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Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 7
ARRET DU 12 MAI 2022
(n° , 11 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/06062 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B77J5
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Avril 2019 -Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de VILLENEUVE SAINT GEORGES – RG n° F16/00065
APPELANT
Monsieur [U] [F]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Virginie MAX-CARLI, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 435
INTIMEE
SNC SOCIETE D’AVITAILLEMENT ET DE STOCKAGE DE CARBURANTS AVIATION (SASCA)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Pascale CALVETTI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1367
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre, et Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller, chargés du rapport.
Ces magistrats, entendus en leur rapport, ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre,
Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre,
Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller.
Greffière, lors des débats : Madame Lucile MOEGLIN
ARRET :
– CONTRADICTOIRE,
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre et par Madame Lucile MOEGLIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROC”DURE ET PR”TENTIONS DES PARTIES
M. [U] [F] a été engagé à compter du 15 mai 2006 par la société BP France par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein en qualité d’avitailleur.
Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective des industries du pétrole.
Le 1er janvier 2012, le contrat de travail de M. [F] a été transféré à la société Sasca.
M. [F] a saisi le conseil de prud’hommes de Villeneuve-Saint-Georges le 8 février 2016 aux fins d’obtenir la condamnation de la société Sasca au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.
Par jugement de départage du 5 avril 2019, le conseil de prud’hommes a:
– rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription,
– débouté M. [F] de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la société Sasca
– débouté la société Sasca de sa demande de dommages-intérêts,
– condamné M. [F] à payer à la société Sasca la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision,
– condamné M. [F] aux dépens.
Le 14 juin 2019, M. [F] a interjeté appel de ce jugement.
Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 31 juillet 2019, il demande à la cour d’infirmer le jugement et, statuant à nouveau :
– de condamner la société Sasca à lui verser les sommes suivantes :
– 949,00 euros d’heures supplémentaires au titre de dépassement du quota annuel des heures de l’accord relatif au temps de travail au sein de la Sasca au titre de l’année 2013,
– 103,77 euros de prime de quart pour les heures supplémentaires citées ci-dessus,
– 600,00 euros au titre du paiement de 0,5 heures de repos quart volant pour la période de 2012 à 2015 soit 22 heures de repos quart volant non payées,
– 50,00 euros au titre d’heures d’incommodités pour les heures supplémentaires ou complémentaires travaillées de nuit en application de l’art. 415 de la CCNIP non payées effectuées dans la tranche horaire (21h à 5h) dont le 6 juillet 2014,
– 12,91euros d’indemnités de panier de nuit pour les quarts encadrant minuit en application de l’article 701 de la CCNIP, pour le quart du 6 juillet 2014,
– 3.060 euros à titre de rappel de salaire sur coefficient 200 de février 2013 à décembre 2015 outre 306 euros à titre de congés payés afférents,
– 246,06 euros à titre de rappel sur prime d’ancienneté de février 2013 à décembre 2015,
– 4.155,83 euros outre 415,58 euros à titre de congés payés afférents à titre de prime sur le temps d’habillage et de déshabillage de février 2013 à décembre 2017,
– 17.300 euros au titre de rattrapage de versement de primes de perfonnance sur les années 2012 à 2015,
– 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi,
– dire et juger que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil,
– ordonner la remise du bulletin de salaire conforme à la décision à intervenir,
– condamner la société Sasca à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
– condamner la société Sasca aux dépens et ce, y compris les éventuels frais d’exécution.
Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 28 octobre 2019, la société Sasca demande à la cour de :
-dire mal fondé M. [F] en son appel,
-l’en débouter,
-confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
-condamner M. [F] à payer à la société Sasca, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, une somme de 3000 euros en cause d’appel,
-statuer ce que de droit sur les dépens.
Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.
L’instruction a été déclarée close le 9 février 2022.
MOTIFS :
Sur les heures supplémentaires :
M. [F] sollicite, d’une part, le paiement d’heures supplémentaires effectuées en 2013 pour une somme totale de 949 euros et, d’autre part, le paiement d’une prime de quart au titre des ces heures supplémentaires d’un montant de 103,77 euros.
Il fait valoir que son travail est organisé en quarts d’une durée de 8h30 en équipes successives et qu’en application de l’accord du 29 mars 2013 relatif au temps de travail au sein de la société Sasca, il ne pouvait réaliser plus de 182,5 quarts par an. Il soutient avoir réalisé 202 quarts en 2013 et réclame le paiement de la différence au titre des heures supplémentaires, déduction faite de trois quarts supplémentaires prévus par la convention collective et de onze quarts volants qui lui ont été payés sur la période concernée.
La société conteste le dépassement du quota annuel d’heures de travail et conclut au débouté de la demande du salarié.
Aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
Enfin, selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
M. [F] ne présente pas de décompte des horaires de travail et se borne à déduire le nombre de quarts réalisés au titre de l’année 2013 du nombre de primes de panier jour mentionné sur ses bulletins de paye entre février 2013 et janvier 2014, tout en précisant que ces primes sont généralement versées avec un mois de retard.
La cour constate qu’il n’est ni allégué ni justifié par le salarié que celui-ci ne peut recevoir qu’une prime de panier jour par quart effectué. En outre, il n’est pas justifié que les primes de panier jour mentionnées sur les bulletins de paye de février 2013 à janvier 2014 correspondent à des primes versées au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013. Aucune correspondance ne peut ainsi être établie, au regard des pièces versées aux débats, entre le nombre de quarts et le nombre de primes de panier jour mentionné sur les bulletins de paye des mois de février 2013 à janvier 2014.
Par suite, en l’absence d’autres éléments et notamment du décompte susmentionné, M. [F] ne présente pas des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées prétendument accomplies pour permettre à l’employeur de répondre. Sa demande relative aux heures supplémentaires sera donc rejetée et, par voie de conséquence, sa demande au titre de la prime de quart également.
Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.
Sur la prime de quart volant :
M. [F] sollicite le paiement d’une prime de quart de 600 euros pour la période de 2012 à 2015.
La société Sasca s’oppose à cette demande.
Le salarié ne produisant aucun argumentaire à l’appui de sa demande pécuniaire, il sera débouté de celle-ci.
Sur la prime de panier de nuit :
M. [F] expose avoir travaillé dans la nuit du 6 au 7 juin 2014 jusqu’à 1h30 du matin et sollicite ainsi un rappel de salaire au titre de la prime de panier de nuit qu’il n’a pas perçue pour un montant de 12,91 euros.
La société Sasca s’oppose à cette demande aux motifs que le quart du 6 juin 2014 s’est terminé à 23h30 et que M. [F] a perçu une indemnité de panier de jour au titre de cette journée qui n’est pas cumulable avec la prime de panier de nuit.
Selon l’article 703 de la convention collective applicable, l’indemnité de panier est accordée aux salariés travaillant en équipes successives ou en service continu visés à l’article 701. Son montant est égal :
– pour le quart encadrant minuit : à 1 fois et demi le salaire minimum global conventionnel horaire correspondant au coefficient d’emploi 150 de la hiérarchie,
– pour les autres quarts : à la moitié du taux précédent.
Il ressort du justificatif de dépassement d’horaire signé du chef de piste (pièce 12) que le quart de M. [F] du 6 juin 2014 devant se dérouler de 15h00 à 23H30 s’est en réalité terminé le 7 juin 2014 à 1 heure du matin. Il s’en déduit que ce quart a encadré minuit et que M. [F] est créancier de l’indemnité prévue à ce titre par l’article 703 précité.
La cour constate que, contrairement aux allégations de l’employeur, il ne résulte ni des stipulations de la convention applicable, ni de celles de l’accord du 28 février 2013 relatif à la rémunération au sein de la société Sasca que la prime de panier de jour que l’intimée soutient avoir versé en juillet 2014 au titre de la journée du 6 juin 2014 est exclusive du versement de la prime de panier de nuit sollicitée.
Il ressort du barème de l’Union française des industries pétrolières (pièce 12b) que le montant de l’indemnité de panier de nuit est de 12,91 euros. La société Sasca sera donc condamnée à verser ce montant à l’appelant, précision faite que cette somme doit être exprimée en brut. Le jugement sera infirmé en conséquence.
Sur la majoration pour incommodité :
M. [F] sollicite la somme de 50 euros au titre de la majoration pour incommodité prévue à l’article 415 a) de la convention applicable au titre de sept journées.
La société s’oppose à cette demande aux motifs que le salarié travaillait de manière habituelle de nuit entre 21h00 et 5h00 du matin, que la majoration pour incommodité ne concerne que le travail de nuit exceptionnel et que l’appelant ne précise pas le calcul permettant d’aboutir au montant sollicité.
L’employeur est tenu de produire les éléments dont dépend la rémunération du salarié.
Selon le a) de l’article 415 de la convention collective applicable, l’ouvrier, employé, agent de maîtrise ou assimilé appelé à effectuer exceptionnellement des heures de travail la nuit, le dimanche, les jours fériés ou les jours de repos accordés à titre exceptionnel (ponts, par exemple) percevra, en dehors de majorations éventuellement dues au titre d’heures supplémentaires, une majoration dite d’incommodité, égale à 33 % de ses appointements. Par heure de travail de nuit, il faut entendre les heures de travail effectuées entre 21 heures et 5 heures.
Au moyen de justificatifs de dépassement d’horaire signés par le chef de piste, M. [F] établit avoir travaillé après 21 heures les 12 mars, 22 juin et 27 juillet 2013, les 6 juin et 27 juillet 2014, ainsi que les 3 et 12 avril 2015 (pièces 20 à 26). Il s’en déduit que le salarié a réalisé des horaires de travail de nuit à raison de deux à trois jours par an.
Si l’employeur soutient que M. [F] travaillait habituellement de nuit, il ne produit à l’appui de ses allégations aucun document permettant de déterminer les horaires de travail du salarié entre 2013 et 2015. Par suite, il n’apporte pas la preuve qui lui incombe que les horaires de travail de nuit justifiés par le salarié n’étaient pas exceptionnels.
Il sera ainsi alloué à M. [F] la somme de 50 euros bruts à titre de majoration pour incommodité. Le jugement sera infirmé en conséquence.
Sur le rappel de salaire au titre d’un reclassement au coefficient 200 :
M. [F] reproche à la société de ne l’avoir classé au coefficient 200 qu’à compter du 1er janvier 2016 alors qu’il avait fait trois demandes en ce sens les 20 novembre 2012, 7 octobre 2013 et 6 octobre 2015 et que l’employeur était tenu d’y faire droit en application de l’article 3 de l’accord du 16 janvier 2006 relatif aux opérations d’avitaillement, compte tenu de son dossier professionnel et au fait qu’il avait suivi la formation de ‘formateur occasionnel’. Il soutient ainsi avoir subi une discrimination dans la mesure où d’autres salariés de la société ayant moins d’ancienneté ont été classés au niveau 200. Il sollicite ainsi un rappel de salaire de 3.060 euros pour la période de février 2013 à décembre 2015, outre les congés payés afférents. Il sollicite également un rappel de salaire de 246,06 euros au titre de la prime d’ancienneté pour la même période, compte tenu du reclassement sollicité.
La société Sasca conteste toute discrimination et soutient que ses entretiens avec les représentants du personnel versés aux débats par le salarié ne concernent pas l’accord du 16 janvier 2016, que le classement au coefficient 200 nécessite, outre la condition d’ancienneté de 3 ans, une appréciation sur les compétences du salarié qui n’ont été jugées suffisantes qu’en 2016 au regard des entretiens d’évaluation réalisés entre 2009 et 2015, que l’obtention d’un certificat de formateur occasionnel n’impose pas le reclassement sollicité. La société Sasca s’oppose ainsi aux demandes pécuniaires du salarié.
Les différences de rémunération entre des salariés exerçant un travail égal sont licites si elles sont justifiées par des critères objectifs et pertinents, étrangers à toute discrimination. L’employeur peut ainsi attribuer une augmentation de salaire, une prime ou un avantage à certains salariés si tous les salariés placés dans une situation identique au regard de l’avantage en bénéficient et si les règles déterminant son octroi sont préalablement définies et contrôlables.
Le salarié qui invoque en réalité une rupture d’égalité de traitement et non une discrimination doit présenter au juge des éléments susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ou de traitement. Ensuite, il revient à l’employeur de démontrer que cette différence de traitement est basée sur des éléments objectifs et pertinents.
Aux termes de l’article 3 de l’accord du 16 janvier 2006 relatif aux opérations d’avitaillement: ‘tout salarié ayant depuis 3 ans ou plus la classification K 185 – avitailleur d’aéronefs – échelon A de la filière transports du secteur d’activité exploitation de la classification des emplois de la CCNIP en date du 5 mars 1993 verra sa situation examinée : le salarié concerné pourra alors bénéficier d’une progression à l’échelon B (classification K 200) sous réserve de l’analyse favorable de ses compétences techniques et de son aptitude au travail en équipe. Cette disposition ne porte pas préjudice à des dispositions plus favorables existant en entreprise à la date de mise en oeuvre des présentes, ou qui viendraient à y être adoptées’.
Il ressort de ces stipulations, sur lesquelles se fondent le salarié, que toute salarié ayant la classification K 185 depuis au moins 3 ans pourra se voir attribuer la classification K200 si ses compétences techniques et son aptitude au travail en équipe sont jugées suffisantes par l’employeur.
En l’occurrence, le salarié entend justifier l’inégalité de traitement alléguée en produisant, en premier lieu, la retranscription d’un dialogue non daté et non signé entre l’employeur et des représentants du personnel sur le réexamen des situations des salariés au regard non pas de l’article 3 de l’accord du 16 janvier 2006 précité, mais de l’article 3.1 de l’accord du 28 février 2013 relatif à la rémunération au sein de la société Sasca, concernant les promotions individuelles. Il s’en déduit que cette retranscription n’est pas susceptible de caractériser l’inégalité de traitement alléguée.
En second et dernier lieu, la salarié produit le classement au niveau 200 de MM. [X] et [C] respectivement par courriers des 13 mars et 7 juin 2013. Toutefois, ces seuls courriers produits ne font mention ni d’un reclassement automatique ni des éléments sur lesquels l’employeur s’est fondé pour leur attribuer le coefficient 200 ni au fait que ces deux salariés avaient un statut et une ancienneté comparables à celui de M. [F] au moment de leur promotion. Il s’en déduit que ces documents ne sont pas susceptibles de caractériser l’inégalité de traitement alléguée.
Au surplus, comme le relève le jugement entrepris, les entretiens d’évaluation de M. [F] versées aux débats sur la période considérée font état d’une nécessaire progression quant à l’aptitude au travail d’équipe qui peut justifier, comme le prétend l’employeur, l’absence de classement du salarié au niveau 200 avant janvier 2016. Ainsi, l’entretien individuel réalisé le 16 avril 2013 a mentionné : ‘M. [F] doit continuer ses efforts de communication envers tous les chefs de piste qui en feront de même’. L’entretien du 20 novembre 2013 a précisé : ‘M. [F] est un avitailleur qui fait son travail mais qui est réfractaire aux changements et avec qui la communication est difficile. M. [F] doit continuer ses efforts de communication et la remontée d’informations vers les chefs de piste notamment dans la remontée des fiches presqu’accident’. L’entretien individuel 2014 a indiqué : ‘M. [F] est un avitailleur qui a des capacités mais qui se contente juste d’effectuer son travail sans montrer aucune motivation. M. [F] ne remonte toujours pas les informations via les fiches presqu’accident et sa communication vis-à-vis des chefs de piste est parfois très limitée’. L’entretien individuel 2015 a précisé : ‘M. [F] ne remonte toujours pas les informations via les fiches presqu’accident’.
Il résulte de ce qui précède que la rupture d’égalité de traitement alléguée par le salarié n’est pas établie. Par suite, ses demandes pécuniaires seront rejetées et le jugement sera confirmé en conséquence.
Sur la contrepartie financière pour le temps d’habillage et de déshabillage:
M. [F] sollicite la somme de 4.155,83 euros au titre de la contrepartie financière pour le temps d’habillage et de déshabillage pour la période de février 2013 à décembre 2015. Il soutient que les avitailleurs sont astreints au port d’une tenue de travail et que la direction refuse d’ouvrir des négocations pour mettre en place une compensation due au titre de l’article L. 3121-3 du code du travail. Il se prévaut d’un jugement du conseil de prud’hommes de Villeneuve-Saint-Georges qui a condamné la société Sasca à verser à des salariés un rappel de salaire de primes d’habillage et de déshabillage à raison de 20 minutes par jour sur 186 jours de travail par an, au seul motif que ces salariés devaient revêtir une tenue spécifique pour l’exécution de leurs prestations de travail.
La société Sasca s’oppose à cette demande au motif que les opérations d’habillage et de deshabillage de la tenue de travail n’ont pas à être effectuées sur le lieu de travail.
Aux termes de l’article L.3121-3 du code du travail, le temps nécessaire aux opérations d’habillage et de déshabillage, lorsque le port d’une tenue de travail est imposé par des dispositions légales, des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l’habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l’entreprise ou sur le lieu de travail, fait l’objet de contreparties. Ces contreparties sont accordées soit sous forme de repos, soit sous forme financière.
Il résulte de ce texte qu’une contrepartie n’est accordée que si le port d’une tenue de travail est imposé et que les opérations d’habillage et de deshabillage s’effectuent sur le lieu de travail.
Si les parties s’accordent sur le fait que les avitailleurs sont tenus de porter une tenue de travail, il ne résulte en revanche d’aucune pièce versée aux débats que les salariés sont tenus de procéder aux opérations d’habillage et de deshabillage sur leur lieu de travail. Au contraire, comme le relève le jugement entrepris, l’employeur produit deux attestations par lesquelles M. [M], chef de station et M. [Y], adjoint au chef de station ont indiqué que :
– l’employeur n’impose pas d’obligation de s’habiller ou de se deshabiller sur le lieu de travail, le salarié pouvant arriver en tenue de travail et repartir en tenue de travail,
– la tenue doit uniquement être rapportée sur la station pour le lavage afin que celui-ci ne soit pas fait au domicile.
Il s’en déduit que les demandes pécuniaires de M. [F] seront rejetées et le jugement sera confirmé en conséquence.
Sur la prime de performance :
M. [F] expose que l’employeur ne lui a versé aucune prime de performance au titre des années 2012 à 2015 et sollicite un rappel de salaire d’un montant de 17.300 euros. Il expose que l’employeur n’a pas indiqué comment il attribuait cette prime et que les objectifs fixés au cours des entretiens individuels ne sont pas réalistes.
La société Sasca conclut au débouté de cette demande. Si elle ne conteste pas ne pas avoir versé au salarié de primes de performances entre 2012 et 2015, elle soutient que cette prime est versée au regard des objectifs fixés au cours des entretiens annuels et qu’au regard de ceux-ci M. [F] n’était pas en droit de la percevoir. Elle soutient également que le salarié n’a jamais contesté l’absence de versement de la prime litigieuse en sollicitant un entretien auprès de son supérieur hiérarchique. Elle expose que M. [F] ne peut percevoir de prime au titre de l’année 2012 dans la mesure où l’article III de l’accord du 27 septembre 2012 sur lequel est fondée la prime de performance stipule que celle-ci sera versée annuellement au mois de mars de l’année suivant celle au titre de laquelle l’évaluation des performances du salarié a été réalisée. Elle expose également que le salarié ne précise pas comment il calcule le rappel de salaire sollicité et qu’il convient, en tout état de cause, de déduire de ses demandes les sommes qui lui ont été allouées au titre de la prime additionnelle, à savoir 1.200 euros pour l’année 2013, 1.200 euros pour l’année 2014 et 1.218 euros pour l’année 2015.
Lorsque le salarié a droit au paiement d’une rémunération variable reposant sur l’atteinte d’objectifs, il appartient à l’employeur de fixer les objectifs servant au calcul de cette rémunération.
L’employeur est tenu de produire les éléments dont dépend la rémunération du salarié.
En l’occurrence, selon l’accord conclu le 27 septembre 2012 entre la société Sasca et les organisations syndicales (pièce 27), la prime de performance concerne l’ensemble des salariés de la Sasca et est destinée à récompenser la performance individuelle au cours de l’année considérée. Pour en bénéficier, il faut être présent et en activité au 31 décembre de l’année considérée. La prime est déterminée par le responsable hierarchique après réalisation des entretiens individuels et validée par la direction des ressources humaines et la direction. Son montant est variable et aléatoire, pouvant aller jusqu’à 15% du salaire de base annuel. Pour le personnel percevant la prime de service additionnel Sasca, ce montant maximal de 15% du salaire de base annuel intègre les sommes versées au cours de l’année considérée au titre de la prime de service additionnel (15% du salaire de base annuel – primes de service additionnel versées au cours de l’année considérée). La prime de performance est versée au mois de mars de l’année suivant celle au titre de laquelle l’évaluation des performances a été réalisée.
En premier lieu, faute de précision sur ce point dans les conclusions des parties et dans les pièces versées aux débats, la cour considère que l’accord susmentionné est entré en vigueur au jour de sa signature, soit le 27 septembre 2012. Il s’en suit que M. [F], présent et en activité au 31 décembre 2012, était éligible à ce dispositif, peu important le fait que la prime ne soit versée qu’en mars 2013 et que le salarié n’ait pas contesté l’absence de versement de celle-ci avant de saisir le conseil de prud’hommes.
En deuxième lieu, il ressort de l’entretien individuel du 16 avril 2013 qu’aucun objectif n’avait été assigné à M. [F] au titre de l’année 2012 (pièce 19). Par suite, le salarié est en droit de percevoir une prime de performance correspondant au montant maximal pouvant lui être attribué, soit 15% du salaire de base annuel au titre de cette année. Il résulte des bulletins de paye versés aux débats que ce salaire de base annuel est de 24.283,92 euros bruts (12×2023,66). M. [F] est donc en droit de percevoir prorata temporis, pour la période allant du 27 septembre au 31 décembre 2012, une prime de performance de 911 euros bruts au titre de l’année 2012.
En troisième lieu, il ressort de l’entretien individuel du 20 novembre 2013 (pièce 20) que trois objectifs ont été assignés à M. [F] : soigner la rédaction des bons de livraison; faire le petit entretien et le nettoyage complet des camions; avoir une attitude positive et constructive et une participation active aux réunions de sécurité. Le salarié ne justifie pas que ces objectifs n’étaient pas réalisables comme il le prétend. Si l’entretien individuel mentionne qu’un des trois objectifs n’était pas atteint et que les autres l’étaient partiellement, l’employeur ne produit aucun élément permettant de déterminer les critères d’attribution de la prime de performance au regard de l’appréciation portée par lui sur les objectifs assignés au salarié.
Aussi, compte tenu des appréciations formulées dans l’entretien individuel du 20 novembre 2013, la cour considère que M. [F] devait percevoir une prime de 3% de son salaire de base annuel de l’année 2013. Il résulte des bulletins de paye versés aux débats que ce salaire était de 24.859,92 euros bruts (12×2071,66). Par suite, déduction faite de la prime de service additionnel de 1.200 euros que le salarié ne conteste pas avoir perçue dans ses conclusions, la cour considère que ce dernier n’est pas en droit de percevoir une prime de performance au titre de l’année 2013.
En quatrième lieu, il ressort de l’entretien individuel du 27 novembre 2014 (pièce 21), d’une part, que les trois objectifs assignés à M. [F] au titre de l’année 2013 ont été repris au titre de l’année 2014 et, d’autre part, que l’appréciation portée par l’employeur sur la réalisation de ceux-ci demeure la même, à savoir un objectif non atteint et deux objectifs partiellement atteints. Compte tenu des appréciations ainsi formulées par l’employeur sur les objectifs assignés au salarié, la cour considère qu’il devait percevoir une prime de 3% du salaire de base annuel de l’année 2014. Il résulte des bulletins de paye versés aux débats que ce salaire était de 25.058,76 euros bruts (12×2088,23). Par suite, déduction faite de la prime de service additionnel de 1.200 euros que le salarié ne conteste pas avoir perçue dans ses conclusions, la cour considère que ce dernier n’est pas en droit de percevoir une prime de performance au titre de l’année 2014.
En cinquième et dernier lieu, si les objectifs assignés au salarié au titre de l’année 2015 sont les mêmes que ceux des années 2013 et 2014 (pièce 21), l’entretien individuel du 23 novembre 2015 mentionne cette fois qu’ils étaient pleinement atteints (pièce 22). Par suite, le salarié est en droit de percevoir une prime de performance correspondant au montant maximal pouvant lui être attribué, soit 15% du salaire de base annuel au titre de cette année. Il résulte des bulletins de paye versés aux débats que ce salaire de base annuel était de 25.209,12 euros bruts (12×2100,76). M. [F] est donc en droit de percevoir une prime de performance de 2.563,36 euros bruts au titre de l’année 2015, déduction faite de la prime de service additionnel de 1.218 euros que le salarié ne conteste pas avoir perçue dans ses conclusions.
Il résulte de ce qui précède que la société Sasca est condamnée à verser à M. [F] un rappel de salaire de 3.474,36 euros bruts au titre de la performance des années 2012 à 2015. Le jugement sera infirmé en conséquence.
Sur la demande de dommages-intérêts :
M. [F] sollicite de l’employeur la somme de 5.000 euros pour l’avoir contraint à saisir le conseil de prud’hommes afin d’obtenir le versement des sommes réclamées au titre du présent litige.
La société Sasca s’oppose à cette demande.
En l’espèce, M. [F], qui ne précise pas le fondement juridique de sa demande, ne justifie pas de l’existence d’un préjudice distinct de celui résultant du non-versement des sommes qui lui ont été allouées par la cour dans les développements précédents.
Il sera donc débouté de sa demande et le jugement sera confirmé en conséquence.
Sur les demandes accessoires :
Conformément aux articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances de nature salariale porteront intérêt à compter de la convocation de l’employeur devant le conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires à compter de la décision qui les ordonne.
Compte tenu des développements qui précèdent, la demande du salarié tendant à la remise d’un bulletin de salaire récapitulatif conforme au présent arrêt est fondée et il y est fait droit.
La société Sasca qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens d’appel et être condamnée à payer à M. [F] la somme de 1.800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel.
La société sera en revanche déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,
INFIRME le jugement en ce qu’il a débouté M. [U] [F] de ses demandes au titre de la prime de panier de nuit, de la majoration pour incommodité et de la prime de performance ;
CONFIRME le jugement pour le surplus ;
Et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
CONDAMNE la société Sasca à verser à M. [U] [F] les sommes suivantes:
– 12,91 euros à titre d’indemnité de panier de nuit,
– 50 euros bruts à titre de majoration pour incommodité,
– 3.474,36 euros bruts au titre de la prime de performance pour les années 2012 à 2015,
– 1.800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel ;
DIT que les créances de nature salariale porteront intérêt à compter de la convocation de l’employeur devant le conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires à compter de la décision qui les prononce ;
ORDONNE la remise par la société Sasca d’un bulletin de paye récapitulatif conforme au présent arrêt ;
DEBOUTE la société Sasca de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Sasca aux dépens d’appel.
LA GREFFI’RE LA PR”SIDENTE