Extension de la mission de l’expert judiciaire sur de nouveaux désordres

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Extension de la mission de l’expert judiciaire sur de nouveaux désordres

Résumé de l’affaire

La SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT a demandé l’extension de la mission de l’expert judiciaire désigné dans une affaire antérieure en raison de nouveaux désordres constatés, notamment des fissures sur les bâtiments attribuées à des causes différentes de celles initialement identifiées. Ces désordres ont entraîné des déclarations de sinistres auprès de l’assureur dommages ouvrages. Plusieurs parties, dont des entreprises de construction et des assureurs, ont été assignées en référé pour se prononcer sur cette demande. La SARL DOXAR GRUP a notamment demandé le rejet de la demande d’extension à son encontre en invoquant la forclusion décennale. La décision a été mise en délibéré pour le 20 août 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

20 août 2024
Tribunal judiciaire d’Évry
RG
24/00595
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au Nom du Peuple Français

Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés

Ordonnance du 20 août 2024
MINUTE N° 24/______
N° RG 24/00595 – N° Portalis DB3Q-W-B7I-QC2Q

PRONONCÉE PAR

Virginie BOUREL, Vice-Présidente,
Assistée de Alexandre EVESQUE, greffier, lors des débats à l’audience du 2 juillet 2024 et lors du prononcé

ENTRE :

S.A. d’HLM SA IMMOBILIERE DU MOULIN VERT
dont le siège social est sis [Adresse 4] [Localité 20]

représentée par Maître Laurence BROSSET de la SELARL SELARL BROSSET – TECHER AVOCATS ASSOCIÉS, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : B 0449

DEMANDERESSE

D’UNE PART

ET :

Compagnie d’assurance MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF), en qualité d’assureur de la société AIA MANAGEMENT, de la société AIA INGENIERIE et de la SA.R.L. JJ. ORY & PARTNERS
dont le siège social est sis [Adresse 8] [Localité 20]

non comparante ni constituée

S.A.S. AIA INGENIERIE
dont le siège social est situé [Adresse 15] [Localité 12] et prise en son établissement secondaire sis [Adresse 2] [Localité 13]

représentée par Maître Hélène CHAUVEL de la SELARL SELARL CHAUVEL GICQUEL, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : P0003

S.A. EUROMAF, en qualité d’assureur de la S.A.S. ICM STRUCTURE
dont le siège social est sis [Adresse 8] [Localité 20]

non comparante ni constituée

S.A. BITP
dont le siège social est sis [Adresse 9] [Localité 26]

représentée par Maître Marion PIERI de la SELEURL SELARLU MARION PIERI AVOCAT,avocate au barreau de PARIS, vestiaire : R070

comparante par écrit (article 486-1 du code de procédure civile)

Société DOXAR GRUP SARL
dont le siège social est sis [Adresse 7] – [Localité 17] – ROUMANIE

représentée par Maître Pierre-yves SOULIE de la SELARL EGIDE AVOCATSCÎMES, avocat au barreau de l’ESSONNE

S.A. ABEILLE IARD & SANTE, en qualité d’assureur dommages ouvrage, responsabilité civile décennale de la SARL LE DOMAINE DU BOIS FRESNAIS
dont le siège social est sis [Adresse 6] – Et pour signification [Adresse 16] [Localité 25]

représentée par Maître Alberta SMAIL de la SELARL REIBELL ASSOCIES, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : L0290

S.A.S. AIA MANAGEMENT DE PROJETS
dont le siège social est sis [Adresse 15] [Localité 12] et prise en son établissement secondaire de [Localité 19] sis [Adresse 10] à [Localité 19]

représentée par Maître Hélène CHAUVEL de la SELARL SELARL CHAUVEL GICQUEL, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : P0003

S.A.R.L. JJ ORY & PARTNERS SARL
dont le siège social est sis [Adresse 14] [Localité 18]

représentée par Maître Antoine TIREL de la SELAS LARRIEU ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J073

S.A.S. QUALICONSULT
dont le siège social est sis [Adresse 3] – [Localité 21]

représentée par Maître Guillaume RODIER de la SELARL RODIER ET HODE avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2027, substitué lors de l’audience par Maître Françoise ECORA, avocate au barreau de l’ESSONNE

S.A. AXA FRANCE IARD, en qualité d’assureur de la société NATEKKO CONSTRUCTION, de la société ILE DE FRANCE CONSTRUCTION et de la S.A.S. QUALICONSULT,
dont le siège social est sis [Adresse 11] [Localité 24]

représentée par Maître Laurent KARILA de la SELAS KARILA SOCIETE D’AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 264

S.A.S. ICM STRUCTURE
dont le siège social est [Adresse 5] [Localité 23]

non comparante ni constituée

S.A.S. TECHNOSOL
dont le siège social est sis [Adresse 5] [Localité 23]

non comparante ni constituée

DÉFENDERESSES

D’AUTRE PART

ORDONNANCE : Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, réputée contradictoire et en premier ressort.

**************
EXPOSÉ DU LITIGE

Selon ordonnance du 26 janvier 2018 rendue dans l’affaire enregistrée sous le RG n° 17/01194, le président du tribunal de céans statuant en référé a, sur la demande de la SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT, désigné Monsieur [P] [J] en qualité d’expert judicaire, empêché et remplacé par Monsieur [L] [N] par l’ordonnance de changement d’expert du 5 mars 2018.

Aux termes de l’ordonnance du 30 novembre 2018 rendue dans l’affaire enregistrée sous le RG n° 18/00925, le président du tribunal de céans statuant en référé a, sur la demande de la SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT, déclarées communes et opposables les opérations d’expertise à la SAS ICM STRUCTURE, à la SA EUROMAF et à la compagnie d’assurance MAF.

Selon ordonnance du 21 janvier 2020 rendue dans l’affaire enregistrée sous le RG n° 19/01255, le président du tribunal de céans statuant en référé a, sur la demande de la SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VER, déclarées communes et opposables les opérations d’expertise à la société DOXAR GRUP SRL.

Par acte délivré les 26 et 30 avril et 2, 3, 7 et 10 mai 2024, la SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT a assigné en référé devant le président du tribunal judiciaire d’Evry, la SA ABEILLES IARD & SANTE en sa qualité d’assureur dommages ouvrage, responsabilité civile décennale de la SARL LE DOMAINE DU BOIS FRESNAIS et d’assureur de la société TBI, la SAS AIA MANAGEMENT DE PROJETS, la SARL JJ.ORY & PARTNERS, la SAS QUALICONSULT, la SA AXA France IARD en qualité d’assureur de la société NATEKKO CONSTRUCTION, la société ILE DE FRANCE CONSTRUCTION et la société QUALICONSULT, la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF), la SAS ICM STRUCTURE et son assureur la SA EUROMAF, la SAS TECHNOSOL, la société AIA INGENIERIE, la SA BITP et la SARL DOXAR GRUP, au visa des articles 145 et 245 alinéa 2 du code de procédure civile et afin d’obtenir l’extension de la mission de l’expert judiciaire désigné par l’ordonnance du référé du 26 janvier 2018.

Au soutien de ses prétentions, la SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT expose que :

– en cours d’expertise de nouveaux désordres sont apparus, notamment l’atteinte du ravalement des 3 bâtiments par de nombreuses fissures attribuées initialement à l’affaissement de la structure bois,
– les sondages réalisés le 16 février 2024 au contradictoire des parties ont démontré que les fissures extérieures étaient liées à d’autres causes et notamment des venues d’eau depuis les menuiseries extérieures et les balcons :
– les gardes corps des balcons sont fixés dans la laine de bois :
– il existe un risque de chute des personnes, les gardes corps étant dépourvus de toute solidité,
– la présence de champignons dans le platelage en bois des balcons et dans la structure porteuse des balcons a été constatée,
– la structure bois a été endommagée par I’humidité de l’isolant et les venues d’eau,
– l’isolant en laine de bois est très dégradé et humide,
un gonflement des panneaux support de l’isoIant a été constaté,
– l’enduit du ravalement est fissuré,
– un point de rouille important sur toutes les fixations des gardes corps existe
– il manque les équerres de soutien
– ces désordres s’étant généralisés sur les 3 bâtiments collectifs d’habitation, les déclarations de sinistres ont été faites auprès de l’assureur dommages ouvrages.

A l’audience du 2 juillet 2024, la SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT, représentée par avocat, a soutenu son acte introductif d’instance et déposé ses pièces telles que visées dans l’assignation, précisant s’opposer à la demande de mise hors de cause de la SARL DOXAR GRUP.

La SAS AIA MANAGEMENT DE PROJETS et la société AIA INGENIERIE, la SARL JJ.ORY & PARTNERS et la SAS QUALICONSULT, représentées par leurs conseils, se sont référées à leurs conclusions, aux termes desquelles, elles forment protestations et réserves sur la mesure sollicitée et les trois premières ont précisé oralement s’opposer à la demande de mise hors de cause de la SARL DOXAR GRUP.

La SA BITP, représentée par avocat dispensé de comparaître conformément aux dispositions de l’article 486-1 du code de procédure civile, a formé protestations et réserves aux termes de son courrier daté du 28 juin 2024 adressé au tribunal.

La SARL DOXAR GRUP, représentée par son conseil a soutenu ses conclusions en réponse n°1 sollicitant, au visa des articles 1792 et suivants et 1792-4-2 du code civil de rejeter la demande d’extension à son encontre concernant les 11 nouveaux désordres visés dans son assignation signifiée postérieurement à la forclusion (ou prescription) décennale et de condamner la SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Bien que régulièrement assignées, la SA EUROMAF en qualité d’assureur de la SAS ICM STRUCTURE et la SAS TECHNOSOLn’ont pas comparu et n’ont pas constitué avocat.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance, aux écritures déposées et développées oralement et aux notes d’audience.

La décision a été mise en délibéré au 20 août 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des dispositions de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande de mise hors de cause de la SARL DOXAR GRUP

La SARL DOXAR GRUP sollicite sa mise hors de cause au motif que l’assignation signifiée le 15 mai 2024 est tardive, l’action de la SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT étant forclose (ou prescrite) à agir concernant de nouveaux désordres depuis le 13 mai 2024.

Elle précise qu’il n’y a pas lieu à expertise pour des désordres qui ne pourraient donner lieu qu’à des demandes forcloses ou prescrites à son encontre.

La SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT, la SAS AIA MANAGEMENT DE PROJETS, la société AIA INGENIERIE et la SARL JJ.ORY & PARTNERS s’opposent à cette demande, considérant tant que l’acte a été délivré le 13 mai 2024 que l’action n’est pas prescrite.

Il convient de relever que les parties s’opposent sur une question de délais et de prescription d’action qui échappe à l’évidence du juge des référés et nécessite une appréciation du juge du fond.

De plus, l’objet de l’assignation est une demande d’extension des missions de l’expert concernant une expertise en cours à laquelle la SARL DOXAR GRUP, par une ordonnance du 21 janvier 2020, est partie et qu’il est donc d’une bonne administration de la justice que la décision soit prise au contradictoire de l’ensemble des parties dans la cause.

Par conséquent, et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens soulevés par les parties, il convient de dire n’y avoir à référé sur la demande de mise hors de cause de la SARL DOXAR GRUP.

Sur la demande d’extension

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.

Aux termes de l’article 245 du code de procédure civile, le juge ne peut, sans avoir préalablement recueilli les observations du technicien commis, étendre la mission de celui-ci ou confier une mission complémentaire à un autre technicien.

La SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT sollicite l’extension de la mission à l’examen des désordres suivants :

– détalonnage de toutes les portes,
– fissures dans les couloirs de circulations et dans les appartements,
– infiltrations par les menuiseries extérieurs, liées au tassement de la structure,
– fissures dans les couloirs de circulation et affaissement des plinthes,
– fixation des gardes corps des balcons dans la laine de bois : risque de chute des
personnes et des gardes corps, absence de solidité,
– présence de champignons dans le platelage en bois des balcons et dans la structure porteuse des balcons,
– endommagement de la structure bois endommagée par I’humidité de l’isolant et les venues d’eau,
– dégradation de l’isolant en laine de bois
– gonflement des panneaux support de l’isoIant,
– fissuration de l’enduit /ravalement ,
– point de rouille important sur toutes les fixations des gardes corps et de l’assemblage de la structure des balcons,
– manque des équerres de soutien.

La SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT, qui justifie d’une expertise en cours, verse aux débats l’ordonnance du 26 janvier 2018, l’ordonnance de changement d’expert du 5 mars 2018, l’ordonnance du 30 novembre 2018 et l’ordonnance du 21 janvier 2020, le procès-verbal de réception du 13 mai 2024, les déclarations de sinistre des 25 mai 2020 et 20 février 2024 et l’avis de l’expert judiciaire daté du 30 mai 2024, rendant vraisemblable l’existence des désordres invoqués.

Il ressort des pièces produites qu’en cours d’expertise, de nouveaux désordres sont apparus, sur les mêmes bâtiments que ceux objet de la mission confiée à l’expert judiciaire et qu’au regard de sondages réalisés le 16 février 2024, de nouvelles causes semblent être à l’origine des sinistres, qui ont tous été déclarés à l’assureur dommage-ouvrage.

Par ailleurs, l’expert judiciaire Monsieur [L] [N], a indiqué, le 30 mai 2024, donner son accord sur le projet d’assignation s’agissant de l’extension de sa mission.

Il sera donc fait droit à la demande, aux frais avancés de la SA d’HLM IMMOBILIERE DU MOULIN VERT, dans les termes du dispositif ci-dessous.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

En l’absence de partie perdante, l’équité commande de laisser à chacune des parties la charge des frais qu’elle a exposés.

Il n’y a donc pas lieu d’appliquer les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

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