Formalités légales et AG des Sociétés : Cour d’appel de Paris, Pôle 4 – Chambre 13, 14 septembre 2022, 19/13245

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Formalités légales et AG des Sociétés : Cour d’appel de Paris, Pôle 4 – Chambre 13, 14 septembre 2022, 19/13245
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ng privé du 14 octobre 2002, M. [W] [S] [D] et Mme [I] [D], sa s’ur, ont racheté à leur troisième associée ses parts dans la Sci, devenant titulaires de 50 parts sociales chacun.

Lors de l’assemblée générale extraordinaire du même jour, Mme [I] [D] a été désignée en qualité de gérante de la Sci Merlan.

Un acte de cession de parts sociales daté du 27 février 2004 a été enregistré le 24 mars 2004 à la recette principale de [Localité 13] , aux termes duquel les 50 parts sociales détenues par M. [D] étaient cédées à M. [R] [P], concubin de Mme [I] [D], moyennant le prix de 1
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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 13

ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2022

(n° , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/13245 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAHPE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 novembre 2018 – Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 15/08241

APPELANT

Monsieur [R] [P]

Né le [Date naissance 4] 1960 à [Localité 11] (Iran)

[Adresse 10]

[Adresse 14] (IRAN)

Représenté et assisté de Me Sébastien REVAULT D’ALLONNES, avocat au barreau de PARIS, toque : E201

INTIMÉS

Madame [I] [D] épouse [P]

Née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 7] (93)

[Adresse 9]

TEHERAN (IRAN)

Représentée par Me Aude LEQUERRE-DERBISE de l’ASSOCIATION PERALTA-LEQUERRE – LEQUERRE- DERBISE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 98

Monsieur [W] [S] [D]

Né le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 7] (Seine-Saint-Denis)

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représenté et assisté de Me Michel-Alexandre SIBON de l’AARPI FOURNIER LABAT-SIBON ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0204

SCI MERLAN représentée par Maître [Z] [N], administrateur judiciaire, es-qualités d’administrateur provisoire de la SCI MERLAN

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée et assistée de Me Philippe THOMAS COURCEL de la SELARL CABINET THOMAS-COURCEL BLONDE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0165, substituée par Me Simon BADREAU, avocat au barreau de l’Eure

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 31 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre, chargée du rapport et Mme Estelle MOREAU, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Mme Claire DAVID, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffière lors des débats : Mme Sarah-Lisa GILBERT

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre, et par Florence Grégori, Greffière présente lors de la mise à disposition.

* * * * *

La société civile immobilière Merlan, constituée le 24 janvier 2000, est propriétaire de quatre biens immobiliers situés à [Localité 12] et à [Localité 15].

Par acte sous seing privé du 14 octobre 2002, M. [W] [S] [D] et Mme [I] [D], sa s’ur, ont racheté à leur troisième associée ses parts dans la Sci, devenant titulaires de 50 parts sociales chacun.

Lors de l’assemblée générale extraordinaire du même jour, Mme [I] [D] a été désignée en qualité de gérante de la Sci Merlan.

Un acte de cession de parts sociales daté du 27 février 2004 a été enregistré le 24 mars 2004 à la recette principale de [Localité 13] , aux termes duquel les 50 parts sociales détenues par M. [D] étaient cédées à M. [R] [P], concubin de Mme [I] [D], moyennant le prix de 138 euros la part soit 6900 euros.

L’acte de cession des parts sociales, le procès verbal de l’assemblée générale extraordinaire des associés de la Sci Merlan du 27 février 2004 décidant d’agréer la cession des parts de M. [D] à M. [P] et la modification de l’article 7 des statuts afférents à l’identité des titulaires des parts sociales a été déposé au greffe du tribunal de commerce de Paris le 25 juillet 2008.

M. [P] a été désigné en qualité de gérant de la Sci Merlan selon procès-verbal de l’assemblée générale extraordinaire des associés de la Sci Merlan du 1er septembre 2010 déposé au greffe du tribunal de commerce de Paris le 3 septembre suivant.

M. [P] et Mme [D] se sont mariés le [Date mariage 5] 2010 à l’ambassade de France à [Localité 8].

M. [D] et ses parents ont déposé le 3 novembre 2010 une plainte contre M. [P] pour faux, usage de faux et abus de faiblesse que le parquet de [Localité 12] a classé sans suite le 24 novembre 2011.

Par acte du 18 janvier 2011, M. [D] a fait assigner M. [P] aux fins de voir prononcer la nullité de l’acte de cession de parts sociales du 27 février 2004. Cette instance a été distribuée à la 9ème chambre du tribunal de grande instance de Paris.

Le 13 juillet 2012, M. [D] et ses parents ont déposé plainte avec constitution de partie civile pour faux et usage de faux, escroquerie, abus de faiblesse par sujétion psychologique et enlèvement et séquestration de [I] [D] à l’encontre de M. [P].

Le 10 septembre 2020, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a infirmé l’ordonnance du juge d’instruction ayant prononcé un non-lieu.

Arguant n’avoir jamais consenti à la cession de ses parts sociales au profit de M. [P] et de fautes de gestion commises par Mme [D]-[P] et M. [P], M. [D] par acte du 28 mai 2015 a fait assigner la Sci Merlan, M. [P] et Mme [D] épouse [P] aux fins d’obtenir la condamnation de la Sci Merlan au paiement de diverses sommes au titre de sa quote-part dans les résultats de la société pour les années 2008 à 2014, la condamnation de M. [P] et de Mme [D] épouse [P] à garantir à titre personnel la Sci Merlan des condamnation prononcées à son encontre et la révocation du mandat de gérant de la Sci Merlan détenu par M. [P]. Cette instance a été distribuée à la 5ème chambre du tribunal de grande instance de Paris.

Par ordonnance du 14 janvier 2016, le juge de la mise en état de la 5ème chambre a fait droit à la demande d’expertise en écriture sollicitée par M. [D].

Par ordonnance du 18 janvier 2017, le juge de la mise en état de la 9ème chambre a ordonné un sursis à statuer, jusqu’à ce que la 5ème chambre ait statué sur la validité des signatures attribuées à M. [D].

Mme [X] [M], experte désignée, a déposé son rapport le 18 janvier 2017.

Mme [Z] [N], administrateur judiciaire, a été désignée en qualité d’administrateur provisoire de la Sci Merlan, selon ordonnance du juge de la mise en état du 6 juillet 2017.

Suivant jugement du 22 novembre 2018, la 5ème chambre du tribunal de grande instance de Paris a :

– rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de M. [D],

– rejeté la demande de nouvelle expertise en écriture,

– déclaré prescrites les demandes de M. [D] dirigées à l’encontre de la Sci Merlan et de Mme [D] épouse [P] en tant qu’elles portent sur les actes critiqués du 27 février 2004 et les bénéfices distribués avant le 28 mai 2010,

– prononcé la nullité de l’acte de cession de parts de la Sci Merlan par M. [D] à M. [P] en date du 27 février 2004 en l’absence de consentement de M. [D],

– déclaré inopposable à M. [D] le procès-verbal d’assemblée générale du 27 février 2004,

– rappelé qu’en sa qualité d’associé M. [D] est fondé à solliciter de la Sci Merlan la communication de l’ensemble des documents sociaux conformément aux dispositions de l’article 1855 du code civil depuis le 28 mai 2010, non encore communiqués dans le cadre de la procédure,

– dit n’y avoir lieu à astreinte pour la période considérée (jusqu’en 2016),

– condamné la Sci Merlan à payer à M. [D] sa quote-part sur le montant des bénéfices distribués depuis le 28 mai 2010 soit 56 060 euros,

– condamné M. [P] à garantir la Sci Merlan au titre de ce paiement, diminution faite de sa créance au titre de son compte d’associé,

– prononcé la révocation de M. [P] de son mandat de gérant,

– condamné M. [P] à payer à M. [D] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [P] à payer à la Sci Merlan la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [P] a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 1er juillet 2019.

Par jugement du 11 mars 2020, la 9ème chambre du tribunal de grande instance de Paris a déclaré M. [D] irrecevable en sa demande d’annulation de l’acte de cession des parts sociales daté du 27 février 2014 pour cause d’autorité de la chose jugée du jugement rendu par la 5ème chambre du même tribunal le 22 novembre 2018.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 1er décembre 2020, M. [P] demande à la cour de :

– réformer le jugement en ce qu’il a :

prononcé la nullité de l’acte de cession de parts de la Sci Merlan par M. [D] à M. [P] du 27 février 2004,

déclaré inopposable à M. [D] le procès-verbal d’assemblée générale du 27 février 2004,

rappelé qu’en sa qualité d’associé M. [D] est fondé à solliciter de la Sci Merlan la communication de l’ensemble des documents sociaux conformément aux dispositions de l’article 1855 du code civil depuis le 28 mai 2010, non encore communiqués dans le cadre de la procédure,

condamné la Sci Merlan à payer à M. [D] sa quote-part sur le montant des bénéfices distribués depuis le 28 mai 2010 soit 56 060 euros,

l’a condamné à garantir la Sci Merlan au titre de ce paiement,

prononcé sa révocation de sa qualité de gérant,

l’a condamné à payer à M. [D] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

l’a condamné à payer à la Sci Merlan la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la diminution faite de sa créance au titre de son compte courant d’associé de la garantie qu’il doit apporter à la Sci Merlan, pour le paiement à M. [D] de sa quote-part sur le montant des bénéfices distribués depuis le 28 mai 2010 soit 56 060 euros,

– le recevoir en ses fins et prétentions, l’en dire recevable et bien fondé,

– constater la prescription de l’action en nullité de l’acte de cession de parts introduite par M. [D],

– déclarer opposable à M. [D] le procès-verbal d’assemblée générale du 27 février 2004,

– déclarer valable la cession de parts de la Sci Merlan intervenue entre lui et M. [D] le 27 février 2004, avec toutes conséquences de droit,

par conséquent,

– ordonner à M. [D] la restitution de tous documents de la Sci Merlan reçus à ce jour,

– condamner M. [D] à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [D] aux entiers dépens qui pourront à la demande des avocats être recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 27 janvier 2021, Mme [D] [I] épouse [P] demande à la cour de lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte à justice sur le mérite de l’appel formé par son époux, ainsi que des appels incidents des autres intimés.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 30 mars 2022, M. [D] demande à la cour de :

– déclarer M. [P] irrecevable en sa fin de non-recevoir tendant à voir constater la prescription et en tout état de cause mal fondé,

– déclarer M. [P] mal fondé en son appel, ses fins de non recevoir, prétentions et conclusions,

– confirmer le jugement en ce qu’il a :

rejeté la fin de non-recevoir tirée de son défaut de qualité à agir,

rejeté la demande de nouvelle expertise en écriture,

déclaré prescrites ses demandes dirigées à l’encontre de la Sci Merlan et de Mme [D]-[P] en tant qu’elles portent sur les actes critiqués du 27 février 2004 et les bénéfices distribués avant le 28 mai 2010,

prononcé la nullité de l’acte de cession de parts de la Sci Merlan par M. [D] à M. [P] en date du 27 février 2004 en l’absence de son consentement,

déclaré inopposable à son encontre le procès-verbal d’assemblée générale du 27 février 2004,

rappelé qu’en sa qualité d’associé il est fondé à solliciter de la Sci Merlan la communication de l’ensemble des documents sociaux conformément aux dispositions de l’article 1855 du code civil depuis le 28 mai 2010, non encore communiqués dans le cadre de la procédure,

dit n’y avoir lieu à astreinte pour la période considérée (jusqu’en 2016),

condamné la Sci Merlan à lui payer sa quote-part sur le montant des bénéfices distribués depuis le 28 mai 2010 soit 56 060 euros,

prononcé la révocation de M. [P] de sa qualité de gérant,

condamné M. [P] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. [P] à garantir la Sci Merlan de la condamnation au paiement de la somme de 56 060 euros prononcée à son profit, diminution faite de sa créance au titre de son compte courant d’associé,

statuant à nouveau,

– condamner M. [P] à garantir la société Sci Merlan de la condamnation au paiement de la somme de 56 060 euros prononcée à l’encontre de celle-ci à son profit,

y ajoutant,

– condamner M. [P] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Me Michel-Alexandre Sibom de l’AARPI FLS associés.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 7 septembre 2020, la Sci Merlan, représentée par son administrateur provisoire, Mme [Z] [N], administrateur judiciaire, demande à la cour de :

– lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte à justice sur le mérite de l’appel formé par M. [P] contre le jugement en ce qu’il a annulé la cession de parts sociales du 27 février 2004,

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

déclaré prescrites les demandes de M. [D] à son encontre et à celle de Mme [D]-[P] en ce qu’elles portent sur les actes du 27 février 2004 et les bénéfices distribués avant le 28 mai 2010,

condamné M. [P] à la garantir de la condamnation prononcée à son encontre,

condamné M. [P] à lui payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné M. [P] aux dépens,

– infirmer le jugement en ce qu’il a :

déclaré inopposable à M. [D] le procès-verbal d’assemblée générale du 27 février 2004,

l’a condamnée à payer à M. [D] sa quote-part sur le montant des bénéfices distribués depuis le 28 mai 2010, soit 56 060 euros,

condamné M. [P] à la garantir au titre de ce paiement, diminution faite de sa créance au titre de son compte d’associé,

statuant à nouveau de ces chefs,

– dire et juger M. [D] irrecevable car prescrit en sa demande portant sur les bénéfices distribués avant le 28 mai 2010,

– débouter M. [D] de sa demande en paiement à son encontre,

subsidiairement,

– débouter M. [P] de ses demandes au titre d’un prétendu compte courant d’associé,

– débouter M. [P] de sa demande au titre d’un prétendu enrichissement sans cause,

– condamner M. [P] à la relever et garantir de toutes les condamnations financières éventuellement prononcées à son encontre.

– en tout état de cause, débouter les parties de leurs demandes formulées à son encontre,

– condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner toute partie succombante aux entiers dépens de l’instance, tant de première instance que d’appel, dont distraction au profit de Me Philippe Thomas-Courcel.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 5 avril 2022.

SUR CE,

Sur la prescription de l’action en nullité de la cession de parts

Le tribunal a retenu que :

– l’action en nullité de la cession des parts sociales initialement soumise à la prescription trentenaire de l’ancien article 2262 du code civil s’est vue substituer la prescription quinquennale de l’article 2224 du code civil et a commencé à courir dans son intégralité à compter du 19 juin 2008, date de l’entrée en vigueur des dispositions nouvelles,

– cette action introduite par M. [D] devant le tribunal de grande instance de Paris le 18 janvier 2011, initialement distribuée à la 9ème chambre a valablement interrompu la prescription à l’égard de M. [P] mais n’a pas interrompu la prescription à l’encontre de Mme [D]-[P] ni de la Sci Merlan, non appelées à la cause dans cette procédure,

– l’action de M. [D] introduite à l’encontre de la Sci Merlan et de Mme [D]-[P] par acte du 28 mai 2015 est tardive pour avoir été introduite par assignation du 28 mai 2005 et ses demandes de condamnations au titre des actes critiqués et des années antérieures à 2010) sont prescrites.

M. [P] soutient que :

– par jugement en date du 11 mars 2020, la 9ème chambre du tribunal judiciaire de Paris a déclaré l’action introduite par M. [D] le 18 janvier 2011 irrecevable,

– l’action étant irrecevable dès son introduction, elle n’a pas pu avoir pour effet d’interrompre la prescription de l’action en nullité de la cession de parts,

– la seule assignation de l’ensemble des parties devant la 5ème chambre du même tribunal est intervenue plus de 5 ans après la connaissance par M. [D] de l’acte de cession, lequel a été déposé comme le procès-verbal d’assemblée générale du 27 février 2004 et la modification de l’article 7 des statuts au greffe du tribunal de commerce de Paris le 25 juillet 2008,

– l’action est donc prescrite au visa de l’article 2224 du code civil.

M. [D] répond que :

– la fin de non-recevoir tirée de la prescription est irrecevable en ce qu’elle n’a pas été soulevée en première instance,

– le tribunal a considéré à bon droit que l’action en nullité introduite le18 janvier 2011 et distribuée devant le 9ème chambre du tribunal puis évoquée dans l’instance initiée devant la 5ème chambre au regard de l’évolution du litige l’a été avant le terme de la prescription au 18 juin 2013,

– il n’a pu avoir connaissance des actes querellés avant leur publication au greffe le 25 juillet 2008, date pouvant également être reconnue comme point de départ de la prescription,

– l’action a été interrompue par différents actes dont :

– l’assignation devant le tribunal de grande instance de Paris en date du 18 janvier 2011 ayant donné lieu à distribution à la 9ème chambre,

– l’assignation devant le tribunal de grande instance de Paris du 28 mai 2015 ayant donné lieu à

distribution à la 5ème chambre, puisque si, en principe, l’interruption de la prescription ne peut s’étendre d’une action à l’autre, il en est autrement quand les deux actions, quoiqu’ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but,

– les conclusions d’incident du 30 septembre 2015 aux fins de vérification d’écritures tendant au même objectif, à savoir la nullité de la cession des parts sociales,

– les conclusions récapitulatives signifiées le 23 février 2017 devant la 5ème chambre et emportant demande d’annulation de ladite cession,

– la plainte avec constitution de partie civile du 13 juillet 2012, dès lors qu’elle vise les faits allégués dans l’action intentée devant les juridictions civiles ( Cass Civ. 2ème, 19 septembre 2019, n° 18-20.959), de sorte que tous les actes qui ont eu des causes différentes mais tendaient à un seul but et notamment les conclusions du 23 février 2017 ont été accomplis dans le délai quinquennal de prescription précédemment interrompu le 13 juillet 2012.

La fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action peut être soulevée en tout état de cause.

L’article 2224 du code civil dans sa version issue de la loi du 17 juin 2008 dispose :

Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

L’article 26-II de cette même loi du 17 juin 2018 a préciser en son paragraphe II :

Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de l’entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Selon l’article 2242 du code civil, l’interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance.

Il s’en déduit que l’interruption résultant de l’assignation en annulation de la cession des parts sociales du 18 janvier 2011 a produit ses effets jusqu’au prononcé du jugement du 11 mars 2020 qui a déclaré la demande irrecevable au seul motif que cette nullité avait été prononcée par le jugement du 22 novembre 2018.

Dès lors, les premiers juges ont considéré à bon droit que l’action en nullité de la cession de parts sociales intervenue en 2004 était soumise à la prescription trentenaire laquelle a été réduite à cinq ans en application de l’article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2018 et qu’en application de l’article 26-II de ladite loi, ce délai plus court que le précédent a couru à compter du 19 juin 2008 et jusqu’au 19 juin 2013 de sorte que la demande en annulation de cession introduite par l’acte du 18 janvier 2011 a valablement interrompu la prescription.

L’action en annulation de la cession de parts sociales datée du 27 février 2004 intentée par M. [D] à l’encontre de M. [P] est recevable, en confirmation du jugement.

Sur la nullité de la cession des parts sociales

Le tribunal a relevé que l’expert, aux termes d’une expertise en écriture diligentée dans le respect du contradictoire et après prise en compte des paraphes et signatures des statuts constitutifs du 24 janvier 2000 et de 23 autres éléments de référence pour les comparer à ceux figurant sur l’acte de cession litigieux, a conclu que les signatures de l’acte de cession et du procès verbal de l’assemblée générale du même jour n’émanaient pas de M. [D] et que cette conclusion corroborait sa propre comparaison des signatures apposées sur les actes litigieux avec les autres signatures de M. [D].

Il a, pour défaut de consentement, prononcé la nullité de l’acte de cession des parts de la Sci Merlan par M. [D] à M. [P].

M. [P] estime que si l’expertise contradictoire a conclu que la signature de l’acte de cession n’émanait pas de M. [D] en qualité de cédant à l’acte, le tribunal en a tiré une conséquence qui excède les rapports juridiques puisque bien que l’acte de cession soit rendu imparfait dans sa matérialité, il recouvre la réalité de la commune intention des parties manifestée conformément à l’article 1832 du code civil par l’absence d’affectio societatis du cédant, M. [D], subséquemment à la cession en question et la pleine participation à la vie de la société du cessionnaire, lui-même, dans des conditions exactement inverses puisque :

– pour l’année 2003, M. [D] a fait figurer dans ses déclarations fiscales 2042 et 2044 les revenus générés par les parts qu’il détenait dans la Sci Merlan, tandis que ses déclarations pour les années postérieures ne mentionnaient plus aucun revenu à ce titre, ce qui démontre qu’il savait ne plus être associé de la Sci Merlan et qu’il ne se considérait plus comme tel,

– M. [D], qui était encore rattaché fiscalement à ses parents à l’époque, prétend qu’il était persuadé d’être toujours associé au sein de la Sci Merlan alors que :

– ses parents connaissaient parfaitement les obligations déclaratives fiscales liées à la détention de parts dans une Sci, et ce d’autant plus que la Sci Merlan n’était pas la première ou la seule Sci au sein de laquelle ils avaient pu, les uns et les autres détenir des parts,

– ils étaient conseillés par une expert-comptable, à laquelle était confiée la tâche de remplir les déclarations de la famille et au sujet de l’établissement de ces déclarations, une sommation interpellative lui a été délivrée le 17 février 2011 pour lui poser diverses questions desquelles il ressort que M. [D] avait exprimé clairement sa volonté de se retirer de la Sci Merlan au profit de son beau frère,

– l’absence de correspondance entre les signatures de M. [D] ne suffit pas à contredire les intentions claires manifestées par celui-ci à la suite de la cession de parts du 27 février 2004, par des attitudes qui démontrent qu’il ne se considérait plus comme associé de la Sci Merlan puisqu’il ne s’inquiétait pas de la gestion, ne déclarait aucun revenu qui aurait pu correspondre à la qualité d’associé et ne participait ni aux bénéfices ni aux pertes de la Sci Merlan,

– depuis 2004, M. [D] n’a rien versé à la Sci et ne s’est porté caution d’aucun emprunt alors que la Sci Merlan a acquis entre juin 2004 et février 2007 trois biens immobiliers, financés par trois prêts pour lesquels M. [P] s’est porté caution solidaire et personnelle.

M. [D] soutient, au visa des articles 1108, 1316-4, 1341 anciens et 1865 du code civil, que :

– la cession des parts sociales doit être constatée par écrit,

– la preuve qu’il n’a jamais été le signataire des paraphes de l’acte de cession des parts sociales du 27 février 2004 est parfaitement rapportée par les conclusions de l’expert judiciairement commis, qui sont rédigées dans des termes exempts d’ambiguïté et M. [P] ne conteste plus que l’acte est imparfait dans sa matérialité,

– l’absence de signature de l’acte querellé équivaut à son absence de consentement, dès lors que la signature est une condition sine qua non de la perfection de l’acte et de la manifestation du consentement de son auteur,

– cette absence de consentement est corroborée par le fait que :

– il n’a pas plus été signataire et/ou l’auteur des paraphes du procès-verbal de l’assemblée générale des associés de la Sci Merlan en date du 27 février 2004 pour laquelle il n’a été justifié d’aucune convocation par Mme [D]-[P],

– l’acte de cession, le procès-verbal d’assemblée générale et les statuts modifiés à effet du 27 février 2004 ont été déposés au greffe du tribunal de commerce de Paris le 25 juillet 2008, soit plus de quatre années après leur prétendue réalisation, ce qui démontre une véritable volonté de masquer le plus longtemps possible l’existence des actes frauduleux de la part de leurs auteurs,

– M. [P] n’a jamais rapporté la moindre preuve de règlement du prix de ce qu’il considère pourtant être une cession parfaitement régulière,

– l’absence de déclaration de revenus fonciers à compter de l’exercice 2004 est liée au fait qu’il était étudiant en architecture de 2004 à 2007 et avait totalement délégué à sa s’ur, Mme [D]-[P] le soin de la gestion de la société,

– il n’a pas été informé de la cession de ses parts au profit de M. [P], comme le corrobore l’expert comptable Mme [O] en réponse à la sommation du 18 février 2011,

– il était dans l’ignorance des actes du 27 février 2004 comme l’attestent les versements qu’il a effectués sur la période postérieure à la prétendue cession pour un montant de 77 500 euros, démontrant qu’il continuait précisément à se comporter en associé de la Sci Merlan,

– il n’avait aucun intérêt à céder ses parts sociales et ne les auraient jamais cédées pour le prix de 6 900 euros alors même que l’actif net de la société ressortait à un montant de 113 000 euros,

– l’absence d’affectio societatis ne saurait avoir pour conséquence de valider une cession portant une fausse signature et d’entériner une forme de retrait forcé d’un associé.

La Sci Merlan souligne que M. [P] ne conteste plus que M. [D] n’a pas signé la cession de parts sociales du 27 février 2004 et rappelle les dispositions de l’article 1316-4 alinéa 1er ancien du code civil qui dispose que la signature apposée sur un acte juridique manifeste le consentement de cette partie aux obligations qui découlent de cet acte et avoue ne pas comprendre comment le comportement d’une partie pourrait pallier l’absence de signature de l’acte.

L’ancien article 1316-4, alinéa 1er du code civil, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, applicable au litige prévoyait que :

La signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie celui qui l’appose. Elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte.

L’article 1341 alinéa 1er ancien du même code , disposait que :

Il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, même pour dépôts volontaires, et il n’est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu’il s’agisse d’une valeur moindre.

La valeur fixée par décret était de 800 euros à la date de l’acte de cession litigieux ainsi qu’il résulte des dispositions de l’article 1er alinéa 1 du décret n°80-533 du 15 juillet 1980 dans sa version applicable jusqu’au 1er janvier 2005.

Enfin, l’article 1865 du code civil figurant dans les dispositions générales applicables à toutes les sociétés civiles, dans sa version applicable jusqu’au 21 juillet 2019, prévoit que :

La cession de parts sociales doit être constatée par écrit. Elle est rendue opposable à la société dans les formes prévues à l’article 1690 ou, si les statuts le stipulent, par transfert sur les registres de la société.

Elle n’est opposable aux tiers qu’après accomplissement de ces formalités et après publication.

L’article 12 des statuts enregistrés le 9 février 2000 reprend cette disposition puisqu’il prévoit que :

Les cessions de parts doivent être faites par acte authentique ou sous seing privé. Elles ne sont opposables à la société qu’après la signification ou l’acceptation prévue à l’article 1690 du code civil, elle ne sont opposables aux tiers que lorsqu’elles ont de surcroît été publiées.

Il ressort de ces dispositions que l’exigence d’un écrit était nécessaire à la validité comme à la preuve de l’acte de cession des parts sociales daté du 27 février 2004 qui portait sur une somme de 6 900 euros. Dès lors, il ne peut être suppléé à l’absence d’écrit par la commune intention des parties et l’absence d’affectio societatis alléguée entre M. [D] et sa soeur à l’inverse de l’affection societatis qui existerait entre Mme [D]-Romani et son époux est indifférente.

M. [P] ne conteste plus les conclusions de l’expertise en écriture aux termes desquelles “les signatures figurant sur l’acte de cession des parts sociales et sur le procès verbal de l’assemblée générale extraordinaire des associés de la Sci Merlan du 27 février 2004 n’émanent pas de M. [W] [S] [D]” puisqu’il admet que l’acte est ‘ imparfait en sa matérialité’.

L’absence de signature de l’acte litigieux par M. [D] équivaut à son absence de consentement dès lors que la signature est une condition de la perfection de l’acte et de la manifestation du consentement de son auteur.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu’il a prononcé la nullité de la cession de parts sociales datée du 27 février 2004, en application de l’article 1108 ancien du code civil.

Sur l’inopposabilité du procès-verbal d’assemblée générale du 27 février 2004 et ses conséquences

Le tribunal a déclaré, en l’absence de consentement, inopposable à M. [D] le procès-verbal d’assemblée générale du 27 février 2004 ayant agréé la cession et la modification des statuts dont la nullité ne pouvait plus être prononcée à l’encontre de la Sci Merlan et Mme [D]-[P] en raison de la prescription de l’action à leur encontre. Il a ordonné la communication à M. [D] de tous documents concernant la Sci Merlan pour la période non prescrite.

M. [P] fait valoir que l’action en annulation du procès verbal de l’assemblée générale dont la publication est intervenue le 25 juillet 2008 est manifestement intervenue tardivement, en sorte qu’elle est frappée de prescription triennale, prévue par l’article 1844-14 du code civil.

La Sci Merlan soutient que la décision déférée doit être infirmée en ce qu’elle a prononcé l’inopposabilité de l’assemblée générale du 27 février 2004 aux motifs que :

– il est acquis que le procès verbal de l’assemblée générale du 27 février 2004 a été publié au RCS de Paris le 25 juillet 2008 et ce dépôt est suffisant pour assurer l’opposabilité aux tiers,

– l’opposabilité de cette assemblée est sans conséquence sur le droit de M. [D] à poursuivre l’annulation de la cession de parts sociales.

M. [D] conclut à la confirmation du jugement estimant que le tribunal a, à bon droit, considéré que l’absence de consentement à l’assemblée générale du 27 février 2004 résultant d’une signature n’émanant pas de sa personne doit entraîner l’inopposabilité de l’acte à son égard.

Si l’opposabilité des actes d’une société est assurée par leur dépôt au registre du commerce et des sociétés, cette opposabilité ne concerne que les tiers et non les associés et les premiers juges ont, à bon droit, déclaré inopposable à M. [D] le procès verbal d’assemblée générale du 27 février 2004 qui comporte une signature dont l’expert judiciaire a dit qu’elle n’émanait pas de lui.

La communication de pièces ordonnée est également confirmée.

Sur la révocation de M. [P]

Le tribunal a considéré que la nullité de la cession des parts justifiait la révocation du mandat de gérance donné à M. [P] selon procès-verbal d’assemblée générale du 6 mai 2010.

M. [P] estime que la décision doit être réformée puisque la cession n’est pas nulle.

M. [D] demande la confirmation du jugement en ce qu’il a prononcé la révocation de M. [P] de ses fonctions de gérant puisqu’il a été désigné gérant de la Sci Merlan après s’être approprié ses droits sociaux, sans son consentement, le 1er septembre 2010, un tel comportement fautif constituant une cause légitime.

La nullité de la cession des parts sociales de M. [D] à M. [P], ayant privé M. [D] de ses droits d’associé notamment quant au choix du gérant, constitue une cause légitime, au sens de l’article 23 des statuts de la société reprenant l’article 1851 alinéa 2 du code civil, de révocation du mandat de gérant de M. [P] et le jugement est confirmé en ce sens.

Sur la demande de M. [D] en paiement par la Sci Merlan de sa quote-part de résultat et la garantie de M. et Mme [P]

Le tribunal a considéré que :

– les parties s’accordaient sur le montant des bénéfices cumulés de 2008 à 2016 et M. [D] était fondé à solliciter le paiement par la Sci Merlan de la moitié des sommes distribuées au titre des exercices 2010 à 2016 non couverts par la prescription soit la somme de 56 060 euros,

– Mme [P] ne peut plus voir sa garantie recherchée au titre des actes critiqués et de sa gérance correspondant aux périodes prescrites et ne peut davantage garantir la Sci Merlan pour les bénéfices distribués à tort à son époux depuis 2010 puisqu’elle n’était pas gérante,

– M. [P] doit garantir M. [D] du paiement de la condamnation prononcée à son profit à l’encontre de la Sci,

– la créance de M. [P] sur la Sci Merlan au titre de ses apports en compte courant soit la somme de 40 130 euros doit être déduite de la condamnation prononcée au profit de M. [D] par compensation.

La Sci Merlan représentée par son administrateur provisoire, appelante à titre incident à ce titre, soutient que :

– la répartition des bénéfices n’est pas automatique et nécessite une décision de l’assemblée générale des associés, en application de l’article 41 de ses statuts,

– si les associés ont décidé de distribuer des bénéfices, ceux-ci ont été partagés entre associés et elle ne saurait être condamnée à payer deux fois les mêmes bénéfices et M. [D] doit former une demande de remboursement contre M. [P], statuer autrement revenant à remettre en cause les statuts,

– ainsi, aucune condamnation ne saurait être prononcée à son encontre au titre de la quote-part des bénéfices qui pourrait revenir à M. [D],

– subsidiairement, M. [P] lui doit garantie mais les premiers juges ont commis une erreur de droit manifeste en tenant compte d’une créance en compte courant que M. [P] détiendrait sur la Sci Merlan puisque, dès lors que la cession de parts sociales litigieuse est annulée, M. [P] est réputé n’avoir jamais été associé et il ne saurait par définition bénéficier d’un compte courant d’associé,

– par conséquent, les apports de fonds par ce dernier à la société peuvent être au mieux qualifiés de prêts consentis à la Sci Merlan mais toute demande de remboursement de ces prêts est aujourd’hui prescrite, en application de l’article 2224 du code civil,

– en présence de prêts ayant une cause puisque des fonds ont été remis, M. [P] ne peut invoquer un enrichissement sans cause qui est une action subsidiaire.

M. [D] qui sollicite la confirmation du jugement sauf en ce qu’il a déduit la créance de compte courant d’associé de M. [P], estime que :

– le tribunal a condamné à bon droit la Sci Merlan au paiement de la quote-part de bénéfices de la société puisque la cession du 27 février 2004 n’a jamais fait l’objet d’une quelconque signification à la société Merlan ou d’une acceptation de sa part par acte authentique, conformément aux dispositions de l’article 12 alinéa 1er des statuts et ne lui a donc jamais été opposable, de sorte que cette dernière n’aurait jamais dû procéder à la distribution de bénéfices au profit de M. [P] et que les paiements effectués par elle ne sont pas libératoires,

– le tribunal ne pouvait se référer à une somme inscrite au compte courant d’associé de M. [P] puisqu’il est réputé n’avoir jamais été associé du fait de l’annulation de la cession du 27 février 2004,

– la Sci fait valoir de manière pertinente que les sommes versées à la société par M. [P] constituent au mieux des prêts dont celui-ci n’est plus recevable à solliciter le remboursement à raison de l’acquisition de la prescription extinctive de l’article 2224 du code civil.

M. [P] conteste l’argumentation de la Sci Merlan et rétorque que :

– s’agissant du compte courant d’associé, tant que la qualité d’associé ne lui était pas retirée par décision de justice, il agissait en tant qu’associé de la Sci, participait à la vie de la société et y a engagé ses fonds personnels,

– si la qualité d’associée lui est déniée, la Sci Merlan s’est enrichie sans cause à son détriment et il est fondé à solliciter le remboursement de sa créance, sans que l’on puisse lui opposer un délai de prescription qui aurait couru avant la perte de sa qualité d’associé par décision de justice,

– les mouvements de fonds ne peuvent être qualifiés de prêts et constituent un enrichissement sans cause qui échappe à la prescription.

Aucun appel n’est formé à l’encontre du chef du jugement ayant rejeté les demandes formées à l’encontre de Mme [D]-[P].

L’article 41 des statuts de la Sci Merlan stipule que :

S’il résulte des comptes de l’exercice, tels qu’ils sont approuvés par l’assemblée générale, l’existence d’un bénéfice distribuable, l’assemblée décide soit de le distribuer, soit de le reporter à nouveau, soit de l’inscrire à un ou plusieurs postes de réserve dont elle règle l’affectation et l’emploi’

Les modalités de mise en paiement des sommes distribuées sont fixées par l’assemblée générale ou, à défaut, par la gérance.

Les sommes distribuées sont réparties entre les associés au prorata de leurs droits respectifs dans le capital social.

Les dividendes ayant été distribués conformément à la répartition décidée lors des assemblées générales des associés, la Scp Merlan a exécuté ces décisions collectives alors même que la cession de parts litigieuse ne lui était pas opposable puisqu’elle ne lui avait pas été signifiée et qu’elle n’avait pas été acceptée par acte authentique, conformément à l’article 12 de ses statuts. Alors que ladite cession de parts est déclarée nulle, les paiements de dividendes par elle effectués au profit de M. [P] ne sont donc pas libératoires et M. [D] qui reste son créancier est fondé à agir en paiement à son encontre.

La somme de 56 060 euros correspondant à la moitié des sommes distribuées au titre des exercices 2010 à 2016 non couverts par la prescription n’étant pas contestée, le jugement est confirmé en ce qu’il a condamné la Sci Merlan à payer cette somme à M. [D].

La Sci Merlan est fondée à solliciter la garantie de M. [P] qui, la cession de parts sociales à son profit étant annulée, a perçu à tort des dividendes de la Sci.

M. [P] justifie au moyen de relevés de compte qu’il a apporté des fonds à la Sci Merlan en mai 2004, en mai et juillet 2005, en janvier, mars, mai et novembre 2006, en janvier, mars, avril, mai, juin et octobre 2007, en février, août, septembre et novembre 2008 et en juin 2009 pour un montant de 40 130 euros.

Si M. [P], ayant perdu la qualité d’associé de la Sci Merlan de manière rétroactive du fait de l’annulation de la cession de parts sociales à son profit, ne peut se prévaloir d’une créance au titre de son compte courant d’associé, il n’en reste pas moins qu’il justifie d’une créance née d’un prêt consenti à la Sci dont cette dernière lui doit le remboursement sans pouvoir lui opposer une quelconque prescription, cette créance n’étant devenue exigible qu’à compter de la demande en paiement valant mise en demeure de payer qui a été formulée lors de la première instance.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu’il a condamné M. [P] à garantir la Sci Merlan de la condamnation au paiement de la somme de 56 060 euros prononcée à son encontre sous déduction de la somme de 40 130 euros.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions relatives aux dépens et aux frais de procédure de première instance sont confirmées.

Les dépens d’appel doivent incomber à M. [P], partie perdante, lequel est également condamné à payer à M. [D] la somme de 7 000 euros et à Mme [N], prise en qualité d’administrateur provisoire de la Sci Merlan celle de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions dans les limites de l’appel,

Condamne M. [R] [P] aux dépens d’appel, dont distraction au profit de Me Philippe Thomas-Courcel et de Me Michel-Alexandre Sibom de l’AARPI FLS associés,

Condamne M. [R] [P] à payer à M. [W] [S] [D] la somme de 7 000 euros et à Mme [Z] [N], administrateur judiciaire, prise en qualité d’administrateur provisoire de la Sci Merlan celle de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


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