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L’article L 331-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que les actions civiles et les demandes relatives à la propriété littéraire et artistique sont exclusivement portées devant les tribunaux judiciaires déterminés par voie réglementaire
En application de ce texte, les actions engagées sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun relèvent de la compétence de ces juridictions spécialisées dès lors que les moyens invoqués en demande ou en défense mettent en cause les règles spécifiques du droit de la propriété littéraire et artistique dont le législateur a entendu leur réserver l’examen.
En l’espèce, les conventions signées entre une artiste et son agent ont toutes pour objet l’exploitation des droits patrimoniaux de cette artiste sur ses oeuvres.
L ’exploitation de ces droits, et tout particulièrement la validité de leur cession, est régie par les dispositions du titre troisième du livre 1 du Code de la propriété intellectuelle.
C’est dès lors à bon droit que le juge de la mise en état a estimé que les demandes relatives aux différents contrats conclus nécessitaient un examen les règles spécifiques du droit de la propriété intellectuelle et artistique et relevaient en conséquence de la compétence du Tribunal judiciaire.
Il en est de même en ce qui concerne les demandes formées au titre de la cession des marques et des dessins et modèles consentie par contrat, qui relèvent elles aussi de la compétence du Tribunal judiciaire spécialisé en application des articles L 521-3-1 et L 716-5 du Code de la propriété intellectuelle ; il convient en conséquence de confirmer les deux décisions du juge de la mise en état ayant fait droit à l’exception d’incompétence et ayant désigné le Tribunal judiciaire pour connaître des demandes formées par les parties.
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-1
ARRÊT AU FOND DU 12 MAI 2022
N° 2022/181
JONCTION
RG 21/13378 joint
RG 21/13376 –
N° Portalis DBVB-V-B7F-BIDIZ
SARL ARTMEDI
C/
A Z
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Roselyne SIMON-THIBAUD
Me Patrick LEROUX
Décisions déférées à la Cour :
Ordonnance du Juge de la mise en état du Tribunal Judiciaire de Grasse en date du 03 Septembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 20/01717.
Ordonnance du Juge de la mise en état du Tribunal Judiciaire de Grasse en date du 03 Septembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 20/03613.
AFFAIRE N° RG 21/13376 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BIDIZ
APPELANTE
SARL ARTMEDI, prise en la personne de son gérant en exercice Monsieur X, dont le siège social est sis 1820 Chemin de Saint-Bernard – 06220 VALLAURIS
représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Michel MONTAGARD, avocat au barreau de NICE substitué par Me Carole MENARD, avocat au barreau de PARIS, plaidant
INTIMEE
Madame A Z née le […] à Bourges, demeurant […]
représentée par Me Patrick LEROUX, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me David LAIK, avocat au barreau de GRASSE, plaidant
AFFAIRE N° RG 21/13378 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BIDI6
APPELANT
Monsieur B X
né le […] à MIGENNES, demeurant […]
représenté par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Michel MONTAGARD, avocat au barreau de NICE substitué par Me Carole MENARD, avocat au barreau de PARIS, plaidant
INTIMEE
Madame A Z
née le […] à Bourges, demeurant […]
représentée par Me Patrick LEROUX, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me David LAIK, avocat au barreau de GRASSE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 24 Mars 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Monsieur Pierre CALLOCH, Président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Pierre CALLOCH, Président
Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère
Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022,
Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Le 20 septembre 2012, madame A Z exerçant l’activité de peintre et de sculpteur sous le nom de Y a signé avec monsieur X un contrat d’agent exclusif au terme duquel elle s’engageait à poursuivre son travail artistique tandis que monsieur X s’engageait lui, notamment à en assurer la promotion moyennant une commission de 10 % sur chaque opération. Un avenant a été signé entre les parties le 16 avril 2015.
Le 16 avril 2015, madame A Z a signé avec monsieur X et la société ARTMEDI un contrat dit de collaboration avec la société ARTMEDI.
Par acte en date du même jour, madame Z a cédé à monsieur X partiellement ses droits portant sur ses oeuvres.
Par acte daté du 17 juillet 2015, elle a cédé au même monsieur X une partie de ses marques, trois marques Y, de ses dessins et modèles et de ses noms de domaine, Y.com et Y.fr.
Par acte en date du 24 avril 2020, la société ARTMEDI a fait assigner madame Z devant le Tribunal judiciaire de GRASSE afin de la faire condamner à exécuter ses obligations stipulées dans le contrat de collaboration du 16 avril 2015 et à lui verser une somme de 1 200 000 € au titre de dommages intérêts.
Par acte en date du même jour, monsieur X a fait assigner madame Z devant le même Tribunal judiciaire de GRASSE afin de faire constater la résiliation du contrat d’agent exclusif du 20 septembre 2012 et son avenant du 16 avril 2015 et obtenir sa condamnation au paiement des sommes de 500 000 € au titre de l’article 9 du contrat et 500 000 € au titre de dommages intérêts.
Suivant conclusions déposées par voie électronique le 23 décembre 2020, madame Z a saisi dans les deux dossiers le juge de la mise en état d’une exception d’incompétence au profit du Tribunal judiciaire de MARSEILLE, juridiction spécialisée en matière de propriété intellectuelle.
Suivant ordonnances en date du 3 septembre 2021, le juge de la mise en état a déclaré le Tribunal judiciaire de GRASSE incompétent au profit du Tribunal judiciaire de MARSEILLE.
Suivant déclarations enregistrées au greffe le 17 septembre 2021, la société ARTMEDI et monsieur X ont interjeté appel de cette décision. Ils ont été autorisés à assigner à jour fixe madame Z par ordonnance en date du 23 septembre 2021.
A l’appui de son appel, par conclusions déposées par voie électronique le 17 septembre 2021, la société ARTMEDI rappelle l’existence des différends litiges opposant les parties et pendant devant diverses juridictions du ressort. Elle soutient que son action se fonde exclusivement sur l’inexécution d’obligations contractuelles et non sur des dispositions du Code de la propriété intellectuelle et qu’en conséquence, elle relève des règles de droit commun sur la compétence matérielle et territoriale, la qualité d’artiste de madame Z étant sur ce point sans incidence. Elle se réfère notamment à une décision du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de MARSEILLE rendue le 20 avril 2021 dans un litige opposant les mêmes parties. Elle invoque un risque de contrariété de décision entre le Tribunal judiciaire de MARSEILLE et celui de GRASSE. Elle conteste enfin l’analyse du premier juge ayant retenu, selon elle à tort, la théorie de l’interdépendance des contrats. Elle conclut en conséquence à l’infirmation de l’ordonnance et à la condamnation de madame Z au paiement de la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Monsieur X a déposé le 17 septembre 2021 des conclusions contenant les mêmes moyens et les mêmes prétentions que la société ARTMEDI.
Madame Z, par conclusions déposées par voie électronique le 26 janvier 2022, reprend la motivation du juge de la mise en état sur l’analyse du contrat de collaboration et sur l’existence d’un ensemble contractuel relevant du droit de la propriété littéraire et artistique. Elle rappelle que l’existence de cet ensemble contractuel a été consacrée par la présente cour dans un arrêt rendu le 10 juin 2021. Elle précise en outre, notamment, invoquer les dispositions spécifiques du droit de la propriété intellectuelle pour demander à la cour de prononcer la nullité du contrat de cession de ses droits d’artiste. Elle conclut en conséquence à la confirmation de la décision déférée et demande à la cour de condamner la société ARTMEDI et monsieur X chacun à lui verser la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les appels interjetés par la société ARTMEDI et monsieur X étant fondés sur les mêmes moyens et visant la même fin, il y a lieu d’ordonner la jonction des deux procédures.
L’article L 331-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que les actions civiles et les demandes relatives à la propriété littéraire et artistique sont exclusivement portées devant les tribunaux judiciaires déterminés par voie réglementaire ; en application de ce texte, les actions engagées sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun relèvent de la compétence de ces juridictions spécialisées dès lors que les moyens invoqués en demande ou en défense mettent en cause les règles spécifiques du droit de la propriété littéraire et artistique dont le législateur a entendu leur réserver l’examen.
En l’espèce, les conventions signées par madame Z tant avec monsieur X qu’avec la société ARTMEDI ont toutes pour objet l’exploitation des droits patrimoniaux de cette artiste sur ses oeuvres ; l’exploitation de ces droits, et tout particulièrement la validité de leur cession, est régie par les dispositions du titre troisième du livre 1 du Code de la propriété intellectuelle ; c’est dès lors à bon droit que le juge de la mise en état a estimé que les demandes relatives aux différents contrats conclus entre madame Z, monsieur X et la société ARTMEDI nécessitaient un examen les règles spécifiques du droit de la propriété intellectuelle et artistique et relevaient en conséquence de la compétence du Tribunal judiciaire de MARSEILLE ; il en est de même en ce qui concerne les demandes formées au titre de la cession des marques et des dessins et modèles consentie par contrat en date du 17 juillet 2015, qui relèvent elles aussi de la compétence du Tribunal judiciaire spécialisé en application des articles L 521-3-1 et L 716-5 du Code de la propriété intellectuelle ; il convient en conséquence de confirmer les deux décisions du juge de la mise en état ayant fait droit à l’exception d’incompétence et ayant désigné le Tribunal judiciaire de MARSEILLE pour connaître des demandes formées par la société ARTMEDI et monsieur X.
En l’état de la procédure, il serait inéquitable de faire application de l’article 700 du code de procédure civile à l’encontre de l’une quelconque des parties ; il appartiendra au juge du fond de statuer sur la charge des frais irrépétibles supportés par chacune d’entre elles à l’occasion des très nombreuses procédures introduites.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
– ORDONNE la jonction entre la procédure enrôlée sous le numéro 21/13376 et la procédure enrôlée sous le numéro 21/13378.
– CONFIRME les deux ordonnances du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de GRASSE rendues le 3 septembre 2021.
Ajoutant aux décisions déférées,
– DÉBOUTE les parties de leurs demandes formées en application de l’article 700 du code de procédure civile.
– MET les dépens d’appel in solidum à la charge de monsieur X et de la société ARTMEDI.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT