Il n’existe pas d’obligation de conseil en matière de contrat de financement de matériel.
En la cause, la société Grenke Location n’était pas tenue par un devoir de conseil concernant le financement d’un écran et d’une imprimante. Lorsque l’acheteur est un professionnel qui exerçait son activité depuis un certain temps, il a acquis l’expérience lui permettant de comprendre la porté de l’engagement souscrit pour financer la location d’un écran et d’une imprimante. La juridiction a donc rejeté les demandes d’annulation du contrat et de paiement de dommages intérêts formulées par l’acheteur. |
Résumé de l’affaire : Le 8 avril 2019, un contrat de livraison de matériel a été signé entre la société Maritho’s Cooking et Grenke Location, avec une livraison prévue pour le 6 mai 2019. Un contrat de location a été établi le 10 mai 2019 pour une durée de 36 mois, avec un loyer mensuel de 139 euros hors taxe. Le 15 octobre 2020, Grenke Location a résilié le contrat et a demandé à Mme [J] de restituer le matériel. Le 4 novembre 2022, Grenke Location a assigné Mme [J] en paiement. Le tribunal de commerce de Lorient a rendu un jugement le 11 septembre 2023, déclarant le contrat valide et condamnant Mme [J] à payer des sommes à Grenke Location. Mme [J] a interjeté appel le 2 novembre 2023, et les dernières conclusions des parties ont été déposées entre janvier et février 2024. L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 avril 2024. Mme [J] conteste la validité du contrat et demande des dommages et intérêts, tandis que Grenke Location demande la confirmation du jugement et des indemnités. La cour a confirmé le jugement et rejeté les autres demandes.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°314
N° RG 23/06187 – N° Portalis DBVL-V-B7H-UHC2
(Réf 1ère instance : 2022J338)
Mme [L], [R], [Y] [K] épouse [J]
C/
S.A.S. GRENKE LOCATION
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me LE MINTIER
Me PATAOU
Copie certifiée conforme délivrée
le :
à : TC de LORIENT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Fabienne CLÉMENT, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER LE GAC, Conseillère,
GREFFIERS :
Madame Julie ROUET, lors des débats, et Madame Frédérique HABARE, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 27 Mai 2024
devant Monsieur Alexis CONTAMINE, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 10 Septembre 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
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APPELANTE :
Madame [L], [R], [Y] [K] épouse [J]
née le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 9] (58)
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Jean-Guillaume LE MINTIER de la SELARL ISIS AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Gilles REGNIER, Plaidant, avocat au barreau de LORIENT
INTIMÉE :
S.A.S. GRENKE LOCATION
immatriculée au RCS de STRABOURG sous le numéro 428 616 734, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représentée par Me Solen PATAOU, Postulant, avocat au barreau de LORIENT
Représentée par Me Thierry COUMES, Plaidant, avocat au barreau de SARREGUEMINES
Le 8 avril 2019, une confirmation de livraison de matériel a été signée entre, d’une part, la société Maritho’s Cooking RCC 828 489 161 et, d’autre part, la société Grenke Location. Le matériel financé était indiqué comme étant fourni par la société e-pack Hygiène. La livraison était prévue pour le 6 mai 2019.
Le 10 mai 2019, un contrat de location pour professionnel, n°152-16016, a été conclu entre, d’une part, la société Maritho’s Cooking RCC 828 489 161 et, d’autre part, la société Grenke Location. Le matériel financé était indiqué comme étant fourni par la société e-pack Hygiène. Le contant était conclu pour une durée initiale de 36 mois, moyennant un loyer mensuel de 139 euros hors taxe.
Le 15 octobre 2020, la société Grenke Location a résilité le contrat de location et mis en demeure Mme [J], née [K], de restituer le matériel.
Le 4 novembre 2022,la société Grenke Location a assigné Mme [J] en paiement.
Par jugement du 11 septembre 2023, le tribunal de commerce de Lorient a :
– Dit que la société Grenke Location est recevable à agir contre Mme [J],
– Dit que le contrat de location n°152-16016 conclu entre la société Grenke Location et Mme [J] est valide,
– Débouté en conséquence Mme [J] de sa demande de nullité du contrat,
– Condamné Mme [J] à payer à la société Grenke Location la somme principale de 4.571,80 euros majorée des intérêts au taux légal à compter de la réception de la mise en demeure du 15 octobre 2020, soit le 26 octobre 2020,
– Condamné Mme [J] à payer à la société Grenke Location la somme de 2.848,14 euros au titre de l’indemnité de non restitution de l’objet du contrat de location pour professionnel n°152-16016,
– Débouté Mme [J] de sa demande de délai de paiement,
– Débouté Mme [J] de sa demande de dommages et intérêts d’un montant de 5.000 euros,
– Condamné Mme [J] à payer à la société Grenke Location la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Débouté Mme [J] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Dit n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire du présent jugement,
– Condamné Mme [J] aux entiers dépens,
– Dit toutes autres demandes, fins et conclusions, des parties injustifiées et en tout cas mal fondées, les en a déboutées.
Mme [J] a interjeté appel le 2 novembre 2023.
Mme [J] a déposé ses dernières conclusions le 30 janvier 2024. La société Grenke Location a déposé ses dernières conclusions le 15 février 2024.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 avril 2024.
PRÉTENTIONS ET MOYENS :
Mme [J] demande à la cour de :
– Infirmer en toutes ses dispositions le jugement,
Et statuant à nouveau :
– Constater qu’aucune demande de conciliation n’est intervenue à la demande la société Grenke Location ,
– Dire et juger que Mme [J] n’était pas engagée par le contrat de location-vente de matériel de bureautique signé le 8 avril 2019 et que la société Grenke Location a manqué à son devoir de conseil et de rédacteur d’actes, eu égard à l’apposition d’un numéro d’immatriculation au RCS erroné, de l’absence d’apposition de date au contrat et de l’absence de vérification la qualité professionnelle de Mme [J],
– Déclarer nul et non avenu le contrat de location de matériel signé le 8 avril 2019,
– Débouter la SAS Grenke location de toutes ses demandes,
A titre subsidiaire :
– Accorder les plus larges délais de paiement à Mme [J],
– Condamner la société Grenke Location au paiement entre les mains de Mme [J] de la somme de 5.000 euros en application de l’article 1240 du code civil à titre de dommages et intérêts pour non respect de leurs obligations professionnelles,
– Condamner la société Grenke Location au paiement entre les mains de Mme [J] de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Réserver les dépens de la procédure.
La société Grenke Location demande à la cour de :
– Statuer ce que de droit sur la recevabilité de l’appel,
– Le dire en tout état de cause mal fondé,
– Débouter Mme [J] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– Confirmer le jugement,
Y ajoutant,
– Condamner Mme [J] au paiement au profit de la société Grenke Location d’une indemnité de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner Mme [J] aux entiers frais et dépens.
Sur la force obligatoire du contrat :
Mme [J] fait valoir que sa responsabilité ne pourrait être recherchée au motif que le contrat de location aurait été conclu entre la société Maritho’s cooking, dont elle la présidente, et la société Grenke location.
La société par actions simplifiée Maritho’s Cooking a été immatriculée le 5 février 2019. Mme [J] en est la présidente. Cette société a été placée en redressement judiciaire le 14 février 2020, la date de cessation des paiements étant fixée au 1er septembre 2019. Le 24 juillet 2020 elle a été placée en liquidation judiciaire.
Le tampon du client apposé sur le contrat de location fait référence à la société Maritho’s cooking, ayant pour adresse le ‘[Adresse 7] [Localité 5]’, pour numéro de téléphone le [XXXXXXXX02], pour adresse mail ‘[Courriel 10]’. Ces quatre premières informations sont exactes. Enfin, il est également indiqué que le numéro de SIREN de l’entreprise serait le ‘828 489 161″. Pour autant ce numéro ne correspond pas à celui de la société Grenke Location, dont le numéro de SIREN est le ‘848002689″, mais à celui de l’entreprise individuelle ‘[L] [K] épouse [J]’.
Cette entreprise a été immatriculée le 2 mai 2018. Le registre du commerce et des sociétés mentionne que le 2 mai 2018 il a été précisé que le nom de domaine était marithos-cooking.fr.
Il apparait que Mme [J] a délibérément utilisé un tampon contenant des informations contradictoires. Elle exerçait à la date de signature du contrat une activité directe en utilisant la dénomination marithos cooking. Elle a délibérément entretenu une confusion entre les deux entreprises. Il convient de s’en tenir au numéro de RCS mentionné sur le tampon utilisé lors de la signature du contrat. Ce numéro correspond à l’activité exercée à titre personnel par Mme [J]. C’est elle qui s’est trouvée engagée contractuellement.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement sur ce point.
Sur l’annulation du contrat et le manquement aux obligations contractuelles :
Mme [J] fait valoir que la responsabilité de la société Grenke location devrait être recherchée en sa qualité de rédactrice d’actes. Elle indique en ce sens que le contrat de location ne comporterait aucune date, que le cocontractant serait erroné et enfin que le devoir de conseil n’aurait pas été respecté.
Il apparait que le contrat de location fait bien état d’une date, celui-ci ayant été accepté le 10 mai 2019.
Comme il a été vu supra, les difficultés d’identification du client signataire sont le seul fait de Mme [J] et c’est bien cette dernière qui s’est trouvée engagée à titre personnel.
Mme [J] n’indique pas en quoi la société Grenke Location aurait été tenue à un devoir de conseil concernant le financement d’un écran et d’une imprimante.
Mme [J] est une professionnelle qui exerçait son activité à titre personnel depuis le 22 mars 2017. Elle avait ainsi acquis l’expérience lui permettant de comprendre la porté de l’engagement souscrit pour financer la location d’un écran et d’une imprimante.
Il y a lieu de rejeter les demandes d’annulation du contrat et de paiement de dommages intérêts.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
Mme [J] demande un constat d’absence de conciliation. Il ne s’agit pas d’une demande en justice et cet argument ne vient à l’appui d’aucune demande.
En tout état de cause, il apparaît que le montant du litige s’élève à 7.411,94 euros. Le litige comprend, en effet, le montant des loyers n’ayant pas été payé, soit 4.571,80 euros outre intérêts, ainsi que les indemnités de non restitution de l’objet du contrat de location, soit la somme de 2.848,14 euros. Le montant de la demande est donc supérieur à 5.000 euros. Il n’y avait donc pas d’obligation de conciliation amiable préalable.
Sur la demande de délais de paiement :
Mme [J] a déjà, de fait, bénéficié d’importants délais de paiement. Il n’y a pas lieu de lui en accorder de nouveaux.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur les frais et dépens :
Il y a lieu de condamner Mme [J], partie succombante, aux dépens d’appel et de rejeter les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour :
– Confirme le jugement,
Y ajoutant :
– Rejette les autres demandes des parties,
– Condamne Mme [J] aux dépens d’appel.
Le Greffier Le Président