Forclusion et montant de la créance

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Forclusion et montant de la créance

Résumé de l’affaire

La SA Financo a consenti à M. [Z] [S] un crédit pour l’achat d’un véhicule, mais ce dernier n’a pas procédé au remboursement du prêt. Le tribunal de proximité de Lure a déclaré l’action en paiement irrecevable et a débouté la SA Financo de ses demandes. La SA Financo a fait appel de ce jugement et demande à la cour de la recevoir en son appel, de réformer le jugement et de condamner M. [Z] [S] à lui payer la somme due, de restituer le véhicule financé et de payer des frais. L’affaire a été mise en délibéré pour le 13 août 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

13 août 2024
Cour d’appel de Besançon
RG
23/00281
Le copies exécutoires et conformes délivrées à

ASW/LZ

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Minute n°

N° de rôle : N° RG 23/00281 – N° Portalis DBVG-V-B7H-ETK6

COUR D’APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale

ARRÊT DU 13 AOUT 2024

Décision déférée à la Cour : jugement du 30 décembre 2022 – RG N°22/000078 – TRIBUNAL DE PROXIMITE DE LURE

Code affaire : 53B – Prêt – Demande en remboursement du prêt

COMPOSITION DE LA COUR :

M. Michel WACHTER, Président de chambre.

Mme Anne-Sophie WILLM et Philippe MAUREL, Conseillers.

Greffier : Melle Leila ZAIT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DEBATS :

L’affaire a été examinée en audience publique du 14 mai 2024 tenue par M. Michel WACHTER, président de chambre, Mme Anne-Sophie WILLM et Philippe MAUREL, conseillers et assistés de Melle Leila ZAIT, greffier.

Le rapport oral de l’affaire a été fait à l’audience avant les plaidoiries.

L’affaire oppose :

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A. FINANCO

RCS de Brest n° 338 138 795

sise [Adresse 2]

Représentée par Me Bérengère CHENIN, avocat au barreau de BESANCON

ET :

INTIMÉ

Monsieur [Z] [S]

de nationalité française, demeurant [Adresse 1]

N’ayant pas constitué avocat.

ARRÊT :

– DEFAUT

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Melle Leila ZAIT, greffier lors du prononcé.

*************

EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS

La SA Financo a consenti à M. [Z] [S] un crédit affecté à l’achat d’un véhicule de marque Ford, modèle SMAX, immatriculé [Immatriculation 3], d’un montant de 26 182,76 euros au taux contractuel de 4,59 % l’an, remboursable en 60 mensualités selon offre préalable acceptée le 16 janvier 2020.

M. [Z] [S] ne procédant plus au remboursement du prêt, la déchéance du terme a été constatée par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 novembre 2020.

Par acte du 14 mars 2022, la société Financo a fait assigner M. [Z] [S] devant le tribunal de proximité de Lure aux fins de restitution du véhicule et de remboursement des sommes dues.

Par jugement rendu le 16 décembre 2022, le tribunal a :

– déclaré l’action en paiement irrecevable,

– débouté la SA Financo de l’ensemble de ses demandes,

– condamné la SA Financo aux dépens de l’instance,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :

– qu’il résultait de l’historique fourni qu’au 19 mars 2020, l’échéance de 531,87 euros n’avait pas été réglée, et qu’au 21 septembre, la dette s’élevait à 3 489,09 euros,

– que le 21 octobre 2020, le dossier avait été transmis au contentieux avec mention de retard d’impayé de 3 723,09 euros,

– que les fonds avaient été versés le 4 février 2020,

– que contrairement à ce qui était soutenu, le premier incident de paiement non régularisé était intervenu le 4 mars 2020 et non le 4 avril 2020,

– que la société Financo avait donc jusqu’au 5 mars 2022 pour assigner le défendeur en paiement,

– que l’assignation était cependant intervenue après cette date,

– que l’action était dès lors forclose.

-oOo-

Par déclaration du 3 mars 2023, la SA Financo a relevé appel du jugement en toutes ses dispositions.

Aux termes de ses uniques conclusions transmises le 2 juin 2023, elle demande à la cour :

– de la recevoir en son appel, la déclarer bien fondée,

– de réformer en toutes ses dispositions le jugement intervenu devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Lure en date du 30 décembre 2022 en ce qu’il a déclaré la présente action en paiement irrecevable, en ce qu’il l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et en ce qu’il l’a condamnée aux dépens de l’instance,

Et statuant à nouveau

– de débouter M. [Z] [S] de l’intégralité de ses prétentions, demandes, fins et conclusions,

– de constater, dire et juger qu’il était stipulé dans le tableau d’amortissement établi le 4 février 2020 en exécution du contrat de crédit affecté litigieux consenti par elle à M. [Z] [S] que la première échéance mensuelle de remboursement devait intervenir le 4 avril 2020,

– de constater, dire et juger que l’action en paiement introduite par elle à l’encontre de M. [Z] [S] au titre de l’offre préalable de crédit affecté acceptée par ce dernier le 16 janvier 2020 n’est nullement forclose,

– de condamner M. [Z] [S] à lui payer la somme en principal de 31 727,92 euros se décomposant de la façon suivante :

. échéances impayées : 3 723,09 euros

. intérêts de retard impayés : 50,21 euros

. capital à échoir : 24 092,45 euros

. indemnité légale de 8 % : 2 225,24 euros

. intérêts arrêtés au 31/01/2022 : 1 636,93 euros

. intérêts de retard au taux de 4,59 % l’an courus

et à courir à compter du 01/02/2022 et jusqu’au jour du plus complet règlement : mémoire

– de condamner M. [Z] [S] à lui restituer le véhicule de marque FORD modèle SMAX immatriculé [Immatriculation 3] financé, aux fins de sa mise en vente aux enchères publiques et dont le montant viendra en déduction de sa créance,

– de condamner M. [Z] [S] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner M. [Z] [S] aux entiers frais et dépens, y compris ceux d’appel dont distraction au profit de Maître Bérengère Chenin, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

-oOo-

La déclaration d’appel a été signifiée par dépôt à étude à M. [Z] [S] par acte du 24 avril 2023, lequel n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2024.

L’affaire a été appelée à l’audience du 14 mai 2024 et elle a été mise en délibéré au 13 août 2024.

Pour l’exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

I. Sur la forclusion

La société Financo fait valoir que le premier incident de paiement non régularisé au titre du contrat de crédit affecté est intervenu le 4 avril 2020. Elle renvoie au tableau d’amortissement et à l’historique du compte, et indique que dans la mesure où l’assignation a été délivrée le 14 mars 2022, soit dans le délai de l’article L.311-52 du code de la consommation, aucune forclusion n’est encourue. Elle précise que le tableau d’amortissement mentionne que la première échéance devait intervenir le 4 avril 2020 et non le 4 mars 2020, et que le débiteur n’a honoré aucune mensualité depuis cette date.

Réponse de la cour :

Aux termes des dispositions de l’article R 312-35 du code de la consommation applicable au litige : ‘Le tribunal judiciaire connaît des litiges nés de l’application des dispositions du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par :

-le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;

-ou le premier incident de paiement non régularisé ;

-ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable ;

-ou le dépassement, au sens du 13° de l’article L. 311-1, non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L. 312-93.

Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l’objet d’un réaménagement ou d’un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés ou après adoption du plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 732-1 ou après décision de la commission imposant les mesures prévues à l’article L. 733-1 ou la décision du juge de l’exécution homologuant les mesures prévues à l’article L. 733-7.’

En l’espèce, il est constaté :

– que l’offre de crédit affecté a été conclue le 16 janvier 2020 et qu’elle prévoit, en son article 1, que ‘la première mensualité sera due au plus tard le 2ème mois suivant la date de mise à disposition des fonds’, sauf en cas d’un crédit report,

– que l’historique du compte mentionne que les fonds ont été mis à disposition le 4 février 2020,

– que le tableau d’amortissement, édité le 4 février 2020, fixe la première échéance de remboursement du prêt à la date du 4 avril 2020,

– que l’historique du compte fait ressortir une première échéance impayée non régularisée, ainsi que l’absence de tout versement ultérieur depuis cette date.

Il ressort de ces éléments que les fonds ayant été versés le 4 février 2020, la première échéance du prêt devait donc être réglée, conformément au contrat, au plus tard le deuxième mois suivant, soit le 4 avril 2020.

Aucune échéance du prêt n’ayant été remboursée par M. [Z] [S] depuis le 4 avril 2020, l’action de la société Financo, qui a été engagée le 14 mars 2022, soit dans les deux ans du premier incident de paiement non régularisé, n’est donc pas forclose.

La demande de la société Financo est en conséquence recevable et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

II. Sur le montant de la créance

L’article 1353 du code civil dispose que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui s’en prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit son extinction.

Appliqué en matière de crédit, cet article fait peser sur la banque la charge de la preuve de la remise des fonds au titre du prêt dont elle demande le remboursement, ce qu’en l’espèce elle fait en justifiant du contrat de crédit, du tableau d’amortissement qui fait ressortir la réalisation du prêt au 4 février 2020, et de la facture de la société Denney Automobiles relative à la vente du véhicule à M. [S] faisant état de la réalisation du ‘financement FINANCO’ à hauteur de 26 182,76 euros.

La déchéance du terme du crédit a en outre été valablement prononcée après mise en demeure du 23 septembre 2020, de sorte que la créance de la société Financo, qui s’élève à la somme de 31 727,92 euros telle que justifiée par l’historique du compte et le décompte des sommes dues au 8 février 2022, se compose comme suit :

– premier impayé non régularisé : 4 avril 2020

– déchéance du terme : 20 octobre 2020

– échéances impayées : 3 723,09 euros

– intérêts de retard impayés : 50,21 euros

– capital à échoir : 24 092,45 euros

– indemnité légale de 8 % : 2 225,24 euros

– intérêts arrêtés au 31 janvier 2022 : 1 636,93 euros

– intérêts de retard au taux de 4,59 % l’an courus et à courirà compter du 01/02/2022 : PM

M. [Z] [S] sera en conséquence condamné à payer à la SA Financo la somme de 31 727,92 euros, outre intérêts de retard au taux de 4,59 % l’an courus et à courir à compter du 1er février 2022.

III. Sur la demande de restitution du véhicule

La société Financo ne présente aucun moyen à l’appui de sa demande de restitution du véhicule.

Elle n’est donc motivée ni en faits, ni en droit, de sorte que la société Financo en sera déboutée.

IV. Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile

Le jugement entrepris sera infirmé sur les dépens.

M. [Z] [S] sera condamné aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Maître Bérengère Chenin, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Il sera condamné à payer à la SA Financo la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt de défaut, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu par le tribunal de proximité de Lure le 30 décembre 2022 en toutes ses dispositions ;

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT

DECLARE recevable l’action en paiement introduite par la SA Financo à l’encontre de M. [Z] [S] ;

CONDAMNE M. [Z] [S] à payer à la SA Financo la somme de 31 727,92 euros, outre intérêts de retard au taux de 4,59 % l’an courus et à courir à compter du 1er février 2022 ;

DEBOUTE la SA Financo de sa demande de condamnation à restitution du véhicule de marque FORD, modèle SMAX, immatriculé [Immatriculation 3] ;

CONDAMNE M. [Z] [S] aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Maître Bérengère Chenin, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [Z] [S] à payer à la SA Financo la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Le greffier, Le président,


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