Factures impayées : le taux d’intérêt de la BCE majoré de 10 points

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Factures impayées : le taux d’intérêt de la BCE majoré de 10 points

Pour obtenir une provision, une société ne peut se prévaloir de l’application de pénalités de retard au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale Européenne (à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points sans pouvoir être inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal).

En effet, cette clause contractuelle n’est pas claire et nécessite une interprétation en ce qu’elle indique d’une part que le retard de paiement est sanctionné par l’application d’un taux d’intérêt de retard égal à trois fois le taux d’intérêt légal et d’autre part, que le retard de paiement est sanctionné par l’application d’un taux d’intérêt de retard égal au taux directeur de la BCE majoré de 10 points.

L’application des pénalités de retard demandées excédant manifestement les pouvoirs du juge des référés qui ne peut interpréter une clause contractuelle, il sera dit n’y avoir lieu à référé sur ce point

Pour rappel, l’article 835 second alinéa du code de procédure civile dispose que le juge des référés peut accorder une provision au créancier dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Sur les pénalités de retard et le taux d’intérêt applicable, selon l’article L441-1 du code de commerce :

 » I. – Les conditions générales de vente comprennent notamment les conditions de règlement, ainsi que les éléments de détermination du prix tels que le barème des prix unitaires et les éventuelles réductions de prix « .

Selon l’article L441-10 II du code de commerce,

 » Les conditions de règlement mentionnées au I de l’article L. 441-1 précisent les conditions d’application et le taux d’intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal, ce taux est égal au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage.

Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l’année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l’année en question. Pour le second semestre de l’année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l’année en question. Les pénalités de retard sont exigibles sans qu’un rappel soit nécessaire. Tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l’égard du créancier, d’une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret.

Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire, sur justification. Toutefois, le créancier ne peut invoquer le bénéfice de ces indemnités lorsque l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire interdit le paiement à son échéance de la créance qui lui est due « .

Résumé de l’affaire : La société LEADACTIV, spécialisée dans le conseil en développement digital, a conclu un contrat de prestation de services marketing avec M. [U] [J] le 7 février 2024, pour une durée de trois mois, moyennant une rémunération de 7.200 € TTC, payable en trois échéances. Suite à l’absence de paiement des factures, LEADACTIV a assigné M. [U] [J] en référé le 21 juin 2024, demandant la reconnaissance d’une créance de 7.200 € TTC, le paiement de pénalités de retard, d’indemnités forfaitaires de recouvrement, d’une clause pénale, ainsi que des frais de justice. M. [U] [J] a été assigné mais n’a pas comparu.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

24 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Valenciennes
RG
24/00144
N° RG 24/00144 – N° Portalis DBZT-W-B7I-GKUD

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES
O R D O N N A N C E de R E F E R E – N° RG 24/00144 – N° Portalis DBZT-W-B7I-GKUD
Code NAC : 56B Nature particulière : 0A

LE VINGT QUATRE SEPTEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

DEMANDERESSE

La S.A.S. LEADACTIV, dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège;

représentée par Maître Tim DORIER, avocat membre de la SELAS CABINET LEGALPS AVOCATS – HERLEMONT ET ASSOCIÉS, avocats au barreau d’ANNECY, substitué par Me Claire ZAFRA LARA, avocat au barreau de VALENCIENNES,
D’une part,

DEFENDEUR

M. [U] [J], entrepreneur individuel, domicilié [Adresse 1];

ne comparaissant pas;
D’autre part,

LE JUGE DES RÉFÉRÉS : Anne PIET, vice-présidente,

LE GREFFIER : Stéphanie BUSIER, adjoint administratif faisant fonction de greffier,

DÉBATS : en audience publique le 03 septembre 2024,

ORDONNANCE : rendue par mise à disposition au greffe le 24 septembre 2024,

EXPOSE DU LITIGE

La société LEADACTIV est une entreprise spécialisée dans le conseil en développement et stratégie digitale, activités de formation à la prospection digitale à destination des professionnels et activités de prospection digitale externalisée.

M. [U] [J] est entrepreneur individuel et a pour activité principale des prestations de services aux entreprises de programmation, conseils et autres activités informatiques.

Par contrat de prestation de services marketing en date du 7 février 2024 conclu avec M. [U] [J], la société LEADACTIV s’est engagée à fournir une prestation de prospection digitale pour une durée déterminée et ferme de trois mois courant du 5 février 2024 au 5 mai 2024 et ce, moyennant une rémunération forfaitaire de 7.200 € TTC. M. [U] [J] s’est engagé à régler cette somme par trois échéances de 2.400 € TTC selon un échéancier fixé dans les conditions particulières dudit contrat.

Indiquant qu’aucune facture n’a été payée, la société LEADACTIV a, par acte de commissaire de justice du 21 juin 2024, fait assigner M. [U] [J] en référé.

La société LEADACTIV demande au juge des référés de :
– juger qu’elle justifie d’une créance certaine, liquide et exigible et incontestable à l’encontre de M. [U] [J], pour un montant en principal de 7.200 € TTC au titre des factures non-réglées,
– condamner M. [U] [J] à lui payer les sommes suivantes :
– 7.200 € TTC à valoir sur le règlement des trois factures impayées, outre pénalités de retard au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale Européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points sans pouvoir être inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal et ce, à compter de la mise en demeure du 21 mai 2024,
– 120 € au titre des trois indemnités forfaitaires de recouvrement, outre intérêts au taux légal à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,
– 1.440 € au titre de la clause pénale stipulée au contrat, outre intérêts au taux légal à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,
– 2.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
– condamner M. [U] [J] aux entiers dépens de l’instance.

M. [U] [J] a été régulièrement assigné mais ne comparait pas.

MOTIFS

Sur les factures impayées

L’article 835 second alinéa du code de procédure civile dispose que le juge des référés peut accorder une provision au créancier dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Il ressort des pièces produites, notamment du contrat de prestation de services marketing du 7 février 2024, des factures du 5 février 2024, du 25 mars 2024 et du 13 mai 2024, du courrier de mise en demeure du 21 mai 2024 ou encore des échanges de mails entre M. [U] [J] et la société LEADACTIV, que l’obligation de M. [U] [J] n’est pas sérieusement contestable. Il doit donc être condamné au paiement de la somme de 7.200 € à valoir sur le règlement des trois factures impayées.

Sur les pénalités de retard et le taux d’intérêt applicable

Selon l’article L441-1 du code de commerce,
 » I. – Les conditions générales de vente comprennent notamment les conditions de règlement, ainsi que les éléments de détermination du prix tels que le barème des prix unitaires et les éventuelles réductions de prix « .
Selon l’article L441-10 II du code de commerce,
 » Les conditions de règlement mentionnées au I de l’article L. 441-1 précisent les conditions d’application et le taux d’intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal, ce taux est égal au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l’année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l’année en question. Pour le second semestre de l’année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l’année en question. Les pénalités de retard sont exigibles sans qu’un rappel soit nécessaire. Tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l’égard du créancier, d’une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire, sur justification. Toutefois, le créancier ne peut invoquer le bénéfice de ces indemnités lorsque l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire interdit le paiement à son échéance de la créance qui lui est due « .

En l’espèce, les conditions générales du contrat de prestations de service marketing du 7 février 2024, article 7.2 stipulent :
 » Le règlement des honoraires de LEADACTIV interviendra à 30 jours de facture par virement. »
 » Tout défaut ou retard de paiement donnera automatiquement lieu, au bénéfice de LEADACTIV, sans mise en demeure préalable, à la perception d’un intérêt de retard égal à trois fois le taux d’intérêt légal (…) .
En cas de retard de paiement, une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 € sera exigée (Décret n°2012-1115 du 2 octobre 2021). Le taux des pénalités de retard applicable est le taux directeur de la BCE majoré de 10 points « .

La société LEADACTIV demande l’application de pénalités de retard au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale Européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points sans pouvoir être inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal et ce, à compter de la mise en demeure du 21 mai 2024.

La clause contractuelle n’est pas claire et nécessite une interprétation en ce qu’elle indique d’une part que le retard de paiement est sanctionné par l’application d’un taux d’intérêt de retard égal à trois fois le taux d’intérêt légal et d’autre part, que le retard de paiement est sanctionné par l’application d’un taux d’intérêt de retard égal au taux directeur de la BCE majoré de 10 points.

L’application des pénalités de retard demandées excédant manifestement les pouvoirs du juge des référés qui ne peut interpréter une clause contractuelle, il sera dit n’y avoir lieu à référé sur ce point

L’article 1231-6 du code civil dispose que les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. La somme due emportera donc intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 mai 2024.

Sur l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement

L’article 7.2 du contrat de prestation de service marketing signé par les parties le 7 février 2024 stipule qu’en cas de retard de paiement, une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 €, par facture, sera exigée.

Cette clause contractuelle étant claire, il sera fait droit à la demande de condamnation provisionnelle de M. [U] [J] au paiement d’une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 € pour chacune des trois factures non payées soit la somme totale de 120 €.

Sur la clause pénale

Si le juge des référés peut condamner par provision au paiement d’une clause pénale, il doit s’assurer préalablement qu’elle résulte de la volonté commune des parties en application de l’article 1113 du Code civil qui dispose  » Le contrat est formé par la rencontre d’une offre d’une acceptation par lesquels les parties manifestent leur volonté de s’engager. Cette volonté peut résulter d’une déclaration ou d’un comportement non équivoque de son auteur.  »

Si le juge des référés ne peut modérer la clause pénale, il peut accorder une provision à valoir sur le montant non contestable de cette clause qui n’a d’autre limite que le montant prévu au contrat.

En l’espèce, l’article 7.3 du contrat de prestation de service marketing signé par les parties le 7 février 2024 stipule qu’en cas de retard de paiement par le client, une clause pénale dont le montant est fixé à 20 % du montant TTC de la facture concernée sera appliquée.

La clause pénale contractuelle étant claire, le contrat ayant été signé par les deux parties, à défaut de contestation opposée par le défendeur sur ce point, il sera fait droit à la demande de la société LEADACTIV sur ce point.

Sur l’article 700 du code de procédure civile, les dépens et l’exécution provisoire

En application de l’article 491 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge des référés statue sur les dépens. Il y a lieu, en l’espèce, de condamner M. [U] [J] aux entiers dépens de la présente instance de référés.

En outre, l’équité commande d’allouer à la société LEADACTIV la somme de 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément à l’article 514-1 du code de procédure civile, l’exécution provisoire est de droit en matière de référés.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, en référé, par décision réputée contradictoire et en premier ressort ;

CONDAMNONS M. [U] [J] à payer à la société LEADACTIV les sommes suivantes à titre de provisions :
– 7 200 € au titre des trois factures impayées, outre intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2024,
– 120 € au titre des trois indemnités forfaitaires de recouvrement, outre intérêts au taux légal à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,
– 1 440 € au titre de la clause pénale stipulée au contrat, outre intérêts au taux légal à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,

CONDAMNONS M. [U] [J] à payer à la société LEADACTIV la somme de 1.000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS M. [U] [J] aux dépens ;

REJETONS les demandes plus amples ou contraires ;

RAPPELONS que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire ;

En foi de quoi la présente décision a été signée par le président et le greffier, le 24 septembre 2024.

Le greffier Le président


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