité des équipes support (voire leur désintérêt), et la non fiabilité des outils de travail, ce qui aurait fait perdre des contacts à son équipe…’ (Pièce n° 11),

Aucune de ces pièces ne démontre une attitude agressive de Mme [I] à l’égard de ses collaborateurs ou de sa hiérarchie, et le fait qu’elle soit apparue agressive à Mme [U] lors d’un entretien téléphonique du 15 novembre 2019 s’explique aisément par le fait qu’elle venait d’apprendre sa rétrogradation du poste de directrice de l’agence de [Localité 4].

Mme [I] verse par ailleurs aux débats des attestations de M. [V] [L] et de M. [M] [A], membres de son équipe, qui déclarent qu’elle a toujours été présente et à l’écoute, et qu’elle était un manager très impliqué dans son travail ainsi qu’avec ses commerciaux (pièces n° 23 et 23 bis).

Ces griefs ne sont pas établis.

* l’utilisation du véhicule professionnel à des fins personnelles sans autorisation de l’employeur :

Mme [I] verse aux débats ses bulletins de salaire du mois de novembre 2019 (du 1er au 15 novembre, et du 16 au novembre) qui démontrent qu’elle a bénéficié de l’intégralité de l’avantage en nature voiture, évalué à 87,46 euros, et ce nonobstant sa réaffectation, à compter du 15 novembre 2019, au poste d’attachée commerciale.

Le courrier de convocation à un entretien préalable du 29 novembre 2019 notifiant à la salariée, qui était alors en arrêt maladie, sa mise à pied à titre conservatoire, ne lui demande pas de restituer le véhicule mis à sa disposition, qu’aux termes de l’avenant à son contrat de travail du 2 mai 2019, elle était en droit de considérer, au moins jusqu’à la fin du mois de novembre 2019, comme un véhicule de fonction.

Ce grief n’est pas établi.

La société SCT Télécom fait également état, dans ses écritures, d’un non respect par la salariée des procédures internes, qui n’est pas expressement visé dans la lettre de licenciement, et qui a, en tout état de cause, été sanctionné par la rétrogradation de la salariée au poste d’attachée commerciale.

Il résulte de l’ensemble des observations qui précèdent que la société employeur ne rapporte pas la preuve de la faute grave commise par la salariée, de sorte que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a jugé que le licenciement de Mme [I] était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

– Sur les conséquences du licenciement :

Mme [D] [I] a été licenciée sans cause réelle et sérieuse d’une entreprise employant plus de onze salariés, à l’issue de vingt cinq mois de présence dans l’entreprise en ce compris la période de préavis de trois mois à laquelle elle est en droit de prétendre. Elle est fondée à obtenir les indemnités de préavis, de congés payés y afférents et de licenciement à hauteur des sommes qui lui ont été accordées par le conseil de prud’hommes.

Elle est également fondée à obtenir des dommages et intérêts pour rupture abusive calculés en application des dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, qu’en considération des circonstances de la rupture, il convient de fixer à la somme de 7 800 euros représentant l’équivalent de 3 mois de salaire brut.

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d’ordonner d’office le remboursement par la société SCT Télécom à Pôle Emploi Occitanie des indemnités chômage éventuellement versées à la salariée, dans la limite d’un mois d’indemnités.

– Sur les autres demandes :

La société SCT Télécom, qui succombe pour une part de ses prétentions, sera condamnée aux dépens de l’appel et déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Il serait en l’espèce inéquitable de laisser à la charge de Mme [D] [I] les frais exposés non compris dans les dépens ; il y a lieu de faire droit, en cause d’appel, à sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’une somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulouse le 19 avril 2022, sauf sur le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Statuant de nouveau sur le point infirmé et y ajoutant :

Condamne la société SCT à payer à Mme [D] [I] la somme de 7 800 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive.

Ordonne le remboursement par la société SCT Télécom à Pôle Emploi Occitanie des indemnités chômage éventuellement versées à la salariée, dans la limite d’un mois d’indemnités.

Condamne la société SCT Télécom aux dépens de l’appel.

Condamne la société SCT Télécom à payer à Mme [D] [I], en cause d’appel, une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700du code de procédure civile.

La déboute de sa demande formée à ce même titre.

Le présent arrêt a été signé par S. BLUM”, présidente et C. DELVER, greffière de chambre.

LA GREFFI’RE LA PR”SIDENTE

C. DELVER S. BLUM”

.

 


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