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ARRET
N°977
S.A.R.L. [3]
C/
Etablissement URSSAF NORD-PAS DE CALAIS
COUR D’APPEL D’AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 28 NOVEMBRE 2022
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N° RG 21/02201 – N° Portalis DBV4-V-B7F-ICPF – N° registre 1ère instance : 17/00848
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 11 février 2021
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
La S.A.R.L. [3] agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Jean-michel LECLERCQ-LEROY de la SELARL LOUETTE-LECLERCQ ET ASSOCIES, avocat au barreau d’AMIENS, vestiaire : 95
ET :
INTIMEE
L’URSSAF NORD-PAS DE CALAIS agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Gaëlle DEFER, avocat au barreau de BEAUVAIS, substituant Me Maxime DESEURE de la SELARL LELEU DEMONT HARENG DESEURE, avocat au barreau de BETHUNE
DEBATS :
A l’audience publique du 16 Juin 2022 devant Mme Jocelyne RUBANTEL, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 28 Novembre 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Audrey VANHUSE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme [K] [U] en a rendu compte à la Cour composée en outre de :
Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,
Mme Chantal MANTION, Président,
et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 28 Novembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Mélanie MAUCLERE, Greffier placé.
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DECISION
La société [3] a fait l’objet d’un contrôle de l’application des législations de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 août 2015, à l’issue duquel, par lettre recommandée du 29 décembre 2016, l’Urssaf du Nord Pas-de-Calais a mis en demeure la société [3] de lui payer la somme de 8 917 euros, soit 7 658 euros de rappel de cotisations et 1 259 euros de majorations de retard due au titre des années 2013 et 2014.
Saisi par la société [3] de la contestation de la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de l’Urssaf, le tribunal judiciaire de Lille, par jugement prononcé le 11 février 2021 a :
– dit que les demandes présentées par la société [3] et relatives à un travail dissimulé sont sans objet dans la présente procédure,
– débouté la société [3] de sa demande tendant à obtenir l’annulation de la procédure de contrôle pour non respect des dispositions de l’artilce R 243-59 du code de la sécurité sociale,
– débouté la société [3] de sa demande tendant à obtenir l’annulation des opérations de contrôle pour non-respect des dispositions de l’article L 143-59 du code de la sécurité sociale,
– débouté la société [3] de sa demande tendant à obtenir l’annulation des opérations de contrôle pour non respect des dispositions de l’article L 114-19 du code de la sécurité sociale,
– débouté la société [3] de sa demande de dommages-intérêts,
– confirmé le chef de redressement n° 1,
– confirmé le chef de redressement n° 2,
– condamné la société [3] à payer à l’Urssaf du Nord Pas-de-Calais la somme de 7 658 euros, et ce en deniers ou quittances valables des sommes qui auraient pu être payées depuis, outre les majorations de retard à parfaire jusqu’à complet paiement,
– condamné la société [3] aux dépens de l’instance,
– condamné la société [3] à payer à l’Urssaf du Nord Pas-de-Calais la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 23 avril 2021, la société [3] a relevé appel de ce jugement qui lui avait été notifié par courrier recommandé dont elle avait accusé réception le 19 septembre 2021.
Les parties ont été convoquées à l’audience du 16 juin, date à laquelle l’affaire a été renvoyée a 16 juin 2021.
Aux termes de ses conclusions transmises au greffe le 3 juin 2022, oralement développées à l’audience, la société [3] demande à la cour de :
– infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
– annuler les opérations de contrôle,
– annuler la contrainte émise par l’Urssaf, du Nord Pas-de-Calais,
– condamner l’Urssaf du Nord Pas-de-Calais à régler à lui régler la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, la société [3] expose les éléments suivants :
Si elle a bien reçu l’avis de contrôle le 6 janvier 2016, l’informant d’un contrôle sur place prévu le 25 janvier 2016, l’inspectrice du recouvrement a annulé le matin même, en indiquant qu’il aurait lieu le 17 février 2016, ce qui devait être confirmé par lettre recommandée, laquelle n’a jamais été reçue.
Elle soutient donc avoir été prise au dépourvu par le contrôle, auquel elle n’avait pu se préparer ce qui constitue une violation de ses droits.
Elle considère que le rendez-vous en cas de report, doit être fixé en temps utile par tout moyen approprié, l’Urssaf devant rapporter la preuve de la réception de l’information en cas de recours contentieux.
Elle fait encore valoir que les délais de contrôle fixés par l’article L 243-13 du code de la sécurité sociale n’ont pas été respectés, puisque le contrôle, débuté le 16 février 2016 et que la lettre d’observations du 14 octobre 2016, contrairement à ce que soutient l’Urssaf, ne relevait pas une situation de travail dissimulé.
Or, l’article L 243-13 précise que la limitation de durée du contrôle n’est pas applicable lorsqu’est établie au cours de cette période situation de travail dissimulé. Tel n’était pas le cas puisque la lettre d’observations indiquait seulement que le contrôle n’était pas terminé, et que l’Urssaf allait poursuivre sa recherche d’un éventuel travail dissimulé.
Elle ajoute que le travail dissimulé n’a jamais été établi, le parquet de Lille ayant considéré que l’infraction était insuffisamment caractérisée, et l’Urssaf n’a pas fait de recours contre cette décision, ni engagé des poursuites par voie de citation directe.
Aux termes de ses conclusions transmises au greffe le 25 février 2022, oralement développées à l’audience, l’Urssaf du Nord Pas-de-Calais demande à la cour de :
– confirmer le jugement dont appel,
– condamner la société [3] à lui payer la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société [3] aux dépens de l’instance.
L’Urssaf réplique que le report du rendez-vous initial a été convenu par téléphone, puis confirmé par courrier simple, la loi n’exigeant pas de formalisme s’agissant d’un report d’un commun accord.
Elle ajoute que l’accord de la société est certain puisqu’elle indique avoir envoyé un courrier électronique à l’inspectrice le 17 février 2016 pour avoir confirmation du rendez-vous.
L’Urssaf soutient par ailleurs que la lettre d’observations du 14 octobre 2016 précisait que des investigations se sont poursuivies dans le cadre de la lutte contre la fraude et notamment sur la minoration des heures déclarées.
Une lettre d’observations visant les dispositions de l’article L 8221-2 du code du travail, renvoyant aux articles L 8221-3 et L 8221-5 du code du travail a été adressée en date du 29 novembre 2016 à la société [3].
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs demandes et des moyens qui les fondent.
MOTIFS
Sur la régularité de l’avis de contrôle
En vertu des dispositions de l’article R 243-59 du code de la sécurité sociale, «’I-Tout contrôle effectué en application de l’article L 243-7 est précédé, au moins quinze jours avant la date de la première visite de l’agent chargé du contrôle, de l’envoi par l’organisme effectuant le contrôle des cotisations et contributions de sécurité sociale d’un avis de contrôle.
Toutefois, l’organisme n’est pas tenu à cet envoi dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l’article L 8221-1du code du travail. Dans ce dernier cas, si l’organisme entend poursuivre le contrôle sur d’autres points de la réglementation, un avis de contrôle est envoyé selon les modalités définies au premier alinéa.
Lorsque la personne contrôlée est une personne morale, l’avis de contrôle est adressé à l’attention de son représentant légal et envoyé à l’adresse du siège social de l’entreprise ou le cas échéant à celle de son établissement principal, telles que ces informations ont été préalablement déclarées. Lorsque la personne contrôlée est une personne physique, il est adressé à son domicile ou à défaut à son adresse professionnelle, telles que ces informations ont été préalablement déclarées.
Sauf précision contraire, cet avis vaut pour l’ensemble des établissements de la personne contrôlée.
Cet avis fait état de l’existence d’un document intitulé ” Charte du cotisant contrôlé ” présentant à la personne contrôlée la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement et à son issue, sur le fondement du présent code. Il précise l’adresse électronique où ce document approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable et indique qu’il est adressé au cotisant sur sa demande. Les dispositions contenues dans la charte sont opposables aux organismes effectuant le contrôle.
II.-La personne contrôlée a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l’avis prévu aux précédents alinéas’».
En l’espèce, l’inspectrice de l’Urssaf a conformément au texte susvisé adressé à la société [3] un avis de passage, fixant une première visite le 25 janvier 2016, qu’elle a dû reporter.
Elle a alors indiqué, après échange avec l’employeur qu’elle avait contacté téléphoniquement, qu’elle se présenterait pour procéder au contrôle le 17 février 2016.
Contrairement à ce que soutient la société [3], le formalisme prévu à l’article R 243-59 du code de la sécurité sociale ne s’applique qu’à l’avis de passage, et aucune disposition n’impose un formalisme pour une modification de la date de visite.
Il suffit que l’employeur en soit avisé en temps utile.
La société [3] indique elle-même dans ses écritures que le matin même du contrôle, l’inspectrice l’a informée de son impossibilité de venir, et annoncé sa venue pour le 17 février 2016 après-midi.
La société était donc informée de la date à laquelle le report de visite était fixé. Elle produit elle-même un mail daté du 17 février 2016 adressé à l’inspectrice du recouvrement ainsi libellé «’Bonjour Mme [W], je n’ai pas reçu confirmation. Pouvez-vous me dire si vous passez effectivement dans nos locaux cet après-midi…’»
Il en résulte que même en l’absence éventuelle d’une confirmation écrite, la société [3] savait que le contrôle aurait lieu sur place le 17 février 2016 après-midi, et elle précise dans ses écritures que l’inspectrice s’est empressée de lui confirmer téléphoniquement sa venue.
Dès lors, la société [3] ne peut prétendre que la visite de l’Urssaf aurait été inopinée et aurait porté atteinte à ses droits.
Le jugement déféré mérite donc confirmation de ce chef.
Sur le non-respect des délais de contrôle
I.-Les contrôles prévus à l’article L 243-7 visant les entreprises versant des rémunérations à moins de dix salariés ou les travailleurs indépendants ne peuvent s’étendre sur une période supérieure à trois mois, comprise entre le début effectif du contrôle et la lettre d’observations.
Cette période peut être prorogée une fois à la demande expresse de l’employeur contrôlé ou de l’organisme de recouvrement.
La limitation de la durée du contrôle prévue au premier alinéa du présent I n’est pas applicable lorsqu’est établi au cours de cette période :
1° Une situation de travail dissimulé, défini aux articles L 8221-3 et L 8221-5du code du travail ;
2° Une situation d’obstacle à contrôle, mentionnée à l’article L 243-12-1du présent code ;
3° Une situation d’abus de droit, défini à l’article L 243-7-2 ;
4° Ou un constat de comptabilité insuffisante ou de documentation inexploitable.
II.-Le présent article n’est pas applicable lorsque la personne contrôlée appartient à un ensemble de personnes entre lesquelles il existe un lien de dépendance ou de contrôle, au sens des articles L 233-1 et L 233-3 du code de commerce, et que l’effectif de cet ensemble est égal ou supérieur à celui mentionné au premier alinéa du I du présent article.
En l’espèce, par sa lettre d’observations du 14 octobre 2016 l’Urssaf indiquait en page 2 «’La présente lettre d’observations ne vaut pas clôture du contrôle et je vous informe que mes investigations se poursuivent dans le cadre de la lutte contre la fraude et notamment sur la minoration des heures de travail déclarées dans le but de bénéficier des bases forfaitaires «’formateur occasionnel’». Les régularisations entrant dans ce cadre feront l’objet d’une lettre d’observations spécifique’».
Le 29 novembre 2016, l’Urssaf adressait à la société [3] une nouvelle lettre d’observations au titre des infractions de travail dissimulé qui ont été constatées, précisant qu’une procès-verbal daté du 29 novembre 2016 était adressé au procureur de la République et notifiait des redressements pour 43 581euros, outre des majorations de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé.
Contrairement à ce que soutient la société [3], l’information donnée par la lettre d’observations du 14 octobre 2016 n’était pas hypothétique quant au constat d’un travail dissimulé puisque l’inspectrice du recouvrement l’informait que les régularisations entrant dans ce cadre feraient l’objet d’observations spécifique, et la nature du travail dissimulé était bien précisée, soit une minoration des bases forfaitaires «’formateur occasionnel’».
La société [3] se prévaut encore de la décision de classement sans suite prise par le procureur de la République de Lille pour en déduire que le travail dissimulé ayant donné lieu à une poursuite des investigations de l’Urssaf n’existe pas.
Cet argument est inopérant dès lors que le classement sans suite décidé par le ministère public est sans incidence sur la mise en ‘uvre de la procédure de recouvrement des cotisations sociales, qui à l’inverse des poursuites pénales, n’exige pas que soit caractérisé un élément intentionnel.
Le jugement mérite dès lors confirmation en ce qu’il a dit que les dispositions de l’article L 143-13 du code de la sécurité sociale ont été respectées.
La société ne formule aucune contestation du jugement qui a rejeté ses contestations des différents chefs de redressement.
Dépens
Conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, il convient de condamner la société [3] aux entiers dépens de l’instance d’appel.
Demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile
La société [3] qui succombe en toutes ses demandes est déboutée de celle qu’elle formule au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge de l’Urssaf les frais non compris dans les dépens qu’elle a été contrainte d’exposer pour assurer la défense des ses intérêts.
En conséquence, la société [3] est condamnée à lui verser la somme de 800 euros sur le fondement de l’article précité.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire, en dernier ressort,
DEBOUTE la société [3] de l’ensemble de ses demandes,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions critiquées,
CONDAMNE la société [3] aux dépens,
La CONDAMNE à payer à l’Urssaf la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,