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Le salarié qui fait la promotion d’un concurrent de son employeur sur les réseaux sociaux s’expose à un licenciement pour cause réelle et sérieuse.
Dans son message posté sur Facebook, le salarié d’une salle de sport a partagé une annonce relative à l’ouverture d’un centre de fitness ‘Basic Fit’, et de ses offres promotionnelles, accompagnée de ces trois mots : ‘Basic Fit j’arrive’.
Cette seule proposition telle que formulée, contrairement à ce que soutient l’employeur, ne saurait constituer littéralement ‘l’éloge’ de ce nouveau centre, étant relevé qu’il n’est nullement prétendu que la salarié avait postulé pour celui-ci ou qu’il y aurait des intérêts de quelque nature. Le salarié n’avait donc pas contrevenu à sa clause d’exclusivité ni à son obligation de confidentialité.
De même, il n’a diffusé aucun propos injurieux ou outranciers à l’encontre de la société ni même aucune information à son sujet.
Il reste qu’en partageant sur un espace public l’annonce publicitaire de l’ouverture d’une nouvelle salle de sport concurrente de l’établissement qui l’employait et à proximité duquel elle se situait ce, en manifestant -même en quelques mots- son approbation par son intention de s’y rendre, et alors que la photo de son profil permettait aux clients habituels de Magic Form fréquentant Facebook d’en reconnaître l’auteur, déjà avisé par l’employeur de son obligation de discrétion professionnelle sur les réseaux sociaux, a manqué à son obligation de loyauté vis à vis de son employeur.
Le manquement à l’obligation de loyauté commis par le salarié constitue une cause réelle et sérieuse de son licenciement sans revêtir néanmoins une importance telle qu’il rendait impossible son maintien dans l’entreprise de sorte que la faute grave n’a pas été retenue.
En application de l’article L. 1222-1 du code du travail, le salarié est tenu à une obligation de loyauté et de fidélité inhérente au contrat de travail lui-même. Elle s’applique même en l’absence de stipulations spécifiques et interdit au salarié les agissements qui constitueraient une concurrence à l’égard de l’employeur.
Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige portant sur le licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles et si un doute subsiste, il profite au salarié.
En cas de licenciement disciplinaire, le juge doit rechercher si le motif allégué constitue une faute. Si les faits invoqués, bien qu’établis, ne sont pas fautifs, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
La faute grave privative du droit aux indemnités de rupture, qu’il appartient à l’employeur de démontrer, correspond à un fait ou un ensemble de faits qui, imputables au salarié, constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible son maintien dans l’entreprise.
Pour apprécier la gravité de la faute, les juges prennent en compte divers éléments tels que le contexte des faits (Soc., 1er décembre 2010, pourvoi n° 09-65.985), l’ancienneté du salarié (Soc., 17 juin 2009, pourvoi n° 07-43.236- Soc., 5 décembre 2006, pourvoi n° 04-43.599), l’existence ou l’absence de précédents disciplinaires (Soc., 14 septembre 2010, pourvoi n° 09-41.275).
Un motif tiré de la vie personnelle du salarié peut justifier un licenciement disciplinaire s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail (Soc., 27 mars 2012, pourvoi n° 10-19.915).
La mise en oeuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits fautifs mais le maintien du salarié dans l’entreprise est possible pendant le temps nécessaire pour apprécier le degré de gravité des fautes commises.
COUR D’APPELd’ANGERS
ARRÊT DU 15 Décembre 2022
Chambre Sociale
ARRÊT N°
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/00414 – N° Portalis DBVP-V-B7E-EXMY.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 18 Novembre 2020, enregistrée sous le n° F 20/00042
APPELANTE :
S.A.R.L. ESNAULT FINANCES
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me GIBIERGE, avocat substituant Maître Luc LALANNE de la SCP LALANNE – GODARD – HERON – BOUTARD – SIMON, avocat au barreau du MANS – N° du dossier 20181015
INTIME :
Monsieur [Z] [J]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Maître Eric TRACOL, avocat au barreau du MANS – N° du dossier 20190008
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Octobre 2022 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame DELAUBIER, conseiller chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Madame Estelle GENET
Conseiller : Mme Marie-Christine DELAUBIER
Conseiller : Mme Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS
Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN
ARRÊT :
prononcé le 15 Décembre 2022, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame DELAUBIER, conseiller pour le président empêché, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
FAITS ET PROCÉDURE
La société à responsabilité limitée Esnault Finances exploite sous l’enseigne ‘Magic Forme’ deux centres de remise en forme, l’un situé sur la commune de [Localité 6], l’autre en périphérie du Mans. Elle applique à ses salariés la convention collective nationale du sport du 7 juillet 2005 et emploie plus de onze salariés.
M. [Z] [J] a été engagé par la société Esnault Finances dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à compter du 2 novembre 2016 en qualité d’animateur sportif des deux centres Magic Form.
En dernier état de la relation contractuelle, sa rémunération mensuelle brute s’élevait à la somme de 2 007,19 euros.
Par courrier du 18 septembre 2018, la société Esnault Finances a convoqué M. [J] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 27 septembre 2018. Cette convocation était assortie d’une mise à pied à titre conservatoire.
Puis, par courrier du 3 octobre 2018, la société Esnault Finances a notifié à M. [J] son licenciement pour faute grave lui reprochant en substance de faire de la publicité sur les réseaux sociaux pour une salle de sport concurrente et sa déloyauté dans l’exécution du contrat de travail.
Contestant le bien fondé de son licenciement, M. [J] a saisi le conseil de prud’hommes du Mans le 3 juillet 2019 pour obtenir la condamnation de la société Esnault Finances, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, au paiement d’un rappel de salaire pour mise à pied à titre conservatoire injustifiée, d’une indemnité compensatrice de préavis, de dommages et intérêts pour licenciement abusif et vexatoire et d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Esnault Finances s’est opposée aux prétentions de M. [J] et a sollicité sa condamnation au paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 18 novembre 2020, le conseil de prud’hommes a :
— dit que le licenciement de M. [J] s’analyse en un licenciement abusif, dénué de cause réelle et sérieuse ;
— écarté les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail issues de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, les déclarant non-conformes aux dispositions de l’article 10 de la convention 158 de l’Organisation Internationale du Travail et de l’article 24 de la Charte sociale européenne de mai 1996, ratifiée par la France ;
— condamné en conséquence la société Esnault Finances à verser à M. [J] les sommes suivantes :
* 972,72 euros au titre des salaires et heures supplémentaires retenues sur les salaires de septembre et octobre 2018 relativement à la mise à pied et 97,27 euros au titre des congés payés y afférents ;
* 2 007,19 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 200,72 euros au titre des congés payés y afférents ;
* 12 043,14 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
* 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture vexatoire ;
* 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
— ordonné la remise à M. [J] d’un bulletin de salaire conforme au jugement ;
— débouté la société Esnault Finances de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
— ordonné l’exécution provisoire du jugement sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile ;
— condamné la société Esnault Finances aux entiers dépens.
Pour statuer en ce sens, le conseil de prud’hommes a notamment considéré que l’utilisation d’un pseudonyme -et non d’une véritable identité- ainsi que les termes employés sur les réseaux sociaux ne permettaient pas de caractériser un manque de loyauté de la part de M. [J] à l’encontre de son employeur.
La société Esnault Finances a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique au greffe de la cour d’appel le 25 novembre 2020, son appel portant sur tous les chefs lui faisant grief ainsi que ceux qui en dépendent et qu’elle énonce dans sa déclaration.
Par acte délivré le 17 décembre 2020, la société Esnault Finances a fait assigner M. [J] devant le premier président de la présente cour afin de voir ordonner la levée de l’exécution provisoire sur les condamnations indemnitaires prononcées et, à titre subsidiaire, la consignation des fonds.
Par une ordonnance de référé du 3 février 2021, le premier président a :
— rejeté l’exception d’irrecevabilité de la demande de suspension de l’exécution provisoire;
— débouté la société Esnault Finances de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement entrepris :
et faisant partiellement droit à la demande d’aménagement de l’exécution provisoire de la société Esnault Finances :
— dit que la société Esnault Finances sera autorisée à consigner la somme de 5 000 euros sur la condamnation prononcée à son encontre à hauteur de 12 043,14 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
— dit que cette consignation devra être effectuée, dans le mois suivant la présente décision, à la Caisse des dépôts et consignations dans l’attente de l’arrêt à intervenir sur l’appel de la décision susvisée ;
— rejeté le surplus de la demande d’aménagement de l’exécution provisoire ;
— débouté M. [J] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
— condamné la société Esnault Finances à payer la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
— laissé les dépens à la charge de la société Esnault Finances.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 14 septembre 2022.
Le dossier a été fixé à l’audience du conseiller rapporteur du 4 octobre 2022.
*
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La société Esnault Finances, dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 8 décembre 2020, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
— juger que la faute grave de M. [J] est caractérisée et établie ;
— juger que le licenciement de M. [J] repose bien sur une cause réelle et sérieuse ;
— à titre principal, débouter M. [J] de l’ensemble de ses demandes ;
— à titre subsidiaire, et si la cour considère le licenciement de M. [J] comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, accorder au salarié la somme de 0.5 mois de salaire soit 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
— à titre infiniment subsidiaire, accorder à M. [J] la somme de 2 mois de salaire soit 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
— en tout état de cause, débouter M. [J] de sa demande de dommages et intérêts pour rupture vexatoire ;
— condamner M. [J] au paiement de la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de son appel, la société Esnault Finances prétend que M. [J] a manqué à son obligation de loyauté en réalisant de la publicité pour une salle de sport concurrente ‘Basic Fit’ ce, explicitement et publiquement. Elle fait valoir que le message publié par M. [J] sur le réseau social Facebook le 7 septembre 2018 indiquant ‘Basic Fit j’arrive’ caractérise ainsi une faute grave. Elle considère que le réseau social Facebook, au regard de sa finalité et de son organisation doit être assimilé à un espace public et affirme au surplus que les captures d’écran des messages litigieux ainsi que la photographie de ‘profil’ de M. [J] permettaient d’identifier le salarié.
Enfin, elle fait observer que cet événement n’est pas isolé et que M. [J] avait déjà été rappelé à l’ordre en juillet 2017 pour avoir échangé sur Facebook sur une autre salle concurrente, l’Orange Bleue.
La société Esnault Finances estime en conséquence que la mise à pied à titre conservatoire et la non-exécution du préavis par M. [J] étaient justifiées par l’existence d’une faute grave. Elle ajoute que le conseil de prud’hommes n’a pas suivi les avis de la Cour de cassation du 17 juillet 2019 lesquels ont retenu la compatibilité du barème institué par l’article L. 1235-3 du code du travail avec l’article 10 de la convention n°158 de l’OIT et l’article 24 de la charte sociale européenne.
L’employeur soutient encore que M. [J], qui avait une ancienneté inférieure à deux ans lors de l’envoi de la lettre de notification du licenciement, ne peut prétendre qu’à des dommages et intérêts au montant devant être compris entre 0,5 et 2 mois de salaire.
Enfin, la société Esnault Finances assure que la notification d’une mise à pied conservatoire, mesure mise à la disposition de l’employeur en cas de faute grave, ne peut être analysée comme illustrant des ‘circonstances vexatoires’ justifiant le versement de dommages et intérêts.
*
M. [J], dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 31 décembre 2020, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :
— déclarer la société Esnault Finances, recevable mais mal fondée en son appel principal;
— le déclarer recevable et fondé en son appel partiel incident du jugement déféré ;
— constater la nullité du licenciement en application des dispositions des articles L. 1132-1 et L. 1235-3-1 du code du travail, avec toutes conséquences de droit, et confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Esnault Finances au paiement des salaires et indemnités légales afférentes à la rupture de son contrat de travail et à l’indemniser de la rupture infondée de son contrat de travail ;
— et subsidiairement, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
— dit que son licenciement était abusif et dénué de cause réelle et sérieuse et condamné la société Esnault Finances au paiement des salaires et indemnités légales afférentes à la rupture de son contrat de travail et à l’indemniser des conséquences de la rupture abusive de son contrat de travail ;
— condamné la société Esnault Finances à lui payer la somme de 972,72 euros correspondant au salaire et heures supplémentaires retenues sur salaire en septembre et octobre 2018, pour mise à pied, outre celle de 97,27 euros, à titre d’indemnité de congés payés y afférents ;
— condamné la société Esnault Finances à lui payer la somme de 2007,19 euros à titre d’indemnité de préavis, et celle de 20,72 euros à titre d’indemnité de congés payés, y afférents.
Y ajoutant :
— dire et juger qu’au regard des circonstances de la rupture et de sa nullité, l’ancienneté du salarié doit s’apprécier en tenant compte de la nullité et non pas à la date de notification du licenciement ;
— et donc, dire et juger qu’il est fondé à revendiquer une indemnité de licenciement de 961,78 euros (501,80 + 459,98 euros), en application des dispositions des articles L. 1234-1, R. 1234-1 et 2 du code du travail ;
— condamner la société Esnault Finances à lui payer lesdites sommes.
Au principal :
— faire application des dispositions de l’article L. 1235-3-1 du code du travail, et confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Esnault Finances à l’indemniser des conséquences illicites et abusives de son contrat de travail, sans application de l’article L. 1235-3 du code du travail ;
— et à défaut, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit et jugé que le barème instauré par l’article L. 1235-3 du code du travail, créé par ordonnance n° 2017-1387 du code du travail, est non conforme aux dispositions des articles 8 et 10 de la convention 158 de l’Organisation Internationale du travail, et à celle de l’article 24 de la Charte sociale européenne de mai 2016, ratifiée par la France ;
— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a écarté les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, et alloué la somme de 12 043,14 euros au titre de l’indemnisation de son préjudice ;
— réformer sur le quantum, et y ajoutant en cause d’appel, porter à la somme de 32 115,04 euros, soit seize mois de salaire, le montant de l’indemnité pour licenciement nul, ou à défaut, licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
— condamner en conséquence, la société Esnault Finances à lui payer la somme de 24086,28 euros, à titre de complément d’indemnité pour licenciement nul ou pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Subsidiairement et à tout le moins :
— si la cour estimait devoir faire application des dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, condamner la société Esnault Finances à lui payer la somme de 7 025,17 euros, soit 3 mois et demi de salaire, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Esnault Finances à lui payer des dommages et intérêts pour rupture abusive et vexatoire du contrat de travail, mais réformer sur le quantum, et porter ladite somme à celle de 3 000 euros et condamner la société Esnault Finances au paiement de celle-ci ;
— confirmer le jugement entrepris sur l’obligation de la société Esnault Finances à lui remettre les bulletins de salaires modifiés, au besoin, en fonction des condamnations à intervenir ;
— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Esnault Finances à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance ;
— y ajoutant, condamner la société Esnault Finances à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu’il a dû exposer en cause d’appel ;
— condamner la société Esnault Finances aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Au soutien de ses intérêts, M. [J] fait valoir que la société Esnault Finances ne rapporte pas la preuve de la faute grave invoquée et que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse.
Il indique à titre liminaire que les faits initiaux de juillet 2017 n’avaient rien de critiquable. Il souligne ainsi que ce message ne faisait aucune allusion à son emploi, que lui-même n’était pratiquement pas identifiable et que surtout, il n’a jamais tenu de propos infamants ou dénigrants à l’encontre de son employeur ou d’une entreprise concurrente.
Il assure ensuite que les faits du 7 septembre 2018 ne sont pas constitutifs d’un manquement de sa part, prétendant que la publication litigieuse ne fait pas l’éloge de la salle Basic Fit et qu’il n’était pas possible de faire un rapprochement entre celle-ci et son emploi au sein de la société Esnault Finances. Au demeurant, il ‘invite’ l’employeur à s’expliquer sur les conditions dans lesquelles il a pu avoir accès à cette publication réservée à des proches, ‘sans violer l’intimité des personnes’.
M. [J] indique par ailleurs que le délai entre la publication du 7 septembre 2018 et la mise en oeuvre de la procédure de licenciement le 18 septembre 2018 est exclusif de toute faute grave laquelle est censée faire obstacle immédiatement à la poursuite de la relation de travail.
Il affirme encore qu’il a été licencié dans une logique ‘d’économie’ en raison de la fermeture programmée de la salle de sport où il exerçait en janvier 2019, ce qui constitue une fraude devant entraîner la nullité du licenciement. Il précise que son employeur l’a licencié en raison de ses origines et de sa vulnérabilité économique de sorte que la rupture doit être analysée comme un licenciement nul au sens de l’article L. 1235-3-1 du code du travail.
M. [J] soutient ensuite que sa réintégration aurait été possible jusqu’à la date de la fermeture de la salle. Compte tenu de la discrimination subie, il considère qu’il est en droit d’obtenir une indemnité supérieure au minimum légal de six mois de salaire posé par l’article L. 1235-3-1 du code du travail et qu’il évalue à une somme équivalente à seize mois de salaire.
Affirmant que le barème institué à l’article L. 1235-3 du code du travail est incompatible avec les articles 10 de la convention n°158 et l’OIT et 24 de la charte sociale européenne, il sollicite subsidiairement une indemnité égale à 3,5 mois de salaire en application de l’article L. 1235-3 du code du travail.
Enfin, il estime qu’il a fait l’objet d’un licenciement vexatoire décidé sans le moindre motif sérieux, avec précipitation et mauvaise foi caractérisée.
***
MOTIVATION
— Sur la demande principale en nullité du licenciement :
Selon l’article L. 1132-1 du code du travail dans sa rédaction en vigueur du 2 mars 2017 au 24 mai 2019 et applicable au présent litige, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l’article1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, en raison notamment de son origine, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, ou encore de ses opinions politiques.
L’article L. 1134-1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Aux termes de l’article L. 1132-4 du code du travail, dans sa rédaction applicable au présent litige, toute disposition ou acte pris à l’égard du salarié en méconnaissance des dispositions précitées est nul.
En l’occurrence, M. [J] fait valoir que son licenciement est en lien avec sa situation familiale d’enfant de réfugiés de l’ancienne Yougoslavie, de ses charges familiales et, concrètement, avec sa particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique et de sa méconnaissance présumée de ses droits, rappelant en outre son esprit peu revendicatif. Il soutient que l’employeur l’aurait aussi licencié pour des considérations morales et politiques au regard des propos tenus par M. Esnault lors de l’entretien préalable. Il prétend que la suppression de son emploi s’est inscrite dans une logique ‘d’économie’ et de ‘totale indifférence, pour ne pas dire mépris de ses droits, au regard des avantages financiers que représentait pour l’employeur la mise en oeuvre d’un licenciement pour faute grave pour un salarié de faible ancienneté et des risques de coût limité en cas de contestation’
En définitive, il considère que le licenciement a été le moyen d’utiliser sa faiblesse présumée, liée à ses origines et son statut, pour que l’employeur s’affranchisse des sujétions légales d’un licenciement économique.
La société Esnault Finances n’a pas conclu postérieurement aux conclusions de M. [J] exposant en cause d’appel ce nouveau moyen.
M. [J] verse aux débats son titre de séjour valable jusqu’au 16 novembre 2020, autorisant son titulaire à travailler et mentionnant une nationalité ‘indéterminée’, l’extrait d’acte de naissance de ses trois enfants, ainsi que les justificatifs de ses charges courantes.
Il produit également le compte-rendu de l’entretien préalable au licenciement rédigé par M. [F] qui l’avait assisté, lequel reprend les propos de M. Esnault, directeur, comme suit : ‘je considère que M. [J] fait de la concurrence déloyale envers la société. Je ne comprends pas comment on peut étaler sa vie, critiquer les patrons et le gouvernement sur internet.’
Enfin, Mme [V] [C], ancienne salariée de la société Esnault Finances, atteste que les salariés ont été informés courant décembre 2018 de la fermeture effective de la salle le 31 janvier 2019.
Ces seuls éléments de fait ne laissent pas supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte commise par la société Esnault Finances à l’encontre de M. [J].
En effet, la lettre de licenciement ne contient aucune référence à l’origine, au statut ou à la situation économique de M. [J].
Le statut de M. [J] était connu de l’employeur à la date de son embauche et aucun autre fait survenu en cours d’exécution du contrat de travail et laissant supposer l’existence d’une discrimination n’est invoqué.
Au surplus, la particulière vulnérabilité alléguée n’est pas établie en ce que M. [J], marié et père de trois enfants, dispose d’un titre de séjour régulier et renouvelable, justifie d’une insertion sociale et d’un niveau de vie similaires à tout salarié occupant un emploi de même catégorie socio-professionnelle. M. [J] ne justifie pas de difficultés financières existantes au cours de l’exécution du contrat connues de l’employeur ou apparentes.
Enfin, les propos tenus par l’employeur lors de l’entretien préalable ne sont que l’expression d’un avis plus général de M. Esnault sur certains usages d’internet, certes inaproprié, mais qui est sans rapport avec les reproches faits à M. [J] lesquels sont circonstanciés à ceux contenus dans la lettre de licenciement.
S’il revient au juge saisi d’une contestation de la part du salarié de rechercher, au-delà de la qualification et des motifs donnés par l’employeur à sa décision, quelle est la véritable cause du licenciement, aucun élément ne vient établir l’existence de difficultés économiques rencontrées par la société Esnault Finances au début du mois de septembre 2018 annonciatrices d’une fermeture à la fin du mois de janvier 2019.
Au surplus, même à considérer leur existence établie, le simple constat de la concomitance entre l’apparition des difficultés économiques et l’engagement de la procédure de licenciement à l’encontre de M. [J] précisément, ne suffit pas à établir que l’employeur a recouru de mauvaise foi à la procédure de licenciement pour faute grave, dans le but d’éluder les contraintes administratives et les charges financières inhérentes à une procédure de licenciement pour motif économique.
La fraude alléguée par M. [J] n’est pas établie de sorte que la contestation du licenciement sur ce fondement sera rejetée.
Il y a donc lieu de débouter M. [J] de sa demande en nullité du licenciement pour discrimination fondée sur son origine, la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, ou encore de ses opinions politiques, ou encore au titre d’une prétendue fraude. Les demandes indemnitaires présentées par le salarié au titre du licenciement nul seront en conséquence rejetées.
— Sur la contestation du bien-fondé du licenciement prononcé pour faute grave :
Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige portant sur le licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles et si un doute subsiste, il profite au salarié.
En cas de licenciement disciplinaire, le juge doit rechercher si le motif allégué constitue une faute. Si les faits invoqués, bien qu’établis, ne sont pas fautifs, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
La faute grave privative du droit aux indemnités de rupture, qu’il appartient à l’employeur de démontrer, correspond à un fait ou un ensemble de faits qui, imputables au salarié, constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible son maintien dans l’entreprise.
Pour apprécier la gravité de la faute, les juges prennent en compte divers éléments tels que le contexte des faits (Soc., 1er décembre 2010, pourvoi n° 09-65.985), l’ancienneté du salarié (Soc., 17 juin 2009, pourvoi n° 07-43.236- Soc., 5 décembre 2006, pourvoi n° 04-43.599), l’existence ou l’absence de précédents disciplinaires (Soc., 14 septembre 2010, pourvoi n° 09-41.275). Un motif tiré de la vie personnelle du salarié peut justifier un licenciement disciplinaire s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail (Soc., 27 mars 2012, pourvoi n° 10-19.915).
La mise en oeuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits fautifs mais le maintien du salarié dans l’entreprise est possible pendant le temps nécessaire pour apprécier le degré de gravité des fautes commises.
En l’espèce, la lettre de licenciement du 3 octobre 2019, qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée :
‘Monsieur,
Je fais suite à l’entretien préalable qui s’est déroulé le 27 septembre dernier, et j’ai le regret par les présentes de vous notifier votre licenciement pour faute grave à raison de votre déloyauté dans l’exécution de votre contrat de travail.
Je vous rappelle à ce titre, que vous avez été embauché par la Sarl Esnault Finances selon contrat à durée indéterminée en date du 2 novembre 2016 en qualité d’animateur sportif des centres Magic Form.
Nous avons eu, une première fois en juillet dernier, la surprise de constater que vous faisiez passer sur les réseaux sociaux des informations douteuses sur des entreprises concurrentes.
Par mail du 23 juillet, nous avons demandé de faire disparaître ces commentaires, qui de surcroît étaient réalisés pendant votre temps de travail.
Nous constatons à nouveau en date du 7 septembre, que vous faites cette fois-ci l’éloge d’une société concurrente, en l’espèce Basic Fit, qui vient de s’installer sur [Localité 5].
Nous vous rappelons que vous deviez à votre employeur, une loyauté irréprochable et il n’est pas acceptable que vous puissiez prendre position publiquement contre la société Esnault Finances.
Ces faits ne permettent pas la poursuite du contrat de travail, y compris durant le temps de votre préavis (…).’
Le contrat de travail stipulait une clause d’exclusivité interdisant au salarié d’exercer une autre activité professionnelle sauf autorisation expresse de la direction, ainsi qu’une obligation de confidentialité par laquelle M. [J] s’engageait à observer la discrétion absolue, pendant la durée de son contrat, sur l’ensemble des informations ou renseignements dont il pouvait avoir connaissance de par l’exercice de ses fonctions.
Plus généralement, en application de l’article L. 1222-1 du code du travail, le salarié est tenu à une obligation de loyauté et de fidélité inhérente au contrat de travail lui-même. Elle s’applique même en l’absence de stipulations spécifiques et interdit au salarié les agissements qui constitueraient une concurrence à l’égard de l’employeur.
En l’espèce, M. [J] ne conteste pas l’authenticité des deux messages postés les 10 juillet 2017 et 7 septembre 2018 sur Facebook.
Contrairement à ce que soutient le salarié, ces publications n’étaient pas réservées à des proches et leur production ne viole pas l’intimité des personnes, dès lors que les captures d’écran produites par M. [J] lui-même font apparaître à côté de ces messages l’icône en forme de globe terrestre révélant ainsi leur caractère public et accessible non seulement aux personnes acceptées comme ‘amis’ mais également à toute autre personne utilisatrice du réseau social Facebook.
Par ailleurs, il doit être précisé que ces publications même postées sous les pseudonymes'[Z] [Z]’ ou ‘[N] [U]’ étaient accompagnées d’une photo de M. [J] de son profil Facebook, ce qui le rendait identifiable à tout le moins par les personnes l’ayant côtoyé physiquement.
La matérialité de ces publications est donc établie mais il reste à déterminer si leur contenu viole l’obligation de loyauté du salarié comme le soutient l’employeur.
La lettre de licenciement fait état d’une première publication diffusée le 10 juillet 2017 par laquelle l’employeur reproche au salarié de faire ‘passer sur les réseaux sociaux des informations douteuses sur des entreprises concurrentes’.
La capture d’écran correspondante révèle que M. [J], en réponse à un avis donné par M. [X] au sujet d’une salle de sport concurrente ‘L’Orange Bleue Le Mans Ouest’ critiquant la qualité du matériel, a écrit : ‘Sérieux, tu abuses, la salle est pas mal, bon, j’avoue le matos est détruit même si j’ai fait de mon mieux pour tout réparer. L’état de la salle j’en parle même pas, même à Curves tu peux mieux t’entrainer’.
En mentionnant avoir fait de son mieux pour réparer le matériel, M. [J], laisse entendre qu’il a été salarié de l’Orange bleue, ce qui apporte de la crédibilité à ses propos, et la lecture de ce message par le public est de nature à le dissuader de la fréquentation de la salle ainsi critiquée. Même si ces propos ne se réfèrent pas à la société Esnault Finances, qui ne souffre d’aucune divulgation d’informations la concernant, il reste qu’une telle annonce est de nature à lui porter préjudice indirectement vis à vis de l’établissement concurrent.
Cependant, il est constant que le message adressé le 10 juillet 2017, soit plus d’un an avant les faits directement à l’origine du licenciement, a été supprimé immédiatement à la demande de l’employeur, ensuite d’un rappel à l’ordre adressé par mail du 23 juillet 2017 intimant à M. [J] de ‘faire disparaître tout cela dans les plus brefs délais’, et ajoutant que ‘cela ne fait pas partie de ma politique! Allez mettre des notations et avis négatifs sur un concurrent sur les réseaux sociaux, c’est tout simplement inadmissible’.
Dans son message posté sous le pseudonyme ‘[N] [U]’ le 7 septembre 2018, M. [J] partage une annonce relative à l’ouverture d’un centre de fitness à [Localité 5], sous l’enseigne ‘Basic Fit’, et de ses offres promotionnelles, accompagnée de ces trois mots : ‘Basic Fit j’arrive’.
Cette seule proposition telle que formulée, contrairement à ce que soutient l’employeur, ne saurait constituer littéralement ‘l’éloge’ de ce nouveau centre, étant relevé qu’il n’est nullement prétendu que M. [J] avait postulé pour celui-ci ou qu’il y aurait des intérêts de quelque nature. M. [J] n’a donc pas contrevenu à sa clause d’exclusivité ni à son obligation de confidentialité. De même, il n’a diffusé aucun propos injurieux ou outranciers à l’encontre de la société Esnault Finances ni même aucune information à son sujet.
Le salarié prétend que son état d’esprit était de manifester son intention de se rendre à la nouvelle salle à titre personnel. De fait, M. [J] fréquentait lui-même à titre privé d’autres centres fitness pour sa pratique individuelle afin de ne pas rencontrer ses clients habituels, ce qui ne saurait lui être reproché.
Sa qualité d’animateur sportif exerçant dans un centre fitness déterminé ne l’empêche certes pas d’être satisfait de l’ouverture d’un autre centre dans la périphérie du Mans permettant ainsi la pratique de ces activités sportives par un plus grand nombre.
Il reste qu’en partageant sur un espace public l’annonce publicitaire de l’ouverture d’une nouvelle salle de sport concurrente de l’établissement qui l’employait et à proximité duquel elle se situait ce, en manifestant -même en quelques mots- son approbation par son intention de s’y rendre, et alors que la photo de son profil permettait aux clients habituels de Magic Form fréquentant Facebook d’en reconnaître l’auteur, M. [J], déjà avisé par l’employeur de son obligation de discrétion professionnelle sur les réseaux sociaux, a manqué à son obligation de loyauté vis à vis de la société Esnault Finances le tout, dans un contexte de concurrence certaine en ce domaine d’activité ainsi qu’en attestera la fermeture de la salle Magic Form quelques mois plus tard.
Toutefois, il doit aussi être noté que la société Esnault Finances a attendu le 18 septembre 2018 pour notifier sa mise à pied conservatoire à M. [J] alors que le message avait été diffusé 11 jours plus tôt.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il convient de considérer que le manquement à l’obligation de loyauté commis par M. [J] constitue une cause réelle et sérieuse de son licenciement sans revêtir néanmoins une importance telle qu’il rendait impossible son maintien dans l’entreprise de sorte que la faute grave ne sera pas retenue.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.
— Sur les conséquences financières de la rupture :
Le licenciement étant fondé sur une cause réelle et sérieuse, M. [J] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé en ce qu’il a écarté les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail issues de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 et les a déclarées non-conformes aux dispositions de l’article 10 de la convention 158 de l’OIT et de l’article 24 de la Charte sociale européenne de mai 1996, et en ce qu’il a condamné la société Esnault Finances à payer au salarié la somme de 12 043,14 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En revanche, la faute grave n’ayant pas été retenue par la cour, M. [J] doit percevoir le rappel de salaire dont il a été privé compte tenu de la mise à pied conservatoire notifiée par l’employeur et dont le montant n’est pas contesté subsidiairement.
Le jugement sera confirmé en ce que la société Esnault Finances a été condamnée à payer à M. [J] la somme de 972,72 euros et celle 97,27 euros au titre des congés payés afférents.
En outre, la décision déférée sera également confirmée quant au montant de l’indemnité compensatrice de préavis équivalente à 1 mois de salaire au regard de l’ancienneté du salarié (2007,19 euros) et des congés payés afférents (200,72 euros) alloués à M. [J], le conseil de prud’hommes ayant fait une juste appréciation des sommes dues au salarié au regard des textes applicables.
M. [J] sollicite également le bénéfice d’une indemnité de licenciement en précisant à tort que le conseil de prud’hommes avait omis de statuer sur cette demande. En effet, il apparaît que c’est M. [J] qui n’avait pas repris cette demande dans le dispositif de ses conclusions produites devant les premiers juges.
En tout état de cause, en application de l’article 566 du code de procédure civile, il doit être considéré que M. [J] est recevable à ajouter une demande relative à une indemnité de licenciement, laquelle constitue la conséquence nécessaire de sa demande tendant à remettre en cause le bien fondé du licenciement.
En application des articles L. 1234-9 et R.1234-1 et 2 du code du travail, M. [J], licencié alors qu’il comptait un an et 10 mois d’ancienneté ininterrompus au service de la société Esnault Finances, est en droit d’obtenir, en l’absence de faute grave, une indemnité de licenciement d’un montant de 919,97 euros soit : (1/4 2007,19 euros =501,80 euros) + (501,80 x 10/12 = 418,17).
Enfin, M. [J] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour rupture vexatoire dès lors que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et qu’il n’est justifié d’aucune faute commise par l’employeur dans les circonstances ayant entouré le licenciement de nature brutale et vexatoire.
— Sur la remise d’un bulletin de paie modifié:
Il y a lieu d’ordonner la remise d’un bulletin de salaire conforme à la présente décision.
— Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Il est justifié de faire partiellement droit à la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile présentée en appel par M. [J] et de condamner la société Esnault Financesau paiement de la somme de 1 000 euros sur ce fondement.
La société Esnault Finances, partie perdante au moins partiellement, doit être déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamnée aux entiers dépens de la procédure d’appel.
***
PAR CES MOTIFS :
La COUR,
Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement prononcé le 18 novembre 2020 par le conseil de prud’hommes du Mans, en ce qu’il a condamné la société Esnault Finances à payer à M. [Z] [J] les sommes suivantes :
— 972,72 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied et 97, 27 euros au titre des congés payés afférents ;
— 2 007,19 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ainsi que 200,72 euros de congés payés afférents ;
— 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;
L’INFIRME pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs des dispositions infirmées et y ajoutant :
DIT que le licenciement prononcé à l’encontre de M. [Z] [J] n’est pas nul et dit qu’il repose sur une cause réelle et sérieuse ;
REJETTE la demande de dommages et intérêts présentée par M. [Z] [J] au titre du licenciement nul ou dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
CONDAMNE la société Esnault Finances à payer à M. [Z] [J] la somme de 919,97 euros à titre d’indemnité légale de licenciement ;
REJETTE la demande de dommages et intérêts présentée par M. [Z] [J] pour rupture vexatoire ;
ORDONNE la remise par la société Esnault Finances à M. [Z] [J] d’un bulletin de salaire conforme au présent arrêt;
CONDAMNE la société Esnault Finances à payer à M. [Z] [J] la somme complémentaire de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles exposés en appel ;
DÉBOUTE la société Esnault Finances de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Esnault Finances aux entiers dépens de la procédure d’appel.
LE GREFFIER, P/ LE PRÉSIDENT empêché,
Viviane BODIN M-C. [B]