Expertise et Restitution : Les Enjeux d’une Rénovation Mal Réalisée

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Expertise et Restitution : Les Enjeux d’une Rénovation Mal Réalisée

M. [B] a assigné la société Domus TCE en référé le 20 juin 2024, invoquant des malfaçons suite à des travaux de rénovation réalisés entre janvier et mai 2023, avec un retard de plus de trois mois. Il a demandé la désignation d’un expert, la production d’attestations d’assurance, la restitution de matériel et des astreintes en cas de non-respect des délais. Lors de l’audience du 10 septembre 2024, M. [B] a maintenu ses demandes. La société Domus TCE n’ayant pas constitué avocat, la décision a été réputée contradictoire. Le tribunal a ordonné une mesure d’expertise, désignant M. [E] [W] comme expert, avec des missions précises concernant l’évaluation des désordres et des travaux nécessaires. Une provision de 5 000 euros a été fixée pour les frais d’expertise, à consigner avant le 9 décembre 2024. La société Domus TCE doit également fournir ses attestations d’assurance dans un délai de trente jours, sous astreinte. Les autres demandes de M. [B] ont été rejetées, et il a été condamné aux dépens. La décision est exécutoire par provision.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

8 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG
24/54490
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/54490 –
N° Portalis 352J-W-B7I-C5DTU

N°: 6-CB

Assignation du :
20 juin 2024

EXPERTISE[1]

[1] 1 Copie exécutoire
délivrée le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 08 octobre 2024

par Sophie COUVEZ, Vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Clémence BREUIL, Greffier.

DEMANDEUR

Monsieur [M] [B]
[Adresse 8]
[Localité 11]

représenté par Maître Alexis BARBIER de la SELARL BARBIER ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS – #J0042

DEFENDERESSE

La société DOMUS TCE
[Adresse 5]
[Localité 9]

non représentée

DÉBATS

A l’audience du 10 Septembre 2024, tenue publiquement, présidée par Sophie COUVEZ, Vice-présidente, assistée de Clémence BREUIL, Greffier,

Nous, Juge des référés, assisté de notre greffier, après avoir entendu les parties représentées par leur conseil, avons rendu la décision suivante ;

FAITS ET PROCEDURE

Invoquant des malfaçons à la suite de travaux réalisés par la société Domus TCE, M. [B] l’a, par acte du 20 juin 2024, faite assigner en référé, pour obtenir, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile :

– La désignation d’un expert,
– Sa condamnation à produire ses attestations d’assurance RC et RCD pour la période correspondant aux travaux, dans un délai de deux semaines à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard pendant une période de trois mois renouvelable,
– Sa condamnation à lui restituer à ses frais le matériel et les matériaux lui appartenant qu’elle a conservé, dans un délai de deux semaines à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard pendant une période de trois mois renouvelable,
– La réserve des dépens.

Lors de l’audience qui s’est tenue le 10 septembre 2024, M. [B], représenté par son conseil, a maintenu ses demandes telles que contenues dans l’acte introductif d’instance.

A l’appui de ses demandes, il explique avoir confié à la société Domus TCE la réalisation de travaux de rénovation qui ont débuté au mois de janvier 2023 et se sont achevés en mai 2023, soit avec plus de trois mois de retard.

Il explique avoir alors constaté de nombreuses malfaçons et l’absence de matériel et de matériaux lui appartenant.

Il précise que si la société Domuc TCE a fini par accepter mi-septembre 2023 d’intervenir, elle n’a pas pour autant mis fin aux malfaçons constatées, de nouveaux désordres étant au contraire apparus.

Bien que régulièrement assignée à personne morale, la société Domus TCE n’a pas constitué avocat. Par application des dispositions de l’article 473, alinéa 2, du code de procédure civile, il sera ainsi statué par décision réputée contradictoire.

Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance.

A l’issue de l’audience, la décision a été mise en délibéré au 8 octobre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d’expertise

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.

Ce texte suppose l’existence d’un motif légitime c’est à dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l’objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui. Elle doit être pertinente et utile.

En l’espèce, il résulte des pièces produites, et notamment du devis en date du 30 décembre 2022, des lettres de mise en demeure des 20 juillet et 7 septembre 2023 et des procès-verbaux en date des 12 et 26 septembre 2023, qu’à la suite de la réalisation de travaux de rénovation par la société Domus TCE au cours de l’année 2024, de nombreux désordres ont été constatés au sein de l’appartement de M. [B] situé [Adresse 7] à [Localité 11].

Le motif légitime requis par l’article 145 du code de procédure civile est donc établi, en présence d’un procès en germe entre les parties

La mesure d’instruction sollicitée sera donc ordonnée dans les termes du dispositif ci-après et ce, aux frais avancés du demandeur.

Sur la demande de production de pièces

Vu l’article 145 du code de procédure civile précité,

Si cette disposition ne vise expressément que les mesures d’instruction légalement admissibles, son champ d’application a été étendu à toutes les mesures tendant à conserver ou établir la preuve de faits ; sont ainsi concernées non seulement les mesures d’instruction proprement dites mais aussi les mesures de production de pièces.

Il est rappelé que la production forcée doit porter sur des actes ou des pièces déterminées ou déterminables. Elle ne peut porter sur un ensemble indistinct de documents. Ceux-ci doivent être suffisamment identifiés.

Par ailleurs, la production ne peut être ordonnée que si l’existence de la pièce est certaine. Le demandeur doit ainsi faire la preuve que la pièce ou l’acte recherché est détenu par celui auquel il le réclame.

En outre, la juridiction des référés, saisie en application de l’article 145, dispose d’un pouvoir souverain pour apprécier si le demandeur justifie d’un motif légitime.

En l’espèce, la société Domus TCE étant tenue de souscrire une assurance responsabilité civile professionnelle et une assurance responsabilité civile décennale, il y a lieu de faire droit à la demande de communication des attestations dans le délai de 30 jours à compter de la signification de la présente ordonnance et ce, sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard passé ce délai suivant les termes du présent dispositif, cette société n’ayant pas communiqué spontanément ces pièces.

Sur la demande de restitution du matériel et de matériaux

Suivant l’article 808 du code de procédure civile,  » Dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.  »

Aux termes de l’article 809,  » Le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.  »

En l’espèce, la société Domus TCE ne produit à l’appui de sa demande tendant à la restitution de matériel et de matériaux qui auraient été emportés par la société Domus TCE que la lettre recommandée avec accusé de réception qu’elle lui a adressée le 20 juillet 2023 et la sommation qu’il lui a faite adresser par acte en date du 19 décembre 2023.

Ces pièces sont insuffisantes pour établir avec l’évidence requise en référé que la société Domus TCE est effectivement en possession du matériel et des matériaux ainsi réclamés.

Il sera, en conséquence, dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de restitution de M. [B].

Sur les demandes accessoires

La partie demanderesse, dans l’intérêt de laquelle la décision est rendue, supportera la charge des dépens de la présente instance en référé en application de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant en référé, par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire et en premier ressort,

Ordonnons une mesure d’expertise ;

Désignons en qualité d’expert :

M. [E] [W]
Via Architectes
[Adresse 6]
[Localité 10]
Tél : [XXXXXXXX01]
Port. : [XXXXXXXX04]
Email : [Courriel 12]

lequel pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne ;

avec mission, les parties régulièrement convoquées, après avoir pris connaissance du dossier, s’être fait remettre tous documents utiles, et avoir entendu les parties ainsi que tout sachant, de:

– Se rendre sur les lieux sis [Adresse 7] à [Localité 11], après y avoir convoqué les parties ;
– Décrire les désordres allégués dans l’assignation ; et le cas échéant, sans nécessité d’extension de mission, examiner tous désordres connexes, ayant d’évidence la même cause mais révélés postérieurement à l’assignation, sans préjudice par ailleurs des dispositions de l’article 238, alinéa 2, du code de procédure civile ;
– Les décrire, en indiquer la nature, l’importance, la date d’apparition, en retracer l’historique et en décrire l’évolution prévisible ; en rechercher la ou les causes ;
– Fournir tout renseignement de fait permettant au tribunal de statuer sur les éventuelles responsabilités encourues et sur les comptes entre les parties ;
– Après avoir exposé ses observations sur la nature des travaux propres à remédier aux désordres, et leurs délais d’exécution, chiffrer, à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d’un maître d’œuvre, le coût de ces travaux ;
– Fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d’évaluer les préjudices de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des désordres, notamment le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état ;
– Dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l’aggravation des désordres et du préjudice qui en résulte, soit pour prévenir les dommages aux personnes ou aux biens ; dans l’affirmative, à la demande d’une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvegarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire dans un rapport intermédiaire qui devra être déposé aussitôt que possible ;
– Faire toutes observations utiles au règlement du litige ;

Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :

-convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise ;

-se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés ;

-se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis ;

– à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations ; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
-en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;
– en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent, sur le fondement de l’article 280 du code de procédure civile, et dont l’affectation aux parties relève du pouvoir discrétionnaire de ce dernier au sens de l’article 269 du même code ;
– en fixant aux parties un délai impératif pour procéder aux interventions forcées ;
-en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;

– au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier impératif de la phase conclusive de ses opérations, compte-tenu des délais octroyés devant rester raisonnable ;
-fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;
-rappelant aux parties, au visa de l’article 276, alinéa 2, du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà de ce délai ;

Fixons à la somme de 5 000 euros (cinq mille euros) le montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée par la partie demanderesse à la régie du tribunal judiciaire de Paris au plus tard le 9 décembre 2024 ;

Disons que faute de consignation de la présente provision initiale dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera aussitôt caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l’article 271 du code de procédure civile ;

Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du contrôle des expertises, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du même code ;

Disons que le terme du délai fixé par l’expert pour le dépôt des dernières observations marquera la fin de l’instruction technique et interdira, à compter de la date à laquelle il est fixé, le dépôt de nouvelles observations, sauf les exceptions visées à l’article 276 du code de procédure civile ;

Disons que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 255, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au greffe du tribunal judiciaire de Paris (contrôle des expertises) avant le 09 juin 2025, pour le rapport définitif, sauf prorogation de ces délais dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge du contrôle ;

Disons que, dans le but de favoriser l’instauration d’échanges dématérialisés et de limiter la durée et le coût de l’expertise, le technicien devra privilégier l’usage de la plateforme OPALEXE et qu’il proposera en ce cas à chacune des parties, au plus tard lors de la première réunion d’expertise, de recourir à ce procédé pour communiquer tous documents et notes par la voie dématérialisée dans les conditions de l’article 748-1 du code de procédure civile et de l’arrêté du 14 juin 2017 validant de tels échanges ;

Ordonnons la communication à M. [B] par la société Domus TCE de son attestation d’assurance responsabilité civile professionnelle et son attestation d’assurance responsabilité civile décennale pour l’année 2023 dans un délai de trente jours à compter de la signification de la présente ordonnance et, sous astreinte provisoire de 50 € par acte et par jour de retard passé ce délai ;

Disons que l’astreinte court pendant un délai maximum de trois mois, à charge pour M. [B], à défaut de communication de ces pièces, de solliciter du juge de l’exécution, la liquidation de l’astreinte provisoire et le prononcé de l’astreinte définitive ;

Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande de M. [B] de condamnation de la société Domus TCE à lui restituer à ses frais le matériel et les matériaux lui appartenant qu’elle a conservés sous astreinte ;

Condamnons la partie demanderesse aux dépens ;

Rejetons toutes les autres demandes des parties ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision.

Fait à Paris le 08 octobre 2024.

Le Greffier, Le Président,

Clémence BREUIL Sophie COUVEZ

Service de la régie :
Tribunal de Paris, Parvis du Tribunal de Paris, 75017 Paris
☎ [XXXXXXXX03]
Fax [XXXXXXXX02]
✉ [Courriel 14]

Sont acceptées les modalités de paiements suivantes :

➢ virement bancaire aux coordonnées suivantes :
IBAN : [XXXXXXXXXX013]
BIC : [XXXXXXXXXX013]
en indiquant impérativement le libellé suivant :
C7 « Prénom et Nom de la personne qui paye » pour prénom et nom du consignataire indiqué dans la décision + Numéro de RG initial

➢ chèque établi à l’ordre du régisseur du Tribunal judiciaire de Paris (en cas de paiement par le biais de l’avocat uniquement chèque CARPA ou chèque tiré sur compte professionnel)

Le règlement doit impérativement être accompagné d’une copie de la présente décision. En cas de virement bancaire, cette décision doit être envoyée au préalable à la régie (par courrier, courriel ou fax).

Expert : Monsieur [E] [W]

Consignation : 5 000 € par Monsieur [M] [B]

le 09 Décembre 2024

Rapport à déposer le : 09 Juin 2025

Juge chargé du contrôle de l’expertise :
Service du contrôle des expertises
Tribunal de Paris, Parvis du Tribunal de Paris, 75017 Paris.


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