Exclusivité : 9 octobre 2015 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 12/23362

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Exclusivité : 9 octobre 2015 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 12/23362
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9 octobre 2015
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
12/23362

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 09 OCTOBRE 2015

N°2015/557

Rôle N° 12/23362

[L] [Z]

C/

SA SOCORAIL

Grosse délivrée le :

à :

Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Me Philippe louis RULLIER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud’hommes – Formation de départage de MARTIGUES – section IN – en date du 09 Novembre 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/1407.

APPELANT

Monsieur [L] [Z], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SA SOCORAIL, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Philippe louis RULLIER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 29 Juin 2015, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Mme Françoise FILLIOUX, Conseillère

Mme Sylvie ARMANDET, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2015

Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Caroline LOGIEST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

[L] [Z] a été engagé par la SA Socorail, suivant contrat à durée indéterminée à compter du 28 janvier 1991 en qualité d’ ouvrier polyvalent expédition.

Dans le dernier état de la relation contractuelle, il a été affecté sur le site de la société Lyondell-Basell CPB à Berre l’Etang et a occupé l’emploi de « ouvrier polyvalent expédition coefficient 190 catégorie A échelon 3 niveau II » moyennant une rémunération mensuelle de base brute de 1556,77 € outre une prime d’ancienneté de 141,12 € . Les rapports contractuels ont été régis par les dispositions de la convention collective des industries de transformation de métaux de Meurthe et Moselle.

Suivant courrier du 17 février 2010, la société Lyondell-Basell a informé la SA Socorail de la fin du contrat de prestations du site CPB Berre sur lequel était affecté [L] [Z] ainsi que 15 autres salariés.

Le 25 mars 2010, la SA Socorail a adressé au salarié le courrier suivant « vous est actuellement affecté sur le site CPB de Berre et comme vous le savez la perte de ce contrat est effective au 30 avril 2010. Dans ce cadre nous vous convions un entretien pour vous proposer les postes de reclassement au sein Socorail et vous informer de sur le congé de reclassement cet entretien se déroulera le 1er avril à 15h30 sur le site CPB ».

Le 2 avril 2010, [L] [Z] a remis en mains propres à l’employeur une lettre datée 2 avril 2010 ainsi libellée:

« depuis un mois,suite à la perte du contrat Lyondell-Basell de Berre, vous avez réuni collectivement et à plusieurs reprises l’ensemble du personnel du contrat jusqu’à ce jour vous ne nous avez convoqué individuellement. J’ai bien écouté retenu les raisons invoquées par Monsieur [C] lors des réunions collectives pour justifier le refus de négociations d’indemnité de départ et en particulier que tout départ négocié réduirait d’autant le montant de l’intéressement de l’année en cours pour l’ensemble du personnel. Bien évidemment je me suis d’accord sur le refus de reconnaître la légitimité à faire valoir mes droits à une indemnité de départ, ni sur le motif invoqué. Ce jour, votre discours n’ayant laissé entrevoir aucune ouverture de négociations possibles ce que je regrette vivement après plus de 19 ans d’ancienneté, je vous confirme que ayant besoin de travail ayant reçu de la part de Delta Route une promesse d’embauche intéressante que je ne souhaite pas la laisser passer. Je vous confirme ma démission à compter du 30 avril 2010 ce qui me rend libre de tout engagement de toute exécution de préavis envers Scorail à partir du 1er mai 2010 ».

Invoquant sa démission forcée s’analysant en un licenciement frappé de nullité, [L] [Z] comme deux autres de ses collègues par instances séparées a le 24 décembre 2010 saisi le conseil de prud’hommes de Martigues lequel section industrie par jugement en date du 9 novembre 2012 a:

*dit n’y avoir lieu à annulation de la démission du salarié en date du 2 avril 2010,

*débouté en conséquence le salarié de l’ensemble de ses demandes,

*dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

*condamné le salarié aux dépens.

[L] [Z] a le 11 décembre 2012 interjeté régulièrement appel de ce jugement.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions, l’appelant demande à la cour de:

*infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

*dire nulle et de nul effet la démission forcée donnée le 2 avril 2010,

*dire que la rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur intervenue pour une cause non inhérente à la personne du salarié s’analyse en un licenciement frappé de nullité à raison de la violation des dispositions de l’article L 1235-10 du code du travail prescrivant l’élaboration d’un plan de sauvegarde de l’emploi,

*condamner l’employeur à lui payer:

– 3395,78 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 339,58 pour les congés payés afférents,

-8991,75 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

-25’000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture du contrat de travail équivalent en ses effets en un licenciement frappé d’appel en application des dispositions du 2ème alinéa de l’article L 1235 -11 du code du travail,

-2000 € à titre d’indemnité pour défaut de proposition de convention de reclassement personnalisé ( CRP) en violation des dispositions de l’article L 1233- 65 du code du travail,

-1500 € à titre d’indemnité pour défaut de mention de la priorité de réembauchage en violation des dispositions de l’alinéa 2 de l’article L1233-16 du code du travail,

-3500 € à titre de dommages-intérêts pour violation des dispositions relatives à la priorité de réembauchage, à l’application des articles L 1233-45 et L 1235-13 du code du travail,

-1500 € à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

-dire que les sommes constituant la créance salariale (préavis et indemnité de licenciement) produiront intérêts de droit à compter du 1er mai 2010 date à laquelle le licenciement aurait dû être notifié, avec capitalisation en application des articles 1153-1 et 1154 du code civil,

-enjoindre à la société intimée sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir d’avoir à délivrer les documents suivants: le certificat de travail rectifié mentionnant pour date de cessation de la relation contractuelle le terme de préavis de licenciement et l’attestation destinée à Pôle Emploi rectifiéede même et mentionnant pour motif de la rupture du contrat de travail « un licenciement »,

-condamner la société intimée aux entiers dépens.

Il rappelle le contexte de la relation contractuelle et fait valoir:

-que le 16 mars 2010 la direction de la société Socorail a informé le comité d’établissement sud qu’elle avait perdu le contrat de prestations du site CPB Berre, situation qui était déjà connue des salariés par de multiples voies informelles et qu’à l’occasion de cette réunion, les membres de la direction exposaient « le projet de licenciement économique du personnel du site CPB Berre, suite à la perte du contrat à compter du 30 avril 2010, 16 salariées étant concernées par ce projet »,

-que dés lors que plus de 10 salariés étaient concernés par le projet de licenciement, la société intimée se devait d’élaborer un plan de sauvegarde de l’emploi que toutefois celle-ci a volontairement éludé cette obligation lui soumettant le 1er avril des propositions de reclassement faites dans un cadre fantaisiste et destinées à provoquer sa démission,

-que le 8 avril 2010, il n’ acceptait aucun poste de reclassement proposé au sein de la société Socorail, , les propositions qui lui avaient été faites, dans la précipitation, hors tout PSE et toute consultation du comité d’établissement, ayant été sciemment conçues pour provoquer son refus alors même que l’entreprise savait qu’une opportunité d’embauche de la société Delta Route s’était présentée,

-que cette circonstance, en tout point étrangère à la société Socorail, ne dispensait à cette dernière de mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi intégrant un dispositif de reclassement digne de ce nom qui aurait pu lui permettre, en adhérant à des propositions sérieuses de conserver l’ancienneté importante qu’il avait acquise dans l’entreprise.

Il soutient dès lors:

-que sa démission a été forcée par les man’uvres de son employeur qu’elle est donc nécessairement nulle et de nul effet est doit être requalifiée en un licenciement des lors que la cessation de la relation contractuelle est fautivement imputable à la société Socorail,

-que l’employeur devait procéder à des licenciements économiques puisque son emploi était en péril en raison d’une cause non inhérente à sa personne et devait compte tenu du nombre de salariés concernés mettre en place un PSE,

– qu’ en éludant cette obligation substantielle, la société intimée à qui incombe la rupture du contrat de travail s’analysant en un licenciement doit se voir aussi imputer la nullité de cette rupture.

Il réfute les moyens adverses et critique le jugement déféré au motif:

– que les obligations pesant sur l’employeur en matière de PSE doivent être déterminées au regard du nombre de salariés concernés par la mesure économique envisagée et non au regard du nombre de licenciements effectivement intervenus,

-que la circonstance que des mesures de reclassement aient été annoncées par Socorail ne constitue que la mise en oeuvre de l’obligation qui incombe à l’employeur, qu’une telle démarche est sans incidence sur le nombre de licenciements projetés,

-que l’argument tirée de la reprise de son ancienneté figurant dans la promesse d’embauche de la société Delta Route est dépourvu de sérieux, cette reprise étant limitée aux droits exclusifs liés à la majoration de salaire ainsi qu’aux compléments maladie et accident du travail, que de plus la dite promesse prévoyait une période d’essai de deux mois , ce qui a figuré également dans le contrat.

Aux termes de ses écritures, la société intimée conclut:

*à ce qu’il soit dit que la démission de l’appelant est claire et non équivoque, a été librement consentie, en dehors de toute prétendue manoeuvre de l’employeur,

*à la constatation que le contrat de travail a été rompu par la démission du salarié, et à ce qu’il soit dit que le projet définitif de licenciement économique portait sur 9 salariés,

* à la confirmation du jugement déféré,

*à ce qu’il soit dit qu’elle n’avait aucune obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde pour l’emploi,

*au débouté de l’ensemble des demandes de l’appelant et à sa condamnation à lui payer 2000 € à titre de frais irrépétibles et à prendre en charge les entiers dépens.

Elle prétend:

-qu’elle a été informée de façon très brutale le 17 février 2010 par la société Lyondell-Basell de la fin du contrat de prestations du site CPB Berre au 30 avril 2010

-qu’elle a immédiatement pris toutes les mesures utiles à la conservation des emplois puisque lors de la réunion du comité d’entreprise du 23 février 2010 elle a précisé mettre en place un plan de reclassement ayant pour objectif le maintien des emplois, qu’à ce stade, aucun licenciement économique n’était envisagé l’employeur souhaitant privilégier la réaffectation de ses employés sur d’autres sites,

-qu’un mois plus tard exactement les 25 et 26 mars 2010 sur les 16 salariés seuls 9 salariés sont susceptibles d’être concernés effectivement par une procédure de licenciement pour motif économique et très exactement 8 ( M [K] étant en maladie ayant convenu de s’engager également avec la société Delta Route).

Elle considère:

-que le fait que l’appelant soutienne que sa démission aurait été forcée est une grave contrevérité et plus certainement une allégation intentionnellement mensongère pour fonder artificiellement son action,

-qu’ en premier lieu, il lui était possible d’attendre les propositions de reclassement qui étaient au nombre de huit et nullement fantaisistes,

-que le consentement du salarié n’a jamais été vicié ou forcé car il aurait bien pu revenir sur son engagement écrit du 25 mars 2010 avec la société Delta Route et accepter une proposition de reclassement comme l’a fait M [G],

-que le 30 mars 2010, il restait neuf salariés concernés par un éventuel licenciement pour motif économique, qu’elle n’avait donc pas envisagé au sens de la loi de licencier plus de 10 salariés sur une période de 30 jours et cela alors et surtout qu’elle était en mesure de proposer 8 postes aux mêmes conditions au sein de la société aux 9 salariés susceptibles d’être licenciés, que finalement 4 ont accepté les postes de reclassement, les 5 qui refuseront seront licenciés pour motif économique,

-qu’elle n’avait pas obligation d’élaborer un plan de sauvegarde de l’emploi, que la chronologie exacte des événements est différente de celle présentée par le salarié, que son intention à elle a bien été de conserver les emplois, que les conditions d’application d’un plan de sauvegarde de l’emploi s’apprécient à la date de l’engagement de la procédure de licenciement et non au stade de simple projet.

Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties et réitérées oralement à l’audience.

SUR CE

Les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.

En l’absence d’élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu’elle approuve, a fait une exacte application des faits de la cause et du droit des parties ; le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en toutes ses dispositions.

Il doit être ajouté que le salarié ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que sa démission

aurait été viciée ni que les propositions faites par l’employeur auraient été fantaisistes.

D’autre part, il convient de rappeler que l’obligation d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi concerne toute rupture du contrat de travail pour motif économique dès lors que le nombre de salariés concernés est au moins égale à 10 salariés sur trente jours.

Toutefois, il s’avère:

-d’une part que l’expression toute rupture devant être prise en compte pour le calcul du nombre de licenciements projetés afin de déterminer si la mise en oeuvre d’un plan est ou non obligatoire concerne notamment les ruptures amiables, conventionnelles homologuées, départ volontaire à la retraite ou mise à la retraite dès lors qu’elles résultent d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification refusée par le salarié d’un élément essentiel du contrat de travail consécutives à un motif économique mais ne vise nullement les démissions de salariés,

-d’autre part que la mise en oeuvre d’un plan de sauvegarde pour l’emploi dépend du nombre de salariés ayant refusé la modification de leur contrat proposée par l’employeur, de sorte qu’en l’espèce, l’employeur n’avait pas obligation d’élaborer un plan de sauvegarde pour l’emploi, au stade des licenciements définitivement envisagés, la condition d’effectif n’était pas remplie, sur la 16 salariés pouvant être éventuellement concernés par l’annonce faite au personnel, 9 salariés restés seulement concernés avant même les propositions en interne de l’employeur.

Il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile à l’une quelconque des parties ni pour la procédure de première instance ni pour celle d’appel.

L’appelant doit être tenu aux dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré

Et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel

Condamne [L] [Z] aux dépens d’appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

 


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