Expertise judiciaire sur les tracteurs de la SARL TRANS TP LOCATION

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Expertise judiciaire sur les tracteurs de la SARL TRANS TP LOCATION

Résumé de l’affaire

La SARL TRANS TP LOCATION a acheté deux tracteurs d’occasion auprès de la SARL TURBOTRUCKS, mais a rencontré plusieurs problèmes et incohérences après l’acquisition des véhicules. Elle a donc assigné la SARL DAF TRUCKS FRANCE et la SARL TURBOTRUCKS en référé pour obtenir la désignation d’un expert afin de déterminer le kilométrage réel des véhicules, les éventuelles manipulations et les réparations nécessaires. Les parties ont plaidé leurs arguments en audience publique et la SELARL [F] [S], en qualité de liquidateur de la SARL TRANS TP LOCATION, a demandé la désignation d’un expert. La SARL TURBOTRUCKS a contesté la demande d’expertise et a demandé à être mise hors de cause. La SARL DAF TRUCKS FRANCE a également demandé à être mise hors de cause et a réclamé des dommages et intérêts. La juge des référés a ordonné l’expertise demandée par la SELARL [F] [S] et a condamné les parties à payer des frais et des dommages et intérêts.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 août 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG
24/00369
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Référés expertises
N° RG 24/00369 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YA4V
SL/CG

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 06 AOUT 2024

DEMANDERESSE :

S.A.R.L. TRANS TP LOCATION
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Me Jean-luc TIGROUDJA, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSES :

S.A.R.L. DAF TRUCKS FRANCE
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 10]
représentée par Me Damien LAUGIER, avocat au barreau de LILLE

S.A.S. TURBOTRUCKS [Localité 14]
[Adresse 8]
[Localité 5]
représentée par Me Thomas MINNE, avocat au barreau de LILLE

JUGE DES RÉFÉRÉS : Sarah HOURTOULE, 1ere VP adjointe, suppléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire

GREFFIER : Martine FLAMENT lors des débats et Sébastien LESAGE lors de la mise à disposition

DÉBATS à l’audience publique du 06 Août 2024

ORDONNANCE du 06 Août 2024

LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :

La SARL TRANS TP LOCATION, gérée par Madame [E] [O], immatriculée le 23 octobre 1995, a pour activité et objet social le transport d’engins et marchandises.

Suivant facture en date du 31 octobre 2017, elle a acheté, auprès de la SARL TURBOTRUCKS [Localité 14], deux tracteurs d’occasion immatriculés respectivement [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12] pour une valeur totale de 91.200 €, dont la date de première mise en circulation est le 15 octobre 2014 selon le certificat administratif et dont le kilométrage indiqué lors de la vente était de 80.000 kilomètres.

Exposant que plusieurs avaries et plusieurs incohérences quant au kilométrage des véhicules sont survenues après l’acquisition de ces deux véhicules, la SARL TRANS TP LOCATION a par actes des 27 et 28 février 2024, fait assigner la SARL DAF TRUCKS FRANCE et la SARL TURBOTRUCKS [Localité 14] devant le président du tribunal judiciaire de [Localité 14] statuant en référé, pour obtenir la désignation d’un expert, au visa des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, outre leur condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile, les dépens étant réservés.

L’affaire a été appelée à l’audience du 19 mars 2024 et renvoyée à la demande des parties pour être plaidée le 25 juin 2024.

A cette date, la SELARL [F] [S], représentée par Maître [K] [F] es-qualité de liquidateur de La SARL TRANS TP LOCATION, dont la gérante de droit est Madame [E] [O], représentée par son avocat, sollicite le bénéfice de ses dernières écritures déposées à l’audience et reprises oralement.
Elle demande de
Vu l’article 145 du Code de procédure civile,
Vu l’article L641-9, L622-20, L641-4 du Code de commerce,
Vu les articles 369 et 373 du Code de procédure civile,
– Juger que la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] intervient es-qualité de liquidateur de La SARL TRANS TP LOCATION,
– Juger que la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] es-qualité de liquidateur de La SARL TRANS TP LOCATION poursuit la présente instance enrôlée sous le N° RG 24/00369 et entend confirmer et faire siens les termes des assignations signifiées aux défenderesses les 27 et 28 février 2024,
Ce faisant,
– Désigner tel Expert aux fins de :
– Se rendre au [Adresse 4] [Localité 13] à [Localité 13] et/ou en tout autre lieu où les véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12] litigieux sont stationnés
– Se faire remettre tout document utile
– Décrire et déterminer l’origine et le parcours juridique, commercial et administratif des véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Donner son avis sur l’absence de carnet d’entretien d’origine
– Décrire l’état des véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Dire si l’état d’usure et les avaries relevées depuis leur acquisition est cohérent avec le kilométrage alors affiché des deux véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Examiner et déterminer le kilométrage réel des deux véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Déterminer et décrire les éventuelles manipulations ayant amené à la minoration du kilométrage des véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Déterminer la valeur corrigée des véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12] au jour de la vente et en fonction du kilométrage réel
– Evaluer le montant des réparations induites par les minorations de kilométrage
– S’adjoindre les services de tel sapiteur dont la désignation s’avèrerait utile à l’exercice de la présente mission d’expertise
– Evaluer le montant des préjudices subis par la requérante
– Condamner la SARL DAF TRUCKS France et la SARL TURBOTRUCKS [Localité 14] à payer à la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] es-qualité de liquidateur de La SARL TRANS TP LOCATION la somme de 2.500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du CPC,
– Réserver les dépens.

La SARL TURBOTRUCKS [Localité 14], représentée par son avocat, sollicite le bénéfice de ses conclusions soutenues et déposées à l’audience et demande de :
– Prononcer la société TURBOTRUCKS [Localité 14] recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions,
A titre principal,
– Prononcer l’action de la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION irrecevable pour défaut de qualité et d’intérêt à agir,
En conséquence,
– Prononcer irrecevables les demandes de la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION et de la société TRANS TP LOCATION en liquidation judiciaire,
A titre principal,
– Débouter la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION et la société TRANS TP LOCATION de l’ensemble de leurs demandes,
A titre subsidiaire,
– Si l’expertise venait à être ordonnée, sans reconnaissance de responsabilité de sa part et sous réserve de soulever ultérieurement tout moyen de droit tenant, notamment, à l’irrecevabilité et au mal fondé des demandes qui pourraient être formées à son encontre,
– Donner acte à la société TURBOTRUCKS [Localité 14] de ses plus expresses protestations et réserves,
– Ajouter les missions d’expertise suivantes :
– Déterminer l’historique des véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12] et décrire les conditions d’utilisation et d’entretien depuis leur acquisition par la société TRANS TP LOCATION et le cas échéant vérifier si elles ont conformes aux préconisations du constructeur et si elles ont pu jouer un rôle causal dans les désordres constatés,
Et
– Répondre à toute question posée par les parties ; instruire toute difficulté dont la solution paraîtra utile à la manifestation de la vérité ».
Mettre à la charge de la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] es qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION les frais d’expertise,
En tout état de cause,
– Condamner la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION à régler à la société TURBOTRUCKS [Localité 14] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

La SARL DAF TRUCKS FRANCE, représentée par son avocat, sollicite le bénéfice de ses conclusions soutenues et déposées à l’audience et demande de :
Vu les articles 700, 872, 873 et 145 du Code de Procédure civile,
Vu les pièces versées aux débats,
– METTRE HORS DE CAUSE la société DAF TRUCKS FRANCE SARL, en déclarant irrecevable et en déboutant la société [F] [S], représentée par Maître [K] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION, de l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions pris à l’encontre de la société DAF TRUCKS France SARL .
– CONDAMNER la société [F] [S], représentée par Maître [K] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION, à payer à la société DAF TRUCKS FRANCE SARL la somme de € 1.500 au titre de l’article 700 CPC.
– CONDAMNER la partie perdante aux dépens ;

Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est fait référence à l’acte introductif d’instance et aux écritures des parties qui ont été soutenues oralement.

La présente décision, susceptible d’appel, est contradictoire.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la fin de non recevoir

La SARL TURBOTRUCKS [Localité 14] soutient qu’il est inutile pour une société placée en liquidation judiciaire de solliciter une expertise judiciaire portant sur 2 tracteurs ayant parcouru plusieurs milliers de kilomètres qui sont destinés à être vendus aux enchères et dont leurs conditions de stockage et d’entretien sont inconnues. Elle estime que faute de rapporter la preuve d’un intérêt à agir dans l’intérêt collectif des créanciers, la fin de non-recevoir tirée de l’intérêt à agir sera accueillie et l’action de la SELARL [F]-[S] représentée par Maître [K] [F] et la société TRANS TP LOCATION en liquidation judiciaire seront déclarées irrecevables en toutes leurs demandes.

Maître [K] [F] expose qu’il intervient à l’instance es-qualité de liquidateur judiciaire de la SARL TRANS TP LOCATION afin de reprendre l’instance pendante devant le Tribunal de céans sous le N° RG 24/00369 et de confirmer les termes des assignations délivrées aux défenderesses les 27 et 28 février 2024 au nom de son administrée. Maître [F] es-qualité de Liquidateur judiciaire, estime qu’il agit dans l’intérêt collectif des créanciers en tentant ainsi de reconstituer leur gage. Il souligne que l’expertise sollicitée vise à démontrer que le consentement de la société TRANSTP LOCATION a été surpris ou que les véhicules vendus étaient atteints d’un vice lors de la vente de nature à la résoudre pour obtenir la restitution du prix de vente et l’indemnisation de tous les postes de préjudices subis par son administrée.

Selon l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

L’article L 622-20 du code de commerce dispose que le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l’intérêt collectif des créanciers. Le liquidateur est investi de ces prérogatives par renvoi de l’article L 641-4.

L’action du liquidateur en extension de la procédure collective fondée sur la confusion des patrimoines tend à la reconstitution du gage commun des créanciers. Elle doit profiter aux créanciers qu’il représente et non aggraver leur sort, faute de quoi son action se trouve dépourvue d’intérêt.

En l’espèce, l’action en référé du Mandataire judiciaire vise à réintégrer dans le patrimoine du débiteur des actifs qui auront vocation à diminuer le passif déclaré.
Le Mandataire judiciaire justifie donc d’un intérêt à agir et son action sera déclarée recevable.

Sur la demande de mise hors de cause

La société DAF TRUCKS FRANCE soutient qu’elle n’est intervenue ni dans les ventes, ni dans un moment quelconque de la chaine de vente des deux véhicules devenus propriété de TRANS TP LOCATION en 2017.
Elle estime qu’en l’absence de toute relation contractuelle entre le demandeur et DAF TRUCKS FRANCE SARL, il y a lieu de mettre cette dernière hors de cause.
Elle rappelle que dans le courrier qu’elle a adressé au cabinet d’expertise DANNEELS le 7 juillet 2022, elle écrit au nom et pour le compte de sa société mère DAF TRUCKS N.V., fabricant et vendeur des véhicules ES 237-AB et ES 252-AB. Elle estime que ce rôle de transmission entre l’expert du propriétaire des véhicules et l’usine n’implique aucun lien contractuel entre TRANS TP LOCATION et DAF TRUCKS FRANCE.

La SELARL [F] [S] es-qualité de liquidateur de La SARL TRANS TP LOCATION fait valoir que la société DAF TRUCKS France a démontré par son intervention son implication dans les investigations amiables. Elle ajoute que l’acquéreur peut agir contre le vendeur intermédiaire ou le constructeur de la chose litigieuse et justifie donc d’un intérêt à agir contre elle.

La « mise hors de cause » ne correspond, sur le plan juridique, ni à une prétention ni à un moyen de défense, et que le tribunal ne dispose pas du pouvoir de sortir une partie d’une procédure en cours, si ce n’est pour constater l’existence d’une cause d’extinction de l’instance à son égard. Dans ces conditions, il ne sera pas statué sur la demande de mise hors de cause à proprement parler, mais seulement sur les moyens de défense qu’elle peut recéler.
En l’espèce, ce moyen de défense qui vise à ce que le juge des référés se prononce sur la responsabilité de la société DAF TRUCKS FRANCE ne saurait prospérer alors que l’examen de celle-ci relèvera de l’appréciation du juge du fond.
Dès lors, sa demande de mise hors de cause sera rejetée.

Sur la demande d’expertise

La SARL TRANS TP LOCATION représentée par Maître [K] [F], Liquidateur judiciaire, indique, pour justifier d’un motif légitime, qu’elle dispose de plusieurs moyens légaux tels que le défaut de conformité et manquement à l’obligation de délivrance, la garantie des vices cachés, ou la nullité du contrat pour manœuvres dolosives pour agir contre l’une ou l’autre des sociétés défenderesses. Elle souligne que son action n’est pas prescrite puisque ce n’est qu’au cours de l’année 2022 qu’elle a eu la confirmation d’une incohérence du kilométrage affiché. Elle ajoute que sur le fondement des vices cachés la prescription ne commence à courir à l’égard de la société TURBOTRUCKS [Localité 14] qu’au jour du dépôt du rapport d’expertise et s’agissant de la société DAF TRUCKS France, elle n’a invoqué aucune prescription et y a renoncé par son implication dans les investigations amiables.

La Société TURBOTRUCKS [Localité 14] conteste l’utilité d’une telle mesure et le motif légitime. Elle souligne que la société TRANS TP LOCATION représentée par son liquidateur es qualité dispose d’éléments suffisants pour établir les faits dont dépend l’issue éventuelle de l’instance devant le juge du fond puisqu’elle a une expertise amiable contradictoire de sorte que la mesure sollicitée est dépourvue de toute utilité.
Elle estime que la demanderesse ne démontre aucun désordre, n’apporte la preuve d’aucun dysfonctionnement ou panne des tracteurs et que les constatations de l’huissier permettent uniquement de constater l’usage intensif des tracteurs depuis leur acquisition. Elle ajoute que la preuve de l’entretien régulier des tracteurs n’est pas apportée.
Elle fait valoir que l’action est prescrite et donc vouée à l’échec et qu’ainsi la demanderesse ne saurait prétendre à l’existence d’un motif légitime. Elle indique que toute action en responsabilité entre 2 sociétés professionnelles se prescrit dans un délai de 5 ans conformément à l’alinéa 1er de l’article L.110-4 du code de commerce.
Subsidiairement, elle formule protestation et réserves.

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. Il suffit qu’un procès futur soit possible, qu’il ait un objet et un fondement suffisamment déterminé, que le demandeur produise des éléments rendant crédibles ses suppositions, sans qu’il n’y ait lieu à exiger un commencement de preuve des faits invoqués, que l’expertise est justement destinée à établir; que sa solution puisse dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, que celle-ci ne soit pas vouée à l’échec en raison d’un obstacle de fait ou de droit et ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui.

L’existence de contestations, même sérieuses, ne constitue pas un obstacle à la mise en œuvre des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, l’application de ce texte n’impliquant aucun préjugé sur la responsabilité des personnes appelées comme parties à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé.

Il est constant, que l’article 146 du code de procédure civile selon lequel “une mesure d’instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l’allègue ne dispose pas d’éléments pour le prouver. En aucun cas, une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve”, relatif aux mesures d’instruction ordonnées au cours d’un procès, ne s’applique pas lorsque le juge est saisi d’une demande fondée sur l’article 145 du même code.

La SARL TRANS TP LOCATION représentée par Maître [K] [F], Liquidateur judiciaire, verse aux débats un procès verbal d’expertise amiable et contradictoire en date du 26 avril 2022 qui indique le caractère réitéré des pannes subies et le fait que la lecture des codes défaut laisse apparaître un kilométrage de 1.009.629 kms (Pièce demanderesse n°11) suite auquel le cabinet d’expertises DANNEELS a adressé par courrier en date du 22 juin 2022 à la société DAF TRUCKS France les fichiers numériques pour pouvoir définir le kilométrage réel du véhicule (Pièce demanderesse n°13).
Le procès-verbal de constat dressé par la SCP [A] [T]-[Y] [Z]-[R] [U], Commissaires de justice à [Localité 15], le 18 mars 2022 annexe un diagnostic permettant de constater que le tracteur immétriculé [Immatriculation 12] a un kilométrage de 1009629 kms au lieu des 679984 kms affichés au compteur et le camion immatriculé [Immatriculation 11] un kilométrage de 959275 kms au lieu des 640531 kms affichés au compteur.
Le rapport d’expertise protection juridique effectué par [P] EXPERTISE le 27 mars 2023 conclut que « les opérations contradictoires n’ont pas dévoilé d’incohérence entre le kilométrage affiché au compteur et le kilométrage réel » mais il convient de relever que cette mention fait suite au défaut de communication par la partie demanderesse de la communication du procès verbal de constat de Maître [U]. (Pièces TURBOTRUCKS [Localité 14] n°11-1 et 11-2)
Les pièces produites aux débats rendent vraisemblable l’existence des désordres invoqués, de sorte que la SARL TRANS TP LOCATION représentée par Maître [K] [F], Liquidateur judiciaire, justifie d’un motif légitime pour obtenir la désignation d’un expert en vue d’établir, avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige.

En conséquence, et sans que la présente décision ne comporte de préjugement quant aux fautes éventuelles, aux responsabilités encourues, et aux garanties mobilisables, dont l’appréciation relève du fond, il sera fait droit à la demande d’expertise suivant les modalités fixées à la présente ordonnance. La détermination de la mission de l’expert relève de l’appréciation du juge, conformément aux dispositions de l’article 265 du code de procédure civile.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Le juge des référés a l’obligation de statuer sur les dépens en application des dispositions de l’article 491 du code de procédure civile. Il ne saurait donc réserver les dépens.

L’expertise étant ordonnée à la demande de la SARL TRANS TP LOCATION représentée par Maître [K] [F], Liquidateur judiciaire, et dans son intérêt exclusif, il convient de mettre à sa charge les dépens qui comprendront l’avance des frais d’expertise.

A ce stade de la procédure, il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties, les frais et dépens par elle engagés dans le cadre de la présente instance au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Les parties seront donc déboutées de leurs demandes à ce titre.

Sur l’exécution provisoire

La présente décision, susceptible d’appel, est exécutoire par provision, en application des dispositions des articles 484, 514 et 514-1, alinéa 3, du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance de référé, par mise à disposition au greffe, après débats en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort ;

Renvoyons les parties à se pourvoir sur le fond du litige ;

Par provision, tous moyens des parties étant réservés ;

Déclarons l’action de la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION recevable ;

Disons n’y avoir lieu à mettre hors de cause la société DAF TRUCKS FRANCE SARL ;

Ordonnons une expertise et Désignons en qualité d’expert :

[D] [J]
[Adresse 3]
[Localité 7]

expert inscrit sur la liste de la cour d’appel de DOUAI,

lequel pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne ;

avec mission de :
– Se rendre au [Adresse 4] [Localité 13] à [Localité 13] et/ou en tout autre lieu où les véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12] litigieux sont stationnés
– Se faire remettre tout document utile
– Décrire et déterminer l’origine et le parcours juridique, commercial et administratif des véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Décrire l’état des véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Dire si l’état d’usure et les avaries relevées depuis leur acquisition est cohérent avec le kilométrage alors affiché des deux véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Examiner et déterminer le kilométrage réel des deux véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Décrire les conditions d’utilisation et d’entretien depuis leur acquisition par la société TRANS TP LOCATION,
– Déterminer et décrire les éventuelles manipulations ayant amené à la minoration du kilométrage des véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12]
– Déterminer la valeur corrigée des véhicules immatriculés [Immatriculation 11] et [Immatriculation 12] au jour de la vente et en fonction du kilométrage réel
– Evaluer le montant des réparations induites par les minorations de kilométrage
– S’adjoindre les services de tel sapiteur dont la désignation s’avèrerait utile à l’exercice de la présente mission d’expertise
– Evaluer le montant des préjudices subis par la requérante

Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :
– convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils,
– recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise ;
– se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés ;
– se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis ;
– définir un calendrier prévisionnel de ses opérations à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
en faisant définir un enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations,
en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent, sur le fondement de l’article 280 du code de procédure civile, et dont l’affectation aux parties relève du pouvoir discrétionnaire de ce dernier au sens de l’article 269 du même code ;
en fixant aux parties un délai impératif pour procéder aux interventions forcées ;
en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;
– adresser aux parties au terme de ses opérations, un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport) et y arrêter le calendrier impératif de la phase conclusive de ses opérations, compte-tenu des délais octroyés devant rester raisonnable :
fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;
rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà de ce délai.

Fixons à la somme de 2500 euros, le montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée par la partie demanderesse, à la Régie d’avances et de recettes du tribunal judiciaire de LILLE avant le 17 septembre 2024 ;

Disons que faute de consignation de la présente provision initiale dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera aussitôt caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l’article 271 du code de procédure civile ;

Disons que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport et en copie sous forme d’un fichier PDF, enregistré sur une clef USB, au Greffe du Tribunal Judiciaire de LILLE, Service du Contrôle des expertises, [Adresse 2], dans le délai de six mois, à compter de la consignation sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du Juge du Contrôle ;

Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du service du contrôle des expertises de ce tribunal, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du même code ;

Déboutons la société TURBOTRUCKS [Localité 14] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboutons la société DAF TRUCKS FRANCE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboutons la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Laissons à la charge de la SELARL [F] [S] représentée par Maître [K] [F] en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANS TP LOCATION, les dépens de la présente instance ;

Rappelons que la présente ordonnance est exécutoire par provision.

La présente ordonnance a été signée par la juge et le greffier.

LE GREFFIER LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Sébastien LESAGE Sarah HOURTOULE


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