Contexte de l’affaireL’affaire concerne une ordonnance de référé rendue le 28 juillet 2023 par le président du tribunal judiciaire de Rennes, à la demande de la société en nom collectif (SNC) La dame de Baud. Cette ordonnance a ordonné une mesure d’expertise confiée à un expert, Monsieur [I]. Actes de commissaire de justiceDes actes de commissaire de justice ont été délivrés entre mai et juin 2024 à la requête de la SNC La dame de Baud, visant plusieurs sociétés, dont Ingen coord construction (I2C) et Axa France IARD. Ces actes avaient pour but de déclarer l’ordonnance du 28 juillet 2023 et les opérations d’expertise en cours comme communes et opposables à ces sociétés. Interventions des partiesLors de l’audience du 11 septembre 2024, la société CRCM a demandé au juge des référés de s’associer à la demande d’expertise. Les sociétés I2C et Axa France IARD ont également exprimé leur volonté de s’associer à cette demande, tout comme la SARL Atelier Loyer, qui a demandé le déboutement de la SNC La dame de Baud et de la société CRCM. Absence de certaines sociétésLes sociétés Socotec et MAF, régulièrement assignées, n’ont pas comparu ni été représentées lors de l’audience. Décisions du tribunalLe tribunal a déclaré que les opérations d’expertise étaient communes aux seules sociétés I2C, Axa France IARD et Socotec construction, et a ordonné leur présence à l’expertise. La SNC La dame de Baud doit communiquer toutes les pièces produites et les notes de l’expert. L’expert doit convoquer ces sociétés à la prochaine réunion d’expertise. Le délai pour le dépôt du rapport a été prorogé de trois mois, et une provision de 1 000 € a été fixée pour la rémunération de l’expert. Les dépens restent provisoirement à la charge de la SNC La dame de Baud, et toute autre demande a été rejetée. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° 24/612
Du 25 octobre 2024
N° RG 24/00412 – N° Portalis DBYC-W-B7I-K7FZ
54G
c par le RPVA
le 25/10/24
à
Me Christophe CAILLERE, Me Céline DENIS, Me Etienne GROLEAU, Me Benjamin THOUMAZEAU
– copie dossier
– 2 copies service expertises
Expédition 24/612délivrée le: 25/10/24
à
Me Christophe CAILLERE Me Céline DENIS
Me Etienne GROLEAU
Me Benjamin THOUMAZEAU
Cour d’appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
OR D O N N A N C E
DEMANDEUR AU REFERE:
S.N.C. LA DAME DE BAUD, dont le siège social est sis [Adresse 6]
représentée par Me Benjamin THOUMAZEAU, avocat au barreau de RENNES substitué par Me Elise GUEGAN, avocat au barreau de Rennes,
DEFENDEURS AU REFERE:
S.A. INGEN COORD CONSTRUCTION, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Christophe CAILLERE, avocat au barreau de RENNES
substitué par Me NADALINI, avocat au barreau de Rennes,
S.A. AXA FRANCE IARD
assureur de I2C , dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Christophe CAILLERE, avocat au barreau de RENNES
substitué par Me NADALINI, avocat au barreau de Rennes,
assureur de SOCOTEC, dont le siège social est sis [Adresse 3]
S.A.R.L. ATELIER LOYER (ALBA), dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Me Etienne GROLEAU, avocat au barreau de RENNES substitué par Me LE GUEN Katel, avocat au barreau de Rennes,
S.A.M.C.V. MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS, dont le siège social est sis [Adresse 1]
non comparante
S.A.S. SOCOTEC CONSTRUCTION, dont le siège social est sis [Adresse 5]
non comparante
PARTIE INTERVENANTE OU APPELEE A LA CAUSE :
S.A.S. CRCM, dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par Me Céline DENIS, avocat au barreau de RENNES substitué par Me STEPHAN Manuella, avocat au barreau de Rennes,
LE PRESIDENT: Philippe BOYMOND, Vice-Président
LE GREFFIER: Claire LAMENDOUR, greffier, lors des débats et Graciane GILET, greffier, lors du prononcé par mise à disposition au greffe, qui a signé la présente ordonnance.
DEBATS: à l’audience publique du 11 septembre 2024,
ORDONNANCE: réputée contradictoire , prononcée par mise à disposition au Greffe des référés le 25 octobre 2024, date indiquée à l’issue des débats
VOIE DE RECOURS: Cette ordonnance peut être frappée d’appel devant le greffe de la Cour d’Appel de RENNES dans les 15 jours de sa signification en application des dispositions de l’article 490 du code de procédure civile.
Vu l’ordonnance de référé rendue le 28 juillet 2023 (RG 23/00068) par le président du tribunal judiciaire de Rennes à la requête de la société en nom collectif (SNC) La dame de Baud et au contradictoire, notamment, de la société à responsabilité limitée (SARL) ARCH Conseil ingénierie et de la société par actions simplifiée (SAS) CRCM, ayant ordonné une mesure d’expertise confiée à M. [J] [I] ;
Vu les actes de commissaire de justice en date des 23, 27 et 30 mai et des 03 et 06 juin 2024 délivrés, à la requête de la SNC La dame de Baud, à l’encontre de :
– la société anonyme (SA) Ingen coord construction (I2C),
– la SA Axa France IARD, son assureur ainsi que celui de la SAS Socotec construction,
– la SARL Atelier loyer,
– la société d’assurance mutuelle (SAM) Mutuelle des architectes français (MAF), son assureur
et de la SAS Socotec construction, au visa des articles 145 du code de procédure civile et 1231-1 et 1792 et suivants du code civil, aux fins de :
– déclarer communes et opposables aux sociétés Ingen coord construction, Axa France IARD, Atelier loyer, MAF et Socotec construction l’ordonnance du 28 juillet 2023 (RG23/00068) ainsi que les opérations d’expertise en cours confiée à Monsieur [I] ;
– statuer sur les dépens.
Vu les conclusions en intervention volontaire, reçues à l’audience utile du 11 septembre 2024, par lesquelles la société CRCM, représentée par avocat, demande au juge des référés, au visa de l’article 145 du code de procédure civile, de lui décerner acte de ce qu’elle s’associe à la demande d’expertise ;
Vu les conclusions des SA Ingen coord construction et Axa France IARD, pareillement représentées, par lesquelles elles forment les protestations et réserves d’usage quant à cette demande à laquelle elles disent vouloir en outre s’associer ;
Vu les conclusions de la SARL Atelier Loyer (ALBA), pareillement représentée, par lesquelles elle sollicite de :
– débouter la SNC La dame de baud et la société CRCM de leur demande d’extension des opérations d’expertise au contradictoire de la société Atelier loyer ;
– les condamner à lui payer la somme de 1 000 € en application des dispositions de l’article 700, ainsi qu’aux entiers dépens.
Régulièrement assignées par remise de l’acte à personne habilitée, les sociétés Socotec et MAF n’ont pas comparu, ni ne se sont faites représenter.
La société CRCM est intervenue volontairement à l’instance, sans que ne soit contestée la recevabilité d’une telle intervention volontaire, qui la rend dès lors partie au présent procès.
L’article 472 du code de procédure civile dispose que :
« Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ».
La juridiction rappelle, enfin, qu’elle n’est tenue de statuer sur les demandes de « constatations », de « décerner acte » ou de « dire et juger » que lorsqu’elles constituent des prétentions (Civ. 2ème 09 janvier 2020 n° 18-18.778 et 13 avril 2023 n° 21-21.463).
Sur la demande d’extension des opérations d’expertises à de nouvelles parties
Il convient, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de permettre à l’expert d’accomplir sa mission en présence de toutes les parties dont l’intervention est justifiée par un motif légitime au sens de l’article 145 du code de procédure civile.
Ce motif légitime doit être constitué par un ou plusieurs faits précis, objectifs et vérifiables qui démontrent l’existence d’un litige plausible, crédible, bien qu’éventuel et futur dont le contenu et le fondement seraient cernés, approximativement au moins et sur lesquels pourrait influer le résultat de la mesure d’instruction à ordonner (Civ. 2ème 10 décembre 2020 n° 19-22.619 publié au Bulletin).
La demande de participation à une mesure d’instruction d’une nouvelle partie, fondée sur la commission de faits hypothétiques, ne constitue pas un tel motif (Civ. 3ème 15 février 2018 n° 16-27.674).
En l’espèce, la SNC La dame de baud sollicite la participation des sociétés I2C, Axa France IARD, Atelier loyer, MAF et Socotec construction aux opérations d’expertises ordonnées par l’ordonnance du 28 juillet 2023, précitée.
Les sociétés I2C et Axa France IARD ont formé les protestations et réserves d’usage quant à cette demande formée à leur encontre, de sorte qu’il y sera fait droit.
La société Atelier loyer s’y oppose au motif que le contrat qu’elle a conclu avec la société Arch’immobilier promotion construction est un contrat de maîtrise d’œuvre de conception, sans direction de travaux et selon lequel l’architecte ne vérifie pas les documents techniques établis par les autres constructeurs. Elle ajoute qu’elle n’a pas choisi le matériau mis en cause. Elle soutient que la recherche de sa responsabilité dans un litige futur, dont la jurisprudence rappelle qu’elle est strictement limitée à sa mission, n’apparait pas envisageable.
La SNC La dame de Baud a répliqué oralement, mais en renvoyant simplement à l’avis de l’expert judiciaire.
En premier lieu, cette société n’articule aucun moyen dans la discussion de son assignation au soutien de sa demande visant à rendre commune l’expertise en cours à cet architecte, se bornant à faire état de sa qualité de maître d’oeuvre de conception des travaux litigieux et de l’avis de l’expert judiciaire. Celui-ci, dans son avis du 23 mai 2024 (pièce demandeur n°17), indique pourtant, seulement, que la demande lui “ apparaît comme utile”, mais sans aucun autre élément quant à l’implication de l’architecte dans les désordres. Si dans sa note aux parties n°1, en date du 04 avril précédent, il évoque un possible manquement du contrôleur technique, il ne s’explique pas, par contre, sur les éléments techniques se rapportant à l’implication “ potentielle” du maître d’oeuvre de conception (pièce demandeur n°15, pages 11 et 12).
Dès lors mal fondée en sa demande, en ce qu’elle est dirigée contre la société Atelier loyer, laquelle ne repose en effet à ce stade que sur la commission de faits hypothétiques et, par voie de conséquence, contre l’assureur de cet architecte, la SNC La dame de Baud en sera déboutée.
La société Socotec étant absente à l’instance, il doit dès lors être vérifié que la demande formée à son encontre est régulière, recevable et bien fondée.
A son appui, la société demanderesse verse aux débats le contrat qu’elle a conclu avec la société Socotec construction, démontrant que cette dernière est intervenue en tant que contrôleur technique de l’opération de construction litigieuse (sa pièce n°22) et la note aux parties n°1 de l’expert judiciaire, précitée et à laquelle il est expressément renvoyé. Elle justifie ainsi d’un motif légitime à ce que l’expertise en cours soit également rendue commune à cette société.
La présente décision ayant pour objet d’étendre la mission de l’expert à de nouvelles parties, il convient de mettre à la charge du demandeur à l’instance une consignation supplémentaire à valoir sur les frais d’expertise résultant de cet appel en cause.
Les sociétés I2C, Axa France IARD et CRCM n’allèguant d’aucun motif légitime à l’appui de leur demande d’ordonnance commune, la dernière citée évoquant simplement, mais de façon vague, un recours en garantie alors même qu’aucune reconnaissance d’un droit n’a encore eu lieu à son encontre, elles en seront dès lors déboutées.
Sur les demandes accessoires
L’article 491 du code de procédure civile dispose, en son second alinéa, que le juge des référés « statue sur les dépens ».
Il est de jurisprudence constante que la partie défenderesse à une expertise ou à son extension, ordonnée sur le fondement de l’article 145 du même code, ne saurait être regardée comme la partie perdante au sens des dispositions des articles 696 et 700 dudit code.
En conséquence, la société demanderesse à l’instance conservera la charge des dépens.
La demande de frais irrépétibles de la société Atelier loyer, que l’équité ne commande pas de satisfaire, est rejetée.
Statuant en référé, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort :
Déclarons communes aux seules sociétés I2C, Axa France IARD et Socotec construction les opérations d’expertise diligentées en exécution de l’ordonnance de référé du 28 juillet 2023 susvisée ;
Disons que ces sociétés seront tenues d’intervenir à l’expertise, d’y être présentes ou représentées;
Disons que la société La dame de Baud leur communiquera sans délai l’ensemble des pièces déjà produites par les parties ainsi que les notes rédigées par l’expert ;
Disons que l’expert devra convoquer les sociétés I2C, Axa France IARD et Socotec construction à la prochaine réunion d’expertise au cours de laquelle elles seront informées des diligences déjà accomplies et invitées à formuler leurs observations ;
Prorogeons de trois mois le délai dans lequel son rapport devra être déposé ;
Fixons à la somme de 1 000 € (mille euros) la provision complémentaire à valoir sur la rémunération de l’expert que la société La dame de Baud devra consigner au moyen d’un chèque émis à l’ordre du régisseur du tribunal judiciaire de Rennes dans un délai de deux mois, faute de quoi la présente décision sera en tout ou partie caduque ;
Laissons provisoirement les dépens à la charge de la société La dame de Baud ;
Rejetons toute autre demande, plus ample ou contraire.
La greffière Le juge des référés